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Arrêté Ministériel du 24 avril 2003
publié le 06 mai 2003

Arrêté ministériel relatif à l'expropriation d'immeubles classés sis place Emile Dupont 9 et 10, à Liège

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ministere de la region wallonne
numac
2003027291
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06/05/2003
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24/04/2003
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24 AVRIL 2003. - Arrêté ministériel relatif à l'expropriation d'immeubles classés sis place Emile Dupont 9 et 10, à Liège


Le Ministre du Budget, du Logement, de l'Equipement et des Travaux publics, Vu la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles, notamment l'article 6, § 1er, I, 7°, inséré par la loi spéciale du 8 août 1988;

Vu le Code wallon de l'Aménagement du Territoire, de l'Urbanisme et du Patrimoine, notamment l'article 247;

Vu l'arrêté du Gouvernement wallon du 6 juin 2002 modifiant l'arrêté du Gouvernement wallon du 27 août 2001 portant règlement du fonctionnement du Gouvernement, notamment l'article 24 modifié pat l'arrêté du 6 juin 2002;

Vu l'avis de la Commission royale des Monuments, sites et fouilles, rendu le 24 mars 2003;

Vu le permis délivré par le Collège des Bourgmestre et Echevins de la Ville de Liège à la Sa Solico en date du 30 août 2001, relatif à un bien sis à 4000 Liège, place Emile Dupont, n° 9/10 et tendant à démolir et construire un immeuble de bureaux et appartements;

Vu l'arrêté du 20 juillet 2002 suspendant le permis délivré par le Collège échevinal, le 30 août 2001, à la s.a. Solico;

Vu l'arrêté du 18 septembre 2002 retirant le permis délivré par le Collège échevinal, le 30 août 2001, à la s.a. Solico;

Vu l'arrêté du 27 mars 2003 classant comme monument la totalité des deux immeubles sis place Emile Dupont 9-10, à Liège;

Vu le plan des emprises ci-annexé;

Considérant qu'il s'agit des emprises situées dans la ville ci-dessus, mentionnées ci-après et figurées au plan d'emprise ci-annexé, à savoir : Ville de Liège, place Emile Dupont 9-10, cadastré Section A (3e div.) n° 1384f et 1385d; Considérant qu'au plan de secteur de Liège approuvé par arrêté de l'Exécutif régional wallon du 26 novembre 1987, les immeubles, ci-après désignés par les « le bien », sont repris en zone d'habitat et dans un périmètre d'intérêt culturel, historique ou esthétique;

Qu'il se situe, par ailleurs, dans le périmètre visé à l'article 303 du Cwatup relatif au centre ancien protégé;

Qu'en effet, le bien est situé à proximité d'un bâtiment classé, soit l'église Saint-Jacques;

Considérant que le permis délivré le 30 août 2001 à la s.a. Solico imposait la réalisation d'une campagne d'investigation du site et du bâti par le Service de l'Archéologie du Ministère de la Région wallonne en province de Liège dont les modalités avaient été arrêtées par un protocole d'accord intervenu le 6 août 2001;

Considérant que les investigations ont démontré que l'édifice actuel englobait un bâtiment du XIVe siècle dont de nombreux éléments de très haute qualité sont conservés;

Qu'une bonne partie des cloisonnements internes, des structures portantes, des planchers, de l'essentielle de la charpente, tous médiévaux ont été dégagés;

Que cette étude archéologique a ainsi mis en évidence l'évolution très complexe depuis le Moyen Age d'un édifice se développant derrière les actuelles façades élevées pour répondre à un souci d'alignement, durant la seconde moitié du XIXe siècle et au début du XXe siècle;

Que cet édifice est le dernier vestige du cloître de l'abbaye bénédictine de Saint-Jacques sur l'histoire de laquelle il livre des informations précises et uniques;

Que, les deux immeubles qui, du Moyen-Age au XIXe siècle, n'en formaient qu'un, renferment en réalité le plus ancien bâtiment de typologie civile connu à Liège à ce jour;

Que du rez-de-chaussée à la poutre faîtière de la toiture, les deux immeubles constituent un amalgame de vestiges qui se sont superposés, juxtaposés sans qu'il y ait eu destruction complète de l'élément antérieur;

Que lors d'investigations des enduits muraux ont été mis au jour par des restaurateurs spécialistes en peinture murale;

Qu'en outre, les fragments d'un décor peint sont apparus dans deux pièces : un ensemble iconographique figuratif surmontant une frise ornée d'une inscription en capitale romaine, citation d'un extrait de l'Evangile selon Saint Mathieu faisant allusion au banquet de noces du fils d'un roi;

Que Mme Cécile Oger, de l'Université de Liège, ainsi que Mlle Isabelle Lecocq et M. Pierre-Yves Kairis, de l'Institut royal du Patrimoine artistique mandatés afin d'examiner ces peintures, ont confirmé l'intérêt exceptionnel à la fois des peintures et du bâtiment, tant du point de vue historique, qu'archéologique et artistique;

Que cet avis fut relayé par la communauté scientifique tel que le relate l'arrêté 18 septembre 2002;

Qu'ainsi, le 20 juillet 2002, le permis délivré à la Sa Solico fut suspendu pendant un délai de 60 jours et qu' ensuite, le 18 septembre 2002, un arrêté décréta qu'il était d'utilité publique de retirer le permis;

Considérant que l'article 247 du Cwatup expose que sur avis de la Commission, le Gouvernement peut poursuivre l'expropriation pour cause d'utilité publique de sites archéologiques en vue de la mise au jour, de l'étude ou de la mise en valeur éventuelle de biens archéologiques;

Que la Commission royale des Monuments, Sites et Fouilles a rendu son avis le 24 mars 2003, qui est libellé comme suit « ... La Commission royale a émis un avis favorable sur l'objet repris sous rubrique... »;

Considérant que l'article 232, 1°, du Cwatup définit ce qu'il faut entendre par bien archéologique, soit tout vestige matériel, y compris paléontologique, ou sa trace située sous ou au-dessus du sol, envisagé comme un témoignage de l'activité de l'homme ou de son environnement, d'époque ou de civilisations révolues, indépendamment de sa valeur artistique;

Que l'ensemble présente sans conteste possible un intérêt historique, architectural et archéologique;

Considérant par ailleurs que nombre de scientifiques ont reconnu l'intérêt exceptionnel de l'ensemble des peintures et des structures découvertes;

Qu'en effet, ce bâtiment médiéval exceptionnel de par sa morphologie et sa qualité de construction, est orné de décors peints de grande ampleur au XVIe siècle (essentiellement) et au XVIIIe siècle;

Que ces peintures sont attribuées à de grands maîtres et plus particulièrement en ce qui concerne les peintures du XVIe siècle, à l'école de Lambert Lombard et inspirées de gravures de Maerten van Heemskerck;

Qu'il s'agit, en effet, d'un témoignage remarquable de l'art médiéval et de la Renaissance sans réel équivalent sur le territoire de la Belgique;

Que l'ensemble découvert offre, par ailleurs, une opportunité inespérée de mieux évaluer l'importance de l'activité artistique liégeoise à l'époque et d'aborder un aspect tout à fait inconnu de la production picturale de Lambert Lombard ou de son école;

Considérant que l'utilité publique qui justifie une expropriation est constituée par ce témoignage, à la fois artistique, littéraire, historique, architectural et archéologique qu'il convient de préserver;

Qu'ainsi, la juxtaposition unique de témoignages exceptionnels contenu dans les deux immeubles impose non une restauration sélective mais une conservation en l'état permettant tant aux chercheurs qu'aux étudiants et aux simples visiteurs d'appréhender l'évolution architecturale, technique et artistique au cours des ans;

Que cet ensemble immobilier doit être par ailleurs destiné à la recherche multiple non seulement d'études appliquées sur le bien lui-même qui sera conçu comme un laboratoire mais aussi de recherches inspirées par toutes formes de contexte analogue (lieu de séminaire);

Que cette recherche constante engendrera une diffusion des acquis à destination des milieux scientifiques mais aussi sous forme d'expositions présentant des données réactualisées en fonction des résultats produits et destinées à tout un chacun;

Qu'enfin, la personne fréquentant le lieu sera pressentie comme un élément interactif : elle circule dans les lieux, découvre en direct ce laboratoire et le contenu des séminaires des chercheurs;

Que cet ensemble immobilier constitue donc et sera conçu comme un lieu d'apprentissage, de découverte et de création ouvert non seulement aux scientifiques mais aussi aux étudiants et à tout un chacun;

Considérant ainsi que cette acquisition contribuera à la connaissance et à la diffusion au sein du public des caractéristiques hors du commun de cet ensemble médiéval duquel découlent de larges potentialités en termes de recherches dans chaque domaine que le lieu même suggère;

Que la conservation en l'état de ce patrimoine permettra tant aux chercheurs dans les domaines les plus variés allant de la muséologie, de la conservation à la restauration, qu'aux étudiants et aux simples visiteurs d'appréhender ce bien très complexe mais aussi toutes les formes de regard qu'il a vis-à-vis de lui;

Qu'en définitive, le lieu sera affecté en un « centre wallon de l'archéologie du bâti »;

Considérant, par ailleurs, si besoin est, que l'objectif d'utilité publique décrit ci-dessus, correspond également à celui qui fonde l'article 247 du Code wallon de l'Aménagement du Territoire, de l'Urbanisme et du Patrimoine en ce que l'expropriation autorisée est nécessaire à l'étude et la mise en valeur de biens archéologiques découverts;

Considérant que l'expropriation doit se réaliser selon la procédure d'extrême urgence;

Que l'extrême urgence se justifie par le fait que des travaux de conservation et de protection de ces témoignages du passé exceptionnel sont déjà en cours et qu'il convient de sécuriser;

Que l'intérêt général serait desservi si ces travaux de sécurisation devaient être retardés;

Que leur état de conservation serait en péril s'ils étaient arrêtés;

Pour les motifs cités ci-avant, Arrête :

Article 1er.Il est décrété l'expropriation pour cause d'utilité publique des emprises immobilières ci-dessus décrites et figurées au plan d'emprise susvisé et annexé ci-après.

Art. 2.La prise de possession immédiate de cette emprise est déclarée indispensable pour cause d'utilité publique.

Art. 3.Il sera fait application de la procédure d'extrême urgence en matière d'expropriation d'utilité publique prévue par l'article 5 de la loi du 26 juillet 1962Documents pertinents retrouvés type loi prom. 26/07/1962 pub. 26/02/2010 numac 2010000080 source service public federal interieur Loi relative à la procédure d'extrême urgence en matière d'expropriation pour cause d'utilité publique. - Coordination officieuse en langue allemande fermer.

Art. 4.Le présent arrêté sera notifié au propriétaire du bien à exproprier.

Namur, le 24 avril 2003.

M. DAERDEN

Annexe TABLEAU DES EMPRISES Ville de Liège - anciennement Liège Pour la consultation du tableau, voir image Vu pour être annexé à l'arrêté ministériel du 24 avril 2003 relatif à l'expropriation d'immeubles classés sis place Emile Dupont 9-10, à Liège.

Namur, le 24 avril 2003.

Le Ministre du Budget, du Logement, de l'Equipement et des Travaux publics, M. DAERDEN

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