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Arrêt
publié le 06 juillet 2021

Extrait de l'arrêt n° 43/2021 du 11 mars 2021 Numéro du rôle : 7244 En cause : le recours en annulation partielle du décret de la Région wallonne du 17 janvier 2019 « relatif à la lutte contre la pollution atmosphérique liée à la circulation La Cour constitutionnelle, composée des présidents F. Daoût et L. Lavrysen, et des juges J.-P. (...)

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COUR CONSTITUTIONNELLE


Extrait de l'arrêt n° 43/2021 du 11 mars 2021 Numéro du rôle : 7244 En cause : le recours en annulation partielle du décret de la Région wallonne du 17 janvier 2019 « relatif à la lutte contre la pollution atmosphérique liée à la circulation des véhicules », introduit par Dominique Ramaekers.

La Cour constitutionnelle, composée des présidents F. Daoût et L. Lavrysen, et des juges J.-P. Moerman, T. Merckx-Van Goey, P. Nihoul, T. Giet, R. Leysen, J. Moerman, M. Pâques et Y. Kherbache, assistée du greffier P.-Y. Dutilleux, présidée par le président F. Daoût, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet du recours et procédure Par requête adressée à la Cour par lettre recommandée à la poste le 13 août 2019 et parvenue au greffe le 19 août 2019, Dominique Ramaekers a introduit un recours en annulation totale ou partielle des articles 1er à 4, 7, 17 et 20 du décret de la Région wallonne du 17 janvier 2019 « relatif à la lutte contre la pollution atmosphérique liée à la circulation des véhicules » (publié au Moniteur belge du 21 février 2019). (...) II. En droit (...) Quant aux dispositions attaquées et à leur contexte B.1.1. Le décret de la Région wallonne du 17 janvier 2019 « relatif à la lutte contre la pollution atmosphérique liée à la circulation des véhicules » (ci-après : le décret du 17 janvier 2019) instaure une interdiction progressive de circulation pour certains véhicules sur le territoire de la Région wallonne en fonction de leur euronorme et du type de moteur dont ils sont équipés, et permet l'instauration de zones de basses émissions.

B.1.2. L'article 2 du décret du 17 janvier 2019 contient une interdiction échelonnée de circulation pour certains véhicules.

Il dispose : « § 1er. Est interdite, uniquement pour ce qui concerne les véhicules de la catégorie M1 : 1° à partir du 1er janvier 2023, la circulation d'un véhicule qui ne répond à aucune euronorme ou qui répond à l'euronorme 1;2° à partir du 1er janvier 2024, la circulation d'un véhicule qui répond à l'euronorme 2;3° à partir du 1er janvier 2025, la circulation d'un véhicule qui répond à l'euronorme 3;4° à partir du 1er janvier 2026, la circulation d'un véhicule qui répond à l'euronorme 4;5° à partir du 1er janvier 2028, la circulation d'un véhicule équipé d'un moteur diesel qui répond à l'euronorme 5;6° à partir du 1er janvier 2030, la circulation d'un véhicule équipé d'un moteur diesel qui répond à l'euronorme 6, à l'exclusion des véhicules équipé d'un moteur diesel qui répond à l'euronorme 6d-TEMP ou à l'euronorme 6d ou à une euronorme supérieure. § 2. Pour des motifs environnementaux ou sanitaires, le Gouvernement peut interdire la circulation de véhicules qui ne sont pas visés au § 1er. Dans ce cas, le Gouvernement en détermine la liste et les échéances. § 3. Le Gouvernement peut déterminer des mesures d'accompagnement destinées aux propriétaires de véhicules dont la circulation est interdite en vertu du présent décret ».

B.1.3. L'article 3 du décret du 17 janvier 2019 prévoit pour certains véhicules des autorisations de circuler au-delà des échéances fixées par l'article 2, § 1er.

Il s'agit notamment de l'autorisation en faveur « [des] véhicules répondant au moins à l'euronorme 4, acquis avant la date du 1er janvier 2019, pour autant qu'ils ne soient pas cédés à un tiers » pour une durée complémentaire déterminée par le Gouvernement (article 3, § 1er, 1°) et en faveur des « véhicules qui parcourent annuellement moins de 3 000 km » (article 3, § 1er, 2°).

Le Gouvernement wallon peut définir d'autres exceptions à l'interdiction de circuler (article 3, § 2).

B.1.4.1. La « zone de basses émissions » est définie comme « la zone dont l'accès aux véhicules motorisés est restreint ou interdit, de manière temporaire ou permanente, en fonction des nuisances environnementales causées par ces véhicules et de la planification prévue à l'article 4 » (article 1er, 1°, du décret du 17 janvier 2019).

B.1.4.2. Les zones de basses émissions peuvent être créées au niveau régional ou communal.

Ainsi, le Gouvernement wallon peut créer une ou plusieurs zones de basses émissions, permanente ou temporaire, sur le territoire de la Région wallonne afin d'améliorer la qualité de l'air (article 7 du décret du 17 janvier 2019).

Par ailleurs, « de manière permanente, pour certains moments fixes de la journée ou certaines périodes de l'année, une commune peut proposer au Gouvernement [wallon] la création, par règlement communal complémentaire de circulation, d'une ou de plusieurs zones de basses émissions sur les voiries communales et régionales qui se trouvent sur son territoire, à l'exception des autoroutes » (article 9, § 1er, alinéa 1er, du décret du 17 janvier 2019).

B.1.5. L'article 4 du décret du 17 janvier 2019, qui règle l'accès des véhicules aux zones de basses émissions, dispose : « § 1er. L'accès à une zone de basses émissions est autorisé uniquement aux : 1° véhicules qui n'appartiennent pas aux catégories M et N;2° véhicules électriques, les véhicules hybrides avec une émission de CO2 maximum de 50 grammes au kilomètre, et véhicules hydrogènes;3° véhicules à moteur des catégories M et N, immatriculés en Belgique ou à l'étranger, qui remplissent les conditions suivantes : a) à partir du 1er janvier 2020, aux véhicules dont : i.le moteur diesel répond au moins à l'euronorme IV ou 4; ii. le moteur à essence, au LPG ou au CNG répond au moins à l'euronorme II ou 2; b) à partir du 1er janvier 2022, aux véhicules dont : i.le moteur diesel répond au moins à l'euronorme V ou 5; ii. le moteur à essence, au LPG ou au CNG répond au moins à l'euronorme III ou 3; c) à partir du 1er janvier 2025, aux véhicules dont : i.le moteur diesel répond au moins à l'euronorme VI ou 6; ii. le moteur à essence, au LPG ou au CNG répond au moins à l'euronorme IV ou 4; [...] § 3. Le Gouvernement peut compléter la liste des véhicules autorisés à accéder aux zones de basses émissions telle que visée au paragraphe 1er sur base de : 1° l'impact des véhicules sur la pollution atmosphérique;2° leur motorisation;3° leur âge;4° le cas échéant, leur niveau d'entretien. Le Gouvernement définit les exceptions à la restriction du droit d'accès en zone de basses émissions visé au paragraphe 1er, en fonction : 1° de la nature, du type ou de l'utilisation faite du véhicule concerné;2° du moment de la journée. Le Gouvernement fixe les modalités selon lesquelles des dérogations individuelles, temporaires ou permanentes, sont accordées. Pour ce faire, il peut tenir compte de critères socio-économiques et de la situation particulière des usagers, notamment des personnes résidant à l'intérieur des zones de basses émissions. § 4. Pour des motifs environnementaux ou sanitaires, le Gouvernement peut restreindre ou interdire la circulation de véhicules équipés des motorisations qu'il détermine et selon les échéances qu'il fixe ».

B.1.6. Les catégories de véhicules prévues dans les dispositions précitées sont les catégories qui sont fixées par l'arrêté royal du 15 mars 1968 « portant règlement général sur les conditions techniques auxquelles doivent répondre les véhicules automobiles, leurs remorques, leurs éléments ainsi que les accessoires de sécurité » (article 1er, 7°, du décret du 17 janvier 2019).

B.1.7.1. L'article 1er, § 1er, de l'arrêté royal du 15 mars 1968, précité, établit la classification suivante des véhicules par catégorie : - la catégorie M vise les « véhicules à moteur conçus et construits pour le transport de passagers et ayant au moins quatre roues »; - la catégorie M1 vise les « véhicules conçus et construits pour le transport de passagers comportant, outre le siège du conducteur, huit places assises au maximum »; - la catégorie M2 vise les « véhicules conçus et construits pour le transport de passagers comportant, outre le siège du conducteur, plus de huit places assises et ayant une masse maximale ne dépassant pas 5 tonnes »; - la catégorie M3 vise les « véhicules conçus et construits pour le transport de passagers comportant, outre le siège du conducteur, plus de huit places assises et ayant une masse maximale supérieure à 5 tonnes »; - la catégorie N vise les « véhicules à moteur conçus et construits pour le transport de marchandises et ayant au moins quatre roues »; - la catégorie N1 vise les « véhicules conçus et construits pour le transport de marchandises ayant un poids maximal ne dépassant pas 3,5 tonnes »; - la catégorie N2 vise les « véhicules conçus et construits pour le transport de marchandises ayant un poids maximal supérieur à 3,5 tonnes, mais ne dépassant pas 12 tonnes »; - la catégorie N3 vise les « véhicules conçus et construits pour le transport de marchandises ayant un poids maximal supérieur à 12 tonnes ».

B.1.7.2. Conformément à l'article 1er, § 1er, de l'arrêté royal du 10 octobre 1974 « portant règlement général sur les conditions techniques auxquelles doivent répondre les cyclomoteurs et les motocyclettes ainsi que leurs remorques », la catégorie L regroupe les cyclomoteurs, les motocyclettes ou motocycles, les tricycles et quadricycles à moteur.

B.1.7.3. L'article 17 du décret du 17 janvier 2019 érige en infraction le fait de ne pas respecter l'interdiction de circuler de certains véhicules sur l'ensemble du territoire régional et l'accès réglementé à une zone de basses émissions.

Il dispose : « Commet une infraction de deuxième catégorie au sens de l'article D.151 du Livre Ier du Code de l'Environnement, celui qui : 1° contrevient à l'article 2; [...] 3° accède à une zone de basses émissions en contravention à l'article 4; [...] ».

B.1.8. L'article 20, 2°, du décret du 17 janvier 2019 modifie l'article D.146 du Code wallon de l'environnement. Depuis lors, les agents visés par l'article D.140 du Code de l'environnement sont autorisés à « consulter et [à] prendre une copie des données administratives nécessaires, tels les documents légalement prescrits qui doivent être en possession du conducteur d'un véhicule et plus largement tous les documents utiles à l'identification du véhicule, du conducteur ou de la personne au nom de laquelle le véhicule est immatriculé ».

B.2. Il ressort des travaux préparatoires qu'en adoptant le décret attaqué du 17 janvier 2019, le législateur décrétal a entendu créer « un cadre pour lutter contre les polluants atmosphériques et les particules fines liées à la circulation des véhicules et pour s'aligner et atteindre au minimum les prescrits européens » (Doc. parl., Parlement wallon, 2018-2019, n° 1226/1, pp. 4 et 24). La pollution atmosphérique demeure en effet « le principal facteur environnemental lié aux maladies et décès prématurés » (ibid., p. 3) et « est en grande partie due aux gaz d'échappement, qui causent des dommages environnementaux dont l'eutrophisation, les maladies respiratoires et cardiovasculaires et contribuent au réchauffement de la planète » (ibid., pp. 3-4).

Quant au désistement partiel relatif à l'article 3 du décret du 17 janvier 2019 B.3.1. Dans son mémoire en réponse, la partie requérante se désiste du recours, en ce qu'il est dirigé contre l'article 3, § 1er, 1° et 2°, et § 2, du décret attaqué du 17 janvier 2019.

B.3.2. Rien ne s'oppose, en l'espèce, à ce que la Cour décrète ce désistement.

Quant à l'étendue et à la recevabilité du recours B.4. Le Gouvernement wallon estime qu'à la lumière de l'exposé des moyens et de l'intérêt de la partie requérante, le recours en annulation n'est recevable qu'en ce qu'il poursuit l'annulation de l'article 2, § 1er, 3°, de l'article 4, § 1er, 3), a), i, de l'article 7, de l'article 17 et de l'article 20, 2°, du décret du 17 janvier 2019.

B.5.1. La Cour détermine l'étendue du recours en annulation en fonction du contenu de la requête et en particulier sur la base de l'exposé des moyens. La Cour limite son examen aux dispositions contre lesquelles des griefs sont effectivement dirigés.

B.5.2. Il ressort de l'exposé des moyens, et compte tenu du désistement précité du recours en ce qu'il est dirigé contre l'article 3, que la critique de la partie requérante vise exclusivement l'article 1er, 1°, l'article 2, § 1er, l'article 4, l'article 7, l'article 17 et l'article 20, 2°, du décret du 17 janvier 2019. La partie requérante expose suffisamment en quoi ces dispositions transgresseraient les normes de référence invoquées dans les moyens.

B.6.1. La Constitution et la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle imposent à toute personne physique ou morale qui introduit un recours en annulation de justifier d'un intérêt. Ne justifient de l'intérêt requis que les personnes dont la situation pourrait être affectée directement et défavorablement par la norme attaquée.

B.6.2. En tant que propriétaire d'un véhicule de la catégorie M1 diesel répondant à l'euronorme 3, la partie requérante ne peut être affectée directement et défavorablement en ce qui concerne l'article 2, § 1er, que par le 3° de cette disposition, lequel interdit la circulation d'un tel véhicule sur le territoire de la Région wallonne à partir du 1er janvier 2025. En cette même qualité, elle peut être affectée par les articles 1er, 1°, 4 et 7, qui prévoient l'instauration de zones de basses émissions dans lesquelles le véhicule de la partie requérante n'est pas autorisé à circuler, par l'article 17, qui sanctionne le non-respect des articles 2 et 4, et par l'article 20, 2°, qui autorise les agents concernés à consulter les données administratives nécessaires.

La Cour limite donc son examen à ces dispositions.

Quant au fond En ce qui concerne le premier moyen B.7. La partie requérante prend un premier moyen de la violation, par l'article 1er, 1°, l'article 2, § 1er, 3°, l'article 4, § 1er, 3°, et l'article 7 du décret du 17 janvier 2019, des articles 35 et 39 de la Constitution, lus en combinaison avec la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles, notamment son article 6, § 4, 3° (première branche), et de la violation des articles 10, 11 et 34 de la Constitution, lus en combinaison avec le Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (ci-après : le TFUE), notamment son titre I, et en particulier ses articles 2, 4 et 91, et avec la Directive 2014/45/UE du Parlement européen et du Conseil du 3 avril 2014 « relative au contrôle technique périodique des véhicules à moteur et de leurs remorques, et abrogeant la directive 2009/40/CE » (ci-après : la Directive 2014/45/UE) (seconde branche).

B.8. En vertu de l'article 142, alinéa 2, de la Constitution et de l'article 1er de la loi spéciale du 6 janvier 1989, la Cour est compétente pour statuer sur les recours en annulation d'une loi, d'un décret ou d'une règle visée à l'article 134 de la Constitution pour cause de violation des règles qui sont établies par la Constitution ou en vertu de celle-ci pour déterminer les compétences respectives de l'autorité fédérale, des communautés et des régions et pour cause de violation des articles du titre II (« Des Belges et de leurs droits ») et des articles 143, § 1er, 170, 172 et 191 de la Constitution.

B.9.1. L'article 35 de la Constitution dispose : « L'autorité fédérale n'a de compétences que dans les matières que lui attribuent formellement la Constitution et les lois portées en vertu de la Constitution même.

Les communautés ou les régions, chacune pour ce qui la concerne, sont compétentes pour les autres matières, dans les conditions et selon les modalités fixées par la loi. Cette loi doit être adoptée à la majorité prévue à l'article 4, dernier alinéa.

Disposition transitoire La loi visée à l'alinéa 2 détermine la date à laquelle le présent article entre en vigueur. Cette date ne peut pas être antérieure à la date d'entrée en vigueur du nouvel article à insérer au titre III de la Constitution, déterminant les compétences exclusives de l'autorité fédérale ».

La loi visée à l'alinéa 2 de l'article 35 de la Constitution n'a pas encore été adoptée. Cette disposition constitutionnelle n'est donc pas encore entrée en vigueur, de sorte que la Cour n'est pas compétente pour statuer sur le respect de celle-ci.

B.9.2. L'article 34 de la Constitution dispose : « L'exercice de pouvoirs déterminés peut être attribué par un traité ou par une loi à des institutions de droit international public ».

Cette disposition constitutionnelle n'a pas pour objet de déterminer les compétences respectives de l'autorité fédérale et des entités fédérées. La Cour n'est donc pas compétente pour statuer sur le respect des règles que ces dispositions énoncent.

B.9.3. En ce qu'il est pris de la violation des articles 34 et 35 de la Constitution, le moyen est irrecevable.

B.10.1. Ensuite, contrairement à ce que fait valoir le Gouvernement wallon, il n'est pas exigé que toutes les dispositions de la loi spéciale du 8 août 1980 dont la violation est invoquée soient identifiées dans le moyen si, comme en l'espèce, il ressort suffisamment de la requête quelles sont les règles répartitrices de compétences visées.

B.10.2. Par ailleurs, la Cour est compétente pour vérifier si les dispositions soumises à son contrôle violent les normes d'une directive européenne, lues en combinaison avec les dispositions constitutionnelles au regard desquelles la Cour peut exercer son contrôle en vertu de l'article 142 de la Constitution, comme en l'espèce les articles 10 et 11 de la Constitution. A l'inverse de ce que fait valoir le Gouvernement wallon, la partie requérante n'est pas tenue de démontrer au préalable une absence ou une insuffisance de transposition de la directive en droit interne.

B.10.3. L'exception d'irrecevabilité est rejetée.

Première branche B.11. La partie requérante soutient qu'en interdisant de manière permanente la circulation de certains véhicules sur tout le territoire de la Région wallonne (article 2 du décret du 17 janvier 2019) ainsi qu'en autorisant le Gouvernement wallon à créer des zones de basses émissions régionales dont l'accès est réglementé pour les véhicules à moteur (article 1er, 1°, article 4 et article 7 du décret du 17 janvier 2019), le législateur décrétal a empiété, d'une part, sur la compétence de l'autorité fédérale en matières de police générale et de réglementation relative à la circulation et aux transports et, d'autre part, sur la compétence de l'autorité fédérale pour fixer les prescriptions techniques auxquelles doivent répondre les véhicules automobiles.

B.12.1. Selon l'article 6, § 1er, II, alinéa 1er, 1°, de la loi spéciale du 8 août 1980, qui a été adopté en exécution de l'article 39 de la Constitution, les régions sont compétentes en matière de « protection de l'environnement, notamment celle du sol, du sous-sol, de l'eau et de l'air contre la pollution et les agressions, ainsi que [de] lutte contre le bruit ».

B.12.2. La Région wallonne est donc compétente en matière de protection de l'environnement contre la pollution atmosphérique.

B.13. Il faut considérer que le Constituant et le législateur spécial, dans la mesure où ils n'en disposent pas autrement, ont attribué aux communautés et aux régions toute la compétence d'édicter les règles propres aux matières qui leur ont été transférées.

B.14.1. Par l'article 2 du décret du 17 janvier 2019, le législateur décrétal interdit progressivement la circulation de certains véhicules sur tout le territoire de la Région wallonne, en fonction de leur euronorme et leur type de moteur. L'article 7 du même décret permet l'instauration de zones de basses émissions régionales, permanentes ou temporaires, dont l'accès aux véhicules motorisés est réglementé par l'article 4 du même décret.

B.14.2. Ces dispositions contiennent des mesures pour lutter contre la pollution atmosphérique et relèvent à ce titre de la compétence des régions en matière d'environnement visée par l'article 6, § 1er, II, alinéa 1er, 1°, de la loi spéciale du 8 août 1980.

B.15. La Cour doit encore examiner si, en interdisant la circulation de certains véhicules sur tout le territoire de la Région wallonne, le législateur décrétal n'a pas empiété sur les compétences de l'autorité fédérale, d'une part, en matière de police générale et de réglementation relative à la circulation et aux transports et, d'autre part, en matière de prescriptions techniques qui s'appliquent aux véhicules en vue de leur mise en circulation ou aux véhicules déjà en circulation.

B.16.1. L'autorité fédérale est compétente pour la police générale et la réglementation relative à la circulation et aux transports, et pour les prescriptions techniques en matière de moyens de communication et de transport, bien que les gouvernements régionaux doivent être associés à l'élaboration des règles s'y rapportant (article 6, § 4, 3°, de la loi spéciale du 8 août 1980).

Selon les travaux préparatoires de cette disposition (Doc. parl., Chambre, S.E. 1988, n° 516/1, p. 21), la « police générale » concerne les réglementations de police applicables aux divers modes de transports, telles que : « - la police de la circulation routière; - le règlement général des voies navigables; - le règlement de police sur les chemins de fer; - la police sur le transport de personnes par tram, pré-métro, métro, autobus et autocar; - la police de la navigation maritime et de la navigation aérienne ».

B.16.2. Les règlements généraux que le Roi peut arrêter sur la base de l'article 1er de la loi du 16 mars 1968Documents pertinents retrouvés type loi prom. 16/03/1968 pub. 21/10/1998 numac 1998000446 source ministere de l'interieur Loi relative à la police de la circulation routière, coordonnée par l'arrêté royal du 16 mars 1968 portant coordination des lois relatives à la police de la circulation routière . - Traduction allemande Le texte q(...) - la loi du 10 octobre 1967 contenant le Code judiciaire (Moniteur belge du 31 octobre 1967); - (...) fermer « relative à la police de la circulation routière » relèvent des règles de la police générale et de la réglementation relative aux communications et aux transports.

B.16.3. Les dispositions attaquées sont des mesures de lutte contre la pollution atmosphérique ciblant les véhicules dont les émissions atmosphériques sont importantes. Si elles ont nécessairement une incidence sur l'usage des véhicules qu'elles visent, elles ne modifient pas pour autant la police générale de la circulation.

B.17. Par ailleurs, en interdisant la circulation sur le territoire de la Région wallonne aux véhicules répondant à une certaine euronorme et équipés d'un certain type de moteur, même si ces véhicules sont en bon état de marche et exempts de défaillances techniques, le législateur décrétal n'est pas intervenu dans la compétence fédérale en matière de prescriptions techniques auxquelles les véhicules en circulation doivent répondre.

Comme il est dit en B.16.3, l'interdiction de circulation attaquée est une mesure de lutte contre la pollution atmosphérique. Bien qu'elle implique, de par sa nature, que certains véhicules ne puissent plus circuler sur le territoire régional, cette interdiction ne détermine pas les exigences techniques auxquelles les véhicules doivent répondre pour garantir la sécurité routière et la protection de l'environnement au sens de la Directive 2014/45/UE. Contrairement à ce que fait valoir la partie requérante, la mesure contestée ne peut pas non plus être assimilée à l'instauration d'un cas de défaillance technique supplémentaire à ceux qui peuvent être constatés lors du contrôle technique des véhicules.

B.18. Le premier moyen, en sa première branche, n'est pas fondé.

Seconde branche B.19. La partie requérante soutient que la Région wallonne n'était pas compétente pour adopter le décret du 17 janvier 2019 puisque l'Union européenne a exercé au préalable sa compétence en matière de contrôle technique des véhicules par la Directive 2014/45/UE. Cette matière relèverait des compétences partagées entre l'Union européenne et les Etats membres, au sens de l'article 2, paragraphe 2, du TFUE, qui dispose : « Lorsque les traités attribuent à l'Union une compétence partagée avec les Etats membres dans un domaine déterminé, l'Union et les Etats membres peuvent légiférer et adopter des actes juridiquement contraignants dans ce domaine. Les Etats membres exercent leur compétence dans la mesure où l'Union n'a pas exercé la sienne. Les Etats membres exercent à nouveau leur compétence dans la mesure où l'Union a décidé de cesser d'exercer la sienne ».

B.20. Comme il est dit en B.16.3, le décret attaqué concerne des mesures pour lutter contre la pollution de l'air et n'établit pas ainsi des prescriptions techniques auxquelles doivent répondre les véhicules en circulation afin de garantir la sécurité de la circulation routière. Le décret attaqué ne concerne pas davantage le contrôle technique des véhicules, qui est réglé par la Directive 2014/45/UE. Le premier moyen, en sa seconde branche, repose donc sur une prémisse erronée et il n'est pas fondé pour cette raison. La Cour ne doit donc pas non plus poser à la Cour de justice de l'Union européenne la question préjudicielle suggérée par la partie requérante.

B.21. Le premier moyen, en sa seconde branche, n'est pas fondé.

En ce qui concerne le deuxième moyen B.22. Le deuxième moyen est pris de la violation, par l'article 1er, 1°, l'article 2, § 1er, 3°, l'article 4, § 1er, 3°, a), i, l'article 7 et l'article 17 du décret du 17 janvier 2019, des articles 10, 11 et 16 de la Constitution, lus en combinaison avec l'article 1er du Premier Protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme (première branche), et des articles 10 et 11 de la Constitution, lus en combinaison avec l'article 49 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne (seconde branche).

B.23. Contrairement à ce que fait valoir le Gouvernement wallon, il ressort suffisamment de la requête en quoi les dispositions soumises au contrôle de la Cour violeraient les normes de référence visées dans le moyen. Il ressort en outre des mémoires du Gouvernement wallon qu'il a pu répondre aux griefs formulés par la partie requérante. Le moyen répond dès lors aux exigences de l'article 6 de la loi spéciale du 6 janvier 1989.

L'exception d'irrecevabilité est rejetée.

Première branche B.24. La partie requérante fait valoir que l'interdiction de circulation pour certains véhicules sur l'ensemble du territoire de la Région wallonne (article 2 du décret du 17 janvier 2019) et la limitation de l'accès aux zones de basses émissions régionales (article 4 du même décret) portent atteinte au droit de propriété en ce que l'interdiction de circulation n'est pas proportionnée au but poursuivi.

B.25.1. L'article 16 de la Constitution dispose : « Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique, dans les cas et de la manière établis par la loi, et moyennant une juste et préalable indemnité ».

L'article 1er du Premier Protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme dispose : « Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens.

Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international.

Les dispositions précédentes ne portent pas atteinte au droit que possèdent les Etats de mettre en vigueur les lois qu'ils jugent nécessaires pour réglementer l'usage des biens conformément à l'intérêt général ou pour assurer le paiement des impôts ou d'autres contributions ou des amendes ».

B.25.2. L'article 1er du Premier Protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme ayant une portée analogue à celle de l'article 16 de la Constitution, les garanties qu'il contient forment un ensemble indissociable avec celles qui sont inscrites dans cette disposition constitutionnelle, de sorte que la Cour en tient compte lors de son contrôle des dispositions attaquées.

B.25.3. L'article 1er du Protocole précité offre une protection non seulement contre l'expropriation ou la privation de propriété (premier alinéa, seconde phrase), mais également contre toute ingérence dans le droit au respect des biens (premier alinéa, première phrase) et contre toute réglementation de l'usage des biens (second alinéa).

B.26. Qu'elle s'applique à tout le territoire de la Région wallonne ou à une zone de basses émissions, l'interdiction de circulation pour certains véhicules a pour conséquence que les propriétaires des véhicules qui ne satisfont pas aux normes fixées par les articles 2 et 4 du décret du 17 janvier 2019 n'ont, sauf exception, plus accès à ce territoire ou à ces zones avec leur véhicule.

Les mesures contestées constituent dès lors une réglementation de l'usage des biens au sens du second alinéa de l'article 1er du Premier protocole additionnel, et relèvent du champ d'application de cette disposition conventionnelle, lue en combinaison avec l'article 16 de la Constitution.

B.27. Toute ingérence dans le droit de propriété doit réaliser un juste équilibre entre les impératifs de l'intérêt général et ceux de la protection du droit au respect des biens. Il faut qu'existe un rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et le but poursuivi.

B.28. Il ressort des travaux préparatoires que le décret attaqué « offre un cadre pour lutter contre les polluants atmosphériques et les particules fines liées à la circulation des véhicules et pour s'aligner et atteindre au minimum les prescrits européens » (Doc. parl., Parlement wallon, 2018-2019, n° 1226/1, p. 4; ibid., n° 1226/4, p. 3).En effet, « la pollution atmosphérique est en grande partie due aux gaz d'échappement, qui causent des dommages environnementaux dont l'eutrophisation, les maladies respiratoires et cardiovasculaires et contribuent au réchauffement de la planète » (Doc. parl., Parlement wallon, 2018-2019, n° 1226/1, pp. 3-4).

Les travaux préparatoires mentionnent encore : « Le programme européen 'Air pur pour l'Europe' (2013) et le rapport de l'Agence européenne de l'Environnement (2014) indiquent qu'en termes de statistiques, la qualité de l'air s'est nettement améliorée en Europe ces dernières années.

Ils font également le constat indéniable que la pollution atmosphérique demeure le principal facteur environnemental lié aux maladies et décès prématurés évitables. Le nombre de décès qui lui sont imputables seraient dix fois supérieur à celui des décès par accident sur la route. La pollution de l'air cause plus de 400 000 décès prématurés en Europe dont 9 300 pour la Belgique ainsi que bon nombre de maladies et affections respiratoires et problèmes cardiovasculaires.

La pollution atmosphérique a également un impact sur les écosystèmes.

Les dommages économiques directs sont évalués à près de 23 milliards d'Euro par an.

L'Europe et ses Etats membres se sont fixés comme objectifs de réduire d'ici 2030 de 52 % les incidences des polluants sur la santé et en termes d'eutrophisation de réduire de 35 % la superficie des écosystèmes excédent les limites en termes d'eutrophisation, tout en prenant en compte un ensemble de données économiques, techniques et scientifiques sans oublier l'impact social. L'objectif de la stratégie européenne est de se rapprocher à termes, progressivement, des lignes directrices de l'OMS ce qui aurait pour effet que plus d'1 600 000 d'années de vie seraient gagnées dans l'Union européenne » (ibid., p. 3).

B.29.1. Les engagements en matière de réduction des émissions atmosphériques anthropiques de dioxyde de souffre (SO2), d'oxydes d'azote (NOx), de composés organiques volatils non méthaniques (COVNM), d'ammoniac (NH3) et de particules fines (PM2,5) de chaque Etat membre de l'Union européenne sont fixés dans la Directive (UE) 2016/2284 du Parlement européen et du Conseil du 14 décembre 2016 « concernant la réduction des émissions nationales de certains polluants atmosphériques, modifiant la directive 2003/35/CE et abrogeant la Directive 2001/81/CE » (ci-après : la Directive (UE) 2016/2284). Cette directive exige par ailleurs l'établissement, l'adoption et la mise en oeuvre de « programmes nationaux de lutte contre la pollution atmosphérique » ainsi que la surveillance et la déclaration des émissions atmosphériques et de leurs incidences.

A propos de cette directive, les travaux préparatoires indiquent : « La dernière Directive 2284/2016/CE [lire : (UE) 2016/2284] sur les plafonds d'émission nationaux impose des taux importants de réduction des polluants atmosphériques notamment d'ici 2030 par rapport à 2005.

Transposé à la Région wallonne, il s'agit de réduire les taux d'émissions de NOx de 59 % » (ibid., p. 3).

B.29.2. La Directive 2008/50/CE du Parlement européen et du Conseil du 21 mai 2008 « concernant la qualité de l'air ambiant et un air pur pour l'Europe » (ci-après : la Directive 2008/50/CE) prévoit la création de zones et d'agglomérations sur l'ensemble du territoire des Etats membres pour évaluer et gérer la qualité de l'air ambiant. Pour l'évaluation de la qualité de l'air ambiant, des seuils d'évaluation s'appliquent à certains polluants atmosphériques, dont le dioxyde d'azote et les oxydes d'azote et les particules fines.

La Cour de justice de l'Union européenne a jugé que les Etats membres doivent prendre toutes les mesures nécessaires pour se conformer aux valeurs limites fixées pour la qualité de l'air par la Directive 2008/50/CE (CJUE, 19 novembre 2014, C-404/13, ClientEarth, points 30-31).

B.30. L'interdiction pour certains véhicules de circuler sur le territoire de la Région wallonne et la création de zones de basses émissions sont des mesures par lesquelles le législateur décrétal entend répondre au minimum aux exigences européennes en matière de lutte contre les polluants atmosphériques. A l'instar des Directives (UE) 2016/2284 et 2008/50/CE, ces mesures poursuivent l'objectif d'intérêt général de la protection de l'environnement et celui de la protection de la santé humaine.

B.31. La Cour doit encore vérifier si les mesures contestées ménagent un juste équilibre entre les impératifs de l'intérêt général et ceux de la protection du droit au respect des biens.

B.32.1. L'article 23, alinéa 3, 2° et 4°, de la Constitution charge les législateurs compétents de garantir le droit à la protection de la santé et le droit à la protection d'un environnement sain. Afin de protéger la santé humaine et l'environnement, il est particulièrement important d'éviter, de prévenir ou de réduire les émissions de polluants atmosphériques nocifs.

B.32.2. Bien que la Convention européenne des droits de l'homme ne mentionne pas formellement le droit à un environnement sain, sa protection relève d'une préoccupation sociale essentielle (CEDH, 27 novembre 2007, Hamer c. Belgique, § 79). De plus, il y a atteinte au droit au respect de la vie privée et familiale lorsque la pollution atmosphérique affecte des personnes directement et très gravement. Les polluants atmosphériques nocifs émis par des véhicules engendrent effectivement un risque d'incidence négative grave sur la santé, en particulier dans les régions à forte densité de population où le trafic est important (CEDH, décision, 12 mai 2009, Greenpeace e.V. et autres c. Allemagne, § 1). Des impératifs économiques et même certains droits fondamentaux, comme le droit de propriété, ne doivent pas nécessairement se voir accorder la primauté face à des considérations relatives à la protection de l'environnement et de la santé publique.

Ainsi, des contraintes sur le droit de propriété peuvent être admises, à condition certes de respecter un juste équilibre entre les intérêts individuels en cause et ceux de la société dans son ensemble (CEDH, 27 novembre 2007, Hamer c. Belgique, § § 79-80).

B.33. Si, comme il ressort des travaux préparatoires, les normes européennes de qualité de l'air n'ont plus été dépassées depuis 2014 (Doc. parl., Parlement wallon, 2018-2019, n° 1226/1, p. 3, et ibid., n° 1226/4, p.3), il n'en résulte pas pour autant que le législateur décrétal serait empêché de prendre des mesures supplémentaires pour réduire davantage encore les émissions atmosphériques nuisibles, d'autant que ces normes de qualité de l'air sont nettement moins strictes que les lignes directrices préconisées par l'Organisation mondiale de la santé pour la protection publique. Le législateur décrétal dispose d'une large autonomie dans les matières qui lui sont attribuées par la Constitution et par le législateur spécial en vertu de celle-ci. Cette autonomie permet aux régions de définir, si elles le souhaitent, une politique de protection de l'environnement plus ambitieuse que celle qui est fixée au niveau européen, sans qu'il ne soit, de ce fait, automatiquement porté atteinte au droit de propriété.

B.34.1. L'interdiction de circuler pour certains véhicules de la catégorie M1, instaurée par l'article 2 du décret du 17 janvier 2019, est progressive. Concrètement, l'interdiction de circulation est organisée de manière échelonnée en six phases, entre le 1er janvier 2023 et le 1er janvier 2030, de manière à viser dans un premier temps les véhicules sans euronorme ou répondant à l'euronorme 1, ensuite les véhicules répondant respectivement à l'euronorme 2, 3 et 4, pour viser, enfin les véhicules équipés d'un moteur diesel répondant à l'euronorme 5 et 6 (moyennant quelques exceptions).

Le phasage prévu par l'article 2 du décret vise à bannir progressivement des routes wallonnes les véhicules les plus polluants pour l'atmosphère, identifiés selon leur ancienneté et le type de moteur dont ils sont équipés. Par ailleurs, il accorde aux propriétaires des véhicules concernés suffisamment de temps pour trouver des solutions de remplacement adéquates à l'usage de leur véhicule et tient raisonnablement compte de la durée de vie moyenne d'un véhicule.

B.34.2. Le choix du critère de l'euronorme pour identifier les véhicules les plus polluants est raisonnablement justifié. D'une part, il s'agit d'un critère objectif qui renvoie à des valeurs limites en matière d'émissions de polluants atmosphériques et de particules fines déterminées au niveau européen et en fonction de la date de la première mise en circulation du véhicule. Il est sans importance à cet égard que les véhicules regroupés au sein d'une même euronorme puissent émettre des quantité d'émissions différentes, tout en respectant les seuils d'émissions européens. D'autre part, il permet de connaître aisément les véhicules concernés par l'interdiction de circulation, contrairement à ce qui serait le cas si l'on tenait compte des émissions réelles des véhicules, comme le suggère la partie requérante, lesquelles dépendent de la durée et des conditions d'utilisation de chaque véhicule considéré individuellement.

B.34.3. Pour atténuer les effets de l'interdiction, l'article 3 du décret du 17 janvier 2019 prévoit des exceptions à l'interdiction progressive de circulation, dont celle pour les véhicules qui parcourent annuellement moins de 3 000 km (article 3, § 1er, 2°). Les véhicules répondant au moins à l'euronorme 4, acquis avant la date du 1er janvier 2019, pour autant qu'ils ne soient pas cédés à un tiers, sont également autorisés à circuler au-delà des échéances, pour une durée complémentaire fixée par le Gouvernement wallon (article 3, § 1er, 1°). Cette dérogation vise « à ne pas piéger des consommateurs qui ont acquis un véhicule répondant à une des normes euro visées et qui n'étaient pas encore informés de l'interdiction programmée » (Doc. parl., Parlement wallon, 2018-2019, n° 1226/1, p. 6).

B.35.1. Concernant les zones de basses émissions, en vertu de l'article 4, § 1er, 3°, a), i, du décret du 17 janvier 2019, les véhicules de la catégorie M et N, immatriculés en Belgique ou à l'étranger, équipés d'un moteur diesel ne répondant pas au moins à l'euronorme IV ou 4, ne sont pas autorisés à accéder à une zone de basses émissions à partir du 1er janvier 2020.

B.35.2. Pour les véhicules à moteur des catégories M et N équipés d'un moteur thermique, le législateur décrétal s'est également fondé sur le critère de l'euronorme et il a prévu également une interdiction progressive d'accès à la zone de basses émissions, ce qui est raisonnablement justifié pour les mêmes motifs que ceux qui ont été exprimés en B.34.1 et B.34.2.

Par ailleurs, l'article 4, § 2, du décret du 17 janvier 2019 prévoit diverses dérogations. En vertu de l'article 4, § 3, alinéa 1er, du décret du 17 janvier 2019, le Gouvernement wallon peut compléter la liste des véhicules autorisés à accéder aux zones de basses émissions « sur base de : 1° l'impact des véhicules sur la pollution atmosphérique; 2° leur motorisation; 3° leur âge; 4° le cas échéant, leur niveau d'entretien ». Le Gouvernement wallon est également habilité à fixer des dérogations individuelles (article 4, § 3, alinéa 3).

B.36. En conséquence, le législateur décrétal a ménagé un juste équilibre entre l'intérêt général de la protection de l'environnement et celui de la santé humaine et les intérêts privés des propriétaires des véhicules concernés par l'interdiction de circulation.

L'ingérence dans le droit de propriété n'est pas disproportionnée.

B.37. Le deuxième moyen, en sa première branche, n'est pas fondé.

Seconde branche B.38. La partie requérante allègue que l'article 17 du décret du 17 janvier 2019 porte atteinte aux articles 10 et 11 de la Constitution, lus en combinaison avec l'article 49 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne. Elle conteste la proportionnalité des sanctions prévues par cette disposition en cas de non-respect de l'interdiction de circulation instaurée par l'article 2 et en cas d'accès à une zone de basses émissions en contravention avec l'article 4, en comparant ces sanctions à celles qui, en vertu de la loi du 16 mars 1968Documents pertinents retrouvés type loi prom. 16/03/1968 pub. 21/10/1998 numac 1998000446 source ministere de l'interieur Loi relative à la police de la circulation routière, coordonnée par l'arrêté royal du 16 mars 1968 portant coordination des lois relatives à la police de la circulation routière . - Traduction allemande Le texte q(...) - la loi du 10 octobre 1967 contenant le Code judiciaire (Moniteur belge du 31 octobre 1967); - (...) fermer « relative à la police de la circulation routière », sont applicables à certaines infractions au Code de la route.

B.39.1. L'article 17 du décret du 17 janvier 2019 dispose : « Commet une infraction de deuxième catégorie au sens de l'article D.151 du Livre Ier du Code de l'Environnement, celui qui : 1° contrevient à l'article 2; [...] 3° accède à une zone de basses émissions en contravention à l'article 4; [...] ».

En vertu de l'article D.151 du Code wallon de l'environnement, les infractions de deuxième catégorie sont punies d'un emprisonnement de huit jours à trois ans et d'une amende d'au moins 100 euros et au maximum de 1 000 000 euros ou d'une de ces peines seulement.

B.39.2. L'appréciation de la gravité d'une infraction et de la sévérité avec laquelle cette infraction peut être punie relève du pouvoir d'appréciation du législateur.

La Cour empiéterait sur le domaine réservé au législateur si, en s'interrogeant sur la justification des différences entre des sanctions, elle émettait chaque fois une appréciation sur la base d'un jugement de valeur concernant le caractère répréhensible des faits en cause par rapport à d'autres faits punissables et ne limitait pas son examen aux cas dans lesquels le choix du législateur contient une incohérence telle qu'il aboutit à une différence de traitement manifestement déraisonnable ou à une sanction manifestement disproportionnée.

B.40.1. Le fait de punir le non-respect de l'interdiction de circuler pour certains véhicules et l'accès non autorisé à une zone de basses émissions d'un emprisonnement de huit jours à trois ans et d'une amende d'au moins 100 euros et au maximum de 1 000 000 euros ou d'une de ces peines seulement, n'est pas manifestement disproportionné, compte tenu de ce que le juge peut, en fonction des cas d'espèce, choisir une sanction dans des fourchettes de peines suffisamment larges et infliger une de ces deux peines seulement.

B.40.2. Par ailleurs, l'existence de degrés de sévérité différents qui peuvent caractériser des sanctions instaurées par des législateurs différents résulte de l'exercice, par chaque législateur, de ses compétences respectives. Une telle différence ne peut en soi être jugée contraire aux articles 10 et 11 de la Constitution, lus ou non en combinaison avec l'article 49 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, ni induire l'absence de proportionnalité de la sanction plus sévère.

B.41. Le deuxième moyen, en sa seconde branche, n'est pas fondé.

En ce qui concerne le troisième moyen B.42. La partie requérante prend un troisième moyen de la violation, par les articles 2, § 1er, et 4, § 1er, 3°, du décret du 17 janvier 2019, des articles 10 et 11 de la Constitution, lus en combinaison avec l'article 1er du Douzième Protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme B.43. L'article 1er du Douzième Protocole additionnel comporte une interdiction générale de discrimination. Il dispose : « 1. La jouissance de tout droit prévu par la loi doit être assurée, sans discrimination aucune, fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur, la langue, la religion, les opinions politiques ou toutes autres opinions, l'origine nationale ou sociale, l'appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance ou toute autre situation. 2. Nul ne peut faire l'objet d'une discrimination de la part d'une autorité publique quelle qu'elle soit fondée notamment sur les motifs mentionnés au paragraphe 1 ». Le Douzième Protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme n'ayant pas été ratifié par la Belgique, la Cour ne peut en tenir compte lors de son contrôle.

B.44. La partie requérante estime, d'une part, que l'interdiction de circulation visée par l'article 2 du décret du 17 janvier 2019 est discriminatoire en ce qu'elle ne vise que les véhicules de la catégorie M1, à l'exclusion des autres véhicules et, d'autre part, que l'accès réglementé aux zones de basses émissions en vertu de l'article 4 de ce décret est discriminatoire en ce qu'il ne vise que les véhicules à moteur des catégories M et N, à l'exclusion des autres véhicules, dont ceux de catégorie L. B.45. L'interdiction de circuler pour certains véhicules, visée à l'article 2 du décret du 17 janvier 2019, concerne uniquement des véhicules de la catégorie M1, à savoir les « véhicules à moteur conçus et construits pour le transport de passagers comportant, outre le siège du conducteur, huit places assises au maximum » (article 1er, § 1er, de l'arrêté royal du 15 mars 1968 « portant règlement général sur les conditions techniques auxquelles doivent répondre les véhicules automobiles, leurs remorques, leurs éléments ainsi que les accessoires de sécurité »).

B.46. L'accès à une zone de basses émissions est autorisé, entre autres, aux véhicules qui n'appartiennent pas aux catégories M et N (article 4, § 1er, 1°, du décret du 17 janvier 2019) et aux véhicules à moteur de combustion des catégories M et N, immatriculés en Belgique ou à l'étranger, qui répondent à certaines euronormes (article 4, § 1er, 3°, du même décret). Les catégories M et N sont les véhicules à moteur conçus et construits pour le transport de passagers (catégorie M) ou pour le transport de marchandises (catégorie N) et ayant au moins quatre roues (article 1er, § 1er, de l'arrêté royal du 15 mars 1968).

B.47.1. En commission, le ministre a justifié le choix de viser prioritairement les véhicules particuliers (M1) pour l'interdiction généralisée de circulation comme suit : « Le mécanisme concerne les véhicules particuliers, à savoir ceux de la catégorie M1 et [...] en raison des alternatives existantes pour ces véhicules, ils constituent la priorité du Gouvernement » (Doc. parl., Parlement wallon, 2018-2019, n° 1226/4, p. 3). « L'interdiction générale n'a pas été étendue aux camions et aux camionnettes au vu de l'absence d'alternative suffisante à l'heure actuelle, mais [...] les voitures de société sont bien concernées » (ibid., p. 10). « La situation au niveau des camions évolue favorablement grâce au prélèvement kilométrique et [...] il constitue une incitation à avoir des véhicules plus propres. [...] la donne va également changer au niveau de l'impact des bus grâce à la livraison de 300 bus hybrides et électriques » (ibid., p. 6).

B.47.2. En séance plénière, le ministre a déclaré : « Dans le catalogue, des réclamations et des injustices pointées par un certain nombre de concitoyens, il y a aussi celle de dire : ' Pourquoi les véhicules des particuliers et pourquoi pas les transports, les camions, et cetera ? '.

Je pense que nous devons le faire avec les bus et, dans le contrat de service public que nous sommes en train de négocier, je souhaite inscrire clairement que, à l'horizon 2030, les bus diesel aient disparu. Il faut une trajectoire, pour cela. On sait que les bus, on les utilise jusqu'à leur 16e année. On y sera plus ou moins, mais il vaut mieux l'inscrire quand même. Nous travaillons à cet aspect-là.

Maintenant, il y a le problème des camions, des camionnettes, des véhicules qui ne sont pas concernés ici. C'est plus difficile, parce que, effectivement, les alternatives se développent moins vite. On sait que l'on aura des solutions. Il y a des modèles qui se développeront, mais c'est difficile aujourd'hui d'avoir un niveau d'exigence aussi important sur ce type de véhicules. Il faudra sans doute que, à travers un autre texte, on s'y attaque, à un moment donné » (Doc. parl., Parlement wallon, 2018-2019, mercredi 16 janvier 2019, C.R.I., n° 11, p. 38).

B.48.1. Il ressort des travaux préparatoires que l'interdiction de circulation prévue par l'article 2 du décret du 17 janvier 2019 ne concerne pas les véhicules de la catégorie N, qui regroupe les camionnettes et les camions, à défaut d'alternatives suffisantes, à l'heure actuelle, pour ces véhicules. Ces alternatives se développent moins rapidement que celles pour les voitures particulières équipées de moteurs à combustion classiques, comme par exemple des moteurs électriques.

B.48.2.1. Par ailleurs, les véhicules à moteur qui sont utilisés, soit partiellement, soit exclusivement, pour le transport par route de marchandises, et dont la masse maximale autorisée dépasse 3,5 tonnes sont soumis au système du prélèvement kilométrique instauré par le décret de la Région wallonne du 16 juillet 2015 « instaurant un prélèvement kilométrique à charge des poids lourds pour l'utilisation des routes ». Cette taxe kilométrique varie en fonction de l'euronorme du véhicule (article 7 du décret du 16 juillet 2015). Elle peut avoir un effet incitant pour les propriétaires de camions de plus de 3,5 tonnes de s'équiper de véhicules répondant à des euronormes élevées.

B.48.2.2. Outre le fait qu'il n'est pas certain qu'un système de prélèvement kilométrique puisse être instauré à faible coût pour les véhicules de la catégorie M1, comme le suggère la partie requérante, le choix de privilégier une interdiction de circulation, appliquée progressivement aux voitures les plus anciennes et donc les plus polluantes, relève du pouvoir d'appréciation du législateur. La Cour ne peut censurer un tel choix que s'il est dépourvu de justification raisonnable. La circonstance que le législateur aurait pu choisir d'autres mesures qu'une interdiction progressive de circulation pour certains véhicules, n'implique pas en soi l'absence de justification raisonnable du choix arrêté par le législateur décrétal.

B.48.3. Quant aux véhicules appartenant à la catégorie L, qui regroupe essentiellement les cyclomoteurs, les motocyclettes et les quads, il ressort du mémoire du Gouvernement wallon qu'ils ne sont visés ni par l'interdiction de circulation, ni par l'accès réglementé aux zones de basses émissions puisqu'ils dégagent peu d'émissions atmosphériques et parce qu'ils sont actuellement peu nombreux et tous équipés d'un moteur fonctionnant à l'essence.

B.48.4. Enfin, quant aux véhicules appartenant aux catégories M2 et M3, regroupant les bus et les minibus, il ressort des travaux préparatoires cités en B.47.1 et B.47.2 qu'en ce qui concerne les transports en commun, la Région wallonne a effectué une commande de 300 bus hybrides et électriques et que le ministre envisage de faire remplacer les bus diesel à l'horizon de 2030, compte tenu de la durée d'utilisation moyenne des bus en Région wallonne. En outre, le Gouvernement wallon indique dans son mémoire que l'exclusion des véhicules relevant des catégories M2 et M3 est justifiée par la volonté de promouvoir l'utilisation des transports en commun.

B.49. En conséquence, le choix du législateur décrétal de viser les véhicules particuliers de la catégorie M1 pour l'interdiction générale de circulation et les véhicules des catégories M et N équipés d'un moteur à combustion pour l'interdiction d'accès aux zones de basses émissions, à l'exclusion d'autres véhicules, n'est pas dépourvu de justification raisonnable.

B.50. Le troisième moyen n'est pas fondé.

En ce qui concerne le quatrième moyen B.51. La partie requérante prend un quatrième moyen de la violation de l'article 22 de la Constitution, lu en combinaison avec l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme, en ce que l'article 20, 2°, du décret du 17 janvier 2019, qui modifie l'article D.146 du Code wallon de l'environnement, confère un pouvoir illimité aux agents compétents pour consulter tous les documents utiles à l'identification du véhicule, du conducteur ou de la personne au nom de laquelle le véhicule est immatriculé et pour en prendre copie.

B.52.1. L'article 20, 2°, du décret du 17 janvier 2019 insère un 11° (lire : 12°) dans l'article D.146 du Code wallon de l'environnement.

Depuis cette modification, l'article D.146 dispose : « Les agents peuvent, dans l'accomplissement de leur mission : [...] [12°] consulter et prendre une copie des données administratives nécessaires, tels les documents légalement prescrits qui doivent être en possession du conducteur d'un véhicule et plus largement tous les documents utiles à l'identification du véhicule, du conducteur ou de la personne au nom de laquelle le véhicule est immatriculé ».

Depuis la modification du Code wallon de l'environnement par l'article 1er du décret du 6 mai 2019 « relatif à la délinquance environnementale », cette compétence des agents concernés est prévue par l'article D.162, 13°, du Code de l'environnement.

B.52.2. Les agents visés par l'article D.146 sont les agents chargés du contrôle du respect des dispositions visées par l'article D.138, alinéa 1er, du Code de l'environnement et de celles qui sont prises en vertu de ces dispositions.

Le décret du 17 janvier 2019 figure dans la liste des dispositions dont le respect est contrôlé par ces agents, depuis la modification de l'article D.138, alinéa 1er, du Code de l'environnement par l'article 18 du décret du 17 janvier 2019.

B.53.1. Le Constituant a recherché la plus grande concordance possible entre l'article 22 de la Constitution et l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme (Doc. parl., Chambre, 1992-1993, n° 997/5, p. 2).

La portée de cet article 8 est analogue à celle de la disposition constitutionnelle précitée, de sorte que les garanties que fournissent ces deux dispositions forment un tout indissociable.

B.53.2. Le droit au respect de la vie privée, tel qu'il est garanti par l'article 22 de la Constitution et par l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme, a pour but essentiel de protéger les personnes contre les ingérences dans leur vie privée.

Ce droit a une portée étendue et comprend entre autres la protection des données à caractère personnel et des informations personnelles.

B.53.3. Les droits que garantissent l'article 22 de la Constitution et l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme ne sont toutefois pas absolus. Ils n'excluent pas une ingérence d'une autorité publique dans l'exercice du droit au respect de la vie privée, mais exigent que cette ingérence soit prévue par une disposition législative suffisamment précise, qu'elle réponde à un besoin social impérieux dans une société démocratique et qu'elle soit proportionnée à l'objectif légitime qu'elle poursuit.

B.53.4. Le législateur décrétal dispose en la matière d'une marge d'appréciation. Cette marge n'est toutefois pas illimitée : pour qu'un régime légal soit compatible avec le droit au respect de la vie privée, il faut que le législateur ait ménagé un juste équilibre entre tous les droits et intérêts en cause.

B.53.5. Le législateur décrétal doit avoir égard à l'article 22, alinéa 1er, de la Constitution, en vertu duquel seul le législateur fédéral peut déterminer de manière générale dans quels cas et à quelles conditions le droit au respect de la vie privée et familiale peut être limité.

Certes, la circonstance qu'une ingérence dans la vie privée résulte de la réglementation d'une matière déterminée attribuée au législateur décrétal n'affecte pas cette compétence, mais ce dernier est tenu de respecter la réglementation fédérale générale, qui a valeur de réglementation minimale pour toute matière.

B.54. En ce que les dispositions attaquées visent la consultation et la prise de copie de données personnelles, ce qui constitue un traitement de données au sens du règlement (UE) 2016/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016 « relatif à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données, et abrogeant la directive 95/46/CE (règlement général sur la protection des données) » (ci-après : le RGPD), le législateur décrétal est lié par les garanties minimales de ce règlement.

L'absence de référence, dans la disposition attaquée, au RGPD n'y change rien, étant donné que ce règlement est directement applicable dans l'ordre juridique interne. Par ailleurs, rien dans la disposition attaquée ne permet de considérer que le législateur décrétal a méconnu les exigences du RGPD. B.55.1. La disposition attaquée poursuit un but légitime, consistant à assurer le respect du décret du 17 janvier 2019 dans le but de protéger l'environnement et la santé humaine.

B.55.2. La compétence des agents concernés de consulter les « données administratives nécessaires » et « tous les documents utiles à l'identification du véhicule, du conducteur ou de la personne au nom de laquelle le véhicule est immatriculé » et d'en prendre copie ne peut être utilisée que dans le cadre du contrôle de la conformité du véhicule avec les dispositions du décret du 17 janvier 2019, par exemple pour déterminer l'euronorme du véhicule. Contrairement à ce que soutient la partie requérante, les pouvoirs des agents, et donc l'ingérence dans la vie privée qui en résulte, ne sont pas illimités.

B.56. Le quatrième moyen n'est pas fondé.

Quant à la demande d'indemnité de procédure B.57.1. Le Gouvernement wallon sollicite une indemnité de procédure de 700 EUR. B.57.2. Ni l'article 142 de la Constitution, ni la loi spéciale du 6 janvier 1989 ne prévoient que la Cour puisse accorder une indemnité de procédure. La demande est rejetée.

Par ces motifs, la Cour - décrète le désistement du recours en ce qu'il porte sur l'article 3, § 1er, 1° et 2°, et § 2, du décret du 17 janvier 2019 « relatif à la lutte contre la pollution atmosphérique liée à la circulation des véhicules »; - rejette le recours pour le surplus; - rejette la demande d'indemnité de procédure.

Ainsi rendu en langue française, en langue néerlandaise et en langue allemande, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, le 11 mars 2021.

Le greffier, P.-Y. Dutilleux Le président, F. Daoût

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