Etaamb.openjustice.be
Arrêt
publié le 10 mars 2023

Extrait de l'arrêt n° 134/2022 du 20 octobre 2022 Numéro du rôle : 7727 En cause : les questions préjudicielles concernant l'article 3 de la loi du 28 mai 2002 « relative à l'euthanasie » (...) La Cour constitutionnelle, composée des présidents L. Lavrysen et P. Nihoul, et des juges T. Gi(...)

source
cour constitutionnelle
numac
2023201178
pub.
10/03/2023
prom.
--
moniteur
https://www.ejustice.just.fgov.be/cgi/article_body(...)
Document Qrcode

COUR CONSTITUTIONNELLE


Extrait de l'arrêt n° 134/2022 du 20 octobre 2022 Numéro du rôle : 7727 En cause : les questions préjudicielles concernant l'article 3 de la loi du 28 mai 2002Documents pertinents retrouvés type loi prom. 28/05/2002 pub. 22/06/2002 numac 2002009590 source ministere de la justice Loi relative à l'euthanasie fermer « relative à l'euthanasie » (avant sa modification par la loi du 28 février 2014), posées par le Tribunal de première instance de Flandre orientale, division de Termonde.

La Cour constitutionnelle, composée des présidents L. Lavrysen et P. Nihoul, et des juges T. Giet, J. Moerman, M. Pâques, Y. Kherbache, T. Detienne, D. Pieters, S. de Bethune, E. Bribosia, W. Verrijdt et K. Jadin, assistée du greffier F. Meersschaut, présidée par le président L. Lavrysen, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet des questions préjudicielles et procédure Par jugement du 12 octobre 2021, dont l'expédition est parvenue au greffe de la Cour le 12 janvier 2022, le Tribunal de première instance de Flandre orientale, division de Termonde, a posé les questions préjudicielles suivantes : « 1) L'article 3 de la loi du 28 mai 2002Documents pertinents retrouvés type loi prom. 28/05/2002 pub. 22/06/2002 numac 2002009590 source ministere de la justice Loi relative à l'euthanasie fermer relative à l'euthanasie, tel qu'il était applicable avant sa modification par la loi du 28 février 2014, viole-t-il les articles 10 et 11 de la Constitution, lus ou non en combinaison avec l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, en ce que tout non-respect des conditions et des procédures prévues par les articles 3 et 5 de la loi précitée relative à l'euthanasie constitue une infraction à l'article 397 du Code pénal, quelle que soit la nature de la condition ou procédure qui n'a pas été respectée, alors qu'à tout le moins, une distinction peut être établie entre les catégories de personnes qui ne respectent pas les conditions matérielles et les catégories de personnes qui ne respectent pas les conditions procédurales fixées par la loi relative à l'euthanasie ? 2) L'article 3 de la loi du 28 mai 2002Documents pertinents retrouvés type loi prom. 28/05/2002 pub. 22/06/2002 numac 2002009590 source ministere de la justice Loi relative à l'euthanasie fermer relative à l'euthanasie, tel qu'il était applicable avant sa modification par la loi du 28 février 2014, viole-t-il les articles 10 et 11 de la Constitution, lus ou non en combinaison avec l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, en ce que l'acte d'un médecin qui, à la demande expresse d'une personne majeure et capable, administre à cette personne une substance entraînant son décès, l'intention du médecin de donner la mort étant uniquement dictée par la demande de cette personne de mettre fin à sa souffrance physique ou psychique constante et insupportable qui ne peut être apaisée médicalement, est assimilé à l'acte d'une personne quelconque qui tue une autre personne intentionnellement en lui administrant une substance entraînant la mort, et ce, si le médecin, dans le cadre de son acte, n'a pas respecté toutes les conditions et procédures prescrites par la loi du 28 mai 2002Documents pertinents retrouvés type loi prom. 28/05/2002 pub. 22/06/2002 numac 2002009590 source ministere de la justice Loi relative à l'euthanasie fermer relative à l'euthanasie ? ». (...) III. En droit (...) Quant à la disposition en cause et à son contexte B.1. Les questions préjudicielles portent sur l'incrimination de l'euthanasie, lorsque le médecin qui pratique une euthanasie n'a pas respecté toutes les conditions et procédures prescrites par la loi du 28 mai 2002Documents pertinents retrouvés type loi prom. 28/05/2002 pub. 22/06/2002 numac 2002009590 source ministere de la justice Loi relative à l'euthanasie fermer « relative à l'euthanasie » (ci-après : la loi du 28 mai 2002Documents pertinents retrouvés type loi prom. 28/05/2002 pub. 22/06/2002 numac 2002009590 source ministere de la justice Loi relative à l'euthanasie fermer).

B.2. La loi du 28 mai 2002Documents pertinents retrouvés type loi prom. 28/05/2002 pub. 22/06/2002 numac 2002009590 source ministere de la justice Loi relative à l'euthanasie fermer fixe un cadre légal en matière d'euthanasie, que l'article 2 de cette loi définit comme étant « l'acte, pratiqué par un tiers, qui met intentionnellement fin à la vie d'une personne à la demande de celle-ci ».

L'exposé des motifs relatif à la proposition de loi qui est devenue la loi du 28 mai 2002Documents pertinents retrouvés type loi prom. 28/05/2002 pub. 22/06/2002 numac 2002009590 source ministere de la justice Loi relative à l'euthanasie fermer mentionne que l'absence d'un tel cadre légal créait une insécurité juridique « qui entraîne des pratiques semi-clandestines, qui ne permet pas le contrôle social de ces pratiques et qui rend plus difficile la tenue d'un dialogue approfondi entre le patient et son médecin » (Doc. parl., Sénat, 1999-2000, n° 2-244/1, p. 2).

La législation proposée entendait donc : « - assurer au patient incurable, dans le respect de son autonomie individuelle, la garantie de voir sa demande d'euthanasie respectée; - donner une protection au patient atteint d'une maladie grave et incurable, en imposant des critères précis pour l'intervention du médecin; - assurer une sécurité juridique au médecin confronté à une demande d'euthanasie satisfaisant aux conditions prévues dans la présente loi; - permettre une meilleure appréhension de la situation réelle par une évaluation des pratiques » (ibid., pp. 2-3).

Selon le même exposé des motifs, « une loi déterminant les conditions de l'euthanasie permettra des pratiques plus homogènes et plus responsables. La loi garantira mieux la relation de confiance entre le médecin et le malade ou ses autres interlocuteurs ». Il a également été souligné que « cet effort de cohérence et de clarté est souhaitable dans une société démocratique » (ibid., p. 3).

B.3.1. La Cour est interrogée au sujet de l'article 3 de la loi du 28 mai 2002Documents pertinents retrouvés type loi prom. 28/05/2002 pub. 22/06/2002 numac 2002009590 source ministere de la justice Loi relative à l'euthanasie fermer, dans sa version applicable avant l'entrée en vigueur de la loi du 28 février 2014 « modifiant la loi du 28 mai 2002Documents pertinents retrouvés type loi prom. 28/05/2002 pub. 22/06/2002 numac 2002009590 source ministere de la justice Loi relative à l'euthanasie fermer relative à l'euthanasie, en vue d'étendre l'euthanasie aux mineurs ». Cet article règle les circonstances dans lesquelles l'euthanasie peut être pratiquée sur un patient majeur ou mineur émancipé capable et conscient, ainsi que les conditions et procédures qui doivent être respectées avant de pratiquer l'euthanasie.

La disposition en cause énonce : « § 1er. Le médecin qui pratique une euthanasie ne commet pas d'infraction s'il s'est assuré que : - le patient est majeur ou mineur émancipé, capable et conscient au moment de sa demande; - la demande est formulée de manière volontaire, réfléchie et répétée, et qu'elle ne résulte pas d'une pression extérieure; - le patient se trouve dans une situation médicale sans issue et fait état d'une souffrance physique ou psychique constante et insupportable qui ne peut être apaisée et qui résulte d'une affection accidentelle ou pathologique grave et incurable; et qu'il respecte les conditions et procédures prescrites par la présente loi. § 2. Sans préjudice des conditions complémentaires que le médecin désirerait mettre à son intervention, il doit, préalablement et dans tous les cas : 1° informer le patient de son état de santé et de son espérance de vie, se concerter avec le patient sur sa demande d'euthanasie et évoquer avec lui les possibilités thérapeutiques encore envisageables ainsi que les possibilités qu'offrent les soins palliatifs et leurs conséquences.Il doit arriver, avec le patient, à la conviction qu'il n'y a aucune autre solution raisonnable dans sa situation et que la demande du patient est entièrement volontaire; 2° s'assurer de la persistance de la souffrance physique ou psychique du patient et de sa volonté réitérée.A cette fin, il mène avec le patient plusieurs entretiens, espacés d'un délai raisonnable au regard de l'évolution de l'état du patient; 3° consulter un autre médecin quant au caractère grave et incurable de l'affection, en précisant les raisons de la consultation.Le médecin consulté prend connaissance du dossier médical, examine le patient et s'assure du caractère constant, insupportable et inapaisable de la souffrance physique ou psychique. Il rédige un rapport concernant ses constatations.

Le médecin consulté doit être indépendant, tant à l'égard du patient qu'à l'égard du médecin traitant et être compétent quant à la pathologie concernée. Le médecin traitant informe le patient concernant les résultats de cette consultation; 4° s'il existe une équipe soignante en contact régulier avec le patient, s'entretenir de la demande du patient avec l'équipe ou des membres de celle-ci;5° si telle est la volonté du patient, s'entretenir de sa demande avec les proches que celui-ci désigne;6° s'assurer que le patient a eu l'occasion de s'entretenir de sa demande avec les personnes qu'il souhaitait rencontrer. § 3. Si le médecin est d'avis que le décès du patient n'interviendra manifestement pas à brève échéance, il doit, en outre : 1° consulter un deuxième médecin, psychiatre ou spécialiste de la pathologie concernée, en précisant les raisons de la consultation.Le médecin consulté prend connaissance du dossier médical, examine le patient, s'assure du caractère constant, insupportable et inapaisable de la souffrance physique ou psychique et du caractère volontaire, réfléchi et répété de la demande. Il rédige un rapport concernant ses constatations. Le médecin consulté doit être indépendant tant à l'égard du patient qu'à l'égard du médecin traitant et du premier médecin consulté. Le médecin traitant informe le patient concernant les résultats de cette consultation; 2° laisser s'écouler au moins un mois entre la demande écrite du patient et l'euthanasie. § 4. La demande du patient doit être actée par écrit. Le document est rédigé, daté et signé par le patient lui-même. S'il n'est pas en état de le faire, sa demande est actée par écrit par une personne majeure de son choix qui ne peut avoir aucun intérêt matériel au décès du patient.

Cette personne mentionne le fait que le patient n'est pas en état de formuler sa demande par écrit et en indique les raisons. Dans ce cas, la demande est actée par écrit en présence du médecin, et ladite personne mentionne le nom de ce médecin dans le document. Ce document doit être versé au dossier médical.

Le patient peut révoquer sa demande à tout moment, auquel cas le document est retiré du dossier médical et restitué au patient. § 5. L'ensemble des demandes formulées par le patient, ainsi que les démarches du médecin traitant et leur résultat, y compris le(s) rapport(s) du (des) médecin(s) consulté(s), sont consignés régulièrement dans le dossier médical du patient ».

B.3.2. Depuis l'entrée en vigueur de la loi du 28 mai 2002Documents pertinents retrouvés type loi prom. 28/05/2002 pub. 22/06/2002 numac 2002009590 source ministere de la justice Loi relative à l'euthanasie fermer, l'euthanasie pratiquée par un médecin est dès lors dépénalisée, dans les circonstances décrites dans le paragraphe 1er de la disposition en cause et lorsque le médecin a respecté les conditions et procédures prescrites par la loi du 28 mai 2002Documents pertinents retrouvés type loi prom. 28/05/2002 pub. 22/06/2002 numac 2002009590 source ministere de la justice Loi relative à l'euthanasie fermer.

B.3.3. L'exposé des motifs relatif à la proposition de loi qui est devenue la loi du 28 mai 2002Documents pertinents retrouvés type loi prom. 28/05/2002 pub. 22/06/2002 numac 2002009590 source ministere de la justice Loi relative à l'euthanasie fermer mentionne en ce qui concerne la disposition en cause : « Cet article impose les conditions dans lesquelles une euthanasie peut être pratiquée.

Les auteurs estiment que le dialogue entre le patient et le médecin doit être au coeur du traitement de la demande d'euthanasie et que la responsabilité de l'un et de l'autre ne peut être amoindrie par des interventions de tiers.

Mais ce dialogue doit évidemment être garanti et approfondi, et organisé autour de l'information la plus large possible donnée au patient à propos de son état de santé et des possibilités de prise en charge palliative existantes. C'est l'objet de la première condition procédurale imposée au médecin à l'alinéa deux de l'article.

Pour être recevable, la demande d'euthanasie doit émaner d'un patient capable juridiquement, majeur ou mineur émancipé. La demande doit traduire, de manière expresse et non équivoque, une volonté persistante et définitive.

Le patient doit souffrir d'une pathologie grave et incurable, consécutive à une maladie ou à un accident. Le caractère incurable doit être confirmé par un autre médecin, qui soit indépendant et qui connaisse la pathologie en cause. L'avis de ce médecin est communiqué au patient.

Enfin et surtout, le patient doit se trouver dans un état de détresse ou de souffrance constant et insupportable que la médecine ne peut apaiser. En vérité, c'est précisément la souffrance ou la détresse durable et inapaisable du patient qui sera au coeur du dialogue entre le patient et le médecin. Celui-ci devra manifestement constater que rien de ce qu'il propose au patient n'est à même d'apaiser sa souffrance.

Ces conditions n'exonèrent pas le médecin de sa responsabilité dans l'établissement du diagnostic et des moyens thérapeutiques mis en oeuvre pour apaiser la souffrance physique ou psychique du patient.

Elles ne l'empêchent pas, s'il l'estime nécessaire, de consulter à ces fins d'autres confrères.

Nonobstant la nécessaire qualité du colloque singulier, dès lors que le patient le souhaite, le médecin doit évidemment consulter d'autres personnes : celles qui sont désignées par le patient, notamment les proches et les membres de l'équipe soignante. Il convient de garantir que les interlocuteurs souhaités par le patient soient associés au dialogue concernant la fin de vie. La pratique médicale doit pouvoir s'adapter aux situations particulières, dans le respect de la volonté du patient.

La volonté des auteurs a été de n'imposer dans la loi que les conditions procédurales garantissant au patient le respect de ses droits et de sa volonté. Il est évident que le médecin peut aller au-delà de ces prescriptions, pourvu qu'il respecte la volonté du patient.

D'autre part, il devra s'assurer auprès du patient qu'il a eu l'occasion de rencontrer toutes les personnes avec lesquelles il voulait s'entretenir » (Doc. parl., Sénat, 1999-2000, n° 2-244/1, pp. 4-5).

B.4.1. Le médecin qui a pratiqué une euthanasie remet, dans les quatre jours ouvrables, le document d'enregistrement dûment complété à la Commission fédérale de contrôle et d'évaluation (article 5 de la loi du 28 mai 2002Documents pertinents retrouvés type loi prom. 28/05/2002 pub. 22/06/2002 numac 2002009590 source ministere de la justice Loi relative à l'euthanasie fermer).

Cette Commission est composée de seize membres, désignés sur la base de leurs connaissances et de leur expérience dans les matières qui relèvent de la compétence de la Commission (article 6, § 2, de la loi du 28 mai 2002Documents pertinents retrouvés type loi prom. 28/05/2002 pub. 22/06/2002 numac 2002009590 source ministere de la justice Loi relative à l'euthanasie fermer). Elle établit le document d'enregistrement précité (article 7 de la loi du 28 mai 2002Documents pertinents retrouvés type loi prom. 28/05/2002 pub. 22/06/2002 numac 2002009590 source ministere de la justice Loi relative à l'euthanasie fermer).

La Commission fédérale de contrôle et d'évaluation examine le document d'enregistrement que lui communique le médecin traitant. Lorsque, par décision prise à la majorité des deux tiers, la Commission estime que les conditions prévues par la loi du 28 mai 2002Documents pertinents retrouvés type loi prom. 28/05/2002 pub. 22/06/2002 numac 2002009590 source ministere de la justice Loi relative à l'euthanasie fermer n'ont pas été respectées, elle envoie le dossier au procureur du Roi du lieu du décès du patient (article 8 de la loi du 28 mai 2002Documents pertinents retrouvés type loi prom. 28/05/2002 pub. 22/06/2002 numac 2002009590 source ministere de la justice Loi relative à l'euthanasie fermer).

B.4.2. La Commission fédérale de contrôle et d'évaluation est également chargée d'établir tous les deux ans, à l'intention des chambres législatives, un rapport statistique « basé sur les informations recueillies dans le second volet du document d'enregistrement que les médecins lui remettent complété en vertu de l'article 8 », ainsi qu'un « rapport contenant une description et une évaluation de l'application de la [...] loi ». Elle peut également formuler des recommandations « susceptibles de déboucher sur une initiative législative et/ou d'autres mesures concernant l'exécution de [cette] loi » (article 9 de la loi du 28 mai 2002Documents pertinents retrouvés type loi prom. 28/05/2002 pub. 22/06/2002 numac 2002009590 source ministere de la justice Loi relative à l'euthanasie fermer).

B.5. La proposition de loi initiale entendait régler les conséquences pénales de l'euthanasie dans le Code pénal. L'article 8 de cette proposition de loi prévoyait plus précisément d'insérer un article 417bis dans le Code pénal, selon lequel « il n'y a ni crime ni délit lorsque les faits visés aux articles 393 à 397 ont été commis par un médecin, et commandés par la nécessité de mettre fin à la souffrance ou à l'état de détresse, constant, insupportable, et inapaisable, d'un patient atteint d'une affection incurable, pour autant que le médecin ait respecté les conditions et procédures énoncées dans la loi du... relative à l'euthanasie » (Doc. parl., Sénat, 1999-2000, n° 2-244/1, p. 11). Par voie d'amendement, il a cependant été choisi de ne pas modifier le Code pénal et de régler la dépénalisation de l'euthanasie dans la loi du 28 mai 2002Documents pertinents retrouvés type loi prom. 28/05/2002 pub. 22/06/2002 numac 2002009590 source ministere de la justice Loi relative à l'euthanasie fermer même.

Cet amendement était justifié comme suit : « Les déposants suggèrent, par leur amendement n° 20, de supprimer la disposition prévoyant d'introduire un article 417bis dans le Code pénal, qui constituait une exception d'euthanasie.

Les déposants proposaient la modification du Code pénal parce qu'elle leur apparaît comme la solution la plus cohérente, la plus explicite et la plus compréhensible par tous. Les déposants considèrent toujours que la modification du Code pénal est la plus évidente des solutions.

Mais ils sont attachés avant tout à la recherche d'une solution. Lors des débats, certains ont dit craindre la portée symbolique d'une exception inscrite dans le Code pénal. Si l'inscription dans le Code pénal est un obstacle que certains de ceux qui veulent sincèrement une solution légale aux problèmes de la fin de vie estiment, en conscience, insurmontable, pour des raisons d'ordre symbolique, idéologique ou religieuse, les déposants entendent prendre en compte leurs réticences.

En conséquence, ils proposent de supprimer l'article 8 de la proposition, et de modifier le § 1er de l'article 3 pour tenir compte de cette suppression.

Leur volonté est que des bornes claires soient fixées aux médecins qui sont confrontés à une demande d'euthanasie. Ceux-ci doivent savoir que s'ils y répondent dans le respect des conditions fixées par la loi, ils ne commettent pas d'infraction » (Doc. parl., Sénat, 2000-2001, n° 2-244/4, pp. 3-4).

B.6.1. Dans son avis relatif à la proposition de loi qui est devenue la loi du 28 mai 2002Documents pertinents retrouvés type loi prom. 28/05/2002 pub. 22/06/2002 numac 2002009590 source ministere de la justice Loi relative à l'euthanasie fermer, la section de législation du Conseil d'Etat a, entre autres, examiné la conformité des règles proposées au droit à la vie. En ce qui concerne la dépénalisation de l'euthanasie, l'avis mentionne : « En ce qui concerne la protection pénale générale du droit à la vie, il faut constater que la proposition ne touche pas aux dispositions du Code pénal qui répriment l'assassinat, le meurtre ou la mort par imprévoyance ou négligence.

De plus, l'euthanasie n'est dépénalisée que lorsqu'elle est pratiquée dans des circonstances bien définies. Si elle est pratiquée à la demande actuelle du patient, celui-ci doit se trouver dans une ' situation médicale sans issue ' et faire état d'une ' souffrance physique ou psychique constante et insupportable qui ne peut être apaisée et qui résulte d'une affection accidentelle ou pathologique grave et incurable ' (article 3, § 1er, troisième tiret). Lorsque l'euthanasie se fonde sur une déclaration anticipée, le patient doit également être atteint d'une ' affection accidentelle ou pathologique grave et incurable ', et il est requis que le patient soit inconscient et que cette situation soit irréversible (article 4, § 1er, alinéa 1er, et § 2, alinéa 1er). Pour des raisons d'ordre public, la proposition limite ainsi la possibilité de donner suite de manière impunie à la demande d'une personne de mettre fin à sa vie.

Le maintien de la répression en dehors des cas visés par la proposition répond à l'obligation de l'autorité de mettre en place des moyens de dissuasion efficaces permettant d'éviter qu'il soit porté atteinte au droit à la vie » (Doc. parl., Sénat, 2000-2001, n° 2-244/21, p. 7).

En ce qui concerne la proportionnalité des peines qui sont applicables en cas d'euthanasie lorsque les conditions et procédures légales ne sont pas respectées, la section de législation du Conseil d'Etat a observé : « En vertu de l'article 3 de la proposition de loi relative à l'euthanasie, le médecin qui pratique une euthanasie ne commet pas d'infraction si, d'une part, il s'est assuré qu'il a été satisfait aux conditions de fond définies au paragraphe 1er, premier à troisième tirets, de cet article et si, d'autre part, il a respecté les conditions et procédures prescrites par la proposition.

Cette dernière condition a une portée générale et concerne dès lors tant les conditions et exigences de procédure qui ont pour but de garantir le respect des conditions de fond prévues à l'article 3, que les conditions et exigences de procédure qui ne sont pas de cette nature mais qui comprennent des obligations purement formelles, telles que les obligations relatives à la déclaration imposée par l'article 7 de la proposition.

Le constat qui vient d'être fait implique qu'un médecin qui n'a pas respecté l'une de ces conditions ou exigences de procédure purement formelles ne peut invoquer l'article 3 et que, sauf s'il peut faire valoir la présence d'un état de nécessité, il peut dès lors être condamné en application des dispositions en vigueur du Code pénal en vertu desquelles l'euthanasie peut être punie. Ce médecin est par conséquent traité tout à fait de la même manière que le médecin qui méconnaît les conditions de fond dans lesquelles l'euthanasie est admissible ou les exigences de procédure qui sont étroitement liées à ces conditions.

La seule méconnaissance d'une obligation purement formelle peut donc conduire à l'imposition d'une peine qui, même si l'on tient compte des peines minimales applicables et à la possibilité de retenir des circonstances atténuantes, peut difficilement être réputée se trouver dans un rapport raisonnable à l'égard de la prévention qui, dans l'hypothèse présentement examinée, revient essentiellement à avoir pratiqué l'euthanasie sans avoir respecté l'exigence purement formelle y afférente.

Afin de respecter le principe de proportionnalité, il est indiqué d'opérer une distinction entre, d'une part, les conditions essentielles qui doivent être respectées pour que l'euthanasie ne soit pas une infraction et, d'autre part, les conditions strictement formelles sans rapport avec ces conditions essentielles. Pour assurer le respect de ces conditions strictement formelles, il conviendrait de prévoir des peines adaptées et distinctes » (ibid., pp. 15-16).

B.6.2. En ce qui concerne les aspects pénaux de l'euthanasie, tels qu'ils ont fait l'objet des observations de la section de législation du Conseil d'Etat, le rapport des commissions réunies de la Justice et des Affaires sociales du Sénat indique : « Un autre membre ajoute à cela que le juge saisi de l'affaire devra travailler avec des qualifications de droit commun telles que l'homicide, les coups et blessures volontaires ayant entraîné la mort, etc. Si une des conditions procédurales n'a pas été respectée et pour peu que le dossier soit transmis par la commission, le juge n'aura d'autre base juridique à sa disposition que les qualifications précitées. Le droit pénal ne fait en effet aucune distinction entre les conditions matérielles et les conditions procédurales d'une infraction. L'intervenant renvoie d'ailleurs à la proposition néerlandaise, qui prévoit une sanction distincte.

L'un des auteurs de la proposition de loi et de l'amendement n° 14 répond que la loi en préparation définit les conditions cumulatives dans lesquelles il n'y a pas d'infraction.

Il n'y a pas de sanction prévue parce que, si les conditions ne sont pas respectées, on se trouve dans une situation identique à la situation actuelle, où le parquet aura à connaître de l'affaire, et où l'euthanasie est qualifiée de meurtre.

Dans ce cas, il n'est pas exclu que le juge pénal fasse éventuellement application de la notion d'état de nécessité en tant que motif d'excuse.

Au contraire, lorsque toutes les conditions sont remplies, c'est d'une absence d'infraction qu'il s'agit. Ces conditions, il faut le répéter, sont liées à la situation du malade et à la procédure qui doit être respectée. [...] Un sénateur souhaiterait que l'on définisse explicitement de quelle infraction il s'agit ici. Contrairement à la proposition de loi n° 2-244 initiale, la proposition telle qu'amendée par l'amendement n° 14 ne précise pas de quelle infraction il retourne. L'intervenant propose de prévoir également dans la loi un taux de peine distinct pour la transgression des conditions matérielles et des conditions procédurales associées à cette infraction.

L'intervenant fait toutefois remarquer que, même dans ce cas, un problème pourrait encore se poser selon d'aucuns. Demande-t-on qu'un taux de peine spécifique soit prévu pour chaque condition prise séparément ? Tel n'est pas l'usage en législation pénale. Le juge saisi de l'affaire doit, au contraire, apprécier les peines qu'il prononce en se fondant sur la gravité de l'infraction » (Doc. parl., Sénat, 2001-2002, n° 2-244/22, pp. 777-779).

B.6.3. A la suite de l'avis précité de la section de législation du Conseil d'Etat, il a été observé, en réunion plénière du Sénat : « A nos yeux et en application de la proposition, toutes les conditions doivent être respectées. Ces conditions, qui ont trait à la situation du malade, à la réalité de sa demande, aux éléments du dialogue, sont toutes importantes.

Et donc, permettre une gradation des peines en fonction du non-respect de certaines de ces conditions, tel que le suggère le Conseil d'Etat, c'est peut-être donner raison à ceux qui diraient que, précisément, ces conditions sont là pour habiller la proposition alors qu'en réalité, pour nous, ces conditions sont essentielles et ont la même valeur.

A notre sens, il n'y a pas infraction si l'ensemble de ces conditions sont respectées et cela nous paraît essentiel » (Ann., Sénat, 2001-2002, 23 octobre 2001, n° 2-150, p. 14).

Et ensuite : « En ce qui concerne la proportionnalité des peines applicables, le Conseil d'Etat souhaite certes que le législateur prévoie des peines adaptées en fonction des violations des conditions essentielles qui doivent être respectées pour que l'euthanasie ne soit pas une infraction.

Même si des peines pénales minimales peuvent être applicables et que des circonstances atténuantes peuvent être retenues en cas de violation d'obligations purement formelles, le Conseil d'Etat conclut cependant que ces peines seraient sans rapport raisonnable à l'égard de la prévention qui a pour but essentiel de réglementer l'acte d'euthanasie. Ici, nous ne pouvons pas acquiescer au raisonnement du Conseil d'Etat.

D'une part, la section de législation cite en exemple l'article 7, lequel instaure une obligation d'enregistrement des euthanasies par le médecin qui a pratiqué une euthanasie; cet article est cité comme une obligation purement formelle et donc, pour le Conseil d'Etat, elle est moins importante que les conditions prévues aux articles 3 et 4 de la proposition de loi.

Pour être légalement acceptable en tant que telle, l'euthanasie est, selon nous, l'aboutissement de tout un processus qui doit être entièrement suivi par le médecin de A à Z, et ce afin de garantir l'autonomie de la volonté du patient et de lui assurer une sécurité dans l'application de ses droits.

En fonction de l'importance du sujet, on ne peut parler, à mon avis, de bureaucratie lorsqu'on entoure le patient du maximum de précautions pour cette décision capitale.

D'une part, à nos yeux, toutes les conditions que le patient ou que le médecin doivent remplir sont importantes; il n'y a pas de conditions secondaires.

D'autre part, comme l'a fait remarquer lui-même le Conseil d'Etat, l'existence d'un mécanisme de contrôle des euthanasies réalisées constitue une ' garantie supplémentaire permettant d'assurer que l'euthanasie n'est pratiquée que dans des cas strictement définis par la loi '. Ainsi, l'article 7 de la proposition de loi, relatif au document d'enregistrement qui doit être complété par le médecin chaque fois qu'il réalise une euthanasie, constitue la base de travail de la commission de contrôle. En cas de doute quant à la légalité et à la régularité de l'euthanasie pratiquée, c'est à partir de ce document analysé par la commission que celle-ci pourra demander des informations complémentaires au médecin.

Ainsi, contrairement à ce que soutient le Conseil d'Etat, l'article 7, s'il peut sembler à première vue une condition de pure forme, constitue en réalité un élément important de la procédure puisqu'il fait partie du contrôle a posteriori des actes d'euthanasie.

En conséquence, si une des conditions imposées par la proposition de loi n'était pas respectée par le médecin, celui-ci pourrait en effet être poursuivi et puni en vertu des dispositions du Code pénal, à moins qu'il ne puisse notamment se prévaloir de la notion jurisprudentielle d'état de nécessité » (Ann., Sénat, 2001-2002, 24 octobre 2001, n° 2-151, pp. 19-20).

B.6.4.1. Par ailleurs, il a été proposé, par voie d'amendement, de prévoir des sanctions spécifiques si le médecin ne respecte pas l'obligation qui lui incombe, en vertu de l'article 5 de la loi du 28 mai 2002Documents pertinents retrouvés type loi prom. 28/05/2002 pub. 22/06/2002 numac 2002009590 source ministere de la justice Loi relative à l'euthanasie fermer, de déclarer à la Commission fédérale de contrôle et d'évaluation une euthanasie qu'il a pratiquée (Doc. parl., Sénat, 2000-2001, n° 2-244/18, p. 21). Les travaux préparatoires précisent à cet égard : « Une des auteurs estime qu'il va de soi que l'on sanctionne aussi les manquements à l'obligation de déclaration. Sinon, il est inutile d'inscrire cette obligation dans la loi. D'où la proposition de prévoir des peines de prison et des amendes.

Un membre répète qu'il n'y a pas lieu de prévoir de sanction particulière sur ce point. Il s'agit d'une condition, d'une procédure prévue par la loi. Or, le texte précise qu'il n'y a pas d'infraction lorsque les conditions et procédures prévues par la loi sont respectées.

Cela signifie évidemment, a contrario, qu'en cas de non-respect de l'une d'entre elles, le juge appréciera si et comment il faut condamner.

La préopinante est d'avis que l'obligation de déclaration est non pas une condition fondamentale, mais une condition de procédure très importante. En effet, si elle n'est pas respectée, tout contrôle ou toute enquête devient impossible, et on ne peut pas saisir la commission fédérale. Tout devient alors possible.

Un membre réitère que le texte prévoit que, si l'on ne respecte pas la condition de déclaration, on se trouve dans les conditions prévues par la loi actuelle.

Ce que l'auteur de l'amendement considère comme une infraction spécifique serait puni de six mois à deux ans.

Les six auteurs vont plus loin puisque, dans l'hypothèse où la condition en question ne serait pas remplie, ils renvoient au texte actuel du Code pénal.

Le juge devra alors apprécier les circonstances d'une euthanasie qui a été pratiquée sans que les conditions soient respectées et qui, dès lors, constitue une infraction.

Le fait de considérer que la déclaration fait partie de la procédure montre bien que les six auteurs considèrent comme extrêmement important - plus que ce que l'amendement n° 515 ne semble le laisser penser - que la déclaration soit faite » (Doc. parl., Sénat, 2001-2002, n° 2-244/22, pp. 1177-1178).

B.6.4.2. Un autre amendement entendait prévoir que « sans préjudice de l'application des peines prévues par le Code pénal et, le cas échéant, de sanctions disciplinaires, le médecin qui contrevient aux dispositions prévues aux articles 3, 4 et 5 est puni d'un emprisonnement de huit jours à un mois ou d'une amende de 1 000 à 100 000 francs » (Doc. parl., Sénat, 2001-2002, n° 2-244/25, p. 70).

L'amendement entendait prévoir « des sanctions spécifiques à l'égard du médecin qui omettrait de compléter et de renvoyer le document d'enregistrement (article 5) ainsi qu'à l'égard du médecin qui ne respecterait pas les obligations contenues dans les articles 3 et 4 » et « répondre à la remarque du Conseil d'Etat concernant le principe de la légalité des peines et de la sécurité juridique » (ibid., p. 70). Les auteurs de l'amendement ont déclaré vouloir établir une distinction « entre sanctions formelles de procédure et sanctions ne répondant pas aux conditions de fond que la proposition prévoit pour pratiquer une euthanasie » (Ann., Sénat, 2001-2002, 24 octobre 2001, n° 2-153, p.64).

B.6.4.3. Aucun de ces amendements n'a été adopté (Doc. parl., Sénat, 2000-2001, n° 2-244/22, p. 1182; Ann., Sénat, 2001-2002, 25 octobre 2001, n° 2-155, p. 63).

Quant à la première question préjudicielle B.7.1. Par la première question préjudicielle, la juridiction a quo demande à la Cour si l'article 3 de la loi du 28 mai 2002Documents pertinents retrouvés type loi prom. 28/05/2002 pub. 22/06/2002 numac 2002009590 source ministere de la justice Loi relative à l'euthanasie fermer, tel qu'il est applicable devant la juridiction a quo, est compatible avec les articles 10 et 11 de la Constitution, lus en combinaison ou non avec l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, « en ce que tout non-respect des conditions et des procédures prévues par les articles 3 et 5 de la loi [...] relative à l'euthanasie constitue une infraction à l'article 397 du Code pénal, quelle que soit la nature de la condition ou procédure qui n'a pas été respectée, alors qu'à tout le moins, une distinction peut être établie entre les catégories de personnes qui ne respectent pas les conditions matérielles et les catégories de personnes qui ne respectent pas les conditions procédurales fixées par la loi relative à l'euthanasie ».

B.7.2. Il est donc demandé à la Cour d'examiner le traitement identique de deux catégories de médecins qui pratiquent une euthanasie sans respecter les conditions ou procédures fixées dans la loi du 28 mai 2002Documents pertinents retrouvés type loi prom. 28/05/2002 pub. 22/06/2002 numac 2002009590 source ministere de la justice Loi relative à l'euthanasie fermer. Ces catégories de médecins diffèrent en ce sens qu'une catégorie a méconnu une « condition matérielle », alors que l'autre a méconnu une « condition procédurale ». Il ressort plus précisément de la motivation de la décision de renvoi que la juridiction a quo établit une distinction entre, d'une part, le médecin qui pratique l'euthanasie sur un patient majeur ou mineur émancipé capable et conscient sans satisfaire à une des conditions de l'article 3, § 1er, de la loi du 28 mai 2002Documents pertinents retrouvés type loi prom. 28/05/2002 pub. 22/06/2002 numac 2002009590 source ministere de la justice Loi relative à l'euthanasie fermer et, d'autre part, le médecin qui pratique l'euthanasie sur un tel patient sans satisfaire à une des conditions ou procédures visées à l'article 3, §§ 2 à 5, et à l'article 5 de la loi du 28 mai 2002Documents pertinents retrouvés type loi prom. 28/05/2002 pub. 22/06/2002 numac 2002009590 source ministere de la justice Loi relative à l'euthanasie fermer.

Dans l'interprétation de la juridiction a quo, la disposition en cause a pour effet, dans les deux situations, que le médecin commet un acte illicite qui réunit les éléments constitutifs du délit d'« empoisonnement » au sens de l'article 397 du Code pénal.

B.7.3. La Cour examine la disposition en cause dans l'interprétation donnée par la juridiction a quo, laquelle n'est pas manifestement erronée.

B.8.1. Ni le libellé de la question préjudicielle, ni l'examen des motifs de la décision de renvoi ne permettent à la Cour de comprendre en quoi la disposition en cause serait incompatible avec l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme. En ce qu'elle porte sur le respect de cette disposition, la question préjudicielle n'est pas recevable.

B.8.2. La partie défenderesse devant la juridiction a quo fait valoir que la disposition en cause, dans l'interprétation soumise à la Cour, n'est pas compatible avec les articles 12 et 14 de la Constitution, avec l'article 7 de la Convention européenne des droits de l'homme, avec l'article 49 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et avec l'article 15 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques. Il n'appartient cependant pas à une partie devant la juridiction a quo de définir l'objet et l'étendue de la question préjudicielle.

B.9. Le principe d'égalité et de non-discrimination n'exclut pas qu'une différence de traitement soit établie entre des catégories de personnes, pour autant qu'elle repose sur un critère objectif et qu'elle soit raisonnablement justifiée. Ce principe s'oppose, par ailleurs, à ce que soient traitées de manière identique, sans qu'apparaisse une justification raisonnable, des catégories de personnes se trouvant dans des situations qui, au regard de la mesure critiquée, sont essentiellement différentes.

L'existence d'une telle justification doit s'apprécier en tenant compte du but et des effets de la mesure critiquée ainsi que de la nature des principes en cause; le principe d'égalité et de non-discrimination est violé lorsqu'il est établi qu'il n'existe pas de rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et le but visé.

B.10.1. La disposition en cause n'a ni pour but ni pour effet d'instaurer une nouvelle incrimination. Elle vise à dépénaliser, à des conditions strictes, un comportement déterminé qui est qualifié d'infraction. En tant que telle, la disposition en cause détermine aussi les conditions auxquelles le comportement en question est qualifié d'infraction et peut être puni.

B.10.2. L'appréciation de la gravité d'une infraction et de la sévérité avec laquelle l'infraction peut être punie relève du pouvoir d'appréciation du législateur. Il peut imposer des peines particulièrement lourdes dans des matières où les infractions sont de nature à porter gravement atteinte aux droits fondamentaux des individus et aux intérêts de la collectivité. La Cour empiéterait sur le domaine réservé au législateur si, en s'interrogeant sur la proportionnalité des sanctions pénales instaurées, elle émettait elle-même une appréciation sur la base d'un jugement de valeur concernant le caractère répréhensible des faits en cause.

L'appréciation de la Cour doit se limiter aux cas dans lesquels le choix du législateur aboutit à traiter de manière manifestement déraisonnable des infractions comparables ou à produire des effets disproportionnés, eu égard aux objectifs poursuivis par le législateur.

B.11.1. Il ressort de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme que les autorités nationales disposent d'une marge d'appréciation étendue, mais pas illimitée, lorsqu'elles réglementent l'euthanasie (CEDH, 20 janvier 2011, Haas c. Suisse, § 55; 19 juillet 2012, Koch c. Allemagne, § 70; 12 avril 2022, Lings c. Danemark, § 41; 4 octobre 2022, Mortier c. Belgique, §§ 142-143).

B.11.2. La Cour doit tenir compte du fait que, dans des matières éthiques, il appartient avant tout au législateur d'apprécier les choix qui doivent être faits en la matière (voy. l'arrêt n° 153/2015 du 29 octobre 2015, B.19.2).

B.11.3. Le législateur a l'obligation positive de prévoir des garanties efficaces pour prévenir les abus en ce qui concerne la pratique de l'euthanasie. Il appartient dès lors au législateur de mettre « en place une procédure propre à assurer qu'une décision de mettre fin à sa vie corresponde bien à la libre volonté de l'intéressé » (CEDH, 20 janvier 2011, Haas c. Suisse, §§ 57-58; 4 octobre 2022, Mortier c. Belgique, §§ 142-143).

B.12.1. En vertu du paragraphe 1er de la disposition en cause, le médecin qui pratique une euthanasie ne commet pas d'infraction s'il s'est assuré que le patient est un majeur capable ou un mineur émancipé capable qui est conscient au moment de sa demande, que la demande est formulée de manière volontaire, réfléchie et répétée et qu'elle ne résulte pas d'une pression extérieure et que le patient se trouve dans une situation médicale sans issue et fait état d'une souffrance physique ou psychique constante et insupportable qui ne peut être apaisée et qui résulte d'une affection accidentelle ou pathologique grave et incurable.

Ces aspects portent sur la situation médicale du patient en tant que telle, ainsi que sur la « qualité » du patient et sur le contenu de la demande d'euthanasie. Ils portent dès lors sur les conditions de fond auxquelles l'euthanasie peut être pratiquée.

B.12.2.1. Pour que le médecin ne commette pas d'infraction lorsqu'il pratique l'euthanasie, il doit en outre, en vertu du paragraphe 1er de la disposition en cause, avoir respecté les autres conditions et procédures prescrites par la loi du 28 mai 2002Documents pertinents retrouvés type loi prom. 28/05/2002 pub. 22/06/2002 numac 2002009590 source ministere de la justice Loi relative à l'euthanasie fermer.

B.12.2.2. La plupart de ces conditions et procédures, en ce qui concerne l'euthanasie pratiquée sur un patient capable et conscient, figurent dans les paragraphes 2 et 3 de la disposition en cause.

Ainsi, le médecin doit informer le patient de son état de santé et de son espérance de vie, se concerter avec le patient sur sa demande d'euthanasie et évoquer avec lui les possibilités thérapeutiques encore envisageables ainsi que les possibilités qu'offrent les soins palliatifs et leurs conséquences (article 3, § 2, 1°). Le médecin doit en outre mener avec le patient plusieurs entretiens, espacés d'un délai raisonnable afin de s'assurer de la persistance de la souffrance physique ou psychique du patient et de sa volonté réitérée (article 3, § 2, 2°). Il faut également consulter un ou, si le décès du patient n'interviendra pas à brève échéance, deux autres médecins indépendants, qui doivent rédiger un rapport concernant leurs constatations (article 3, § 2, 3°, et § 3, 1°). Le médecin doit ensuite s'entretenir de la demande du patient avec l'équipe soignante, si celle-ci existe (article 3, § 2, 4°), et également, si telle est la volonté du patient, avec ses proches (article 3, § 2, 5°).

Ainsi qu'il ressort des travaux préparatoires mentionnés en B.3.3, ces conditions et procédures entendent garantir un dialogue « approfondi » entre le médecin et le patient, dans le cadre duquel d'autres interlocuteurs doivent, le cas échéant, être associés. Les auteurs de la proposition de loi souhaitaient ainsi « n'imposer dans la loi que les conditions procédurales garantissant au patient le respect de ses droits et de sa volonté » (Doc. parl., Sénat, 1999-2000, n° 2-244/1, pp. 4-5).

Les prescriptions contenues dans l'article 3, §§ 2 et 3, de la loi du 28 mai 2002Documents pertinents retrouvés type loi prom. 28/05/2002 pub. 22/06/2002 numac 2002009590 source ministere de la justice Loi relative à l'euthanasie fermer, qui sont en substance des prescriptions à caractère matériel, sont dès lors étroitement liées aux conditions de fond de l'euthanasie, mentionnées en B.12.1, en ce sens qu'elles doivent en premier lieu permettre au médecin concerné de s'assurer que ces conditions de fond sont remplies.

B.12.2.3. La loi du 28 mai 2002Documents pertinents retrouvés type loi prom. 28/05/2002 pub. 22/06/2002 numac 2002009590 source ministere de la justice Loi relative à l'euthanasie fermer prévoit en outre plusieurs conditions et procédures à caractère formel. Ainsi, la demande d'euthanasie du patient doit être actée par écrit (article 3, § 4) et toutes les demandes formulées par le patient, de même que les actes du médecin traitant et leurs résultats, en ce compris les rapports des médecins consultés, doivent être régulièrement consignés dans le dossier médical du patient (article 3, § 5). Le médecin qui pratique l'euthanasie est en outre tenu de fournir à la Commission fédérale de contrôle et d'évaluation, dans les quatre jours, le document d'enregistrement dûment complété, visé à l'article 7 de la loi (article 5).

Ainsi qu'il ressort des travaux préparatoires de la loi du 28 mai 2002Documents pertinents retrouvés type loi prom. 28/05/2002 pub. 22/06/2002 numac 2002009590 source ministere de la justice Loi relative à l'euthanasie fermer, ces prescriptions visent en premier lieu à permettre un contrôle a posteriori, par la Commission fédérale de contrôle et d'évaluation ou par les autorités judiciaires, des circonstances concrètes dans lesquelles l'euthanasie a été pratiquée (Doc. parl., Sénat, 2000-2001, n° 2-244/4, pp.4 et 12). L'obligation de communiquer, par le biais du document d'enregistrement précité, certaines données à la Commission fédérale de contrôle et d'évaluation concernant chaque euthanasie qui a été pratiquée permet également à cette Commission d'accomplir les missions visées à l'article 9 de la loi du 28 mai 2002Documents pertinents retrouvés type loi prom. 28/05/2002 pub. 22/06/2002 numac 2002009590 source ministere de la justice Loi relative à l'euthanasie fermer, qui portent notamment sur l'évaluation de l'application de cette loi (ibid., pp. 12-13). Par ailleurs, la déclaration à la Commission fédérale de contrôle et d'évaluation ne peut avoir lieu par définition qu'après que l'euthanasie a été pratiquée et que le patient est donc déjà décédé.

B.13. Il ressort des travaux préparatoires cités en B.6 que le législateur a sciemment choisi de ne pas prévoir une incrimination distincte, assortie d'une échelle des peines spécifique, en cas de non-respect des conditions et des procédures de la loi du 28 mai 2002Documents pertinents retrouvés type loi prom. 28/05/2002 pub. 22/06/2002 numac 2002009590 source ministere de la justice Loi relative à l'euthanasie fermer qui ne sont pas des conditions de fond de l'euthanasie.

Plusieurs amendements en ce sens ont été rejetés et un sénateur a relevé « qu'il n'y a pas d'infraction lorsque les conditions et procédures prévues par la loi sont respectées », ce qui signifie « évidemment, a contrario, qu'en cas de non-respect de l'une d'entre elles, le juge appréciera si et comment il faut condamner » (Doc. parl., Sénat, 2000-2001, n° 2-244/22, p. 1177).

Ensuite, selon les déclarations précitées faites au cours des travaux préparatoires de la loi du 28 mai 2002Documents pertinents retrouvés type loi prom. 28/05/2002 pub. 22/06/2002 numac 2002009590 source ministere de la justice Loi relative à l'euthanasie fermer, toutes les conditions légales « sont essentielles et ont la même valeur » (Ann., Sénat, 2001-2002, 23 octobre 2001, n° 2-150, p. 14) et « pour être légalement acceptable en tant que telle, l'euthanasie est [...] l'aboutissement de tout un processus qui doit être entièrement suivi par le médecin de A à Z [...]. En fonction de l'importance du sujet, on ne peut parler [...] de bureaucratie lorsqu'on entoure le patient du maximum de précautions pour cette décision capitale. [...] toutes les conditions que le patient ou que le médecin doivent remplir sont importantes » (Ann., Sénat, 2001-2002, 24 octobre 2001, n° 2-151, p. 20). En ce qui concerne spécifiquement l'obligation, faite au médecin, de déclarer, conformément à l'article 5 de la loi du 28 mai 2002Documents pertinents retrouvés type loi prom. 28/05/2002 pub. 22/06/2002 numac 2002009590 source ministere de la justice Loi relative à l'euthanasie fermer, l'euthanasie à la Commission fédérale de contrôle et d'évaluation, un sénateur a en outre souligné que cette obligation de déclaration « est non pas une condition fondamentale, mais une condition procédurale très importante. En effet si elle n'est pas respectée, tout contrôle ou toute enquête devient impossible » (Doc. parl., Sénat, 2000-2001, n° 2-244/22, p. 1177).

B.14. Le législateur a dès lors estimé que toute condition et procédure prescrites par la loi du 28 mai 2002Documents pertinents retrouvés type loi prom. 28/05/2002 pub. 22/06/2002 numac 2002009590 source ministere de la justice Loi relative à l'euthanasie fermer constituent un élément essentiel du cadre législatif dans lequel l'euthanasie est permise, dans la mesure où toutes ces conditions et procédures contribuent à ce que l'euthanasie soit uniquement pratiquée dans les circonstances visées par le législateur, ou que les organes compétents soient en mesure d'exercer un contrôle effectif a posteriori.

Il s'ensuit que, compte tenu du pouvoir d'appréciation étendu dont dispose le législateur en l'espèce, il n'est pas déraisonnable d'exiger de la part des médecins concernés qu'ils respectent scrupuleusement toutes ces conditions et procédures et que toute infraction, quelle qu'en soit la gravité, puisse entraîner des sanctions pénales.

B.15.1. En ce qui concerne les effets de l'euthanasie sur le plan pénal, la disposition en cause n'établit toutefois aucune distinction entre les différentes conditions et procédures prescrites par la loi du 28 mai 2002Documents pertinents retrouvés type loi prom. 28/05/2002 pub. 22/06/2002 numac 2002009590 source ministere de la justice Loi relative à l'euthanasie fermer. Cette disposition a donc pour effet que tout non-respect d'une de ces conditions ou procédures peut donner lieu à un traitement identique des médecins concernés sur le plan pénal. Ce traitement identique implique qu'ils pourront tous être condamnés en application des dispositions existantes du Code pénal qui incriminent l'acte, pratiqué par un tiers, qui met intentionnellement fin à la vie d'une personne, à la demande de celle-ci.

La juridiction a quo souligne qu'en pareil cas, les éléments constitutifs de l'infraction d'« empoisonnement » seront réunis, lequel est défini, en vertu de l'article 397 du Code pénal, comme étant « le meurtre commis par le moyen de substances qui peuvent donner la mort plus ou moins promptement, de quelque manière que ces substances aient été employées ou administrées » et qui est puni de la réclusion à perpétuité. A cet égard, il est également indiqué dans les travaux préparatoires cités en B.6.2 que « le juge saisi de l'affaire devra travailler avec des qualifications de droit commun telles que l'homicide, les coups et blessures volontaires ayant entraîné la mort, etc. Si une des conditions procédurales n'a pas été respectée et pour peu que le dossier soit transmis par la commission, le juge n'aura d'autre base juridique à sa disposition que les qualifications précitées » (Doc. parl., Sénat, 2000-2001, n° 2-244/22, p. 777).

B.15.2. La circonstance que le législateur a estimé que toutes ces conditions et procédures étaient essentielles n'empêche pas qu'elles puissent fondamentalement différer en ce qui concerne leur nature et leur objectif, ainsi qu'il ressort de ce qui est dit en B.12. Il convient également de relever que, même lorsqu'un médecin a pratiqué l'euthanasie sans qu'il soit satisfait à toutes les conditions et procédures visées à l'article 3, §§ 2 à 5, et à l'article 5 de la loi du 28 mai 2002Documents pertinents retrouvés type loi prom. 28/05/2002 pub. 22/06/2002 numac 2002009590 source ministere de la justice Loi relative à l'euthanasie fermer, il n'est pas nécessairement établi que le patient ne se trouvait pas dans les circonstances visées à l'article 3, § 1er, de cette même loi.

B.15.3. L'application d'une seule et même incrimination à tout non-respect des conditions et procédures de la loi du 28 mai 2002Documents pertinents retrouvés type loi prom. 28/05/2002 pub. 22/06/2002 numac 2002009590 source ministere de la justice Loi relative à l'euthanasie fermer, quelle qu'en soit l'importance, est pertinente au regard de l'objectif du législateur consistant à veiller à ce que le médecin concerné respecte strictement les conditions et procédures légales dans la pratique de l'euthanasie. Un tel système d'incrimination entraîne toutefois des conséquences disproportionnées.

Ainsi, le juge a seulement la possibilité de prendre en compte les éléments pertinents de la cause dans les limites des dispositions existantes du Code pénal sur la base desquelles l'euthanasie peut être punie. Les dispositions du Code pénal relatives aux différents types de meurtre, en particulier l'article 397 de ce Code, prévoient en outre les peines privatives de liberté les plus lourdes; ces peines ne sont manifestement pas raisonnablement proportionnées à la gravité du comportement réprimé, lorsque seules certaines conditions et procédures autres que les conditions de fond visées à l'article 3, § 1er, de la loi du 28 mai 2002Documents pertinents retrouvés type loi prom. 28/05/2002 pub. 22/06/2002 numac 2002009590 source ministere de la justice Loi relative à l'euthanasie fermer font défaut pour que l'infraction ne soit pas constituée.

Comme il est dit en B.12.2.3, la déclaration à la Commission fédérale de contrôle et d'évaluation, qui entend en premier lieu permettre un contrôle a posteriori, ne peut s'effectuer par définition qu'après que l'euthanasie a été pratiquée et que le patient est donc déjà décédé.

Par conséquent, cette déclaration n'a en tout état de cause aucune incidence directe sur le respect, par le médecin, des conditions et procédures applicables préalablement à l'euthanasie et au cours de celle-ci.

L'obligation positive incombant au législateur de prévoir des garanties efficaces en vue de prévenir les abus lorsqu'une euthanasie est pratiquée ne va pas jusqu'à nécessiter un système de sanctions à ce point sévère. Un tel système de sanctions a des effets disproportionnés au regard de l'objectif du législateur consistant à veiller à ce que le médecin concerné respecte strictement les conditions et procédures légales.

B.15.4. Contrairement à ce que font valoir le Conseil des ministres et les parties civiles devant la juridiction a quo, la possibilité dont dispose le juge pénal de prendre en compte des circonstances atténuantes conformément à l'article 79 du Code pénal n'aboutit pas à une autre conclusion.

Cette possibilité, qui tend en substance à individualiser la mesure de la peine en fonction des caractéristiques concrètes de l'infraction ou de l'auteur, ne saurait suffire en l'espèce pour compenser l'identité de traitement non justifiable qu'emporte chaque méconnaissance d'une condition ou d'une procédure prévues par la loi du 28 mai 2002Documents pertinents retrouvés type loi prom. 28/05/2002 pub. 22/06/2002 numac 2002009590 source ministere de la justice Loi relative à l'euthanasie fermer. Par ailleurs, la prise en compte de circonstances atténuantes est facultative et peut, tout au plus, aboutir à une diminution de la peine dans les limites fixées par les articles 80 à 85 du Code pénal, mais est sans incidence sur la déclaration de culpabilité et sur la qualification de l'infraction en tant que telle.

B.15.5. Il est également sans importance que la Commission fédérale de contrôle et d'évaluation ne puisse transmettre le dossier au procureur du Roi, conformément à l'article 8, alinéa 3, de la loi du 28 mai 2002Documents pertinents retrouvés type loi prom. 28/05/2002 pub. 22/06/2002 numac 2002009590 source ministere de la justice Loi relative à l'euthanasie fermer, que sur la base d'une décision prise par une majorité des deux tiers, ce qui permettrait, selon les parties civiles devant la juridiction a quo, qu'il soit tenu compte de la gravité de l'infraction concrète aux conditions et procédures légales. Ainsi que l'a également observé la section de législation du Conseil d'Etat, le contrôle opéré par la Commission fédérale de contrôle et d'évaluation ne modifie en effet pas le pouvoir du ministère public d'enclencher l'action publique de sa propre initiative, dans le cadre ou non d'une déclaration ou d'une plainte, ou la possibilité dont dispose une personne lésée de déposer plainte avec constitution de partie civile devant le juge d'instruction (Doc. parl., Sénat, 2000-2001, n° 2-244/21, p. 9).

B.16. Les mots « et qu'il respecte les conditions et procédures prescrites par la présente loi » figurant dans l'article 3, § 1er, in fine, de la loi du 28 mai 2002Documents pertinents retrouvés type loi prom. 28/05/2002 pub. 22/06/2002 numac 2002009590 source ministere de la justice Loi relative à l'euthanasie fermer ne sont dès lors pas compatibles avec les articles 10 et 11 de la Constitution, en ce que cette disposition a pour effet que tout non-respect des conditions et procédures de la loi du 28 mai 2002Documents pertinents retrouvés type loi prom. 28/05/2002 pub. 22/06/2002 numac 2002009590 source ministere de la justice Loi relative à l'euthanasie fermer, par le médecin qui pratique l'euthanasie dans les circonstances visées au paragraphe 1er de cette disposition, peut donner lieu à une seule et même incrimination conformément aux dispositions existantes du Code pénal sur la base desquelles l'euthanasie peut être punie.

Il appartient au législateur d'adopter, dans le respect des articles 10 et 11 de la Constitution, une réglementation visant à remédier à l'inconstitutionnalité constatée. Ce constat d'inconstitutionnalité n'a par ailleurs aucune incidence sur la dépénalisation de l'euthanasie en tant que telle, lorsque les conditions et procédures prescrites par la loi du 28 mai 2002Documents pertinents retrouvés type loi prom. 28/05/2002 pub. 22/06/2002 numac 2002009590 source ministere de la justice Loi relative à l'euthanasie fermer ont été respectées.

Quant à la seconde question préjudicielle B.17. Par la seconde question préjudicielle, la juridiction a quo demande à la Cour si l'article 3 de la loi du 28 mai 2002Documents pertinents retrouvés type loi prom. 28/05/2002 pub. 22/06/2002 numac 2002009590 source ministere de la justice Loi relative à l'euthanasie fermer, tel qu'il est applicable dans l'instance soumise au juge a quo, est compatible avec les articles 10 et 11 de la Constitution, lus en combinaison ou non avec l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, « en ce que l'acte d'un médecin qui, à la demande expresse d'une personne majeure et capable, administre à cette personne une substance entraînant son décès, l'intention du médecin de donner la mort étant uniquement dictée par la demande de cette personne de mettre fin à sa souffrance physique ou psychique constante et insupportable qui ne peut être apaisée médicalement, est assimilé à l'acte d'une personne quelconque qui tue une autre personne intentionnellement en lui administrant une substance entraînant la mort, et ce, si le médecin, dans le cadre de son acte, n'a pas respecté toutes les conditions et procédures prescrites par la loi du 28 mai 2002Documents pertinents retrouvés type loi prom. 28/05/2002 pub. 22/06/2002 numac 2002009590 source ministere de la justice Loi relative à l'euthanasie fermer relative à l'euthanasie ».

B.18. Eu égard au constat d'inconstitutionnalité formulé en réponse à la première question préjudicielle, la réponse à la seconde question préjudicielle n'est manifestement pas utile à la solution du litige soumis au juge a quo.

B.19. La seconde question préjudicielle n'appelle pas de réponse.

Par ces motifs, la Cour dit pour droit : Les mots « et qu'il respecte les conditions et procédures prescrites par la présente loi » figurant dans l'article 3, § 1er, in fine, de la loi du 28 mai 2002Documents pertinents retrouvés type loi prom. 28/05/2002 pub. 22/06/2002 numac 2002009590 source ministere de la justice Loi relative à l'euthanasie fermer « relative à l'euthanasie », dans sa version applicable avant l'entrée en vigueur de la loi du 28 février 2014 « modifiant la loi du 28 mai 2002Documents pertinents retrouvés type loi prom. 28/05/2002 pub. 22/06/2002 numac 2002009590 source ministere de la justice Loi relative à l'euthanasie fermer relative à l'euthanasie, en vue d'étendre l'euthanasie aux mineurs », violent les articles 10 et 11 de la Constitution, en ce que cette disposition a pour effet que tout non-respect des conditions et procédures de la loi du 28 mai 2002Documents pertinents retrouvés type loi prom. 28/05/2002 pub. 22/06/2002 numac 2002009590 source ministere de la justice Loi relative à l'euthanasie fermer, par le médecin qui pratique l'euthanasie dans les circonstances visées au paragraphe 1er de cette disposition, peut donner lieu à une seule et même incrimination conformément aux dispositions existantes du Code pénal sur la base desquelles l'euthanasie peut être punie.

Ainsi rendu en langue néerlandaise et en langue française, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, le 20 octobre 2022.

Le greffier, F. Meersschaut Le président, L. Lavrysen

^