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Décision Du Conseil De La Concurrence
publié le 17 octobre 2003

Conseil de la Concurrence. - Décision n° 2002-C/C-55 du 9 juillet 2002 Affaire CONC-C/C-02/32 : BARRY CALLEBAUT AG / STOLLWERCK AG Vu la notification de concentration déposée le 24 mai 2002 au secrétariat du Conseil de la Concurrence par les Vu le rapport établi par Monsieur Patrick Marchand, rapporteur, en date du 21 juin 2002; Entendu(...)

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SERVICE PUBLIC FEDERAL ECONOMIE, P.M.E., CLASSES MOYENNES ET ENERGIE


Conseil de la Concurrence. - Décision n° 2002-C/C-55 du 9 juillet 2002 Affaire CONC-C/C-02/32 : BARRY CALLEBAUT AG / STOLLWERCK AG Vu la notification de concentration déposée le 24 mai 2002 au secrétariat du Conseil de la Concurrence par les parties notifiantes;

Vu le rapport établi par Monsieur Patrick Marchand, rapporteur, en date du 21 juin 2002;

Entendu à l'audience du 9 juillet 2002 : - Monsieur Patrick Marchand pour le corps des rapporteurs; - Maître Nathalie Flandin, représentant commun des parties notifiantes;

I. Description des entreprises - Acquéreur Barry Callebaut AG (ci-après Barry Callebaut) est une société de droit suisse. Elle est active dans l'industrie du cacao et du chocolat, en ce compris le concassage et le broyage de fèves de cacao. Elle fabrique et vend du chocolat de couverture ainsi que des produits finis à base de chocolat.

Barry Callebaut a deux filiales en Belgique : - Barry Callebaut Services NV. Cette société de services est le centre de coordination du groupe, sans activités commerciales. - Barry Callebaut Belgium NV reprend toutes les activités commerciales en Belgique. Elle fabrique, à partir des fèves de cacao, la masse de cacao ainsi que le beurre et la poudre de cacao afin de procéder, par la suite, à la fabrication du chocolat de couverture destiné aux industriels ainsi qu'au marché artisanal.

Barry Callebaut est une filiale de la société Klaus J Jacobs Holding AG à Zurich (ci-apres JAG). - Vendeur Imhoff Industrie Holding Gmbh et Imhoff Stiftung, sociétés de droit allemand, toutes deux situées à Cologne. - Société cible Le groupe Stollwerck est un groupe allemand actif dans la fabrication et la distribution de chocolat.

Stollwerck AG (ci-après Stollwerck) est une société qui agit en tant que société de tête d'un groupe de sociétés actives surtout dans le secteur de la fabrication et de la distribution de produits finis à base de chocolat à la fois sur le marché intérieur et à l'étranger.

Stollwerck est spécialisée dans la fourniture aux grandes chaînes de supermarchés de produits finis à base de chocolat (tablettes de chocolat, barres de chocolat, confiseries, chocolats pour les enfants, chocolats fourrés et pâtisseries).

Le groupe Stollwerck a trois filiales en Belgique : - Jacques Chocolaterie SA. qui fabrique du chocolat de couverture. - Stollwerck-Sprengel Belgien SA, entreprise dormante. - Euro Confectionary Distribution SA qui gère le musée Jacques à Eupen et est la société propriétaire de toutes les marques Jacques.

Le chiffre d'affaires des sociétés belges du groupe Stollwerck ne représente que [CONFIDENTIEL] % de son chiffre d'affaires mondial.

II. Description de l'opération Le 26 avril 2002, Barry Callebaut a signé une convention de cession d'actions avec Imhoff Stiftung et Imhoff Industrie Holding Gmbh concernant la majorité des actions de Stollwerck.

Cette acquisition sera effectuée par la société Van Houten Beteilings AG & Co. KG, spécialement créée à cette fin. Les actions restantes feront l'objet d'une offre publique d'acquisition.

III. Champ d'application Les sociétés précitées sont des entreprises au sens de l'article 1er de la loi sur la protection de la Concurrence économique et l'opération notifiée est une opération de concentration au sens de l'article 9 de la loi.

Les seuils de chiffres d'affaires visés à l'article 11 de la loi sont atteints.

IV. Marchés concernés Le secteur économique concerné est celui de l'industrie du chocolat (code NACE 15.84).

Le processus de fabrication du chocolat est traditionnellement divisé en cinq phases : 1. La torréfaction.2. Le broyage.3. Le pressage.4. La fabrication du chocolat de couverture.5. La confection de produits finis. Chacune de ces étapes constitue un marché distinct. - Marchés de produits sur lesquels les parties sont actives Selon les parties, Barry Callebaut est essentiellement actif dans les quatre premières phases du processus de fabrication et de façon limitée au niveau de la phase 5.

Les activités de Stollwerck concernent la phase 4 (chocolat de couverture) et principalement la phase 5 (confection de produits finis).

Seuls deux marchés de produits doivent être considérés comme des marchés concernés au sens de la loi, dès lors que les parties y disposent de plus de 25 % de parts de marché : 1° le marché de la production de chocolat de couverture (relation horizontale);2° le marché de la production des produits finis à base de chocolat "Private Label" (relation verticale). - Le marché du chocolat de couverture (relation horizontale) Le marché du chocolat de couverture inclut tant le chocolat de couverture produit et vendu sur le segment du marché ouvert que le chocolat de couverture utilisé par le fabricant pour sa propre production de produits de consommation à base de chocolat (marché captif) - Le marché des produits finis à base de chocolat "Private Label" (relation verticale) A . Préambule Les parties estiment qu'il convient de distinguer le marché des produits finis à base de chocolat distribués en nom propre du marché des produits finis "private label" en se basant sur la décision N° 4064/89 de la Commission européenne du 31/01/2001.

Bien que les parties détiennent plus de 25 % de parts de marché sur le marché des produits finis à base de chocolat "Private Label", elles n'ont pas considéré, dans le formulaire de notification, que ce marché pouvait constituer un marché concerné au sens de la loi et n'ont dès lors pas fourni de renseignements complets sur ce marché.

Le rapporteur a conclu que le marché des produits finis "Private Label" ne constituait pas un marché concerné au sens de la loi.

Il a toutefois considéré que même si les marchés des produits finis à base de chocolat n'étaient pas des marchés horizontaux concernés, ils n'en restaient pas moins des marchés verticaux concernés dans la mesure où Barry Callebaut possède une part de marché largement supérieure à 25 % sur le marché du chocolat de couverture (amont) tandis que de Jacques dépasse largement les 25 % sur le marché des produits finis à base de chocolat "Private Label" (aval).

B. Marché de produits Le marché des produits finis à base de chocolat "Private Label" concerne la production de produits de consommation chocolatés pour des grandes surfaces qui les vendent sous leurs propres marques dans leurs rayons respectifs. Ces produits peuvent être produits sous forme de tablettes, bâtons ou encore mignonettes.

Le marché des produits finis à base de chocolat distribués en nom propre concerne la production et distribution de produits de consommation distribués sous des marques appartenant aux producteurs. - Marché géographique concerné Chocolat de couverture Selon les parties, le marché géographique pertinent pour la production et la distribution de chocolat de couverture ne peut être limité au marché belge. Selon elles, l'ensemble des fabricants de chocolat distribuent leurs produits à travers l'Europe. Dans la mesure où 95 % du chocolat de couverture vendu en Belgique est fabriqué en Belgique et où les barrières à l'entrée restent relativement importantes, le marché géographique à prendre en considération est l'ensemble du territoire belge.

Produits finis à base de chocolat ("Private Label") Les parties tiennent le même raisonnement pour les produits finis à base de chocolat (private label ou de marques). Toutefois, très peu de produits finis sont importés en Belgique. Si au niveau de l'offre une certaine internationalisation est à prendre en compte, il n'en reste pas moins qu'au niveau de la demande, le marché géographique reste principalement le territoire belge.

IV. Analyse concurrentielle : IV. 1. Le marché du chocolat de couverture - Phase d'évolution du marché Barry Callebaut estime que le marché du chocolat de couverture a augmenté, à partir de 1990, de 2 à 3 % par an. Actuellement, ce marché est arrivé à maturité.

Selon OCG, ce marché est devenu stable après avoir été en progression durant plusieurs années de 4 % par an. - Structure de l'offre Concurrents Les principaux producteurs de chocolat de couverture sur le marché belge identifiés par les parties notifiantes ainsi que les concurrents et clients interrogés sont Barry Callebaut, OCG, Belcolade, Jacques et Fruibel.

Le niveau de l'importation du chocolat de couverture sur le marché belge est minime.

La capacité de production Sur la base des chiffres communiqués par les parties et les entreprises interrogées, on peut constater que l'ensemble des producteurs disposent de capacités libres relativement importantes même s'il faut relativiser ces chiffres compte tenu des pics de production en haute saison. - Barrières à l'entrée Les matières premières et l'équipement sont facilement accessibles et ne constituent pas de barrières à l'entrée.

Les contrats fournisseurs-clients sont en général conclus pour une courte durée (3 à 6 mois) et il existe également la possibilité de conclure des contrats globaux à durée limitée. Une pratique de plus en plus courante dans ce secteur est de travailler sur base de contrats globaux. Ces contrats ont une durée limitée dans le temps (entre 2 et 3 ans). Ces contrats ne lient pas les clients qui peuvent se fournir chez les concurrents. Dans le cas où le client n'achète pas le volume auquel il s'est engagé, il doit reverser une somme, peu importante à Barry Callebaut.

Le coût d'installation d'une unité de production de 20.000 T de chocolat de couverture est estimé entre 12,5 millions d'euros et 23 millions d' euros. La barrière n'est pas tant le coût de l'installation mais surtout le temps nécessaire pour que cette unité soit opérationnelle (permis de bâtir, permis d'exploitation, durée de la construction, etc.) dès lors qu'il est indispensable que cette unité de production soit installée en Belgique afin de pouvoir bénéficier du label "chocolat belge".

Le know-how au niveau de la mise au point d'une recette et sa durée de mise au point constitue une barrière à l'entrée importante. Le chocolat de couverture est fourni au client suivant des recettes standard et recettes clients qui répondent à un ensemble de caractéristiques déterminées par le client lui-même et qui font l'objet d'un cahier de charge. Pour rappel, la durée de mise au point d'une recette de chocolat de couverture peut dépasser plusieurs mois.

Une recette ne peut se résumer aux pourcentages des différents ingrédients nécessaires à sa confection (cacao, beurre de cacao, lait, ...), elle se particularise aussi par l'origine et le type des produits utilisés.

Le label "chocolat belge" conserve en outre un effet persuasif.

Toutefois, il faudra relativiser l'impact des barrières à l'entrée une fois que la directive européenne 2000/36/CE relative aux produits de cacao et de chocolat destinés à l'alimentation humaine sera entrée en application, c'est à dire au plus tard au mois d'août 2003. - Intégration verticale Selon Barry Callebaut, la plupart des grands fabricants de produits de chocolat sont intégrés verticalement. Ils sont en effet présents sur au moins 3 des 5 phases de la production de chocolat. Souvent, il s'agit des phases 3 à 5 : le marché de la production de beurre de cacao ou poudre de cacao, le marché du chocolat de couverture et le marché de produits finis à base de chocolat. - Entrées sur le marché Ces cinq dernières années, le marché a considérablement évolué puisqu'il a vu apparaître de nouveaux concurrents. C'est le cas d'OCG qui est entré sur ce marché en 1997 et qui est actuellement en phase d'expansion et de Fruibel qui est entré sur le marché en 1999.

Le développement rapide et important d'OCG sur le marché belge résulte de circonstances particulières : ce groupe a été lancé par d'anciens cadres dirigeants de la société Cocoa Barry et de la société Goemaere et a repris l'usine de production de Nestlé à Anvers. Il dispose en outre de l'expérience requise et de la connaissance du marché. - Structure de la demande La demande sur le marché du chocolat de couverture est composée de deux catégories de clients : les clients industriels et les nombreux clients artisanaux. - Position dominante de Barry Callebaut Le Conseil de la Concurrence avait conclu dans ses deux décisions du 19 décembre 1996 n° 96-C/C-29 et du 3 juin 1997 n° 97-C/C-14 que la nouvelle entité Callebaut/Barry disposait d'une position dominante sur le marché du chocolat de couverture en Belgique.

A l'heure actuelle, Barry Callebaut détient à lui seul, une part de marché de [CONFIDENTIEL] % sur le marché.

Le plus proche concurrent de Barry Callebaut possède une part de marché estimée entre 9 et 12 %.

Les barrières à l'entrée sur ce marché demeurent nombreuses.

Barry Callebaut appartient à un groupe important, KJ Jacobs.

Si par rapport à la situation en 1996, la majorité des éléments sur lesquels s'appuyaient la position dominante de Barry Callebaut reste d'actualité, il y a lieu de souligner que le marché a évolué et qu'un certain nombre d'autres éléments viennent atténuer l'importance de cette position dominante : durée des contrats et possibilité de s'approvisionner auprès de concurrents, apparition d'un concurrent dynamique sur le marché (OCG), érosion des parts de marché détenues par Barry Callebaut, stabilité du marché, augmentation des capacités de production des concurrents, pression concurrentielle sur les prix.

Malgré la prise en considération de cette évolution du marché, le Conseil estime qu'il y a toujours lieu de considérer que Barry Callebaut possède avant la concentration une position dominante sur le marché belge du chocolat de couverture. - Absence de renforcement de position dominante entraînant une restriction significative de la Concurrence Sur le marché ouvert du chocolat de couverture, Jacques détient une part de marché minime qui résulte essentiellement de ventes auprès d'un nombre très restreint de clients.

La présente opération aura en théorie pour conséquence de transférer les clients de l'entreprise Jacques (filiale de Stollwerck) sur ce marché au sein du groupe Barry Callebaut faisant accroître automatiquement la part de marché de ce dernier de [CONFIDENTIEL] %.

Des informations recueillies, il faut considérer cette évaluation comme un maximum.

La Commission européenne considère qu'un accroissement inférieur à 2 % peut ne pas constituer un renforcement de position dominante.

De plus, il nécessaire de prendre en considération l'évolution des parts de marché dans le temps. Les parts de marché de Barry Callebaut sont en déclin continu depuis plusieurs années alors que les parts de marché de son concurrent le plus important sont en constante augmentation depuis 1999.

Il convient de relever que la concentration de 1996 entre Barry et Callebaut n'a pas débouché sur l'addition pure et simple des parts de marché comme le présageait le Conseil de la Concurrence et que la pression concurrentielle actuelle a fait perdre à Barry Callebaut de nombreux tonnages en chocolat de couverture au profit de ses concurrents directs.

A cet égard, il y a lieu de relever que les parts de marché de son concurrent le plus direct ont presque doublé en trois ans et que la capacité de production de ce concurrent atteindra 50.000 tonnes en 2004 pour un marché actuel de 81.000 tonnes.

Ces différents éléments rendent fort peu probable un renforcement de position dominante de Barry Callebaut sur le marché belge du chocolat de couverture.

IV. 2. Le marché des produits finis à base chocolat "Private Label" - Structure de l'offre Il existe 8 fabricants de "private label" en Belgique et les parties font remarquer que d'autres producteurs, nationaux ou étrangers, sont susceptibles d'entrer sur ce marché.

Barry Callebaut rappelle en outre qu'il a décidé dès 2001 de se retirer de ce marché en vendant son usine Chocodif. - Structure de la demande La demande est constituée par les grands groupes de distribution présents sur le territoire belge. Selon les parties, les contrats sont des "contrats - cadres", d'une durée maximum d'un an, négociés par les grandes centrales de distribution. Celles-ci assurent un véritable contrôle du produit en maîtrisant la distribution (endroit de référencement), en exigeant le paiement d'une prime de référencement, en poussant la vente de leurs propres produits ("Private Label") et en refusant des contrats de plus longue durée. - Appréciation Au niveau du marché des produits finis à base de chocolat "Private Label" la part de marché des parties est importante. Cependant cette importance est contrebalancée par plusieurs facteurs à savoir entre autres : - La puissance d'achat des clients : ce sont les principaux groupes de la grande distribution ou des centrales d'achat puissantes; - Les producteurs de "Private Label" ne disposent pas du poids de la marque dans leurs relations commerciales; - Les producteurs ne jouent aucun rôle dans la distribution des produits; - Les producteurs ne choisissent ni la quantité ni la qualité des produits; - Jacques Chocolaterie produit son propre chocolat de couverture pour la fabrication de ses produits finis en ce compris les produits "Private Label" et ne se fournit pas auprès d'autres sociétés. Il n'y aura donc pas, suite à la transaction, d'impact sur le marché. - En outre du fait de la puissance des clients "Private Label", les grandes surfaces, les parts de marchés sont extrêmement volatiles ce qui est indicateur de la puissance d'achat de ces derniers. - Barry Callebaut confirme son intention de ne plus faire de ventes "Private Label" et en tout état de cause de ne pas modifier la décision prise fin 2000 de se retirer du marché suite à l'acquisition du groupe Stollwerck.

Aucun des acteurs interrogés n'a émis d'objections fondamentales sous l'angle concurrentiel si ce n'est sur la constatation qu'un fournisseur alternatif disparaissait.

Au vu de ce qui précède, le Conseil de la Concurrence estime que l'opération en cause n'aura pas d'impact sur le marché des produits finis à base de chocolat "Private Label".

Le Conseil décide en conséquence de ne pas s'opposer à la concentration.

Par ces motifs, Le Conseil de la Concurrence - constate que la concentration en cause tombe dans le champ d'application de la loi; - constate que la concentration notifiée n'aura pas pour effet l'acquisition ou le renforcement d'une position dominante qui entrave de manière significative une Concurrence effective sur le marché belge en cause ou sur une partie substantielle de celui-ci; - la déclare admissible, conformément aux articles 33 § 1er et 33, § 2, 1.a de la loi.

Ainsi décidé le 9 juillet 2002 par la chambre du Conseil de la Concurrence composée de Monsieur Jacques Schaar, président de chambre, de Madame Dominique Smeets, et de Messieurs Eric Balate et David Szafran, membres.

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