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Décision Du Conseil De La Concurrence
publié le 28 novembre 2006

Conseil de la concurrence. - Décision n° 2006-C/C-20 du 9 octobre 2006 CONC-C/C-06/0030 : Autogrill S.p.A./Carestel Group TABLE DES MATIERES I. OPERATION NOTIFIEE II. DEROULEMENT DE LA PROCEDURE III. ENGAGEMENTS DES PARTIES IV. DE IV.A. Introduction IV.B. Position des parties notifiantes IV.C. Position du Rapporteur IV.(...)

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SERVICE PUBLIC FEDERAL ECONOMIE, P.M.E., CLASSES MOYENNES ET ENERGIE


Conseil de la concurrence. - Décision n° 2006-C/C-20 du 9 octobre 2006 CONC-C/C-06/0030 : Autogrill S.p.A./Carestel Group TABLE DES MATIERES I. OPERATION NOTIFIEE II. DEROULEMENT DE LA PROCEDURE III. ENGAGEMENTS DES PARTIES IV. DELIMITATION DES MARCHES IV.A. Introduction IV.B. Position des parties notifiantes IV.C. Position du Rapporteur IV.D. Analyse du Conseil IV.D.1. Observations introductives IV.D.2. Questions préliminaires IV.D.2.1. Restauration de concession et restauration collective IV.D.2.2. Restauration de concession et restauration traditionnelle IV.D.2.3. Restauration de concession selon le type de lieu concédé IV.D.2.4. Conclusions IV.D.3. Marché aval de la restauration autoroutière IV.D.3.1. Concurrence entre restaurants et convenience shops IV.D.3.1.1. Position des parties notifiantes IV.D.3.1.2. Position du Rapporteur IV.D.3.1.3. Position des tiers IV.D.3.1.4. Analyse du Conseil IV.D.3.2. Concurrence des restaurants autoroutiers d'une aire de service différente et dimension géographique du marché IV.D.3.2.1. Position des parties notifiantes IV.D.3.2.2. Position du Rapporteur IV.D.3.2.3. Position des tiers IV.D.3.2.4. Analyse du Conseil IV.D.3.3. Pression concurrentielle exercée par les restaurants situés en dehors des autoroutes et localisés à proximité des sorties d'autoroutes IV.3.3.1. Position du Rapporteur IV.D.3.3.2. Position des parties notifiantes IV.D.3.3.3. Position des tiers IV.D.3.3.4. Analyse du Conseil IV.D.3.4. Conclusion concernant la définition du marché aval IV.D.4. Marché amont de la concession et de la sous-concession IV.D.5. Conclusions générales de l'analyse du Conseil sur la délimitation des marchés V. ANALYSE CONCURRENTIELLE DE LA CONCENTRATION V.A. Analyse concurrentielle de la concentration sur le marché amont V.B. Analyse concurrentielle de la concentration sur le marché aval V.B.1. Position des parties V.B.2. Position du Rapporteur V.B.3. Position d'un tiers V.B.4. Analyse du Conseil V.B.4.1. Clauses d'approvisionnement et la contrainte concurrentielle des petrol shops V.B.4.2. Contrainte concurrentielle de restaurants situés hors autoroute V.B.4.3. Théorie des axes V.B.4.4. Accords avec les compagnies d'autocar V.C. Synthèse des préoccupations du Conseil VI. ADEQUATION ET PROPORTIONNALITE DES ENGAGEMENTS PROPOSES VI.A. Adéquation des engagements proposés VI.A.1. Concernant les clauses d'approvisionnement VI.A.2. Concernant les aires autoroutières intercalées VI.A.3. Concernant l'accès au marché amont et la fréquence de renouvellement des concessions et sous-concessions VI.A.4. Concernant les accords avec les compagnies d'autocar VI.B. Proportionnalité des remèdes imposés VI.B.1. Caractère non proportionné d'obligations de désinvestissement massif VI.B.2. Caractère non proportionné d'un refus d'admissibilité pour part de marché importante VII. CONCLUSION GENERALE ET DECISION DU CONSEIL

ANNEXE I. Opération notifiée 1. L'opération envisagée, qui fait l'objet de la notification au Conseil de la concurrence (ci-après dénommé « le Conseil »), est l'acquisition par la société de droit italien Autogrill S.p.A. des participations détenues par la société belge Assart SA et la société de droit luxembourgeois Megafood S.à.R.L. dans le capital social de la société belge Carestel Group SA, s'élevant à 61,5 % du capital social de celle-ci. Elle sera suivie par une offre publique d'achat des autres actions, ce qui permettra à Autogrill d'acquérir le contrôle exclusif de Carestel. 2. L'acquéreur est la société Autogrill S.p.A..

Autogrill S.p.A. (ci-après « Autogrill ») est une société de droit italien dont le siège social est établi Via Luigi Giulietti, 9 à 28100 Novara en Italie. Elle est contrôlée par Edizione Holding S.p.A., société holding de la famille Benetton, qui détient 57,1 % de son capital. Autogrill est cotée à la bourse de Milan.

Autogrill est active au niveau mondial dans le secteur de la restauration commerciale et de la restauration rapide. Elle opère principalement à partir d'établissements, concédés ou non, localisés le long des autoroutes, dans les aéroports, les gares, les foires-expositions ou encore les centres commerciaux.

En Belgique, Autogrill opère par le biais de la société Autogrill Belgique, qui est notamment la société-mère de AC Restaurants & Hôtels SA, une chaîne de restaurants et hôtels localisés principalement sur les autoroutes et dans des gares ferroviaires. 3. Les vendeurs sont les sociétés Assart SA et Megafood S.à.R.L. Assart SA est une société de gestion patrimoniale contrôlée par la famille Jean Van Milders, qui a pour objet, pour son propre compte, pour compte de tiers ou en participation avec des tiers de contribuer à l'établissement et au développement de sociétés.

Megafood S.à.R.L. est une société de gestion patrimoniale contrôlée par la famille Bertrand Van Milders qui a pour objet l'acquisition, la gestion, la mise en valeur et l'aliénation de participations, de quelque manière que ce soit, dans d'autres sociétés luxembourgeoises et étrangères. 4. La cible est la société Carestel Group SA. Carestel Group SA (ci-après « Carestel ») est une société anonyme dont le siège social est établi Guldensporenpark 23, Bloc C à 9820 Merelbeke et qui est cotée à Bruxelles (Euronext Bruxelles).

Selon les parties, personne ne contrôle actuellement Carestel. Ses principaux actionnaires sont Assart SA (environ 30 %), Megafood S.à.R.L. (30 %) et la GIMV (environ 4 %).

Carestel est active dans le secteur du catering commercial et notamment de la restauration sur autoroutes et dans les aéroports.

L'entreprise a deux filiales : Carestel Motorway Services SA qui gère les établissements le long des autoroutes en Belgique et au Luxembourg et Restair SA qui gère les activités aéroportuaires du groupe en Belgique et à l'étranger (notamment en France, au Royaume-Uni et en Allemagne). 5. L'opération notifiée est une concentration qui est soumise au contrôle de concentrations exercé par l'autorité belge de concurrence. II. Déroulement de la procédure 6. Le 14 juillet 2006, la notification de la concentration a été déposée au Conseil.7. Le rapport motivé du Rapporteur, M.Benjamin Matagne, et le dossier d'instruction, établi sous son autorité par Mesdames Natacha Glibert, Michèle Makoko et Katlyn Van Overmeire, instructeurs du Service de la concurrence, ont été déposés au Conseil en date du 17 août 2006. 8. Le délai de quarante-cinq jours, prévu à l'article 33, § 2, alinéa 2 de la Loi sur la protection de la concurrence économique, coordonnée le 1 juillet 1999 (ci-après LPCE 1 juillet 1999), a été suspendu du 3 août 2006 jusqu'au 9 août 2006 inclus, en vertu de l'article 24 de l'Arrêté royal du 15 mars 1993 relatif aux procédures en matière de protection de la concurrence économique. De plus, le délai pour la présente décision du Conseil a été prorogé, à la demande des parties, par décision n° 2006-C/C-15 du Conseil du 5 septembre 2006, jusqu'au 29 septembre 2006 inclus, et, ensuite, par décision n° 2006-C/C-19 du Conseil du 28 septembre 2006, jusqu'au 9 octobre 2006 inclus. 9. Les parties notifiantes ont déposé une note d'observations au Conseil en date du 1er septembre 2006.Elles ont été entendues aux audiences du Conseil du 4 septembre 2006, en présence du Rapporteur et des instructeurs du Service de la concurrence, mentionnés ci-dessus, et du 26 septembre 2006.

Le Rapporteur a présenté son rapport à l'audience du Conseil du 4 septembre 2006. 10. Par décision du 15 septembre 2006, le président de la chambre du Conseil a octroyé l'autorisation d'être entendue à la société Select Service Partner (SSP), qui en avait formulée la demande, en tant que tiers justifiant d'un intérêt suffisant, au sens de l'article 32quater, § 2, 1er alinéa LPCE 1er juillet 1999. Le 19 septembre 2006, SSP a déposé des observations écrites au Conseil. Ensuite, SSP a été entendue par le Conseil en date du 26 septembre 2006, en présence du Rapporteur et des instructeurs du Service de la concurrence. Lors de cette audience, le Rapporteur a formulé des observations en ce qui concerne le point de vue exposé par SSP. 11. Le 21 septembre 2006, le Conseil a fait connaître ses préoccupations aux parties notifiantes.Le Rapporteur et la société SSP en ont également été informé. 12. Le 26 septembre 2006, les parties notifiantes ont déposé une nouvelle note d'observations au Conseil. Le 27 septembre 2006, SSP a déposé une note d'observations au Conseil.

III. Engagements des parties 13. Par lettre déposée au Conseil le 6 octobre 2006, les parties notifiantes ont présenté les engagements suivants, repris dans le document d'engagements qui est joint à la présente décision : « A) Clauses d'approvisionnement (...) Autogrill s'engage, pour son compte et pour le compte de Carestel, à - mettre un terme à toutes les clauses d'approvisionnement liant les compagnies pétrolières à Autogrill ou Carestel, ou toutes autres entreprises contrôlées directement ou indirectement par Autogrill ou Carestel ou les ayants droit de ces entreprises, et notamment celles relatives [Secrets d'affaires], moyennant un préavis suivant les usages commerciaux en vigueur; - renoncer à insérer de telles clauses dans les futurs contrats entre Autogrill/Carestel et les compagnies pétrolières, et ce pour une période indéterminée (sauf révision de cet engagement par le Conseil de la concurrence), exception faite pour les clauses d'approvisionnement qui font partie intégrante des contrats de franchise pour les enseignes AC Restaurants et Carestel (ainsi que tout type d'enseigne appartenant à Autogrill et Carestel ou à toutes autres entreprises contrôlées directement ou indirectement par Autogrill ou Carestel ou aux ayants droit de ces entreprises) entre Autogrill/Carestel, ou toutes autres entreprises contrôlées directement ou indirectement par Autogrill et Carestel ou les ayants droit de ces entreprises, et les compagnies pétrolières, et dans lesquelles Autogrill ou Carestel ou les entreprises citées ci-dessus agissent en tant que franchiseur et la compagnie pétrolière en tant que franchisé (voir à ce propos point C) ci-dessous).

B) Aires autoroutières « intercalées » (...) i) (...) pour ce qui est du restaurant de [Confidentiel - A] exploité par [Confidentiel] sur la E[Confidentiel], « intercalé » entre les aires de [Confidentiel - B], exploitée par [Confidentiel], de [Confidentiel - Z], exploitée par [Confidentiel] et de [Confidentiel - Y], exploitée par [Confidentiel] sous l'enseigne [Confidentiel] : Autogrill s'engage, pour son compte et pour le compte de Carestel à renoncer à participer à l'appel d'offres relatif à la concession de [Confidentiel - B] au moment de son échéance ([Confidentiel]), et, en toute hypothèse, à ne pas exploiter le restaurant sis sur cette aire moyennant un contrat d'exploitation avec le concessionnaire principal, quelle qu'en soit la forme. ii) En ce qui concerne le restaurant de [Confidentiel - C] sur la E[Confidentiel], exploité par [Confidentiel], « intercalé » entre l'aire de [Confidentiel - D], exploitée par [Confidentiel] et de [Confidentiel - X], exploitée par [Confidentiel] : Autogrill s'engage, pour son compte et pour le compte de Carestel, à renoncer à participer à l'appel d'offres relatif à la concession de [Confidentiel - D] au moment de son échéance ([Confidentiel]), et, en toute hypothèse, à ne pas exploiter le restaurant sis sur cette aire moyennant un contrat d'exploitation avec le concessionnaire principal, quelle qu'en soit la forme. iii) En ce qui concerne le restaurant de [Confidentiel - E] exploité par [Confidentiel] sur la E[Confidentiel], « intercalé » entre l'aire de [Confidentiel - F] (via échangeur de [Confidentiel]) et l'aire de [Confidentiel - W], exploitées par [Confidentiel], sur la E [Confidentiel] et adjacent (via échangeur de [Confidentiel]) à l'aire de [Confidentiel - F] et de [Confidentiel - G], exploitées par [Confidentiel], sur la E[Confidentiel] : Autogrill s'engage, pour son compte et pour le compte de Carestel, à renoncer à participer à l'appel d'offres relatif à la concession de [Confidentiel - G] au moment de son échéance ([Confidentiel]), et, en toute hypothèse, à ne pas exploiter le restaurant sis sur cette aire moyennant un contrat d'exploitation avec le concessionnaire principal, quelle qu'en soit la forme. S'il apparaît qu'il n'y a pas de restaurateurs intéressés par l'aire de [Confidentiel - G], cette concession pourrait être réattribuée à Autogrill ou Carestel; dans ce cas, Autogrill sengage, pour son compte et pour le compte de Carestel, à renoncer à participer à l'appel d'offres de l'aire de [Confidentiel - F] qui vient à échéance le [Confidentiel] et, en toute hypothèse, à ne pas exploiter le restaurant sis sur cette aire moyennant un contrat d'exploitation avec le concessionnaire principal, quelle qu'en soit la forme.

Pour les engagements indiqués ci-dessus sous i, ii et iii : La renonciation à participer aux appels d'offres relatifs aux aires de, respectivement, [Confidentiel- B, D et G], pourrait être modulée ou annulée par le Conseil de la concurrence si Autogrill ou Carestel cède, avant les échéances des concessions de [Confidentiel - B, D ou G], un autre restaurant à condition qu'il soit situé sur une aire contiguë aux aires de [Confidentiel - A, C ou E], selon le cas.

Si à l'issue de la première consultation relative à ces trois aires, aucun restaurateur ne s'est manifesté, Autogrill ou Carestel pourraient demander l'accord du Conseil de la concurrence pour participer à la deuxième consultation. A cette fin, Autogrill ou Carestel présenteraient une demande motivée décrivant les raisons pour lesquelles la première consultation s'est avérée infructueuse.

Autogrill (s'engage), pour son compte et pour le compte de Carestel, à renoncer à solliciter la prorogation ou la reconduction automatique ou tacite d'une des concessions venues à échéance indiquées ci-dessus, sous i à iii. Dans le cas où une prorogation ou reconduction automatique ou tacite est convenue entre l'autorité et le concessionnaire, Autogrill s'engage, pour son compte et pour le compte de Carestel, à renoncer à s'en prévaloir.

C) Contrats de franchise Dans le cas de la conclusion de contrats de franchise, Autogrill ou Carestel s'engagent à ne pas imposer au franchisé d'exploiter le restaurant sous l'enseigne exclusive AC Restaurants et Carestel (ainsi que tout type d'enseigne appartenant à Autogrill ou Carestel ou à toutes autres entreprises contrôlées directement ou indirectement par Autogrill et Carestel ou aux ayants droit de ces entreprises).

D) Renonciation à solliciter la prorogation ou la reconduction automatique ou tacite de toute autre concession venue à échéance (...) Autogrill s'engage pour son compte et pour le compte de Carestel à - renoncer à solliciter la prorogation ou la reconduction automatique ou tacite de la concession venue à échéance; - dans le cas où une prorogation ou une reconduction automatique ou tacite d'une concession venue à échéance est convenue entre l'autorité concédant(e) et le concessionnaire après la Décision d'autorisation, et le concessionnaire demande ensuite à Autogrill ou Carestel de prolonger le contrat d'exploitation, Autogrill s'engage à demander l'autorisation du Conseil de la concurrence, étant entendu que le Conseil tiendra compte, entre autres, des raisons techniques qui sont à la base de la prorogation et des contraintes grevant les concessionnaires.

E) Les aires gérées par les indépendants (...) Autogrill s'engage, pour son compte et pour le compte de Carestel, à renoncer à se présenter, à leur échéance, aux appels d'offres relatifs à la concession de [Confidentiel - A] et de toute autre aire actuellement gérée par un opérateur indépendant, et plus précisément à ceux relatifs aux aires énumérées à l'annexe 1, et ce pour une période de 10 ans à dater de la Décision d'autorisation. Cependant, à l'issue d'une période de 5 ans à dater de la Décision d'autorisation, le Conseil de la concurrence pourra accorder la levée de cette interdiction.

F) Accords avec les compagnies d'autocars et programmes de fidélité (...) Autogrill (s'engage) pour son compte et pour le compte de Carestel à - renoncer à toute clause d'exclusivité dans les nouveaux accords avec les compagnies d'autocars; - éliminer les clauses d'exclusivité existantes et ce dans un délai de 6 mois à partir du jour de la Décision d'autorisation; - maintenir la situation prévalant avant la concentration en ce qui concerne l'étendue de ces accords, c'est-à-dire abstention d'extension des accords d'Autogrill existants aux restaurants de Carestel et vice-versa, si Carestel devait conclure à l'avenir ce type de contrats, elle s'abstiendra d'étendre ces accords aux restaurants d'Autogrill; - maintenir la situation prévalant avant la concentration en ce qui concerne les programmes de fidélité, dans le sens que ni Autogrill ni Carestel n'étendront les ristournes aux restaurants de l'autre société, et ce aussi longtemps que la nouvelle entité maintiendra sur le marché les deux enseignes AC Restaurants (ou Autogrill) et Carestel ainsi que tout type d'enseigne appartenant à Autogrill ou Carestel ou à toutes autres entreprises contrôlées directement ou indirectement par Autogrill et Carestel ou aux ayants droit de ces entreprises, pour une période indéterminée. Cependant, à l'issue d'une période de 5 ans à dater de la Décision d'autorisation, le Conseil de la concurrence pourra accorder la levée de cette interdiction d'extension des ristournes, compte tenu de l'importance de ces types de programmes sur le marché et de la situation concurrentielle existant au moment de la demande.

G) Négociations avec les compagnies pétrolières (...) Autogrill et Carestel s'engagent à : - négocier en tant qu'entités économiques séparées avec les compagnies pétrolières lors de la préparation des offres et des contrats de sous-concession, lorsque Autogrill et/ou Carestel, ou toutes autres entreprises contrôlées directement ou indirectement par Autogrill et Carestel, décident de se porter candidats pour la gestion de la restauration sur une aire donnée, étant entendu que cet engagement deviendra sans objet et prendra donc fin le jour où les activités autoroutières d'Autogrill et Carestel seront intégrées en une seule entité juridique, quelle que soit la modalité de cette intégration (fusion, apport, vente, groupe fiscale etc.). » IV. Délimitation des marchés IV. A. Introduction 14. Il y a deux types de marchés en cause, l'un étant situé en amont, l'autre étant situé en aval. Le marché amont concerne, à titre principal, la concession d'exploitation des aires de stationnement le long des autoroutes, et à titre accessoire, la sous-concession de services de restauration sur les aires autoroutières. Sur ce marché amont, le côté de l'offre de ce marché, à savoir le concédant, est en Belgique la Région, pouvoir adjudicateur et le côté de la demande du marché est constitué par les entreprises qui répondent aux appels d'offres, dans la plupart des cas, une entreprise pétrolière et rarement, une entreprise de restauration. Dans le cas de la sous-concession d'exploitation commerciale de services de restauration, le concédant est donc dans la plupart des cas une compagnie pétrolière.

Le marché aval concerne les services de restauration autoroutière.

De l'instruction, est apparue une divergence profonde entre les définitions des marchés proposées respectivement par les parties notifiantes et par le Rapporteur.

Cette divergence porte en particulier sur la définition du marché aval pertinent des services de restauration autoroutière et sur l'estimation de la taille du marché à utiliser pour le calcul des parts de marché des entreprises participant à la concentration.

Les divergences d'analyse entre les parties notifiantes et le Rapporteur portent également sur les barrières à l'entrée qui pourraient empêcher des concurrents potentiels étrangers ou des concurrents potentiels de taille petite ou moyenne d'entrer de manière viable sur le marché amont des concessions et des sous-concessions.

IV. B. Position des parties notifiantes 15. Pour le marché amont des concessions et des sous-concessions, les parties notifiantes définissent le marché pertinent comme le marché de la restauration de concession quel que soit le type de lieu concédé (autoroute, gare, aéroport, centre commercial).La demande est composée d'opérateurs spécialisés dans ce marché fonctionnant par appel d'offres (« bidding market ») et ces opérateurs spécialisés peuvent être actifs sur les différents types de lieu concédé (ensemble de la restauration de concession) et sur différents marchés géographiques (opérateurs de dimension internationale). 16. Pour le marché aval des prestations de services de restauration, les parties définissent le marché du côté de la demande comme le marché national de la restauration de concession sur les aires autoroutières (restaurants au sens strict et convenience shops des stations-service) et de la restauration traditionnelle à proximité des sorties d'autoroute;il s'agit selon les parties d'un marché sur lequel la concurrence est très limitée spatialement à chaque aire autoroutière et aux restaurants traditionnels situés - en dehors de l'autoroute - à proximité de chaque aire autoroutière. Sur la base de cette définition, les parties estiment que la taille du marché national s'élève à euro 143 millions par an.

IV. C. Position du Rapporteur 17. Le Rapporteur doute que des concurrents potentiels étrangers ou des concurrents potentiels de taille petite ou moyenne aient la possibilité et l'intérêt d'entrer de manière viable sur le marché amont des concessions ou sous-concessions.18. Pour le marché aval des prestations de services de restauration, le Rapporteur définit le marché pertinent comme le marché national des activités de restauration de concession sur autoroute exercées par les restaurants au sens strict et il exclut les produits alimentaires vendus dans les convenience shops des stations-service situées sur les aires autoroutières ainsi que la restauration traditionnelle des restaurants localisés à proximité des sorties d'autoroute. Sur la base de cette définition plus étroite, le Rapporteur estime que la taille du marché national s'élève à euro 59,38 millions.

IV. D. Analyse du Conseil IV.D.1. Observations introductives 19. L'analyse du Conseil distingue deux types de marchés. Le marché amont est, à titre principal, celui des concessions de l'exploitation des aires de stationnement le long des autoroutes et, à titre accessoire, celui des sous-concessions de service de restauration le long des autoroutes. Ce stade amont est très important puisqu'il définit à long terme les capacités de production des services de restauration et de distribution de carburant le long des autoroutes. Le Conseil constate à cet égard l'existence de contrainte de capacités dans la mesure où il n'est pas permis d'envisager la construction de nouvelles autoroutes en Belgique ni la création de nouvelles aires le long des autoroutes existantes. Il en résulte que ce sont les seules concessions ou sous-concessions venant à échéance qui constituent une capacité de production disponible à l'avenir pour de nouveaux entrants. L'ouverture des appels d'offre permettrait à de nouveaux entrants d'obtenir le renouvellement des concessions et des sous-concessions venues à échéance. 20. Il s'impose d'analyser le marché en aval des services de restauration en se plaçant - dans le temps - après que la concession et la sous-concession ont été accordées.En d'autres mots, on fait l'analyse du marché aval dans le cadre des concessions existantes avec leur calendrier d'échéance. 21. Le Conseil est d'avis que l'analyse de substituabilité entre produits - en l'occurrence, entre produits de restauration alimentaire - pour la définition du marché des produits et l'analyse de substituabilité entre les différentes localisations des services de restauration alimentaire pour la définition du marché géographique doivent théoriquement être menées de manière simultanée (P.Van Cayseele, « De Belgische wet op de mededinging. Concentraties in een industrieel economisch en internationaal juridisch perspectief », Maklu, Antwerpen & Apeldoorn, 1994, p. 35 : « Er kan namelijk overtuigend geargumenteerd worden dat :1° de Wet (WBEM) wel degelijk wenst te werken met een relevante marktconcept waarbij simultaan ruimtelijke- en produkt-substitutie wordt meegenomen; 2° de invulling van beide relevante markten derhalve volgens dezelfde principes moet gebeuren »).

Ainsi, si on considère que le marché géographique pertinent est a priori limité à chaque aire autoroutière et à son environnement spatial immédiat, les produits, pris en compte initialement dans l'analyse de substituabilité du côté de la demande menée en vue de délimiter le marché pertinent des produits, comprendront les services de restauration autoroutière, les produits des convenience shops situés sur la même aire de service et les services de restauration traditionnelle de restaurants situés à proximité des sorties d'autoroute.

IV.D.2. Questions préliminaires IV.D.2.1. Restauration de concession et restauration collective 22. La distinction entre restauration de concession et restauration collective ressort de la jurisprudence de la Commission (Décision de la Commission du 29 juin 2000, COMP/M.1972 - Granada/Compass, décision de la Commission du 8 mai 2001, COMP/M.2373 - Compass/Selecta, et décision de la Commission du 26 février 2002, COMP/M.2639 - Compass/Restoram/Rail Gourmet/Gourmet Nova).

La restauration de concession consiste dans la fourniture d'un service de restauration à un client dans un lieu dédié au transport, au commerce de détail, au sport et au loisir. Les clients fréquentent ces lieux pour un objectif autre que celui de se restaurer. L'activité de restauration de concession se caractérise également par le fait que le restaurateur paye un loyer qui lui permet d'exploiter son activité dans le lieu en question et que le revenu du restaurateur provient des ventes aux consommateurs finals (Rapport, p. 4).

La restauration collective est définie par la Commission comme suit : « La Commission entend par restauration collective concédée, la prestation de services de restauration hors foyer exécutée par des tiers et qui comprend principalement la fourniture de repas préparés au moins en partie - au sein même des collectivités publiques ou privées clientes : cette prestation de service est effectuée dans les secteurs divers, regroupant la restauration dans les lieux de travail (entreprises, administrations), dans le secteur social ou la santé (hôpitaux, maisons de retraite) et dans l'enseignement (...). La Commission rejoint l'appréciation d'Accor et de la plupart des concurrents interrogés selon laquelle il n'existe pas de différences significatives entre ces segments ou entre le secteur public et le secteur privé qui permettent de justifier l'existence de marchés distincts. Le « know how » de base est en effet le même et la majorité des entreprises concernées sont actives dans tous ces segments. On peut donc considérer que le marché de la restauration collective dans son ensemble constitue le marché pertinent en question. » (Décision de la Commission du 28 avril 1992, IV/M126 - Accor/Wagons-Lits, citée par le Rapport, p. 6).

Le Conseil estime que cette distinction ne pose pas de problème dans la présente concentration, et rejoint la position du Rapporteur et la pratique décisionnelle de la Commission européenne. La restauration collective est en tout état de cause exclue du marché pertinent.

IV.D.2.2. Restauration de concession et restauration traditionnelle 23. Par contre, la distinction entre restauration de concession et restauration traditionnelle pose problème.Le Rapporteur exclut du marché pertinent les restaurants traditionnels même s'ils sont situés à proximité des sorties d'autoroute.

Cette distinction entre restauration de concession et restauration traditionnelle à proximité des sorties d'autoroute est contestée par les parties.

Certes, les parties disent que du côté de l'offre, la restauration de concession est caractérisée par une offre de base d'opérateurs spécialisés (en restauration de concession) « disposant d'un savoir-faire spécifique et d'une marque reconnaissable, ainsi que d'un réseau développé sur le territoire, souvent sur plusieurs marchés géographiques » (cité par le Rapport p. 4). Par cet argument, les parties semblent avaliser la distinction entre restauration de concession d'une part, et les autres types de restauration d'autre part. En fait, l'intention des parties semble être plutôt, par cet argument, d'annoncer leur prise de position ultérieure concernant la question de savoir s'il faut ou non segmenter le marché de la restauration de concession selon le type de lieu concédé (autoroutes, gares ferroviaires, aéroports, centres commerciaux) : comme il sera mentionné ci-dessous (infra, n° 27), les parties défendent, en effet, le point de vue qu'une segmentation plus détaillée du marché de la restauration de concession selon le type de lieu concédé n'est pas pertinente.

Le Conseil a porté son analyse sur la substituabilité éventuelle entre services de restauration autoroutière et services de restaurants traditionnels, spécifiquement ces restaurants situés à proximité des sorties d'autoroute (infra, nos 66 à 76).

IV.D.2.3. Restauration de concession selon le type de lieu concédé 24. Le Rapporteur a examiné les cahiers de charges et les contrats de concession et de sous-concession afin de déterminer si les concessions autoroutières se distinguent des autres lieux de restauration concédés (gares ferroviaires, aéroports, centres commerciaux).Il ressort de cet examen que les concessionnaires de l'exploitation des aires de stationnement sur autoroute et les sous-concessionnaires de restauration autoroutière doivent supporter des coûts particulièrement élevés (Rapport, p. 9 et note en bas de page 26). Le Rapporteur relève aussi que les charges d'exploitation imposées par le cahier des charges sont plus lourdes pour les concessions des aires autoroutières que celles dans les gares et aéroports. Par exemple, les charges d'exploitation des aires autoroutières comprennent la signalisation et l'entretien de la voirie et des parkings, mettant ceux-ci gratuitement à disposition des usagers autoroutiers, tandis que les parkings situés dans les gares et les aéroports sont payants (Rapport, p. 10). En outre, la durée des concessions d'exploitation commerciale des aires autoroutières est plus longue - en moyenne de 20 ans et même davantage, avec une possibilité de renouvellement - que les concessions des exploitations dans les gares et les aéroports (Rapport, pp. 10 et 11).

Le Rapporteur analyse également la pratique de la Commission : la Commission européenne a laissé ouverte la question d'une segmentation de la restauration de concession dans ses décisions Granada/Compass (décision de la Commission du 29 juin 2000, COMP/M.1972), Compass/Selecta (décision de la Commission du 8 mai 2001, COMP/M.2373), Compass/Restorama/Rail Gourmet/Gourmet Nova (décision de la Commission du 26 février 2002, COMP/M.2639), Compass Onama (décision de la Commission du 15 novembre 2002, COMP/M.2977) et Compass/Cremonini/JV (décision de la Commission du 6 mai 2003, COMP/M.3104).

Le seul cas où la Commission s'est prononcée sur cette segmentation, est, selon le Rapporteur, l'affaire Accor/Wagons-Lits (décision de la Commission du 28 avril 1992, IV/M126) et elle a retenu le marché de la restauration autoroutière comme marché pertinent.

Le Rapporteur cite, en outre, la jurisprudence de l'Autorité italienne de concurrence qui invoque aussi cette décision Accor/Wagons-Lits pour défendre la segmentation de ce marché selon le type des lieux de transport concédés (dossier d'instruction, doc 9).

Le Rapporteur a réfuté - lors de l'audience du 4 septembre 2006 - l'argument des parties notifiantes selon lequel l'ensemble de la restauration de concession est caractérisée par une offre de base d'opérateurs spécialisés (en restauration de concession) « disposant d'un savoir-faire spécifique et d'une marque reconnaissable, ainsi que d'un réseau développé sur le territoire, souvent sur plusieurs marchés géographiques » (supra, n° 23). Selon lui, les parties notifiantes sont les seules entreprises à réaliser cette offre globale, c'est-à-dire une offre pour tous les types de lieux concédés. Il mentionne qu'il n'existe qu'un nombre très limité d'entreprises qui réalisent la combinaison de la restauration sur autoroute et dans une gare ou un aéroport (Rapport, p. 11 et la note 38 en bas de page). 25. Les parties défendent le point de vue qu'une segmentation plus détaillée du marché de la restauration de concession selon le type de lieu concédé n'est pas pertinente.Elles se réfèrent à la pratique décisionnelle de la Commission qui laisse la question ouverte (voir la synthèse de la position des parties à cet égard dans le Rapport p 5).

Dans leur note d'observations du 1er septembre 2006, les parties contestent aussi la valeur de précédent de la décision Accor/Wagons-Lits et de la pratique de l'autorité italienne sur lesquelles se base le rapport du Rapporteur : « Or, le rapport suit une position dépassée et se réfère expressément à une pratique de l'autorité italienne et, en ce qui concerne la Commission européenne, à une très ancienne décision (décision Accor/Wagons-Lits de 1992), qui concernait par ailleurs le marché français, c'est-à-dire des autoroutes à péage, et non la Belgique.

Dans ces décisions, un marché distinct de la restauration de concession autoroutière est identifié. En ce qui concerne la Commission européenne, elle a dans sa pratique décisionnelle plus récente toujours laissé la question ouverte, voire même exclu, selon ses propres dires, cette segmentation (Décision de la Commission Compass/Onama SPA COMP/M.2977 du 15 novembre 2002). Le rapport se contente toutefois de reprendre les conclusions tirées par la Commission à l'époque de la décision Accor/Wagons-Lits sans vérifier si les caractéristiques du marché identifiées par la Commission sont toujours d'actualité et applicables au marché belge. Or, comme il a été expliqué dans la notification et même souligné par Elior au cours de l'instruction, les comportements des consommateurs et la structure de l'offre ont considérablement évolué en 15 ans. Quant à la position de l'autorité italienne, qui a été contestée de façon constante par Autogrill au cours des différentes procédures l'impliquant, elle se réfère à un marché profondément différent, et à des situations très particulières, comme Autogrill l'a exposé dans une note explicative du 9 août ».

Cette note explicative d'Autogrill du 9 août 2006 est un document qu'Autogrill a fait parvenir au Rapporteur, et accompagnant la traduction française des décisions de l'autorité italienne de concurrence, l'AGCM. Dans cette note, Autogrill mentionne des différences qu'elle estime très significatives entre la situation italienne et la situation belge : « Par contre, l'autoroute n'est pas payante en Belgique et il n'y a donc pas de limitation au choix de l'automobiliste de s'approvisionner en dehors du réseau autoroutier ou même dans les convenience stores des compagnies pétrolières situées sur les mêmes aires. Par conséquent, l'identification d'un marché distinct de la restauration autoroutière ne serait pas justifiée en Belgique, car le réseau autoroutier ne se différencie pas de façon déterminante par rapport au réseau des routes ordinaires » (document 090239 du dossier d'instruction, lettre du 9 août 2006). 26. Le Conseil est d'avis que cette comparaison de la situation italienne et de la situation belge concernant le réseau autoroutier ne s'applique pas à la question de la segmentation, selon le type d'aire concédée, du marché pertinent en amont de la restauration de concession.Cette comparaison de la situation italienne et de la situation belge concernant le réseau autoroutier s'applique plutôt à la question de la délimitation du marché pertinent en aval des services de restauration le long des autoroutes, par exemple comme la citation ci-dessus le révèle, la question de savoir si les convenience stores situés sur le même site autoroutier qu'un restaurant et si les restaurants situés hors autoroute mais à proximité des sorties d'autoroute du même axe autoroutier exercent une contrainte concurrentielle telle qu'ils font partie du même marché pertinent aval.

Cette comparaison de la situation italienne et de la situation belge concernant le réseau autoroutier est au demeurant utilisée dans la présente analyse que fait le Conseil du marché pertinent aval de la restauration autoroutière (voir infra, nos 52 et 61). 27. L'argumentation propre développée par les parties porte sur l'offre (cfr supra, n° 23).Selon les parties, la restauration de concession est caractérisée par une offre de base d'opérateurs spécialisés en restauration de concession en tant que « bidding market », disposant d'un savoir-faire spécifique et d'une marque reconnaissable leur permettant d'être actifs sur les différents types de lieu concédé (autoroutes, gares, aéroport, centres commerciaux), et disposant d'un réseau développé sur le territoire, souvent sur plusieurs marchés géographiques. Les parties citent à cet égard, outre elles-mêmes, les sociétés Elior, Mövenpick et, jusqu'à récemment, Compass.

La pratique française citée par Autogrill dispose aussi que : « L'activité de restauration de concession consiste également à fournir un service de restauration dans des zones affectées principalement à une autre activité : le transport (aéroport, gares, etc.), les loisirs ou le sport (musées, cinémas, parcs d'attraction, stades, etc.), le commerce de détail (galeries marchandes, grands magasins, etc.).

Toutefois, à la différence de la restauration collective, le prestataire verse une rémunération au concédant en contrepartie du droit d'exploiter pour son compte propre une partie de la zone concédée. Le prestataire n'est rémunéré qu'à partir des ventes faites au public. Une segmentation plus fine en fonction du type de lieu concédé (gare, musée, galerie commerciale, etc.) ne semble pas pertinente dans la mesure où les conditions de concurrence s'exercent de manière similaire dans les différents endroits cités. » Les parties se réfèrent aussi à la pratique française, qui selon les parties exclurait expressément une segmentation du marché de la restauration de concession et que le Rapporteur n'évoque pas dans le rapport.

Les parties citent aussi la jurisprudence - non citée dans le Rapport - de notre Conseil (Carestel/Lunch Garden et Crock'in) qui considérerait l'existence d'un marché unique de la restauration de concession sans aucune distinction en fonction du lieu concédé (Décision du Conseil de la concurrence n° 2002-C/C-71 du 2 octobre 2002, Carestel/Lunch Garden N.V. et Crock'in N.V., Revue Trimestrielle de jurisprudence du Conseil de la concurrence - 2002/04). 28. Le Conseil constate que tout système de concession d'exploitation commerciale de services de restauration présente certes des aspects généraux quel que soit le lieu. Cependant, le Conseil relève que des conditions techniques et financières sont spécifiques aux autoroutes et peuvent être plus lourdes que pour d'autres types de lieu concédé. La durée des concessions d'exploitation commerciale d'aires autoroutières est plus longue que pour d'autres types de lieu concédé. Par contre, l'argument selon lequel la spécificité des concessions autoroutières vient aussi du fait que la réglementation n'est pas seulement nationale mais aussi régionale n'est pas convaincant compte tenu du fait que les concessions ont une structure très similaire en Région wallonne et en Région flamande (station-service, petrol shop et restaurant). Dès lors, l'impact des différences de réglementation sur le plan formel entre les Régions est limité (voir infra nos 80 et 81). 29. En ce qui concerne la décision du Conseil Carestel/Lunch Garden, le Conseil estime que les restaurants autoroutiers Carestel ne se trouvent pas sur le même marché que Lunch Garden, étant donné que Carestel se trouve sur le marché des restaurants de concession (§ 5 de la partie 5a) de la décision), et que le marché des restaurants de concession est distinct du marché sur lequel se trouve Lunch Garden (§ 3 et § 4 de la partie 5c de la décision), qui est le marché « informal eating out » (§ 6 à § 8 de la décision).De cette décision antérieure, le Conseil tire comme seule conclusion que les restaurants sur autoroute, qui constituent de la restauration de concession, ne se trouvent pas sur le même marché que les restaurants hors autoroute. Le Conseil ne s'est pas prononcé sur une segmentation des marchés des restaurants de concession selon le type de lieu concédé. Une telle segmentation n'était tout simplement pas nécessaire dès lors que le Conseil constatait que Lunch Garden n'était pas actif sur le marché de la restauration de concession.

Le Conseil constate aussi que la pratique décisionnelle de la Commission postérieure à l'affaire Accor/Wagons-Lits laisse ouverte la question de la segmentation de la restauration de concession selon le type de lieu concédé, et que cette pratique décisionnelle n'exclut pas cette segmentation. 30. Le Conseil est d'avis que cette pratique décisionnelle de la Commission peut être appliquée au cas belge. Le Conseil souligne que cette divergence d'analyse entre les parties et le Rapporteur (numéros 24 à 27 ci-dessus) porte sur le marché amont de la concession et de la sous-concession. Or, comme mentionné ci-dessus (supra, n° 19 et 20), la démarche du Conseil pour la définition des marchés pertinents se décompose en deux parties : le marché amont de la concession et de la sous-concession d'une part, le marché aval des services de restauration d'autre part.

Quand on procède à l'analyse de la définition du marché aval des services de restauration et qu'on considère la substituabilité du côté de la demande (infra, n° 33 et suivants), il ne fait aucun doute que, pour les usagers d'une autoroute qui constituent une clientèle spécifique, il n'y a aucune substitution possible entre les services de restauration prestés sur ou à proximité de l'autoroute d'une part, et des services de restauration de concession dans des gares, centres commerciaux, musées et aéroports. 31. Carestel est active dans la restauration dans les aéroports et sur autoroutes. Les activités de Carestel dans les aéroports en Belgique (Bruxelles-national) et à l'étranger (Londres, France, Allemagne) ne posent cependant aucun problème de relation horizontale sur le marché belge, puisqu' Autogrill n'est pas présente sur ce marché en Belgique.

Ce sont les activités de Carestel en matière de restauration le long des autoroutes en Belgique qui posent le problème de recouvrement horizontal avec les activités d'Autogrill. Ces activités de restauration le long des autoroutes en Belgique représentent cependant moins de la moitié du chiffre d'affaires annuel total réalisé en Belgique par Carestel, à savoir un montant d'environ euro 24 millions pour chacune des années 2004 et 2005.

IV.D.2.4. Conclusions 32. Le Conseil analyse donc d'abord le marché (aval) de la restauration autoroutière, en se plaçant dans le temps après que la concession et la sous-concession aient été accordées.L'analyse de l'offre est ainsi menée dans le cadre des concessions existantes sous la contrainte du calendrier de leurs échéances.

Quant à l'analyse de la demande, elle est menée par le Conseil de manière ouverte, c'est-à-dire en considérant que la substituabilité du côté de la demande des services de restauration autoroutière doit être évaluée vis-à-vis à la fois (i) de tous les opérateurs en restauration situés sur le même site; (ii) des opérateurs en restauration localisés sur une autre concession autoroutière; (iii) des restaurants hors autoroute.

Le Conseil analyse ensuite le(s) marché(s) de la concession (et de sous-concession), en terme de degré d'ouverture au niveau des appels d'offres. Alors que le marché de la restauration semble être limité au territoire national, tant pour les parties que pour le Rapporteur, le marché des appels d'offres pour concession peut être international.

Les parties citent des concurrents potentiels dont certains sont localisés hors du territoire belge comme Elior, Mövenpick et Compass, et qui ne sont pas ou pas encore entrés sur le marché belge de la restauration de concession. Comme mentionné plus haut (n° 19), les concessions ou sous-concessions venant à échéance constituent une capacité de production disponible dans l'avenir pour de nouveaux entrants. C'est donc aussi et surtout à ce niveau de(s) marché(s) des concessions et de sous-concessions que l'entrée de nouveaux acteurs doit être préservée de telle sorte que la présente concentration ne crée ni ne renforce une position dominante et n'ait pas pour conséquence qu'une concurrence effective serait entravée de manière significative dans le marché belge ou une partie substantielle de celui-ci.

IV.D.3. Marché aval de la restauration autoroutière 33. L'analyse de la substituabilité du côté de la demande est menée en considérant que chaque restaurant sur une aire autoroutière pourrait subir trois types de contraintes concurrentielles : - Une contrainte concurrentielle des opérateurs situés sur la même aire autoroutière, à savoir les convenience stores ou petrol shop (Point IV.D.3.1. ci-dessous, n° 35 à 49). - Une contrainte concurrentielle de restaurants autoroutiers - ou plus généralement des opérateurs en restauration s'il s'avérait qu'il y a concurrence entre restaurants autoroutiers et convenience shops - situés sur une autre concession, mais le long du même axe autoroutier (Point IV.D.3.2 ci-dessous, n° 51 à 64). - Une contrainte concurrentielle de restaurants hors autoroute mais situés à proximité des sorties d'autoroute du même axe autoroutier (Point IV.D.3.3. ci-dessous, n° 66 à 76). 34. Cette manière d'aborder l'analyse du marché de la restauration autoroutière est compatible avec l'analyse de choc ou « crash test » (« shock analysis ») menée par RBB Economics pour le compte des parties notifiantes (RBB Economics, « Project Red Devil : Competitive assessment of the proposed transaction », Londres, juillet 2006. Annexe 14 de la notification). Une telle analyse de choc est une méthode quantitative couramment acceptée pour la définition du marché pertinent et consiste à observer l'effet d'un choc marqué affectant le prix d'un possible substitut sur les ventes d'un bien concurrent (E. Combe, « Economie et politique de la concurrence », Précis Dalloz, série sciences économiques, Paris, 2005, pages 338 et 339). RBB Economics a, sur la base d'une telle méthode, étudié dans quelle mesure les ventes des restaurants autoroutiers AC étaient soumis, avant la présente opération de concentration, à des contraintes concurrentielles émanant respectivement : - des petrol shops - des restaurants de Carestel - de restaurants situés hors autoroute.

IV.D.3.1. Concurrence entre restaurants et convenience shops IV.D.3.1.1. Position des parties notifiantes 35. Les parties notifiantes définissent le marché pertinent comme étant le marché national de la restauration autoroutière et même routière, sur lequel la concurrence est très limitée spatialement à chaque aire autoroutière et aux restaurants situés - en dehors de l'autoroute - à proximité de chaque aire autoroutière.Sur chaque aire autoroutière, les parties considèrent aussi que les produits offerts par les convenience shops et les restaurants sont des substituts.

A cet égard, les parties insistent sur la différence entre la situation prévalant actuellement en Belgique et la situation qui prévalait en Italie lors de la décision de refus par l'Autorité de concurrence italienne, dans l'affaire de concentration n. C 5249 Autogrill/Ristop. A cette époque, il n'y avait pas encore de convenience shops sur les aires autoroutières en Italie (note du 9 août 2006 des parties notifiantes, pages 2 et 4, document des pages 09237 à 090242 du dossier d'instruction).

Sur la base de cette analyse, comme mentionné supra (point 16), les parties notifiantes estiment que la valeur de la restauration de concession sur autoroute est de euro 143 millions en 2004.

Pour arriver à ce chiffre de euro 143 millions, elles additionnent les estimations de dimension totale du marché venant de deux études différentes : - Un montant de euro 82,989 millions qui vient de l'étude de Food in Mind (Tableau 17 p. 89 de l'étude « Foodservice : Petrol Shops in België 2006-2010 », Food in Mind, étude n° 06/0416GL, janvier 2006, annexe 12 de la notification). Ce montant est le chiffre d'affaires des activités food & beverage sur autoroutes par les compagnies pétrolières en 2004 et est mentionné par les parties notifiantes dans leur note d'observations du 1er septembre 2006, p. 5. - Un montant de euro 59,38 millions qui vient de l'étude GIRA (« The GIRA Monitor -Transport Foodservice- Belgium, Annexe 11 de la notification) et est également mentionné dans le Rapport (p. 18). Ce montant de euro 59,38 millions se veut la valeur des ventes des restaurateurs au sens strict sur la base de l'étude GIRA (cfr infra, point 39).

L'addition de ces deux montants donne un total de euro 142,369 millions, arrondi à euro 143 millions. 36. Sur la base de ce marché total de euro 143 millions, les parts de marché des parties en 2004 sont d'après les parties notifiantes : Pour la consultation du tableau, voir image 37.Les parties notifiantes communiquent aussi leurs parts de marché sur la base du marché belge de l'ensemble de la restauration de concession, sans la distinction selon le type de lieu concédé. Dans cette définition du marché, la part de marché combinée d'Autogrill et de Carestel s'élèverait à [Secrets d'affaires - entre 10 et 15 %] en 2004 (notification, p. 27). Comme mentionné plus haut (n° 28 à 30), le Conseil n'accepte pas cette définition large du marché pertinent. 38. Les parties notifiantes justifient cette méthode de calcul, à savoir l'addition du chiffre d'affaires des activités food & beverage sur autoroutes par les compagnies pétrolières et du chiffre d'affaires des restaurateurs au sens strict, du fait de l'existence d'une certaine pression concurrentielle entre la part des petrol shops et les restaurants. Pour démontrer cette pression concurrentielle, les parties notifiantes se réfèrent à l'analyse de choc (« shock analysis ») menée par RBB Economics. Selon l'étude de RBB Economics, tous les sites où se trouve un restaurant d'Autogrill (sauf un) et tous les sites sur lesquels se trouve un restaurant de Carestel, sont équipés d'un petrol shop (voir planche 5 de l'étude RBB). Beaucoup de ces shops ont été restaurés récemment et assimilés à l'apparition de « nouveaux » petrol shops, et donc traités par RBB comme un choc rendant possible l'analyse de « crash test ».

Il apparaît de l'étude statistique de RBB que, à trafic constant, la restauration ou l'ouverture de nouveaux petrol shops affecte négativement le volume des ventes des restaurants Autogrill de Bierges, Ruisbroek et surtout Minderhout et va de pair avec une réduction de prix pratiquée par ces mêmes restaurants (voir planches 11 et 12 de l'étude RBB et notamment aussi p. 44 § 4 étude Food in Mind). Le même type d'effet négatif sur le volume des ventes est observé pour des restaurants de Carestel, en particulier les deux restaurants des sites de Jabbeke (voir planche 13 de l'étude RBB).

IV.D.3.1.2. Position du Rapporteur 39. Le Rapporteur définit le marché pertinent comme le marché national de la restauration autoroutière, à l'exclusion des convenience stores. Sur la base de cette définition du marché pertinent, le Rapporteur se base sur l'étude GIRA. Il exclut de l'estimation de la taille totale du marché, les ventes de certains acteurs qui n'exploitent pas de restaurant autoroutier au sens strict tels Deli-La Lorraine ou Texaco.

Le Rapporteur aboutit à une estimation de la taille du marché s'élevant à euro 59,38 millions. Sur cette base, les parts de marché en 2004 sont calculées et présentées dans le tableau ci-dessous (Rapport, p. 18). Ce montant de euro 59,38 millions pourrait même, selon le Rapporteur, être une légère surestimation de la taille du marché parce que : - sont repris dans les euro [Secrets d'affaires] millions de ventes de Van der Valk, les restaurants d'Oostkamp et de Nivelles-Sud qui sont situés à proximité des autoroutes E40 et l'autoroute E19 mais pas sur cette dernière; - sont repris dans le montant de euro [Secrets d'affaires] millions de ventes du pétrolier Total, non seulement les ventes de ses restaurants autoroutiers au sens strict mais également les ventes d'une quinzaine de ses points de restauration « fast food ».

Pour la consultation du tableau, voir image Le Conseil observe néanmoins que ces chiffres ne comprennent pas les ventes des aires de Couthuin et de Tellin, équipées de restaurants mais sans station-service. 40. L'exclusion des convenience stores du marché pertinent est soutenue par la jurisprudence de la Commission.Dans la décision Accor/Wagons-Lits (décision de la Commission du 28 avril 1992, IV/M126), la Commission a, en effet, identifié un marché de la restauration autoroutière segmenté de la manière suivante : - restauration sensu stricto, avec service à table ou self service; - prestations légères : petite restauration ou croissanterie; - vente de produits alimentaires : boutiques, appareils distributeurs, opérations pique-nique et vente à emporter, dans les termes suivants : « Trois marchés de produits doivent être distingués à l'intérieur de la restauration autoroutière. Il s'agit de la restauration stricto senso (avec un service à table ou un self service), des prestations légères (petite restauration et croissanteries) et des ventes de produits alimentaires (par le biais de boutiques, appareils distributeurs, opérations pique-nique et vente à emporter). Cette différenciation repose, en ce qui concerne la demande, sur cinq critères (temps nécessaire à la consommation, nature du service rendu, prix, le lieu de consommation et caractère professionnel ou de loisir du déplacement et, en ce qui concerne l'offre, sur cinq autres critères (nature des entreprises pour chaque type de service, présence de plusieurs types de restauration sur une même aire, perception des concurrents d'Accor, clauses des cahiers de charges et montant des investissements). » Dans une autre décision également relative à la restauration de concession (du 26 février 2002, COMP/M.2639 - Compass/Restorama/Rail GourmetGourmet Nova) la Commission mentionne l'existence, sur les lieux de restauration de concession, de « competition from other outlets within the facility ». Toutefois, cette citation est utilisée par le Rapporteur pour exclure du marché pertinent les restaurants situés hors autoroute (Rapport, p. 11 et note 40 en bas de page). 41. Le Rapporteur se base aussi sur l'existence des clauses limitant la pression concurrentielle que le petrol shop peut exercer sur le restaurant autoroutier situé sur la même concession, c'est-à-dire des clauses suivant lesquelles le petrol shop et le restaurant ne peuvent vendre des produits identiques (par ex.le petrol shop ne peut pas faire des plats cuisinés) et les clauses d'approvisionnement exclusif sur la même aire autoroutière (par ex. si le shop veut vendre des sandwichs, ces produits doivent venir du restaurateur Carestel ou Autogrill).

Selon l'interprétation économique donné par le Rapporteur, ces restrictions de concurrence dans les contrats de sous-concession dont les plus anciens dans le dossier remontent à 1973, auraient pour effet de cloisonner les sites autoroutiers en deux marchés distincts (restaurants versus convenience shops). Ces clauses de non-concurrence permettraient de maintenir une différenciation entre les produits offerts, et seraient utilisées à l'égard des petrol shops précisément parce qu'ils se trouvent dans les mêmes concessions, ce qui réduit la pression concurrentielle.

IV.D.3.1.3. Position des tiers 42. Les tiers interrogés dans le cadre de l'instruction ont des avis très partagés sur l'existence ou non d'une pression concurrentielle exercée par les convenience shops sur les restaurants autoroutiers : - Il y aurait concurrence entre les petrol shops et les restaurants d'autoroutes selon les tiers suivants : Total, Texaco, Esso, Q8, Van der Valk.Quant à Shell, sa position est ambiguë (une fois oui, une fois non). - Il n'y aurait pas de concurrence entre les petrol shops et les restaurants d'autoroutes selon les tiers suivants : MET (Ministère de l'Equipement et du Transport) de la Région wallonne, Departement Mobiliteit en Openbare Werken de la Région flamande, Ho.re.ca Vlaanderen, SSP. Lors de l'audience, SSP a confirmé ce point de vue en se référant à la jurisprudence européenne.

IV.D.3.1.4. Analyse du Conseil 43. Le Conseil est d'avis que la distinction entre restaurants autoroutiers sensu stricto et convenience shops situés sur la même aire autoroutière n'est pas nette, comme en atteste la divergence d'opinion des tiers (voir ci-dessus n° 42), et qu'une fraction des ventes des convenience shops pourrait être comprise dans le marché pertinent, quoique ladite fraction soit très difficile voire impossible à déterminer.44. Pour arriver à cette opinion, le point de départ de la démarche du Conseil consiste, par analogie avec l'analyse des marchés pertinents dans les secteurs régulés tels les marchés des communications électroniques, à essayer de définir le marché en l'absence de régulation (approche « afresh ») ou, dans le cas présent, en l'absence de ces clauses restrictives de concurrence. Les parties font remarquer à cet égard, dans leur note d'observations du 1er septembre 2006 (p. 9) que « la conclusion d'un accord de non-concurrence implique nécessairement que les services sont en concurrence entre eux et contredit ainsi la position du Rapporteur ».

Cela semble aussi ressortir de l'étude Food in mind : « Indien op de locatie een wegrestaurant aanwezig is zal dit de verkoop van voeding in de shop kannibaliseren. Veelal worden afspraken tussen de uitbater van de shop en de restaurateur gemaakt met betrekking tot de concurrerende producten » (Food in mind, p. 44).(Traduction : Au cas où un restaurant se trouve sur le même site [que le Petrol shop], cela va cannibaliser les ventes de produits alimentaires du shop. Des accords relatifs aux produits concurrents sont fréquemment conclus entre l'exploitant du shop et le restaurant.).

Le Conseil estime que ce raisonnement des parties et de l'étude Food in mind est pertinent dans la mesure où il s'applique aux seules clauses permettant de maintenir une différenciation entre les produits actuellement offerts par les restaurants au sens strict et par les convenience shops, de telles clauses pouvant s'expliquer par la volonté des parties d'éviter de se faire une concurrence pure en prix au détriment de leur marge bénéficiaire.

Une telle interprétation de ces clauses de non-concurrence est basée sur le modèle de Hotelling (voir par ex. Ph. McCann, Urban and Regional Economics, Oxford University Press, 2001, pp. 50 à 52); plus précisément, cette interprétation est basée sur une utilisation nuancée du modèle de Hotelling, que l'on peut résumer comme suit (C. d'Aspremont, J. Jaskold Gabszewicz, and J.-F. Thisse, On Hotelling's « Stability in Competition », Econometrica, Vol. 47, n° 5, septembre 1979, pp. 1145 - 1150).

Premièrement, lorsque deux firmes se rapprochent du centre du marché, c'est-à-dire - comme c'est le cas pour une aire autoroutière - qu'il n'y a plus de différenciation spatiale entre ces deux firmes, la concurrence en prix n'est pas soutenable.

Deuxièmement, il est, dans ce cas, nécessaire pour les deux firmes d'éviter la concurrence pure en prix, en différenciant au maximum leur offre de produit et leur enseigne, comme en témoignent par exemple les investissements de ces entreprises de restauration autoroutière dans leurs enseignes, par exemple les accords entre Carestel et Quick (voir infra, nos 66 et 87).

Dans le cadre d'une telle interprétation économique de ces clauses de non-concurrence, celles-ci sont révélatrices de la concurrence potentielle qu'exercent les produits des petrol shops sur les ventes des restaurants, et apparaissent légitimes pour éviter une pure concurrence en prix.

Par contre, les clauses obligeant les shops à s'approvisionner exclusivement auprès du restaurant de la même aire ne peuvent s'expliquer par ce raisonnement basé sur le modèle de Hotelling (voir infra, n° 95 et 105). Ces clauses ont pour objectif de garantir au restaurant une marge sur ce que le petrol shop pourrait lui prendre comme part de marché.

Ce type de clause a également pour effet de diminuer l'incitation du petrol shop à offrir des produits concurrençant directement le restaurant. Ainsi, par exemple, pour décourager le shop d'avoir la même offre de sandwichs que le restaurant, le restaurateur pourrait tarifier les sandwiches livrés au pétrol shop à un prix équivalent à celui proposé dans son restaurant. Une telle stratégie de prix s'explique, dans le chef du restaurant, en termes de « raising rivals' costs ». 45. Le Conseil est critique à l'égard de la présentation des parties qui fondent leur estimation d'un marché de euro 143 millions en incluant des petrol shops dans la définition du marché pertinent, alors que l'offre pour certains produits vendus par ces convenience shops doit obligatoirement venir de la chaîne de restaurants AC ou Carestel. Par ailleurs, la méthode utilisée par les parties pour aboutir à cette estimation d'un marché de euro 143 millions soulève deux problèmes possibles.

En premier lieu, l'addition de chiffres de deux études - l'étude GIRA et l'étude Food in Mind (voir notification p. 25 et note 13 en bas de page) - complètement différentes avec leurs propres méthodes et variables s'avère être une méthode erronée. Par exemple comme mentionné ci-dessus (n° 39), le montant de euro 59,38 millions comprend un chiffre d'affaires de euro [Secrets d'affaires] millions de Total, qui reprend non seulement les ventes de ses restaurants autoroutiers au sens strict mais également les ventes d'une quinzaine de ses points de restauration « fast food ».

En deuxième lieu, le Conseil a vérifié que les parties n'ont pas pris en compte tous les petrol shops le long des autoroutes, car si tel était le cas, cela aboutirait à agrandir excessivement le marché. En d'autres mots, il ne faudrait pas que les parties définissent un marché pertinent résultant d'un SSNIP test qui aurait été mené en simulant, sur les ventes du restaurant du site, l'effet d'une variation du prix des repas pré-emballés, sandwichs, snacks, crèmes glacées et tous autres produits vendus par les convenience shops. 46. Il faut idéalement ne tenir compte que des petrol shops situés sur les autoroutes et offrant, par exemple, des repas pré-emballés et sandwichs garnis ou à tout le moins une certaine gamme de snacks, sandwichs, fast-food, etc. Si on fait le SSNIP test, dans l'hypothèse d'absence de clauses de non-concurrence, il est en effet très probable qu'en cas de hausse de prix des menus des restaurants, la demande se déplace vers certains produits vendus par de tels petrol shops s'ils sont situés sur la même aire autoroutière.

Pour identifier de tels petrol shops en vue de les inclure dans le marché pertinent, le Conseil se base sur l'étude « Food in mind » répertoriant 1.825 stations-service disposant d'un shop en Belgique.

Cette étude introduit les classifications suivantes : 1. Classification selon la localisation (étude « Food in mind », pp. 44 et suivantes) : - Localisation A : « A locaties zijn plaatsen voor tankstations die gelegen zijn langs autosnelwegen en enkel bereikbaar zijn via deze autosnelwegen. Ze worden daarom ook wel motorway stations' genoemd. In totaal zijn er 64 A-locaties in België. Het verbruik van voeding en drank is op deze locaties groter dan bij de overige locaties. De keuze van de consument is meestal beperkt tot de shop of het wegrestaurant » (p. 44) (Traduction : Les localisations de type A sont des lieux pour stations-service qui sont situées le long d'autoroutes et qui sont uniquement accessibles en passant par ces autoroutes.Elles sont de ce fait aussi appelées motorway stations'. Au total, il y a 64 localisations de type A en Belgique. La consommation de produits alimentaires et de boissons est plus importante dans ces localisations que dans les autres localisations. Le choix du consommateur est le plus souvent limité au magasin ou au restoroute.) - Localisation B1 : « De B1-locaties zijn de stations die periferisch gelegen zijn langs de belangrijkste invalswegen naar industriezones en steden. In België, zijn er 48 stations die aan deze criteria voldoen.

De shopomzet is hier min of meer vergelijkbaar met deze van de motorway stations ». (Traduction : Les localisations de type B1 sont des stations-service qui sont situées en périphérie le long des plus importantes voies d'accès aux zones industrielles et villes. En Belgique, 48 stations-service répondent à ce critère. Le chiffre d'affaires du magasin est plus ou moins comparable à celui des motorway stations.) - Localisation B : « De B-locatie ... onderscheidt zich van de B1-locatie door het feit dat zij minder omzet genereert en minder gunstig gelegen is. Deze B-locaties kennen dus minder « traffic » met als gevolg minder aankopen in de shop. Deze locaties vindt men langs de druk bereden gewestwegen'. (Traduction : La localisation de type B... se distingue de la localisation de type B1 parce qu'elle génère un chiffre d'affaires moins élevé et qu'elle est moins bien située.

Ces localisations de type B ont moins de « trafic » et par conséquent moins d'achats dans leur magasin. Ces localisations se trouvent le long des routes 'régionales' à circulation intense.) - Localisation C : « Een C-locatie kan ook omschreven worden als een buurtstation' ». (Traduction : Une localisation de type C peut également être définie comme une station-service de proximité'.) 2. Classification selon le potentiel de chiffre d'affaires (p.42) : - Classe 1 : ces petrol shops appartiennent tous à des sociétés pétrolières, sont souvent de localisation A ou B1, bénéficient donc d'un trafic important et ont une enseigne connue. Il y a 137 shops de cette catégorie, représentant 7,5 % du total. Les petrol shops ayant les enseignes des grandes compagnies pétrolières (Total, Texaco, Shell, Q8, Esso et Jet) ont une superficie moyenne comprise entre 40 et 60 m2. A titre de comparaison, les aires autoroutières de catégorie III (Couthuin par exemple) ont une surface de restaurant comprise entre 30 et 80m2 et une surface de cafétéria comprise entre 30 et 80 m2.

Les aires autoroutières de catégorie II (par exemple Verlaine, Hellebecq, Nivelles, Tienen-Hélécine, Waremme) ont une surface de restaurant comprise entre 60 et 120 m2 et une surface de cafétéria comprise entre 40 et 120 m2. - Classe 2 : ils ont aussi un bon potentiel de chiffre d'affaires, sont du type localisation B. « De shops zijn onder andere succcesvol door hun aanbod aan verse producten zoals broodjes, gemaksproducten, etc... ». - Classe 3 : Ce sont les shops plus petits, de localisation B ou C. - Classe 4 : ces shops n'ont qu'une gamme très étroite de produits du type boissons, tabac, friandises.

Les petrol shops pouvant exercer une pression concurrentielle sur les restaurants d'autoroutes sont de la classe 1 et de localisation A; il s'agit de 64 shops, dont le chiffre d'affaires « Food » en 2004 s'élève à euro 82.989.864 (étude de Food in Mind, Tableau 17 p. 89).

Ce montant correspond bien au chiffre de euro 82,989 millions qui est cité par les parties comme étant le chiffre d'affaires des activités food & beverage sur autoroutes par les compagnies pétrolières en 2004 et est mentionné par les parties notifiantes dans leur note d'observation datée du 31 août, p. 5.

Une démarche un peu plus restrictive dans la définition du marché pertinent consisterait à ne retenir qu'un montant de euro 70.947.672 obtenu après soustraction des ventes de boissons alcoolisées (étude Food in mind, p. 89).

Une hypothèse plus forte consisterait à ne pas exclure une certaine concurrence entre les points de restauration autoroutière et les points de restauration situés près des autoroutes (voir infra point, n° 55 et suivants);dans ce cas, la pression concurrentielle serait exercée non seulement par les shops de catégorie 1 et de localisation A, mais par les petrol shops de catégorie 1 et de localisation B1; il s'agit de 48 shops, dont le chiffre d'affaires « Food » en 2004 s'élève à euro 54.774.126 (étude Food in mind, p. 89). Dans ce cas, les ventes de petrol shops prises en compte dans la définition du marché pertinent s'élèveraient à euro 137.763.990 ( euro 82.989.864 + euro 54.774.126) ou à euro 125.721.798 ( euro 70.947.672 + euro 54.774.126).

Ces différents montants tirés de l'étude « Food in mind » seraient additionnés au montant de euro 59,38 millions tiré de l'étude GIRA pour obtenir une estimation extensive de la taille du marché.

Il n'en reste pas moins qu'une telle estimation de la taille de marché serait basée sur l'addition de chiffres provenant de deux études complètement différentes et est donc sujette à caution (voir supra, n° 45). 47. De l'examen des chiffres et des documents contenus dans le dossier d'instruction, le Conseil tire deux approximations de la taille du marché. La première approximation est basée exclusivement sur l'étude GIRA et évite l'écueil d'une estimation basée sur deux études différentes.

L'étude GIRA estime que la taille du marché de restauration de concession « Road/Motorway » représente 58,5 % du total de la restauration de concession, y compris les restaurants des aéroports et gares. Ce total s'élève, selon l'étude GIRA, à euro 126 millions. La taille du marché de restauration de concession « Road/Motorway » s'élève selon GIRA à 58,5 % de euro 126 millions, donc à euro 73,71 millions (arrondi à 74 millions).

D'après les chiffres de l'étude GIRA, ce montant comprend le chiffre d'affaires « Food » de trois sociétés pétrolières : - Esso : euro [Secrets d'affaires] millions pour 40 « points de vente ». - Total : euro [Secrets d'affaires] millions pour 19 « points de vente ». - Texaco : euro [Secrets d'affaires] millions pour 37 « points de vente ».

L'addition de ce chiffre d'affaires « Food » des trois sociétés pétrolières précitées donne un montant égal à euro [Secrets d'affaires] millions, pour 96 « points de vente ».

Ce sous-total de euro [Secrets d'affaires] millions inclut des ventes de convenience shops, parce que ces trois sociétés pétrolières n'exploitent qu'un nombre très limité de restaurants sensu stricto situés sur des aires autoroutières, à savoir : - Esso exploite 2 restaurants situés de part et d'autre de l'autoroute sur 1 site. - Total exploite 5 restaurants sur 3 sites. - Texaco n'exploite aucun restaurant. 48. Si on retient une taille de marché de euro 74 millions, les parts de marché sont alors : Autogrill ([Secrets d'affaires - entre 35 et 40] %) et Carestel ([Secrets d'affaires - entre 30 et 35] %) = [Secrets d'affaires - entre 65 et 70] % après concentration. Les autres acteurs sont : Deli-La Lorraine : [Secrets d'affaires - entre 5 et 10] % Esso : [Secrets d'affaires - entre 5 et 10] % Van der Valk : [Secrets d'affaires - entre 5 et 10] % Total : [Secrets d'affaires - entre 0 et 5] % Texaco : [Secrets d'affaires - entre 0 et 5] % SSP : [Secrets d'affaires - entre 0 et 5] %. 49. Comme mentionné ci-dessus, les parties avancent une estimation de euro 143 millions qui est fondée sur l'inclusion de certains petrol shops dès lors qu'on accepte que la distinction entre restaurants et petrol shops n'est pas une distinction claire et nette.Dans ce cas, la part de marché cumulée des parties en 2004 s'élève à [Secrets d'affaires - entre 30 et 35] %.

A titre subsidiaire, les parties donnent une estimation du total du marché de 78 millions, en ajoutant au montant de euro 59 millions les revenus de la vente de produits frais et de boissons chaudes des buffets pétroliers autres que ceux de Total (qui sont déjà compris dans le chiffre de euro 59 millions), ce qui exclut, selon les parties, les produits pré-confectionnés mais en incluant également les revenus de plusieurs opérateurs indépendants actifs sur autoroutes, dont [Confidentiel] à [Confidentiel - A] et [Confidentiel] à [Confidentiel - H] (note d'observations des parties du 1er septembre 2006, p. 11). 50. En conclusion, le Conseil estime que certaines ventes de biens et services alimentaires autres que les services de restaurant autoroutier sensu stricto doivent être comprises dans la définition du marché pertinent. Le Conseil retient une estimation prudente de la taille du marché, à savoir un montant compris entre euro 74 et euro 78 millions.

Si on retient une estimation de euro 74 millions, les parts de marché s'élèvent à [Secrets d'affaires - entre 35 et 40] % pour Autogrill et à [Secrets d'affaires - entre 30 et 35] % pour Carestel, c'est-à-dire à une part cumulée de [Secrets d'affaires - entre 65 et 70] % après concentration.

Si on retient une estimation de euro 78 millions, ces parts de marché s'élèvent respectivement à [Secrets d'affaires - entre 30 et 35] % (part de marché d'Autogrill), [Secrets d'affaires - entre 30 et 35] % (part de marché de Carestel) et [Secrets d'affaires - entre 60 et 65] % (part de marché cumulée).

IV.D.3.2. Concurrence des restaurants autoroutiers d'une aire de service différente et dimension géographique du marché IV.D.3.2.1. Position des parties notifiantes 51. Elles semblent poser la question de la distance maximale en dessous de laquelle deux aires autoroutières sont en concurrence et font donc partie de la même zone de chalandise.Elles parlent d'environ 150 kilomètres, mais dans le contexte du réseau autoroutier italien. 52. Les parties veulent concilier l'idée d'une vive concurrence limitée spatialement à chaque aire autoroutière et à ses environs, mais défendent en même temps la définition d'un marché national.Dans cette ligne, les parties insistent sur l'argument du manque de « brand-awareness » des consommateurs circulant sur les autoroutes en Belgique, du faible degré de fidélité à une enseigne et du manque d'attention à la qualité du service et des produits dans le chef des utilisateurs des autoroutes belges (note explicative d'Autogrill accompagnant la traduction des décisions de l'autorité italienne; voir supra n° 25).

A l'appui de leurs affirmations, les parties invoquent à nouveau les résultats de l'étude RBB Economics et de l'étude Dimarso, selon lesquels « 70 % of customers who claimed to have stopped at a Carestel restaurant in the last 6 months could not remember exactly where they stopped » (planche 19 de l'étude RBB) (traduction : 70 % des clients qui affirment s'être arrêtés dans un restaurant Carestel durant les six derniers mois ne se rappellent pas exactement où ils se sont arrêtés).

IV.D.3.2.2. Position du Rapporteur 53. Le Rapporteur conclut que la dimension géographique du marché de la restauration de concession est nationale au motif notamment que la politique des prix des parties, se fait au niveau national. IV.D.3.2.3. Position des tiers 54. Certains acteurs confirment que le marché est national : Texaco, Esso, Ho.re.ca Vlaanderen. Elior mentionne que le marché évolue vers une dimension européenne.

D'autres acteurs définissent le marché pertinent par l'approche des axes ou par tronçons (voir infra, n° 58) : Q8, Mc Donald.

SSP combine les deux approches. SSP s'est appuyé sur l'approche des axes ou tronçons lors de l'audience du 26 septembre 2006.

IV.D.3.2.4. Analyse du Conseil 55. Le Conseil constate que deux approches sont possibles : (1) délimitation du marché géographique au niveau national;(2) délimitation du marché géographique par la longueur de l'autoroute (chaque axe ou tronçon autoroutier). 56. La délimitation du marché géographique au niveau national est justifiée en particulier dans une décision de la Commission européenne (décision du 9 février 2000, affaire COMP/M.I628 - TotalFina/Elf), par l'argument de substituabilité en chaîne : la distance moyenne entre deux stations service - qui n'est que de 40 km - et le degré d'interconnexion entre autoroutes entraînent un effet de chaîne (numéros 178, 185 et 188 de la décision). Une station située à proximité d'une bifurcation entre deux autoroutes prend en compte dans la détermination de ses prix les prix facturés par ses concurrents sur les deux branches de la bifurcation et ceci mène à une délimitation du marché géographique au niveau national.

Cet argument de substituabilité en chaîne, également utilisé dans des cas de concentration dans la grande distribution (« overlapping van verzorgingsgebieden »), semble transposable au marché belge de la restauration autoroutière sur la base des considérations suivantes : - La distance moyenne entre deux restaurants autoroutiers n'est en général pas très élevée (sauf sur les axes Namur-Arlon et Liège-Arlon) et le réseau autoroutier belge a un haut degré d'interconnexion. - C'est au niveau national que chaque chaîne de restaurants autoroutiers, donc chaque enseigne, fixe ses prix. - Cette théorie d'un marché géographique national est également supportée par l'argument - avancé par les parties - du manque de « brand-awareness », c'est-à-dire du faible degré de fidélité à une enseigne et du manque d'attention à la qualité du service et des produits dans le chef des utilisateurs des autoroutes belges (supra, n° 52). - L'absence de péage. 57. L'argument de substituabilité en chaîne peut justifier la position des parties et du Rapporteur qui, par exemple pour le calcul des parts de marché, définissent le marché comme national. Une décision récente de la Commission (décision du 22 septembre 2006, affaire COMP/M.4249 - Abertis/Autostrade) jette cependant le doute sur cette définition nationale du marché autoroutier dans un cas d'autoroutes à péage, à savoir en Espagne. En particulier, le n° 29 dans cette décision énonce que le marché pourrait être plus grand que le territoire national, mais aussi plus étroit.

En l'espèce, cette position du Rapporteur et des parties n'est pas satisfaisante, dans la mesure où un marché géographique national est une définition à la fois : - trop étroite, puisqu'il n'y a pas de frontières politiques nationales sur autoroute et que quelques aires autoroutières en Belgique sont très proches des frontières : Hondelange-Arlon près du Grand-Duché, Minderhout près de l'aire de Hazeldonk-Oekel aux Pays-Bas et Lichtenbusch à la frontière allemande; - trop large : une définition nationale ne tient pas compte de la concurrence potentielle sur chaque aire entre le restaurant sensu stricto et certains convenience shops, problème qui a été analysé plus haut (n° 43 à 47). Cette définition d'un marché national ignore aussi l'approche par la méthode « Origin&Destination » (O&D) et l'approche par axe autoroutier. 58. La définition géographique par axe ou tronçon autoroutier est retenue par l'autorité française de concurrence (Décision n° 03-D-17 du 31 mars 2003 du Conseil français de la concurrence relative à des pratiques sur le marché de la distribution de carburants sur autoroute et avis du 16 avril 2004).D'après cette jurisprudence française, la définition géographique pertinente est la longueur de l'autoroute : les stations d'essence et enseignes de restaurant sont en concurrence sur chaque axe ou tronçon autoroutier, long de quelques dizaines de kilomètres à - théoriquement pour les grands pays - plusieurs centaines de kilomètres. 59. Cette approche par axe ou par tronçon est utilisée par la Commission dans sa décision du 9 février 2000 (affaire COMP/M.I628 - TotalFina/Elf) pour arriver à la conclusion que l'opération notifiée (concentration entre TotalFina et Elf) conférerait à la nouvelle entité les moyens de punir tout concurrent qui ne suivrait pas, voire s'opposerait, à sa politique de « rigidité à la baisse et une fluidité à la hausse des prix » (considérant n° 220).

Cette conclusion se base sur la couverture inégalée en nombre de stations et en ampleur géographique après la fusion (considérant n° 218) et sur la présence de doublons et de stations intercalées entre deux stations TotalFina/Elf (n° 219).La Commission conclut que la fusion TotalFina/Elf aboutirait à la création d'une position dominante sur ce marché des stations-service sur autoroute et a imposé à TotalFina/Elf la revente de 70 stations-service des marques Elf, Total et Fina. Dans le considérant de la décision imposant cette condition (n° 334), la Commission précise que « Le choix des stations tient compte notamment des problèmes identifiés au considérant 219 de la présente décision ». SSP se base aussi sur cette approche pour expliquer qu'en France, les autorités de concurrence auraient considéré qu'Elior était en situation de monopole sur l'autoroute A10-A11 et auraient contraint la société concédante à lancer des appels d'offre sur le tronçon concerné à raison d'une aire sur deux alors même que les contrats en cause n'étaient pas arrivés à échéance (observations complémentaires de SSP du 19 septembre 2006). Dans le dossier d'instruction, à la question « Quelle est la dimension géographique de l'activité de restauration de concession sur autoroute ? », SSP a répondu : « ... Le Conseil de la Concurrence en France semble avoir récemment émis des griefs quant au fait que la quasi-totalité des aires sur certains axes autoroutiers français soient gérées par un seul et même opérateur (notamment les axes Paris-Dijon, Paris-Poitiers et Paris-Le Mans) ». (p. 240771 du dossier d'instruction). 60. Le Conseil est d'avis que cette théorie des axes ou tronçons doit être fortement relativisée dans le cas du réseau autoroutier belge.61. En premier lieu, les décisions précitées se réfèrent à des cas d'autoroutes à péage en France ou en Espagne.En Belgique, les autoroutes ne sont pas à péage. 62. En deuxième lieu, même si avant ou après l'opération Autogrill/Carestel tous les restaurants le long d'un axe étaient entre les mains de la nouvelle entité, il n'en reste pas moins que : - sur toutes les aires équipées de restaurants Carestel ou AC, il y a - sauf dans un cas - un convenience shop (voir supra n° 38 et planche 5 de l'étude de RBB Economics) qui peut exercer une pression concurrentielle sur le restaurant autoroutier; - il peut y avoir le long de cet axe des aires autoroutières équipées d'une station-service et d'un convenience shop sans qu'il y ait de restaurant autoroutier, de telle sorte qu'il peut déjà y avoir une certaine alternance sur ces axes ou tronçons qui seraient « monopolisés » par Autogrill/Carestel (cfr infra, n° 70).

A l'appui de cette affirmation, deux observations statistiques peuvent être mentionnées : - (i) Autogrill et Carestel totalisent, d'après la notification (p. 26 et note 16 en bas de page) l'exploitation de 53 établissements de restauration autoroutière sur 57 sites (certains restaurants étant abrités dans les ponts reliant les deux côtés de l'autoroute, ils couvrent deux sites). Or, l'étude Food in mind recense 64 localisations de type A (« motorway stations ») avec petrol shop (étude Food in mind, p. 44-45). - (ii) Il y a des aires autoroutières équipées de stations-service avec petrol shop et qui ne sont pas pourvues d'un restaurant. A titre d'exemple, le calcul a été fait pour les aires autoroutières concédées à ESSO et TEXACO (les chiffres se rapportent à l'année 2004 - source : étude GIRA).

Pour la consultation du tableau, voir image 63. En troisième lieu, les parties invoquent à juste titre, pour relativiser la théorie des axes, une décision très récente de la Commission dont il appert que les autorités espagnoles ont laissé s'implanter le long de certains axes autoroutiers (à péage) en Espagne des restaurants d'une seule entité économique, à savoir soit d'Autogrill soit d'une filiale d'Albertis (décision Albertis-Autostrade COMP/M.4249 du 22 septembre 2006). 64. Un quatrième argument à examiner pour relativiser cette théorie des axes ou tronçons est l'argument d'une possible concurrence entre restaurants autoroutiers et restaurants situés à proximité des sorties d'autoroute, en particulier dans le cas du réseau autoroutier belge caractérisé par une faible différenciation par rapport au réseau de routes dites nationales, et par le nombre élevé de sorties et de rampes d'accès permettant ainsi à l'automobiliste de quitter facilement un axe autoroutier.65. Ces arguments mènent à la conclusion que cette théorie des axes n'est pas adaptée au cas belge. IV.D.3.3 Pression concurrentielle exercée par les restaurants situés en dehors des autoroutes et localisés à proximité des sorties d'autoroutes IV.D.3.3.1. Position du Rapporteur 66. Le Rapporteur exclut la restauration traditionnelle de la définition du marché pertinent sur la base de la définition même de la restauration de concession : « ... la restauration de concession consiste dans la fourniture d'un service de restauration à un client dans un lieu dédié au transport, au commerce de détail, au sport et au loisir. Les clients fréquentent ces lieux pour un objectif autre que celui de se restaurer. L'activité de restauration de concession se caractérise également par le fait que le restaurateur paye un loyer qui lui permet d'exploiter son activité dans le lieu en question et que le revenu du restaurateur provient des ventes aux consommateurs finals » (Rapport, p. 4).

Le Rapporteur mentionne aussi la Commission européenne dans sa décision Accor/Wagons-Lits (Décision de la Commission du 28 avril 1992, IV/M126) pour justifier sa position que la restauration de concession et la restauration traditionnelle sont deux marchés distincts.

Cette décision Accor/Wagons-Lits conclut que la restauration autoroutière est un marché distinct : - Au plan de la demande, il s'agit d'une clientèle spécifique puisque seuls les usagers d'autoroutes ont accès à ce type de prestation. Il s'agit aussi d'une clientèle captive puisque la majorité des usagers ne sortent pas de l'autoroute pour prendre un repas; seuls en effet, les « short haul » et « medium haul » runners (des navetteurs) sortiraient de l'autoroute pour prendre un repas. - Les restaurants hors autoroute ont une visibilité limitée pour les usagers de l'autoroute. - Au plan de l'offre, l'activité de restauration autoroutière est caractérisée par une grande variation du chiffre d'affaires sur l'année (jours de congés, période des vacances), par l'ouverture 7 jours sur 7 des restaurants, par un horaire de restauration plus large que dans les restaurants traditionnels et par de lourdes obligations imposées par cahiers des charges.

L'argument de la clientèle spécifique semble s'appliquer au cas belge, puisque la clientèle des Lunch Garden était différente de celle des Carestel.

L'argument de la faible visibilité pourrait être une raison pour laquelle des chaînes comme Pizza Hut et Quick passent ou essaient de passer des accords de complémentarité avec AC ou Carestel. Cependant, à la question « Si vous avez passé un accord avec un restaurant d'autoroute afin d'être présent sur les autoroutes belges, pourquoi avoir fait ce choix plutôt que de collaborer directement avec la compagnie pétrolière dans le cadre, par exemple, d'une sous-concession ou d'un contrat d'exploitation ? », la réponse de Quick est : « Parce que nous n'offrons qu'un seul concept de restauration et qu'en général les stations autoroutières en veulent plusieurs pour un plus grand choix pour le consommateur » (réponse de Quick à la demande de renseignements, non reprise dans le dossier d'instruction et reçue par courrier électronique du 28 août 2006); selon cette réponse de Quick, les accords de complémentarité répondent plutôt à un objectif de différenciation des offres sur une aire autoroutière (voir supra, n° 44; voir aussi infra, n° 87).

IV.D.3.3.2. Position des parties notifiantes 67. Les parties contestent que la décision Accor/Wagons-Lits ait une valeur de précédent pour la présente affaire, étant donné qu'elle est déjà ancienne, et qu'elle s'applique au territoire français, avec des autoroutes à péage et comptant relativement moins de sorties qu'en Belgique. Les parties contestent la distinction entre restauration de concession sur autoroute et restauration traditionnelle en suggérant qu'il y a substituabilité du côté de la demande entre ces deux types de restauration sur le marché belge.

Dans la lettre d'accompagnement de la traduction des décisions de l'autorité italienne, les parties écrivent en effet : « Par contre, l'autoroute n'est pas payante en Belgique et il n'y a donc pas de limitation au choix de l'automobiliste de s'approvisionner en dehors du réseau autoroutier ou même dans les convenience stores des compagnies pétrolières situées sur les mêmes aires. Par conséquent, l'identification d'un marché distinct de la restauration autoroutière ne serait pas justifiée en Belgique, car le réseau autoroutier ne se différencie pas de façon déterminante par rapport au réseau des routes ordinaires ». (document 090239, lettre du 9 août 2006).

Cette description du réseau belge contraste avec le réseau italien équipé de péages et marqué par des distances assez importantes entre les sorties d'autoroute. 68. Les parties soutiennent que les restaurants situés à proximité des sorties d'autoroute exercent une pression concurrentielle sur les restaurants autoroutiers sur la base des résultats de la shock analysis de RBB Economics.Ainsi, l'entrée d'un tel restaurant hors autoroute a un impact négatif sur les ventes de restaurants d'Autogrill (planche 9 de RBB) et sur les prix pratiqués par ces restaurants d'Autogrill (planche 10) (cfr infra n° 94).

En particulier, les parties soulignent les résultats de l'analyse concernant le cas du restaurant AC de Hondelange qui aurait été affecté très récemment et significativement par l'implantation du restaurant IKEA d'Arlon et avant cela, par un restaurant de proximité et par un restaurant exploité juste derrière la frontière Luxembourgeoise, à Capelle, par Eurest qui se trouve dans une position plus favorable compte tenu du prix de carburants, cigarettes etc. au Luxembourg (planche 9 de l'étude RBB Economics). 69. Les parties mentionnent aussi l'étude Di Marso pour l'importance de la concurrence des restaurants hors autoroute (document 040124, annexe 13 de la notification et planche 18 de RBB).70. Lors de l'audience du 4 septembre 2006, les parties ont insisté sur le fait que les automobilistes s'arrêtent principalement sur une aire autoroutière pour des raisons alimentaires et sanitaires, plutôt que principalement pour prendre de l'essence vu l'autonomie accrue des automobiles;selon M. Isoart, président d'Autogrill France et Benelux, moins de 25 % des arrêts sur une aire autoroutière seraient motivés principalement par l'achat de carburant.

Les parties semblent conscientes du fait que, pour évaluer la pression concurrentielle des restaurants hors autoroute sur les restaurants autoroutiers, une question importante est de connaître quel pourcentage d'automobilistes s'arrête sur l'aire prioritairement pour manger et se rendre aux toilettes même sans prendre de l'essence, ou au contraire s'arrête prioritairement pour prendre de l'essence. Si des automobilistes s'arrêtent prioritairement pour prendre de l'essence, alors le service de restauration ou la vente d'aliments est une activité accessoire par rapport à la vente de carburant; dans ce cas, on ne peut pas soutenir que les restaurants hors autoroute exercent une pression concurrentielle sur les restaurants autoroutiers.

IV.D.3.3.3. Position des tiers 71. Les avis des tiers sont divergents.Certains estiment, à l'instar des analyses de Di Marso et de RBB Economics, que les restaurants urbains de proximité sont en concurrence avec les restaurants d'autoroutes : Quick, Total, Esso, Q8, Van der Valk, Mc Donald, Departement Mobiliteit en Openbare Werken de la Région flamande.

D'autres tiers, à savoir Texaco et SSP, estiment au contraire que ces restaurants hors autoroutes n'exercent pas de pression concurrentielle.

IV.D.3.3.4. Analyse du Conseil 72. Le Conseil a analysé la position de la Commission dans l'affaire TotalFina/Elf (cfr supra n° 59, affaire COMP/M.I628). Pour la Commission, il y a lieu de faire une distinction du marché de la vente de carburants par réseau de stations-service, selon que les stations-service sont situées sur autoroutes ou hors autoroute, sur la base des considérations suivantes (considérant n° 159 et suivants) : - La Commission constate une différence de prix, de l'ordre de 10 %, entre les stations-service sur et hors autoroutes et cette différence ne peut se justifier entièrement par des charges plus élevées encourues par les opérateurs de stations-service sur autoroute : « ... si le consommateur avait un choix réel entre les deux possibilités alternatives de ravitaillement, les prix s'aligneraient à un prix unique de marché, qui refléterait tant l'offre des stations sur autoroute que celle hors autoroute » (considérant n°163); - « La demande de carburants sur autoroute semble répondre à d'autres paramètres que la demande de carburants hors autoroute. Les automobilistes empruntent l'autoroute afin de bénéficier de la rapidité du trafic, ainsi que de tout autre service intégré à la structure d'exploitation d'une autoroute, tel que le ravitaillement en carburants, la restauration, le repos, etc. Une conséquence de (ce) choix est une sensibilité moindre aux prix des carburants ». Après avoir ainsi affirmé que la demande de ces services disponibles sur des sites autoroutiers est peu élastique au prix, la Commission souligne que « le fait de payer un péage renforce certainement leur réticence à perdre du temps à chercher une station moins chère hors autoroute mais n'est pas un facteur déterminant dans ce sens. Il n'y a donc pas de raisons de faire une distinction entre stations-service sur autoroute selon la présence d'un péage ou non. » La Commission fait aussi référence à une décision de l'autorité de concurrence allemande qui va dans le même sens pour les autoroutes allemandes qui ne sont pas soumises à péage (considérant n° 168); - La Commission note aussi la saisonnalité de la demande de carburant sur autoroute (considérant n° 171), ce qui paraît aussi être le cas de la restauration autoroutière (cfr supra, n° 66); - Les conditions d'entrée sont aussi différentes de celles du marché hors autoroute : en France les stations-service opèrent par sous-concession (considérant n°175). Cet argument est applicable par similarité mutatis mutandis dans le cas de la restauration de concession sur autoroute en Belgique. 73. Cet examen des positions de la Commission et de l'autorité allemande de concurrence n'est donc pas favorable à l'inclusion, dans la définition du marché, des restaurants situés hors autoroute : - Le type de clientèle est différent hors et sur autoroutes et les besoins des clients sont différents.La Commission et les autorités françaises de concurrence adhèrent à l'hypothèse que les automobilistes s'arrêtent prioritairement pour prendre du carburant, contrairement aux affirmations des parties notifiantes qui disent que la proportion d' automobilistes s'arrêtant sur une aire autoroutière principalement pour prendre du carburant est inférieur à 25 % (voir supra, n° 70). Or, si des automobilistes s'arrêtent prioritairement pour prendre du carburant, alors le service de restauration ou la vente d'aliments est une activité accessoire par rapport à la vente de carburant et dans ce cas, on ne peut pas soutenir que les restaurants hors autoroute exercent une pression concurrentielle sur les restaurants autoroutiers. Dans ce même cas, il semble qu'on pourrait soutenir que ces automobilistes se contenteront des produits « food » d'un petrol shop si l'aire autoroutière sur laquelle ils se sont arrêtés pour prendre du carburant n'est pas pourvue d'un restaurant sensu stricto; cette réflexion est cohérente avec l'analyse menée ci-dessus (n° 62), analyse selon laquelle il peut y avoir, le long d'un axe, des aires autoroutières équipées d'une station-service et d'un convenience shop sans qu'il y ait de restaurant autoroutier, et que ce type d'aire même non pourvue d'un restaurant permet une certaine alternance sur ces axes ou tronçons le long desquels tous les restaurants autoroutiers sensu stricto appartiendraient à Autogrill ou Carestel. - Les restaurants hors autoroute tels les restaurants urbains de proximité ne sont pas soumis à une procédure de concession ou de sous-concession et les services qu'ils offrent ne sont pas analysés comme des services publics alors que, en France par exemple, l'exploitation d'un restaurant d'autoroute peut être analysée comme une concession de service public (voir avis du Conseil d'Etat français du 16 mai 2002). 74. Dans la décision antérieure du Conseil du 2 octobre 2002 dans la concentration Carestel-Lunch Garden, le Conseil indique que les restaurants sur autoroute ne se trouvent pas sur le même marché que les restaurants hors autoroute (cfr supra, n° 29).75. Une certaine jurisprudence ne semble donc pas favorable à l'inclusion des restaurants hors autoroute dans la définition du marché pertinent.Il paraît cependant indiqué de tenir compte dans la présente affaire de l'apport de l'analyse de choc menée à la demande des parties notifiantes par RBB Economics (supra, n° 34 et 38). Ce type d'analyse n'était par contre pas disponible dans le cas de la concentration Carestel-Lunch Garden. Il n'est pas non plus fait mention de ce type d'analyse dans la décision Totalfina/Elf.

Le Conseil souligne que l'analyse de choc dans la présente affaire a été menée à trafic constant, c'est-à-dire en introduisant une variable de contrôle pour le volume du trafic. Par contre, il ne semble pas que l'analyse de choc de RBB Economics tienne compte des possibles effets induits par la restructuration menée par Carestel. Ainsi, dans les cas de baisses du chiffre d'affaires ou de réduction de prix sous la forme d'augmentations dans l'offre de coupons, on ne peut savoir avec certitude si une telle baisse a effectivement eu pour cause l'installation de restaurants hors autoroute (ou de convenience shops) ou si une telle baisse a été provoquée par des restructurations menées au sein de Carestel. 76. Même si un doute subsiste concernant l'inclusion des restaurants hors autoroute dans la définition du marché pertinent, le Conseil est d'avis que, dans certains cas, une pression concurrentielle est exercée par des restaurants situés hors autoroute. IV.D.3.4 Conclusion concernant la définition du marché aval 77. Pour le marché aval des prestations de services de restauration autoroutière, le Conseil ne retient pas la définition étroite du marché basée sur les ventes des seuls restaurants autoroutiers au sens strict (dimension du marché limitée à un montant annuel de euro 59 millions) mais inclut dans la définition du marché une partie des ventes des convenience stores ou petrol shops situés sur des aires autoroutières;selon une estimation prudente, la dimension du marché est comprise entre euro 74 et euro 78 millions par an (supra, n° 50).

Le Conseil est d'avis qu'il existe une concurrence limitée spatialement à chaque aire autoroutière et à ses environs, par la pression concurrentielle qu'exercent les shops et, dans certains cas, les restaurants situés hors autoroute, sur les ventes des restaurants sensu stricto situés sur les aires autoroutières.

Le Conseil estime aussi que la théorie des axes ou tronçons autoroutiers n'est pas adaptée au cas belge (supra, n° 65).

IV.D.4. Marché amont de la concession et de la sous-concession 78. L'analyse du marché pertinent en amont consiste à identifier les opérateurs qui peuvent entrer en concurrence pour la concession principale lors des appels d'offres ou, en cas de sous-concession à un restaurateur par la société pétrolière qui est le concessionnaire principal, à identifier les opérateurs qui peuvent négocier avec ce concessionnaire principal et s'associer à son offre. L'analyse déjà menée sur la restauration de concession (supra, nos 22 à 31) a permis d'établir que celle-ci doit être distinguée de la restauration collective (n° 22), et que ce marché de la restauration de concession doit être segmenté selon le type de lieu concédé à savoir : autoroutes, gares ferroviaires, aéroports, centres commerciaux (supra, nos 24 à 30). Le marché de la restauration sur autoroute se distingue aussi de la restauration traditionnelle hors autoroute (supra, n° 23 et nos 66 à 76).

Le marché amont se définit, dès lors, donc comme le marché de la concession ou dans la plupart des cas, de la sous-concession, de restauration autoroutière. 79. Quant à la définition du marché géographique, on l'analyse tant du côté de l'offre de concessions, c'est-à-dire au niveau des pouvoirs adjudicateurs qui lancent les appels d'offre, que du côté de la demande, c'est-à-dire au niveau des opérateurs participant à des remises d'offres.80. Du côté de l'offre de concessions, c'est-à-dire au niveau des pouvoirs adjudicateurs qui lancent les appels d'offre, il faut tenir compte de la structure institutionnelle belge et se demander si ce marché de la concession ou de la sous-concession de restauration autoroutière est national ou régional. Le pouvoir adjudicateur est en Belgique l'autorité régionale, à savoir : - en Région wallonne : SOFICO (Société wallonne de Financement complémentaire des Infrastructures) et le Ministère wallon de l'Equipement et des Transports, Direction générale des Autoroutes et des Routes. - en Région flamande : Ministerie van de Vlaamse Gemeenschap, Departement Leefmilieu en Infrastructuur, Administratie Wegen en verkeer, Afdeling Wegenbeleid en beheer. 81. La procédure d'appel d'offres dans les deux régions est cependant soumise partiellement à l'A.R. du 8 janvier 1996 qui constitue une réglementation nationale.

Ainsi, les opérateurs ne peuvent pas se trouver dans les conditions d'exclusion mentionnées dans cet A.R. L'autorité flamande déclare par ailleurs que la sélection des candidats est faite sur la base des informations requises conformément aux articles 17 à 19 de l'A.R. En ce qui concerne les critères d'évaluation, les dispositions formelles apparaissent différentes. En Wallonie, il existe un arrêté du gouvernement wallon de 1995, qui établit de différents types de concessions et les équipements dont elles doivent disposer (nombre de pompes, toilettes, superficie des restaurants,...). De telles dispositions concernant la classification des concessions n'apparaissent pas dans une disposition légale en Région flamande comme c'est le cas en Wallonie mais l'autorité adjudicatrice en Région flamande énumère quelques critères de sélection.

Il apparaît que les concessions mêmes semblent avoir une structure très similaire (station-service, petrol shop et restaurant). L'impact des différences sur le plan formel paraît donc plutôt limité. Les parties à la concentration ont donné la même analyse lors de l'audience du 4 septembre 2006. 82. Du côté de la demande c'est-à-dire au niveau des opérateurs pouvant participer avec succès à des remises d'offres, l'instruction a cherché à savoir si les appels d'offre sont accessibles à des opérateurs étrangers ou si le marché reste national. Cette démarche est dans la logique de la décision récente de la Commission dans l'affaire Abertis/Autostrade qui mentionne que les parties (Abertis et Autostrade) et la plupart des opérateurs interrogés estiment que le marché est au moins national et très probablement plus large (nos 28 et 29 dans cette décision du 22 septembre 2006, COMP/M.4249 - cfr supra 57). 83. Dans le cadre de l'instruction de la présente affaire, un opérateur français, Elior, mentionne que le marché évolue vers une dimension européenne puisqu'à la question du Rapporteur « Estimez-vous que des chaînes actives dans la restauration de concession sur autoroute dans des pays étrangers sont susceptibles d'être actives dans la restauration de concession sur autoroute en Belgique ? », la réponse est : « Elior estime qu'une chaîne de restauration étrangère est susceptible de s'implanter en Belgique.Le Groupe Elior est intéressé à un éventuel développement en Belgique, pays pour lequel Elior estime être en mesure de faire valoir son expérience européenne et internationale et apporter une valeur ajoutée... » (p. 210726 du dossier d'instruction et supra, n° 54).

Mais il y a un « caveat » dans la réponse d'Elior à la question 5 de la demande de renseignements adressée par le Service de la concurrence dans le cadre de l'instruction. Cette question 5 est formulée comme suit : « Selon vous, quelle est la dimension géographique de l'activité de restauration de concession sur autoroutes ? ». La réponse d'Elior est en effet : « Sur le plan de l'offre, il faut tempérer l'appréciation faite par la Commission en 1992, suivant laquelle les principales entreprises de restauration autoroutière sont peu présentes dans plusieurs Etats à la fois, les essais d'implantation sur des réseaux étrangers s'avérant en général des échecs. Cette appréciation correspond au constat d'une situation historique dont la pertinence s'estompe en 2006 pour les motifs ci-avant évoqués (Elior se réfère à sa réponse à la question 4 intitulée « Selon vous, quelle est la dimension géographique de l'activité de restauration de concession en général ? »), auxquels il faut ajouter pour le secteur autoroutier, l'impact des mutations stratégiques des grands groupes pétroliers. Toutefois, il reste difficile, même pour un concessionnaire expérimenté dans d'autres pays, de s'implanter en restauration autoroutière dans un pays tiers par gain d'appels d'offres sans base existante d'activité ». (p. 210724 du dossier d'instruction).

Selon SSP : « Les particularités propres à chaque pays (réglementation, conditions d'exploitation, organisation des réseaux autoroutiers, etc) rendent plus difficile l'accès à un marché pour une entreprise étrangère. Néanmoins, il convient d'admettre qu'un tel accès n'est pas impossible comme le démontrent les exemples d'Autogrill et SSP... Une entreprise étrangère sera intéressée par pénétrer le marché belge à condition de ne pas rencontrer des barrières trop importantes à l'entrée. Or, une position de quasi-monopole rendra pratiquement impossible la pénétration... » (p. 240774 du dossier d'instruction).

Texaco est d'avis, tout comme Elior, que des opérateurs étrangers pourraient entrer sur le marché; Texaco affirme cependant que c'est sans succès qu'il s'est adressé à des opérateurs étrangers (150559).

Total partage cet avis d'une ouverture du marché aux opérateurs étrangers : « Nous ne voyons aucune raison qui serait de nature à empêcher des acteurs étrangers de développer une activité de restauration sur concession autoroutière sur le marché belge. Une demande de collaboration avec notre société dans ce contexte serait certainement examinée avec soin. » (p. 140549) 84. Cette analyse mène le Conseil à la conclusion que le marché amont de la concession et de la sous-concession s'ouvre à des opérateurs implantés hors du territoire belge.Cette conclusion concorde avec l'avis des grands opérateurs étrangers interrogés, à l'exception de celui de SSP, ainsi qu'avec la position de la Commission dans le cas Abertis/Autostrade (supra n° 57).

IV.D.5. Conclusions générales de l'analyse du Conseil sur la délimitation des marchés 85. Le marché amont est à titre principal le marché des concessions des aires autoroutières et à titre accessoire le marché des sous-concessions des services de restauration autoroutière. L'ouverture du marché amont est importante pour assurer une concurrence effective à long terme sur le marché aval. Ainsi, dans le communiqué de presse relatif à sa décision Abertis/Autostrade susmentionnée, la Commission déclare notamment : « L'opération envisagée ne produirait qu'un seul chevauchement horizontal - sur le marché européen des concessions d'autoroutes à péage. Toutefois, la présence d'autres concurrents importants sur ce marché, le fait que celui-ci fonctionne par appel d'offres et l'absence de craintes exprimées par des tiers ont amené la Commission à considérer que l'opération envisagée ne donnerait pas lieu à des problèmes de concurrence sur ce marché » (communiqué de presse de la Commission IP/06/1244, 22 septembre 2006). C'est donc d'abord sur le marché amont des concessions et sous-concessions que doit porter l'analyse concurrentielle de l'opération.

Le marché aval des prestations de services de restauration autoroutière est défini par le Conseil, non pas de manière étroite par les ventes des seuls restaurants autoroutiers au sens strict, mais en incluant des ventes de convenience ou petrol shops situés sur des aires autoroutières.

Concernant la définition de la dimension géographique du marché, et en particulier la question de savoir si différentes aires autoroutières situées le long d'un axe autoroutier sont en concurrence, le Conseil est d'avis que la théorie des axes ou tronçons n'est pas adaptée au cas belge.

Le Conseil est d'avis qu'il existe une concurrence effective et limitée spatialement à chaque aire autoroutière et à ses environs.

Cette concurrence effective vient de la contrainte qu'exercent, sur les ventes des restaurants autoroutiers sensu stricto, non seulement les petrol shops situés sur les mêmes aires mais également, dans certains cas, les restaurants situés hors autoroute mais à proximité des sorties d'autoroute. Le Conseil se fonde à cet égard sur les spécificités du réseau autoroutier en Belgique.

V. Analyse concurrentielle de la concentration V. A. Analyse concurrentielle de la concentration sur le marché amont 86. L'importance de ce marché amont basé sur des appels d'offres (« bidding market »), soulignée ci-dessus (n° 80), a été confirmée dans la présente affaire par SSP lors de l'instruction : « L'entrée de SSP sur ce marché ne pourra se faire que de manière progressive compte tenu de la maturité du marché en ce sens qu'il n'y a plus de construction d'autoroutes en Belgique et peu de développement de nouvelles aires sur les autoroutes existantes.Ainsi, la pénétration du marché par un nouvel entrant est essentiellement limitée à l'obtention de concessions lors du renouvellement des concessions existantes » (p. 240772 du dossier d'instruction; voir aussi supra, n° 19). 87. D'après les opérateurs interrogés, il y a au moins deux barrières à l'entrée sur le marché amont : - L'intensité capitalistique (voir les chiffres dans Rapport, p.9 et note en bas de page 28). SSP déclare à ce sujet : « Une autre particularité des concessions autoroutières est la forte exigence en matière d'investissement qui empêche les P.M.E. de pouvoir accéder au marché autoroutier. Ainsi, on constate une intensité capitalistique de 100 à 150 % pour les concessions sur autoroute alors que cette intensité ne dépasse généralement pas 40 % pour les gares et aéroports. Le niveau élevé d'investissements nécessaires avant même de générer des résultats limite le nombre d'acteurs en mesure de répondre à un appel d'offres pour une concession autoroutière. » (p. 240770). - La nécessité de construire un réseau (Rapport p. 10, avis de SSP et de la SNCB) ou de disposer d'une base existante : « Toutefois, il reste difficile, même pour un concessionnaire expérimenté dans d'autres pays, de s'implanter en restauration autoroutière dans un pays tiers par gain d'appels d'offres sans base existante d'activité ». (avis d'Elior cité ci-dessus n° 78, extrait de p. 210724 du dossier d'instruction).

Or, d'après SSP, il deviendrait impossible de construire un tel réseau ou une telle base si la concentration projetée se réalisait : citation p. 240773 (réponse à question 9B) et réponse à question 11 : « Une entreprise étrangère sera intéressée par pénétrer le marché belge à condition de ne pas rencontrer des barrières trop importantes à l'entrée.Or, une position de quasi-monopole rendra pratiquement impossible la pénétration d'un tel marché, l'entreprise en monopole pouvant aisément bloquer toute nouvelle entrée tant sur le plan de la politique commerciale, des partenariats avec des pétroliers, que des partenariats avec d'autres enseignes (l'accord exclusif entre Quick et Carestel en est un exemple) » (p. 240774 du dossier d'instruction). 88. Le Conseil observe à cet égard que sont entrés très récemment sur ce marché amont de la concession ou de la sous-concession de restauration autoroutière sur l'aire d'Aische en Refail un pétrolier Q8 (site dans la direction Bruxelles-Namur de la E411) et SSP (à partir du 1/1/2007 sur le site dans la direction Namur-Bruxelles). Par ailleurs, de petits opérateurs comme Van Leeuw et Woopy Snack sont présents sur le marché. 89. La longueur des contrats de concession contribue à ralentir l'entrée de nouveaux opérateurs.En outre, il faut bien constater qu'au-delà de la durée de 20 à 30 ans prévue dans les contrats de concession, des prorogations ont eu lieu (Voir par ex. p. 130411, 130446 et 130460). Le concessionnaire principal est en principe une société pétrolière - sauf pour les aires de Groot-Bijgaarden et Vosselaar-Gierle où Carestel est concessionnaire - et la clause standard dans les sous-concessions prévoit que le contrat du sous-concessionnaire expire en même temps que la concession principale. 90. En conclusion, c'est la longueur des concessions et leur possible prorogation ou reconduction qui peut constituer une importante barrière à l'entrée de nouveaux opérateurs (infra, nos 108 et 116). V. B. Analyse concurrentielle de la concentration sur le marché aval V.B.1. Position des parties 91. Les parties notifiantes ont elles-mêmes indiqué des zones de chevauchement horizontal potentiel (« Potential overlap areas »).Ces zones sont décrites sur la carte « A1. Location of Autogrill, Carestel, Oil shops and off-motorway restaurants », planche 4 de l'étude RBB Economics, dont une version agrandie a été distribuée lors de l'audience du 4 septembre 2006. 92. Les parties se basent sur l'analyse de choc de RBB pour démontrer que la concentration n'est pas susceptible de mener à des hausses de prix même dans ces zones de chevauchement potentiel, parce que cette concentration ne supprime pas des contraintes concurrentielles existant avant la concentration.93. La concentration n'affecte nullement la contrainte concurrentielle que des petrol shops exercent sur les restaurants au sens strict.Les parties décrivent cette contrainte concurrentielle à l'aide des résultats de RBB supra n° 38). Les parties soulignent que tous les restaurants d'Autogrill et de Carestel dans les zones de chevauchement sont sur des aires pourvues d'un petrol shop (planches 4 et 7 de RBB). 94. Toutes les zones de chevauchement potentiel comprennent au moins un restaurant hors autoroute à proximité et la plupart de ces zones de chevauchement en ont même plusieurs.Or, l'entrée d'un tel restaurant hors autoroute a un impact négatif sur les ventes de restaurants d'Autogrill et sur les prix pratiqués par ces restaurants d'Autogrill (planches 9 et 10 de RBB; cfr supra, n° 68) et la concentration n'affecte en rien de telles entrées. 95. Avant la concentration, les restaurants d'Autogrill et de Carestel n'exercent pas de contrainte concurrentielle les uns sur les autres, c'est-à-dire il n'y a pas d'interaction concurrentielle (« competitive interaction ») entre Carestel et Autogrill (planches 21 à 24).On ne doit dès lors pas craindre d'effets unilatéraux suite à cette concentration (planches 25 et 26 de RBB).

V.B.2. Position du Rapporteur 96. La concentration est le rachat par Autogrill de son principal concurrent dans le secteur de la restauration autoroutière en Belgique, ce qui créerait ou renforcerait une position dominante par la transformation d'un quasi-duopole en un quasi-monopole sur le marché de la restauration autoroutière. V.B.3. Position d'un tiers 97. Pour SSP, il pourrait même s'agir d'un cas de création d'une position de super-dominance.La transformation d'une position dominante symétrique vers une super-position dominante a déjà été invoquée dans la jurisprudence européenne d'après SSP, qui cite les conclusions de l'avocat général Fennelly dans l'affaire Compagnie maritime belge et consorts/Commission (Rec., 2000, p. I-1365, § 137).

SSP évoque aussi l'approche des axes ou tronçons pour affirmer que toute concurrence serait anéantie sur divers tronçons d'autoroutes où coexistent actuellement Autogrill et Carestel, en particulier (observations complémentaires du 19 septembre de SSP, p. 2) : - Aires de Mannekesvere (Autogrill) et de Jabbeke (Carestel), - Aires de Saint-Ghislain (Carestel), de Thieu (Autogrill), de Nivelles (Carestel) et de Ruisbroek (Autogrill), - Aires de Bierges (Autogrill) et de Aisches en Refail (sens Bruxelles/Namur) (Carestel).

Lors de l'audience du 26 septembre 2006, SSP a aussi distribué des schémas à l'appui de cette thèse basée sur la théorie des axes.

V.B.4. Analyse du Conseil V.B.4.1. Clauses d'approvisionnement et contrainte concurrentielle des petrol shops 98. Le Conseil accepte d'inclure une partie des ventes des petrol shops ou convenience stores dans la définition du marché pertinent. L'analyse menée par le Conseil pour fonder cette conclusion a notamment porté sur les clauses restrictives de concurrence liant les shops aux restaurants autoroutiers (supra, n° 38 et 39).

Le premier type de clause interdit aux shops de vendre des produits identiques à ceux offerts par le restaurant (clause de non-concurrence). 99. Un examen des contrats entre les entreprises gérant les shops et les entreprises gérant les restaurants révèle au demeurant certaines nuances dans la formulation de ces clauses.Ainsi, la clause du contrat précise parfois que l'exploitation du convenience store de la compagnie pétrolière est confiée au restaurateur, mais que ce n'est ni pour son compte ni à son nom (p. 160687 du dossier d'instruction).

Parfois, un contrat prévoit explicitement que, si la Compagnie pétrolière vend certains produits alimentaires, elle paiera à l'entreprise gérant le restaurant, AC par exemple, une indemnité (p.160662 du dossier d'instruction).

Certains cahiers des charges spéciaux énoncent que les petrol shop peuvent vendre des plats froids et aussi chauds, ainsi que des plats préparés. Soit ces clauses sont formulées en termes assez généraux, par exemple, le shop peut commercialiser 24 h/24 des produits de consommation courante de nature à répondre aux besoins des usagers (voir par exemple p.571015 du dossier d'instruction). Soit ces clauses sont particulières, par exemple stipulent que c'est en dehors des heures d'ouverture du restaurant que le shop peut prévoir un minimum de restauration en plats froids et préparés (voir par exemple p. 571111 du dossier d'instruction). 100. Alors que les clauses qui interdisent aux petrol shops de vendre des produits identiques à ceux offerts par le restaurant sont considérées par le Conseil comme légitimes afin d'éviter une pure concurrence en prix dans le contexte particulier de concurrence entre deux points de vente sur une aire autoroutière, au contraire, les clauses obligeant les shops à s'approvisionner exclusivement auprès du restaurant de la même aire sont susceptibles de diminuer l'incitation et la capacité du shop à exercer une pression concurrentielle sur l'offre du restaurant (supra, n° 44). Certes, dans certains contrats, la clause d'exclusivité dans l'approvisionnement peut être assouplie par exemple en cas d'accord des deux parties (p. 150612 et 150630 du dossier d'instruction).

Il n'en reste pas moins que, vu l'importance de préserver et de favoriser la contrainte concurrentielle que certains petrol shops exercent sur les restaurants sensu stricto situés sur la même aire, des remèdes sont requis en ce qui concerne les clauses d'approvisionnement liant les petrol shops et les restaurants (voir infra, n° 110).

V.B.4.2 Contrainte concurrentielle de restaurants situés hors autoroute 101. Le Conseil estime qu'il est indiqué de tenir compte dans la présente affaire de l'apport d'une analyse de choc qui a été menée à la demande des parties notifiantes dans le cadre de la présente affaire alors que ce type d'étude n'était pas disponible pour les cas précédents (supra, n° 75).Cette étude indique que l'entrée d'un nouveau restaurant hors autoroute peut exercer une pression concurrentielle (supra, n° 68 en 69). 102. Ce résultat de l'analyse de choc est conforme aux attentes vu certaines spécificités du réseau autoroutier belge : L'absence de péage. La faible différenciation entre le réseau autoroutier et le réseau routier, vu la faible distance entre les sorties successives d'autoroute (supra, n° 64).

La proportion relativement élevée de « short haul » et « medium haul » runners, en particulier dans des zones de chevauchement potentiel entre les restaurants AC et les restaurants Carestel (étude RBB, planche 20). Or, ce sont les « short haul » et « medium haul » runners (navetteurs) qui sont les plus susceptibles de sortir de l'autoroute pour prendre un repas (supra, n° 66).

V.B.4.3 Théorie des axes 103. Le Conseil entend relativiser fortement la théorie des axes ou tronçons autoroutiers dans le contexte de la structure du réseau autoroutier en Belgique sur la base des arguments suivants (supra, nos 60 à 65) : - Sur toutes les aires équipées de restaurants Carestel ou AC, il y a - sauf dans un cas - un convenience shop (planche 5 de l'étude de RBB Economics) qui peut exercer une pression concurrentielle sur le restaurant autoroutier;la relativisation de la théorie des axes requiert donc que cette pression concurrentielle exercée par les shops soit préservée et favorisée (supra, n° 100). - Il peut y avoir le long d'un axe des aires autoroutières équipées d'une station-service et d'un convenience shop sans qu'il y ait de restaurant autoroutier. De telles aires peuvent constituer une alternative à des aires pourvues d'un restaurant, surtout si on considère que des automobilistes qui s'arrêtent prioritairement pour prendre du carburant se contenteront des produits « food » d'un petrol shop dès lors que l'aire autoroutière sur laquelle ils se sont arrêtés pour prendre du carburant n'est pas pourvue d'un restaurant sensu stricto. De telles aires autoroutières équipées d'une station-service et d'un convenience shop et dépourvues de restaurant autoroutier peuvent donc être source d'alternance sur ces axes ou tronçons sur lesquels tous les restaurants autoroutiers appartiendraient à la nouvelle entité Autogrill/Carestel.

Le Conseil étant d'avis que la théorie des axes n'est pas adaptée à la réalité du marché belge de la restauration autoroutière, il ne retient pas les arguments avancés par SSP concernant la monopolisation de certains tronçons autoroutiers par la nouvelle entité issue de la fusion (supra, n° 97). 104. S'inspirant de la jurisprudence de la Commission dans l'affaire TotalFina/Elf, le Conseil est sérieusement préoccupé par l'effet préjudiciable que pourrait créer la concentration sur la situation concurrentielle des restaurants indépendants dits intercalés. En cas d'admissibilité de la concentration sans conditions, le réseau des restaurants AC/Carestel aurait une telle extension géographique que la nouvelle entité pourrait surveiller le comportement de chaque concurrent et punir le concurrent qui aurait une politique de prix agressive sur un axe autoroutier. Si un restaurant concurrent est intercalé entre deux restaurants AC/Carestel, le risque est que la nouvelle entité créée par la concentration puisse cibler ses représailles sur le seul restaurant intercalé sans affecter les autres restaurants concurrents; de telles représailles ciblées seraient une menace plus crédible que des représailles affectant l'ensemble du marché et pourraient donc inhiber toute concurrence en prix.

Ces préoccupations concernant la position d'une entreprise tierce exploitant un restaurant sur une aire qui est intercalée entre deux restaurants de la nouvelle entité, s'applique à trois situations : 1. Le restaurant « intercalé » de [Confidentiel - A] exploité par [Confidentiel] sur la E[Confidentiel] entre [Confidentiel] et [Confidentiel] jusqu'au [Confidentiel]. Les aires contiguës, avec indication de la distance approximative, sont : Pour la consultation du tableau, voir image [Confidentiel] [Confidentiel] Les concessions pour ces aires de [Confidentiel - Z] et [Confidentiel - Y] sont déjà renouvelées à partir du [Confidentiel]. 2. Le restaurant « intercalé » de [Confidentiel - C] sur la E[Confidentiel] exploité par [Confidentiel] jusqu'au [Confidentiel]. Les aires contiguës, avec indication de la distance approximative, sont : Pour la consultation du tableau, voir image 3. Restaurant de [Confidentiel - E] exploité par [Confidentiel] sur la E[Confidentiel] jusqu'en [Confidentiel]. Ce restaurant est : - intercalé entre [Confidentiel - F] sur la E[Confidentiel] (via échangeur de [Confidentiel]) et [Confidentiel - W] sur la E[Confidentiel], - adjacent (via échangeur de [Confidentiel]) au doublon [Confidentiel - F] - [Confidentiel - G] sur la E[Confidentiel].

V.B.4.4. Accords avec les compagnies d'autocar 105. Le Conseil a aussi des préoccupations concernant les effets des accords avec des compagnies d'autocar.106. Autogrill a deux accords en vigueur avec des compagnies d'autocars néerlandaises en vertu desquels les compagnies s'engagent à arrêter leurs autocars sur un site déterminé localisé sur le territoire belge et sur l'itinéraire du trajet parcouru, par exemple sur le trajet Pays-Bas - Espagne ou Pays-Bas - Disneyland;le site déterminé et le repas qui y est pris - petit-déjeuner, déjeuner ou dîner - sont choisis par la compagnie d'autocar en fonction du point kilométrique de ce site sur le trajet parcouru et en fonction de l'heure de passage sur ce site. Ces accords ne prévoient pas d'exclusivité en faveur des restaurants d'Autogrill, au sens où aucune clause d'exclusivité n'interdit aux autocars des compagnies concernées de s'arrêter, par exemple, pour le petit-déjeuner dans un restaurant d'Autogrill et pour le déjeuner et dîner dans le restaurant d'un concurrent d'Autogrill situé ou non sur une autoroute.

En vertu de ces accords, en échange de leur engagement de s'arrêter sur un site où le restaurant appartient à Autogrill, ces compagnies d'autocars obtiennent une ristourne sur les différentes prestations de restauration en fonction du volume annuel qu'elles représentent.

La pratique de rabais liés au volume des prestations suscite la question d'un possible effet d'exclusion du marché au détriment des concurrents. 107. Tant Autogrill que Carestel ont mis sur pied des programmes de fidélité qui visent directement les chauffeurs d'autocar et parfois même les guides, et non les compagnies d'autocar. Autogrill a élaboré un programme de fidélité au niveau européen (Italie, France, Benelux, Espagne, Suisse, Slovénie et Autriche) dénommé « Groups Service » octroyant un certain nombre d'avantages aux chauffeurs qui se présentent dans un restaurant Autogrill avec un groupe d'au moins 20 personnes.

Il existe aussi des programmes de fidélité ad hoc pour des sites spécifiques. Autogrill n'a mis en place qu'un de ces programmes ad hoc, pour l'établissement d'Arlon. Le programme de fidélité est en quelque sorte comparable aux programmes « frequent flyers » des compagnies aériennes.

Carestel dispose également de programmes de fidélité pour les chauffeurs d'autocars et les guides.

De tels programmes ayant pour objet ou pour effet de fidéliser une clientèle suscitent la question d'un possible effet d'exclusion du marché au détriment des concurrents.

V. C. Synthèse des préoccupations du Conseil 108. Les préoccupations du Conseil sur les différents marchés sont les suivantes. Le marché amont des concessions et sous-concessions est important parce que la pénétration du marché par un nouvel entrant est essentiellement limitée à l'obtention de concessions lors du renouvellement des concessions existantes. Le Conseil est préoccupé par l'effet sur l'entrée de nouveaux opérateurs, de la longueur des contrats de concession. Cet effet est aggravé par de possibles prorogations.

Sur le marché aval des services de restauration autoroutiers le Conseil estime que : - Il est important de préserver et de favoriser la contrainte concurrentielle que certains shops peuvent exercer sur les restaurants sensu stricto situés sur la même aire. Ceci requiert des remèdes en ce qui concerne les clauses d'approvisionnement liant ces shops et les restaurants; - Il est important de sauvegarder la position d'entreprises tierces exploitant les restaurants de [Confidentiel - A, Confidentiel - C et Confidentiel - E], qui sont situés sur une aire qui est intercalée entre deux restaurants de la nouvelle entité; - Il faut éviter que des pratiques de rabais liés au volume des prestations fournies à des compagnies d'autocar ainsi que des programmes ayant pour objet ou pour effet de fidéliser une clientèle de chauffeurs et de guides n'exercent un effet d'exclusion du marché au détriment des concurrents. 109. Il appartient au Conseil de vérifier que ces préoccupations concernant les effets de la présente concentration sur les différents marchés concernés soient adéquatement rencontrées par les engagements proposés par les parties de telle sorte que la présente concentration ne crée ni ne renforce une position dominante et n'ait pas pour conséquence qu'une concurrence effective serait entravée de manière significative dans le marché belge ou une partie substantielle de celui-ci. VI. Adéquation et proportionnalité des engagements proposés VI. A. Adéquation des engagements proposés VI.A.1. Concernant les clauses d'approvisionnement 110. L'analyse concurrentielle a mis en avant l'importance de préserver et de favoriser la contrainte concurrentielle que certains petrol shops ou convenience stores peuvent exercer sur les restaurants sensu stricto situés sur la même aire autoroutière. Alors que les clauses qui interdisent aux shops de vendre des produits identiques à ceux offerts par le restaurant sont considérées par le Conseil comme légitimes afin d'éviter une pure concurrence en prix dans le contexte particulier de concurrence entre deux points de vente sur une aire autoroutière, au contraire, les clauses qui obligeraient les shops à s'approvisionner exclusivement auprès du restaurant sensu stricto situé sur la même aire autoroutière sont susceptibles de diminuer l'incitation et la capacité des shops à concurrencer l'offre du restaurant (supra, nos 44 et 100).

Les parties prenant l'engagement d'abroger ces clauses et de renoncer pour l'avenir à conclure de telles clauses, la contrainte concurrentielle que certains petrol shops peuvent exercer sur le restaurant autoroutier situé sur le même site sera préservée.

VI.A.2. Concernant les aires autoroutières intercalées 111. La renonciation d'Autogrill ou de Carestel à participer à l'appel d'offres relatif à la concession de [Confidentiel - B] au moment de son échéance sauvegarde la position de l'aire de [Confidentiel - A] puisque [Confidentiel - B] est une des aires contiguës à [Confidentiel - A].L'option de [Confidentiel - B] est la meilleure puisque les autres aires contiguës à [Confidentiel - A] viennent d'être renouvelées. 112. La renonciation d'Autogrill ou de Carestel à participer à l'appel d'offres relatif à la concession de [Confidentiel - D] au moment de son échéance sauvegarde la position de l'aire de [Confidentiel - C] puisque [Confidentiel - D] est une des aires contiguës à [Confidentiel - C].L'option de [Confidentiel - D] est la meilleure parce que : - l'autre aire contiguë à [Confidentiel - C] sur la E[Confidentiel], à savoir [Confidentiel - X], comprend un restaurant de moindre importance que celui de [Confidentiel - D] en termes de chiffres d'affaires; - [Confidentiel - D] est en même temps une aire contiguë à et proche de celle de [Confidentiel - V] sur la E[Confidentiel]. 113. La renonciation à participer à l'appel d'offre relatif à l'aire de [Confidentiel - G] au moment de son échéance le [Confidentiel] ou la renonciation à participer à l'appel d'offre de l'aire de [Confidentiel - F] venant à échéance en [Confidentiel] sauvegarde la position de l'aire de [Confidentiel - E] puisque ces aires de [Confidentiel - G] et de [Confidentiel - F] constituent un doublon situé sur la E[Confidentiel] mais adjacent, via l'échangeur de [Confidentiel], à l'aire de [Confidentiel - E] située sur la E[Confidentiel].114. D'autres sites autoroutiers peuvent sembler intercalés mais n'ont pas fait l'objet de préoccupations du Conseil pour les raisons suivantes : - Le site de [Confidentiel - I] sur la A[Confidentiel] peut sembler intercalé entre les aires de [Confidentiel - J] et de [Confidentiel - K].Cependant, le site de [Confidentiel - I] ne constitue une alternative au site de [Confidentiel - J] que pour une partie minime du trafic passant par l'aire de [Confidentiel - J] et quittant l'autoroute [Confidentiel] pour emprunter la A[Confidentiel]. Le site de [Confidentiel - K] ne constitue pas une alternative au site de [Confidentiel - I] pour le trafic passant par l'aire de [Confidentiel - I] et se dirigeant vers [Confidentiel]; en fait, le site de [Confidentiel - K] ne constitue une alternative au site de [Confidentiel - I] que pour le trafic se dirigeant vers [Confidentiel]. - Le site de [Confidentiel - L] n'est pas intercalé entre deux aires occupées par Autogrill ou Carestel, parce qu'une des aires contiguës à [Confidentiel - L] est une aire - située [Confidentiel - Pays], tout près de la frontière belgo-[Confidentiel] à hauteur des localités de [Confidentiel] et [Confidentiel] - sur laquelle les restaurants ne sont pas exploités par Autogrill ni Carestel. - Le site de [Confidentiel - H] est certes intercalé entre les aires de [Confidentiel - N] et [Confidentiel - O], mais la distance entre [Confidentiel - H] et [Confidentiel - O] excède 70 kilomètres. - Le site de [Confidentiel - Y] est certes intercalé entre les aires de [Confidentiel - P] et de [Confidentiel - N], mais la distance le séparant de [Confidentiel - N] peut être considérée comme suffisante. 115. Les dispositions particulières prévoyant que la renonciation aux clauses d'approvisionnement ne s'appliquerait pas aux contrats de franchise n'ont pas pour effet d'affaiblir la portée des conditions et charges imposées par le Conseil.Elles ont pour objet d'éviter de décourager la conclusion de contrats de franchise avec des parties tierces. En interdisant à Autogrill ou Carestel d'imposer au franchisé des contrats de franchise exclusifs, c'est-à-dire en interdisant à Autogrill ou Carestel d'imposer au franchisé d'exploiter le restaurant sous l'enseigne exclusive AC ou Carestel, l'objectif est de favoriser l'entrée de ces franchisés sur le marché de la restauration autoroutière.

Ainsi, en réponse à la question « Avez-vous des commentaires d'ordre concurrentiel à émettre à propos de la présente opération, la réponse de Quick est : « J'espère que l'opération en question permette à des sociétés comme la nôtre d'exister sur les lieux de déplacement des consommateurs et que la nouvelle « entité » n'en profite pas pour imposer ses marques propres de restauration ».

VI.A.3. Concernant l'accès au marché amont et la fréquence de renouvellement des concessions et sous-concessions. 116. Les engagements proposés (voir D et E) ont pour objectif et pour effet d'ouvrir plus rapidement aux tiers les appels d'offre pour le renouvellement des concessions et d'assurer une publicité adéquate en vue de permettre la candidature de tiers à des contrats d'exploitation de restaurants autoroutiers.Ces remèdes sont importants et prioritaires dans la mesure où ils visent à améliorer le fonctionnement de ce marché amont basé sur des appels d'offres (« bidding market ») (cfr supra n° 32).

VI.A.4. Concernant les accords avec les compagnies d'autocar 117. Les engagements souscrits par les parties doivent porter sur une durée suffisante pour permettre à des concurrents de disposer d'une période assez longue pour pouvoir se constituer une « base d'activité », quelle que soit la politique de marques ou d'enseignes qui sera adoptée par la nouvelle entité. Les engagements sont : - Renonciation à toute clause d'exclusivité dans les nouveaux accords conclus par Autogrill avec les compagnies d'autocars et élimination des clauses d'exclusivité existantes. - Maintien de la situation prévalant avant la concentration en ce qui concerne l'étendue de ces accords, c'est-à-dire abstention d'extension de ces clauses de ristourne aux restaurants de Carestel. - Maintien de la situation prévalant avant la concentration en ce qui concerne les programmes de fidélité pour une durée en principe indéterminée, quelle que soit la politique de marques ou d'enseignes qui sera adoptée par la nouvelle entité.

VI. B. Proportionnalité des remèdes imposés VI.B.1. Caractère non proportionné d'obligations de désinvestissement massif 118. L'obligation qui serait faite à Autogrill de vendre une partie substantielle - voire la quasi-totalité comme le demande SSP - des restaurants autoroutiers de Carestel n'est pas nécessaire, vu l'analyse qu'a faite le Conseil des contraintes concurrentielles que les petrol shops et les restaurants hors autoroutes exercent sur les restaurants, pour éviter que la présente concentration ne crée ni ne renforce une position dominante et n'ait pas pour conséquence qu'une concurrence effective serait entravée de manière significative dans le marché belge ou une partie substantielle de celui-ci. Une telle obligation de désinvestissement massif aurait un effet négatif sur les avantages économiques générés par la concentration. En particulier, la reprise de la plus grande partie possible des restaurants autoroutiers de Carestel semble utile pour permettre une revalorisation du réseau de restaurants autoroutiers de Carestel. 119. La condition selon laquelle les parties seraient obligées de vendre un restaurant sur deux de telle sorte qu'une alternance soit assurée sur tout axe autoroutier et de telle sorte que la part de la nouvelle entité sur le marché défini de manière étroite soit inférieure à 50 %, serait un remède non proportionné aux préoccupations de concurrence, eu égard aux motifs de la présente décision conduisant à rejeter la théorie des axes ou tronçons autoroutiers dans le contexte de la restauration sur le réseau autoroutier belge.120. La revente de certains restaurants spécifiques sur la base de cette théorie des axes est aussi un remède non proportionné aux préoccupations de concurrence, eu égard au fait que la théorie des axes n'est pas adaptée et aux résultats de l'analyse de choc menée à la demande des parties notifiantes par RBB. VI.B.2. Caractère non proportionné d'un refus d'admissibilité pour part de marché importante 121. SSP a attiré l'attention du Conseil sur la possibilité que, Autogrill rachetant son principal concurrent dans le secteur de la restauration autoroutière en Belgique, il puisse s'agir d'un cas de renforcement d'une position dominante sous la forme d'une constitution d'une super-position dominante (transformation d'un quasi-duopole vers un quasi-monopole).122. La seule prise en compte de la part de marché des entreprises à l'issue de la concentration n'est pas suffisante pour déterminer la décision de l'autorité de concurrence (voir par exemple E.Combe, « Economie et politique de la concurrence », Dalloz, 2005, pp. 374 - 375).

La jurisprudence de la Commission européenne et le nouveau Règlement sur le contrôle des concentrations traduisent au demeurant un effort pour évaluer une concentration sur la base de ses effets, et pas seulement sur la base de la structure de marché qui résulterait de l'admissibilité de ladite concentration. 123. L'« efficiency defence » est de nature à justifier une décision d'admissibilité d'une concentration, même dans le cas d'une part de marché très élevée. Dans le cas de concentration impliquant Whirlpool et Maytag dans le secteur des gros électroménagers (« white goods »), l'acteur le plus important du marché a acquis le troisième acteur, l'entité ainsi constituée en cas d'admissibilité de la concentration ayant une part de marché de 70 %. L' « efficiency defence » a été admis sur la base des arguments suivants : - La société-cible n'était pas une « failing firm » mais était en déclin et manquait de moyens pour se développer. - Il existait des capacités de production disponibles à coûts modérés et accessibles à des concurrents. (voyez au sujet de cette affaire : Diana Moss, Antitrust Analysis of Whirlpool's Proposed Acquisition of Maytag, January 17, 2006, The American Antitrust Institute (AAI), www.antitrustinstitute.org).

VII. Conclusion générale et décision du Conseil Il résulte de ce qui précède que les engagements présentés par les parties rencontrent les préoccupations du Conseil.

Eu égard à ces engagements, dont le respect sera garanti par les conditions et charges qui sont imposées par la présente décision, le Conseil doit constater que la concentration n'a pas pour conséquence qu'une concurrence effective serait entravée de manière significative dans le marché belge ou une partie substantielle de celui-ci, et quelle n'y crée ou n'y renforce pas de position dominante.

La concentration doit dès lors être déclarée admissible.

Par ces motifs, Le Conseil de la concurrence, Constate que la concentration tombe sous le champ d'application de la loi belge, Impose, tant à la société Autogrill S.p.A., à la SA Carestel Group et aux sociétés contrôlées directement ou indirectement par elles, qu'aux ayants droits de chacune de ces sociétés - dénommées ci-après : les parties -, les conditions et charges suivantes visant à garantir que les parties respectent les engagements présentés, qui sont joints en annexe de la présente décision : - A Ordonne aux parties de mettre un terme à toutes les clauses d'approvisionnement qui les lient aux compagnies pétrolières, notamment les clauses d'approvisionnement relatives aux aires de [secrets d'affaires], et interdit aux parties d'insérer de telles clauses dans les futurs contrats avec les compagnies pétrolières, à l'exception des clauses d'approvisionnement qui font partie intégrante des contrats de franchise se rapportant aux enseignes AC Restaurants, Carestel, ou à toute autre enseigne appartenant aux parties, entre les parties en tant que franchiseur et les compagnies pétrolières en tant que franchisée, - B Interdit aux parties de participer aux appels d'offres relatifs aux concessions de [Confidentiel - B] (à son échéance du [Confidentiel]), de [Confidentiel - D] (à son échéance du [Confidentiel]), et de [Confidentiel - G] (à son échéance du [Confidentiel]), ou d'exploiter le restaurant sis sur chacune de ces aires moyennant un contrat d'exploitation avec le concessionnaire principal, quelle qu'en soit la forme, Autorise toutefois les parties à exploiter le restaurant sis sur l'aire de [Confidentiel - G] à partir du [Confidentiel], pour autant qu'aucun autre restaurateur ne se soit manifesté pour reprendre cette exploitation; interdit, dans ce cas, aux parties de participer à l'appel d'offres relatif à la concession de [Confidentiel - F] (à son échéance le [Confidentiel]) ou d'exploiter le restaurant sis sur cette aire moyennant un contrat d'exploitation avec le concessionnaire principal, quelle qu'en soit la forme, Dit que ces interdictions de participer aux appels d'offres pourraient être modulées ou levées par le Conseil de la concurrence, à condition qu'avant les échéances des concessions mentionnées ci-dessus, une des parties n'exploite plus un autre restaurant situé sur une aire contiguë à celle qui a motivé l'interdiction, c'est-à-dire l'aire de [Confidentiel - A] pour l'interdiction portant sur [Confidentiel - B], l'aire de [Confidentiel - C] pour l'interdiction portant sur [Confidentiel - D], ou l'aire de [Confidentiel - E] pour l'interdiction portant sur [Confidentiel - G], ou, à défaut, sur [Confidentiel - F], Dit que les parties peuvent demander l'autorisation du Conseil de la concurrence de participer à un deuxième appel d'offres ou à une deuxième consultation, si à l'issue du premier appel d'offres ou de la première consultation se rapportant à une des trois aires - [Confidentiel - B, D ou F] - aucun autre restaurateur ne s'est manifesté; dans ce cas, ordonne aux parties de demander cette autorisation par une requête motivée décrivant les raisons pour lesquelles l'appel d'offres ou la consultation s'est avérée infructueuse, Interdit aux parties de solliciter la prorogation ou la reconduction automatique ou tacite d'une des concessions venues à échéance indiquées ci-dessus, ou d'accepter ou de se prévaloir d'une prorogation ou d'une reconduction automatique ou tacite qui a été convenue entre l'autorité concédante et le concessionnaire principal, - C Interdit aux parties d'inclure dans les contrats de franchise l'obligation pour le franchisé d'exploiter le restaurant sous l'enseigne exclusive appartenant aux parties, - D Interdit aux parties de solliciter la prorogation ou la reconduction automatique ou tacite de toute autre concession venue à échéance, Interdit également aux parties d'accepter ou de se prévaloir d'une prorogation ou d'une reconduction automatique ou tacite convenue entre l'autorité concédante et le concessionnaire principal sans autorisation préalable du Conseil de la concurrence; ordonne aux parties de demander cette autorisation par une requête motivée mentionnant les raisons techniques qui sont à la base de la prorogation et des contraintes grevant les concessionnaires, - E Interdit aux parties de participer aux appels d'offres relatifs aux concessions de [Confidentiel - A] et de toute autre aire actuellement gérée par un opérateur indépendant, et plus précisément aux appels d'offres relatifs aux aires énumérées dans le document d'engagements des parties joint à la présente décision, ou d'exploiter le restaurant sis sur ces aires moyennant un contrat d'exploitation avec le concessionnaire principal, quelle qu'en soit la forme, pour un délai de dix ans à partir de la notification de la présente décision aux parties notifiantes; autorise toutefois les parties à demander la levée de cette interdiction au Conseil de la concurrence après un délai de cinq ans à partir de la notification de la présente décision aux parties notifiantes, - F Interdit aux parties de conclure des contrats d'exclusivité avec les compagnies d'autocar, Ordonne aux parties d'abroger les clauses d'exclusivité avec les compagnies d'autocar dans un délai de six mois à partir de la notification de la présente décision aux parties notifiantes;

Interdit à chacune des parties d'étendre les contrats avec les compagnies d'autocar valant pour un ou plusieurs de ses restaurants à d'autres restaurants des parties, Interdit à chacune des parties d'étendre l'avantage des ristournes d'un programme de fidélité à des visites à d'autres restaurants des parties, et ce aussi longtemps que des enseignes distinctes sont maintenues; dit que les parties peuvent demander au Conseil de la concurrence de lever cette interdiction à l'issue d'un délai de cinq ans à partir de la notification de la présente décision aux parties notifiantes au moyen d'une requête motivée au regard de l'importance de ces types de programmes sur le marché et de la situation concurrentielle existante au moment de la demande, - G Ordonne à chacune des parties de participer aux appels d'offres relatifs à des concessions d'aires autoroutières, ou à des consultations ou des négociations en vue d'exploiter le restaurant sis sur ces aires moyennant un contrat d'exploitation avec le concessionnaire principal, quelle qu'en soit la forme, en tant qu'entité économique autonome, jusqu'à ce qu'elles soient intégrées en une seule entité juridique, quelle que soit la modalité de cette intégration, Déclare la concentration assortie de ces conditions et charges admissible.

Ainsi décidé et prononcé par une chambre du Conseil de la concurrence composée de M. Stefaan Raes, président du Conseil de la concurrence et président de la chambre, et Madame Dominique Smeets et M. Christian Huveneers, membres du Conseil de la concurrence, en date du 9 octobre 2006.

Annexe faisant partie intégrante de la décision : Lettre du représentant des parties notifiantes du 6 octobre 2006 (une page) et document d'engagements (sept pages).

Annexe Lettre du représentant des parties notifiantes du 6 octobre 2006 (une page) M. Stefaan Raes, Président Mme Dominique Smeets, M. Christian Huveneers, Membres Conseil de la ConcurrenceNorth Plaza A Boulevard Albert II 9 1210 Bruxelles Bruxelles, le 6 octobre 2006 Concerne : Affaire Autogrill S.p.A./Carestel Group CA, Conc C/C06/0030 Monsieur le Président, Madame, Monsieur, Dans le cadre de l'opération sous rubrique, veuillez trouver ci-joint un document d'engagements dûment signé par la société Autogrill et paraphé sur chaque page. Les originaux seront transmis lundi matin par courrier.

Nous vous prions d'agréer, Monsieur le Président, Madame, Monsieur, l'expression de notre très haute considération.

Massimo Merola Document d'engagements Concerne : Affaire Autogrill S.p.A./Carestel Group CA, Conc C/C06/0030 Les présents engagements prendront effet dès la réception de la décision du Conseil qui déclare admissible la concentration en objet, au sens de l'article 33, § 2, a, de la Loi sur la protection de la concurrence économique coordonnée le 1er juillet 1999 (ci-après « la Décision d'autorisation ») tant pour les engagements concernant Autogrill S.p.A. (« Autogrill ») que pour ceux concernant Carestel Group CA (« Carestel »).

A) Clauses d'approvisionnement L'effet sur le marché des clauses d'approvisionnement entre restaurateurs et compagnies pétrolières doit être examiné du point de vue de la concurrence à l'intérieur d'une même aire de service. Il s'agit là d'une préoccupation qui prend en compte la concurrence exercée par les compagnies pétrolières. Par conséquent, Autogrill s'engage, pour son compte et pour le compte de Carestel, à : - mettre un terme à toutes les clauses d'approvisionnement liant les compagnies pétrolières à Autogrill ou Carestel, ou toutes autres entreprises contrôlées directement ou indirectement par Autogrill et Carestel ou les ayants droit de ces entreprises, et notamment celles relatives aux aires de (...), moyennant un préavis suivant les usages commerciaux en vigueur; - renoncer à insérer de telles clauses dans les futurs contrats entre Autogrill/Carestel et les compagnies pétrolières, et ce pour une période indéterminée (sauf révision de cet engagement par le Conseil de la Concurrence), exception faite pour les clauses d'approvisionnement qui font partie intégrante des contrats de franchise pour les enseignes AC Restaurants et Carestel (ainsi que tout type d'enseigne appartenant à Autogrill ou Carestel ou à toutes autres entreprises contrôlées directement ou indirectement par Autogrill et Carestel ou aux ayants droit de ces entreprises)entre Autogrill/Carestel, ou toutes autres entreprises contrôlées directement ou indirectement par Autogrill et Carestel ou les ayants droit de ces entreprises, et les compagnies pétrolières, et dans lesquels Autogrill ou Carestel ou les entreprises citées ci-dessus agissent en tant que franchiseur et la compagnie pétrolière en tant que franchisé (voir à ce propos point C) ci-dessous).

B) Aires autoroutières « intercalées » En ce qui concerne les aires sur lesquelles un tiers indépendant exploite une activité de restauration et qui sont intercalées entre deux aires exploitées par la nouvelle entité, Autogrill est disposée, dans l'esprit de contribuer au maintien du plus large choix pour les consommateurs, à prendre les engagements suivants. [Confidentiel] C) Contrats de franchise Dans le cas de la conclusion de contrats de franchise, Autogrill ou Carestel s'engagent à ne pas imposer au franchisé d'exploiter le restaurant sous l'enseigne exclusive AC Restaurants et Carestel (ainsi que tout type d'enseigne appartenant à Autogrill ou Carestel ou à toutes autres entreprises contrôlées directement ou indirectement par Autogrill et Carestel ou aux ayants droit de ces entreprises).

D) Renonciation à solliciter la prorogation ou la reconduction automatique ou tacite de toute autre concession venue à échéance Par rapport aux aires autoroutières, il est important de s'assurer que la concurrence en amont, pour l'accès au marché, puisse s'exercer de la manière la plus large et inconditionnelle possible, surtout si les nouveaux appels d'offres seront basés sur la séparation des concessions entre restaurateurs et pétroliers. Il est évident que ni Autogrill ni Carestel ne peuvent interférer avec l'organisation des appels d'offres, dont la responsabilité revient aux autorités régionales qui gèrent les autoroutes et/ou au concessionnaire principal. Cependant, dans les limites de leur possibilités, Autogrill s'engage pour son compte et le compte de Carestel à : - renoncer à solliciter la prorogation ou la reconduction automatique ou tacite de la concession venue à échéance; - [Confidentiel] E) Les aires gérées par les indépendants Lors des auditions des parties, le Conseil a évoqué la possibilité que la nouvelle entité s'implante à l'avenir sur les aires actuellement gérées par des opérateurs indépendants, tel que (...). Afin de garantir la pluralité de l'offre et conformément à son plan industriel, Autogrill s'engage, pour son compte et le compte de Carestel, à renoncer à se présenter, à leur échéance, aux appels d'offres relatifs à la concession [Confidentiel] F) Accords avec les compagnies d'autocars et programmes de fidélité Concernant les accords avec les compagnies d'autocars et les programmes de fidélité, la préoccupation manifestée par le Conseil lors des auditions des parties est celle d'éviter un possible effet d'exclusion du marché (ou plus précisément d'exclusion de ce segment de marché représenté par la demande les compagnies d'autocars) au détriment des concurrents.

Pour éliminer cette préoccupation, Autogrill est disposée à s'engager pour son compte et pour le compte de Carestel à : - renoncer à toute clause d'exclusivité dans les nouveaux accords avec les compagnies d'autocars; - éliminer les clauses d'exclusivité existantes et ce dans un délai de 6 mois à partir du jour de la Décision d'autorisation; - maintenir la situation prévalant avant la concentration en ce qui concerne l'étendue de ces accords, c'est-à-dire abstention d'extension des accords d'Autogrill existants aux restaurants de Carestel et viceversa, si Carestel devait conclure à l'avenir ce type de contrats, elle s'abstiendra d'étendre ces accords aux restaurants d'Autogrill; - maintenir la situation prévalant avant la concentration en ce qui concerne les programmes de fidélité, dans le sens que ni Autogrill ni Carestel n'étendront les ristournes aux restaurants de l'autre société, et ce aussi longtemps que la nouvelle entité maintiendra sur le marché les deux enseignes AC Restaurants (ou Autogrill) et Carestel ainsi que tout type d'enseigne appartenant à Autogrill ou Carestel ou à toutes autres entreprises contrôlées directement ou indirectement par Autogrill et Carestel ou aux ayants droit de ces entreprises, pour une période indéterminée. Cependant, à l'issue d'une période de 5 ans à dater de la Décision d'autorisation, le Conseil de la concurrence pourra accorder la levée de cette interdiction d'extension des ristournes, compte tenu de l'importance de ces types de programmes sur le marché et de la situation concurrentielle existante au moment de la demande.

G) Négociations avec les compagnies pétrolières - [Confidentiel] Bruxelles, le 6 octobre 2006 (Carmine Meoli) Direttore Generale Business Development ANNEXE 1re - Concessions d'indépendants les long des autoroutes [Confidentiel].

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