publié le 16 décembre 2020
Extrait de l'arrêt n° 59/2020 du 7 mai 2020 Numéro du rôle : 7027 En cause : les questions préjudicielles concernant l'article 8 du décret de la Communauté française(...)
COUR CONSTITUTIONNELLE
Extrait de l'arrêt n° 59/2020 du 7 mai 2020 Numéro du rôle : 7027 En cause : les questions préjudicielles concernant l'article 8 du décret de la Communauté française du 4 janvier 1999 « relatif aux fonctions de promotion et de sélection » et l'article 1er de l'arrêté royal du 31 juillet 1969 « déterminant les fonctions de recrutement et les fonctions de sélection dont doivent être titulaires les membres du personnel de l'enseignement de l'Etat pour pouvoir être nommés aux fonctions de promotion de la catégorie du personnel auxiliaire d'éducation des établissements d'enseignement de l'Etat », tel qu'il a été modifié par les décrets de la Communauté française des 25 juillet 1996, 20 décembre 2001 et 30 avril 2009, posées par le Conseil d'Etat.
La Cour constitutionnelle, composée des présidents F. Daoût et A. Alen, et des juges T. Merckx-Van Goey, T. Giet, R. Leysen, J. Moerman et M. Pâques, assistée du greffier P.-Y. Dutilleux, présidée par le président F. Daoût, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet des questions préjudicielles et procédure Par l'arrêt n° 242.606 du 11 octobre 2018, dont l'expédition est parvenue au greffe de la Cour le 19 octobre 2018, le Conseil d'Etat a posé les questions préjudicielles suivantes : « L'abstention du législateur d'avoir inclus dans l'article 8 du décret du 4 janvier 1999 relatif aux fonctions de promotion et de sélection, parmi les membres du personnel pouvant bénéficier d'une nomination dans une fonction de sélection ou de promotion, tout ou partie des membres du personnel administratif, en particulier les comptables dont la fonction serait, selon le requérant, s'avérer comparable à celle des titulaires d'une fonction d'éducateur-économe qui bénéficient des prévisions de l'article 8 précité, viole-t-elle les articles 10 et 11 de la Constitution ? »; « L'abstention du législateur d'avoir inclus, dans l'article 1er de l'arrêté royal du 31 juillet 1969 déterminant les fonctions de recrutement et les fonctions de sélection dont doivent être titulaires les membres du personnel de l'enseignement de l'Etat pour pouvoir être nommés aux fonctions de promotion de la catégorie du personnel auxiliaire d'éducation des établissements d'enseignement de l'Etat, tel que modifié par le décret du Parlement de la Communauté française du 25 juillet 1996 relatif aux charges et emplois des Hautes Ecoles organisées ou subventionnées par la Communauté française, le décret du Parlement de la Communauté française du 20 décembre 2001 fixant les règles spécifiques à l'Enseignement supérieur artistique organisé en Ecoles supérieures des Arts (organisation, financement, encadrement, statut des personnels, droits et devoirs des étudiants), et le décret du Parlement de la Communauté française du 30 avril 2009 concernant la comptabilité des écoles et l'accès à certaines fonctions de sélection et de promotion, les titulaires d'une fonction de comptable parmi les membres du personnel pouvant être nommés à la fonction d'administrateur, alors que les titulaires d'une fonction d'éducateur-économe peuvent être nommés à la fonction d'administrateur, viole-t-elle les articles 10 et 11 de la Constitution ? ». (...) III. En droit (...) B.1.1. L'article 8 du décret de la Communauté française du 4 janvier 1999 « relatif aux fonctions de promotion et de sélection » (ci-après : le décret du 4 janvier 1999), tel qu'il s'appliquait avant son remplacement par l'article 72 du décret de la Communauté française du 14 mars 2019 « modifiant diverses dispositions relatives aux fonctions de directeur et directrice, aux autres fonctions de promotion et aux fonctions de sélection » (ci-après : le décret du 14 mars 2019), disposait : « Tout membre du personnel directeur et enseignant, du personnel directeur et auxiliaire d'éducation et du personnel paramédical nommé à titre définitif dans l'enseignement de la Communauté française dans une fonction donnant accès à une fonction de sélection ou de promotion, porteur d'un titre requis pour l'exercice d'une fonction donnant accès à la fonction de promotion ou de sélection considérée ainsi que du titre spécifique lorsqu'il est exigé pour la fonction de sélection ou de promotion considérée, peut y être nommé aux conditions suivantes : 1° exercer une fonction comprenant au moins la moitié du nombre minimum d'heures requis pour former une fonction à prestations complètes;2° compter l'ancienneté de service et l'ancienneté de fonction suivantes : - pour l'accès à une fonction de sélection, respectivement six ans et deux ans; - pour l'accès à une fonction de promotion, respectivement huit ans et six ans. 3° ne pas avoir encouru une peine disciplinaire, ni avoir fait l'objet d'un retrait de fonctions supérieures au cours des cinq années précédentes.Toutefois, il n'est pas tenu compte de la présente disposition lorsque le membre du personnel s'est vu attribuer la mention ' favorable ' à l'issue de la seconde année de stage, telle que visée à l'article 33, § 1er, alinéa 1er, du décret du 2 février 2007 fixant le statut des directeurs. 4° avoir reçu au moins la mention ' bon ' au dernier bulletin de signalement; 5° [...] 6° être titulaire du brevet en rapport avec la fonction à conférer;7° ne pas avoir fait l'objet, dans la fonction considérée, pendant les deux dernières années scolaires, d'un rapport défavorable tel que visé aux articles 75ter ou 91duodecies de l'arrêté royal du 22 mars 1969. Les dispositions de l'alinéa 1er ne sont pas d'application en ce qui concerne l'accès à la fonction de sélection de chef d'atelier d'un centre technique et pédagogique, et aux fonctions de promotion de directeur d'un centre technique et pédagogique, de directeur d'un centre d'auto-formation et de formation continuée, de directeur d'un centre de dépaysement et de plein air ou d'un directeur d'un centre technique horticole de l'enseignement de la Communauté française.
La condition visée à l'alinéa 1er, 6°, n'est pas requise pour l'accès à la fonction de sélection de coordonnateur de centre de technologies avancées ».
Selon les travaux préparatoires du décret du 4 janvier 1999, cette disposition « fixe les conditions générales d'accès aux fonctions de promotion et de sélection » (Doc. parl., Parlement de la Communauté française, 1998-1999, n° 274/1, p. 5).
Tel qu'il s'appliquait avant son remplacement par l'article 65, 2°, du décret du 14 mars 2019, l'article 1er, § 2, 1°, du décret du 4 janvier 1999 prévoyait que le décret n'était pas applicable « aux fonctions relevant de l'une des catégories suivantes : personnel social, personnel médical, personnel psychologique, personnel administratif, personnel de maîtrise, gens de métier et de service ».
B.1.2. En vertu de l'article 19, alinéa 1er, du décret du 4 janvier 1999, les brevets d'administrateur sont délivrés au terme de trois sessions de formation sanctionnées chacune par une épreuve distincte.
Ces sessions de formation sont organisées conformément à l'article 23 du décret du 4 janvier 1999.
L'article 23, alinéa 4, du décret du 4 janvier 1999, tel qu'il a été remplacé par l'article 52, q), du décret du 2 février 2007 « fixant le statut des directeurs », dispose : « Tout membre du personnel est admis à la formation à laquelle il désire s'inscrire sauf si, à la date de l'introduction de sa demande de participation, l'intéressé ne satisfait pas ou plus à toutes les conditions énoncées à l'article 8, alinéa 1er, à l'exception du point 6°, ou à l'alinéa 2, 1° et 2° du même article. Toutefois, l'ancienneté de service requise, visée à l'article 8, alinéa 1er, 2° pour l'admission à la formation est de quatre ans pour les formations donnant accès à une fonction de sélection et de 6 ans pour les formations donnant accès à une fonction de promotion ».
B.1.3. L'article 1er de l'arrêté royal du 31 juillet 1969 « déterminant les fonctions de recrutement et les fonctions de sélection dont doivent être titulaires les membres du personnel de l'enseignement de l'Etat pour pouvoir être nommés aux fonctions de promotion de la catégorie du personnel auxiliaire d'éducation des établissements d'enseignement de l'Etat » (ci-après : l'arrêté royal du 31 juillet 1969), tel qu'il a été modifié par l'article 16 du décret de la Communauté française du 30 avril 2009 « concernant la comptabilité des écoles et l'accès à certaines fonctions de sélection et de promotion » (ci-après : le décret du 30 avril 2009), avant son abrogation par l'article 144 du décret du 14 mars 2019, disposait : « Pour pouvoir être nommés à la fonction d'administrateur, les membres du personnel doivent être titulaires de l'une des fonctions de recrutement ou de sélection indiquées ci-après : surveillant-éducateur, surveillant-éducateur d'internat, secrétaire-bibliothécaire, secrétaire de direction, éducateur-économe.
Peuvent également accéder à la fonction d'administrateur, les proviseurs ou sous-directeurs et les sous-directeurs de l'enseignement secondaire inférieur nommés à titre définitif qui ont accédé à l'une de ces fonctions à partir d'une fonction du personnel auxiliaire d'éducation ».
B.1.4. Il résulte des dispositions précitées que, pour pouvoir s'inscrire aux formations organisées en vue de l'obtention du brevet d'administrateur permettant d'être nommé à ce titre dans un établissement d'enseignement de la Communauté française, le membre du personnel intéressé devait satisfaire aux conditions de nomination énoncées par l'article 8, alinéa 1er, du décret du 4 janvier 1999 et qu'il devait, notamment, être nommé à titre définitif dans l'enseignement de la Communauté française dans une des fonctions donnant accès à la fonction d'administrateur.
Quant aux questions préjudicielles B.2.1. La Cour est saisie de deux questions préjudicielles, posées par le Conseil d'Etat.
Par la première question préjudicielle, le juge a quo interroge la Cour sur la compatibilité, avec les articles 10 et 11 de la Constitution, de « l'abstention du législateur d'avoir inclus dans l'article 8 du décret du 4 janvier 1999 relatif aux fonctions de promotion et de sélection, parmi les membres du personnel pouvant bénéficier d'une nomination dans une fonction de sélection ou de promotion, tout ou partie des membres du personnel administratif, en particulier les comptables dont la fonction serait, selon le requérant, [...] comparable à celle des titulaires d'une fonction d'éducateur-économe ».
Par la seconde question préjudicielle, le juge a quo interroge la Cour sur la compatibilité, avec les articles 10 et 11 de la Constitution, de « l'abstention du législateur d'avoir inclus, dans l'article 1er de l'arrêté royal du 31 juillet 1969 déterminant les fonctions de recrutement et les fonctions de sélection dont doivent être titulaires les membres du personnel de l'enseignement de l'Etat pour pouvoir être nommés aux fonctions de promotion de la catégorie du personnel auxiliaire d'éducation des établissements d'enseignement de l'Etat, tel que modifié par le décret du Parlement de la Communauté française du 25 juillet 1996 relatif aux charges et emplois des Hautes Ecoles organisées ou subventionnées par la Communauté française, le décret du Parlement de la Communauté française du 20 décembre 2001 fixant les règles spécifiques à l'Enseignement supérieur artistique organisé en Ecoles supérieures des Arts (organisation, financement, encadrement, statut des personnels, droits et devoirs des étudiants), et le décret du Parlement de la Communauté française du 30 avril 2009 concernant la comptabilité des écoles et l'accès à certaines fonctions de sélection et de promotion, les titulaires d'une fonction de comptable parmi les membres du personnel pouvant être nommés à la fonction d'administrateur, alors que les titulaires d'une fonction d'éducateur-économe peuvent être nommés à la fonction d'administrateur ».
B.2.2. Le litige pendant devant le juge a quo porte sur la décision du 7 décembre 2016 de refus d'inscription du requérant devant le juge a quo aux formations organisées pour le brevet permettant d'accéder à la fonction d'administrateur, au motif que la fonction de comptable de l'intéressé ne lui permettait pas d'être nommé comme administrateur dans un établissement d'enseignement de la Communauté française. Cette décision de refus était fondée sur l'article 8 du décret du 4 janvier 1999 et sur l'article 1er de l'arrêté royal du 31 juillet 1969, tels qu'ils étaient applicables au moment de ladite décision.
Les modifications apportées par le décret du 14 mars 2019, en vigueur pour l'année scolaire 2019-2020 conformément à l'article 155, alinéa 1er, de ce décret, aux dispositions réglant les conditions de nomination à la fonction d'administrateur sont dès lors sans incidence sur l'examen des présentes questions préjudicielles.
B.2.3. Il ressort des faits de la cause et de la motivation de la décision de renvoi que les questions préjudicielles doivent s'entendre comme portant sur l'article 8 du décret du 4 janvier 1999, avant son remplacement par l'article 72 du décret du 14 mars 2019 (première question préjudicielle), et sur l'article 1er de l'arrêté royal du 31 juillet 1969, tel qu'il a été modifié par l'article 16 du décret du 30 avril 2009, avant son abrogation par l'article 144 du décret du 14 mars 2019 (seconde question préjudicielle), en ce que ces dispositions ne permettaient pas au titulaire de la fonction de comptable d'être nommé à la fonction d'administrateur dans un établissement d'enseignement de la Communauté française, alors qu'elles permettaient au titulaire de la fonction d'éducateur-économe d'être nommé à cette fonction d'administrateur.
La Cour examine les deux questions préjudicielles conjointement.
B.3.1. Selon le Gouvernement de la Communauté française, les questions préjudicielles ne seraient pas pertinentes pour la solution du litige car elles porteraient sur une abstention de légiférer dans une matière qui suppose un pouvoir d'appréciation, de sorte qu'en cas d'éventuel constat de lacune inconstitutionnelle, le juge ne pourrait combler cette lacune.
B.3.2. C'est en règle à la juridiction a quo qu'il appartient d'apprécier si la réponse à la question préjudicielle est utile à la solution du litige. Ce n'est que lorsque tel n'est manifestement pas le cas que la Cour peut décider que la question n'appelle pas de réponse.
B.3.3. Le juge a quo doit se prononcer sur un recours en annulation d'une décision de refus d'inscription aux formations en vue de l'obtention du brevet permettant d'être nommé à la fonction d'administrateur dans un établissement d'enseignement de la Communauté française, eu égard aux conditions de nomination à cette fonction telles qu'elles étaient applicables au moment de cette décision de refus. Cette fonction n'était pas accessible au titulaire de la fonction de comptable, alors qu'elle l'était au titulaire de la fonction d'éducateur-économe. A la demande de la partie requérante, le juge a quo pose des questions préjudicielles sur la compatibilité de ces conditions de nomination avec le principe d'égalité et de non-discrimination.
L'effet d'un éventuel constat de lacune inconstitutionnelle, selon qu'une telle lacune puisse ou non être comblée par le juge a quo, n'est pas de nature à remettre en cause la pertinence des questions préjudicielles posées.
Les questions préjudicielles ne sont pas manifestement inutiles à la solution du litige soumis au juge a quo.
B.4.1. Selon le Gouvernement de la Communauté française, les questions préjudicielles n'appelleraient pas de réponse car la critique développée par le requérant devant le juge a quo porterait en réalité non pas sur une abstention de légiférer, mais uniquement sur l'application de l'arrêté royal du 31 juillet 1969, soit une norme réglementaire que le juge a quo pourrait écarter en cas d'inconstitutionnalité, conformément à l'article 159 de la Constitution.
B.4.2. Il revient en règle à la juridiction a quo de déterminer les normes applicables au litige qui lui est soumis. Toutefois, lorsque des dispositions qui ne peuvent manifestement être appliquées à ce litige sont soumises à la Cour, celle-ci n'en examine pas la constitutionnalité.
B.4.3. Le juge a quo pose des questions préjudicielles, d'une part, sur l'article 8 du décret du 4 janvier 1999 et, d'autre part, sur l'article 1er de l'arrêté royal du 31 juillet 1969, modifié par l'article 16 du décret du 30 avril 2009, tels qu'ils s'appliquaient au moment de la décision de refus attaquée, en ce que le champ d'application de ces dispositions ne serait pas suffisamment large, dès lors qu'il ne permet pas au titulaire de la fonction de comptable d'être nommé à la fonction d'administrateur dans un établissement d'enseignement de la Communauté française.
B.4.4. La circonstance que l'article 8 du décret du 4 janvier 1999 ne s'appliquerait pas à la situation du requérant devant le juge a quo ou que ce dernier ne critiquerait en réalité pas cette disposition devant le juge a quo ne permet pas de considérer que la première question préjudicielle y relative n'appellerait pas de réponse.
B.4.5. Pour le surplus, avant son abrogation par le décret du 14 mars 2019, l'article 1er de l'arrêté royal du 31 juillet 1969 a été modifié par une disposition législative, à savoir l'article 16 du décret du 30 avril 2009, lequel a créé la fonction de comptable. La critique, contenue dans la seconde question préjudicielle et portant sur l'éventuelle discrimination entre les titulaires de la fonction de comptable et les titulaires de la fonction d'éducateur-économe, relève donc de la compétence de la Cour.
Quant au fond B.5. Le principe d'égalité et de non-discrimination n'exclut pas qu'une différence de traitement soit établie entre des catégories de personnes, pour autant qu'elle repose sur un critère objectif et qu'elle soit raisonnablement justifiée.
L'existence d'une telle justification doit s'apprécier en tenant compte du but et des effets de la mesure critiquée ainsi que de la nature des principes en cause; le principe d'égalité et de non-discrimination est violé lorsqu'il est établi qu'il n'existe pas de rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et le but visé.
B.6. Pour apprécier si les dispositions en cause sont compatibles avec les articles 10 et 11 de la Constitution, la Cour doit examiner si les titulaires de la fonction de comptable sont, en ce qui concerne les conditions de nomination à la fonction d'administrateur, dans une situation comparable à celle des titulaires de la fonction d'éducateur-économe.
B.7.1. L'article 7 de l'arrêté de l'Exécutif de la Communauté française du 2 octobre 1968 « déterminant et classant les fonctions des membres du personnel directeur et enseignant, du personnel auxiliaire d'éducation, du personnel paramédical, du personnel psychologique et du personnel social des établissements d'enseignement préscolaire, primaire, spécialisé, moyen, technique, artistique, de promotion sociale et supérieur non universitaire de la Communauté française et les fonctions des membres du personnel du service d'inspection chargé de la surveillance de ces établissements », tel qu'il a été modifié par le décret de la Communauté française du 11 avril 2014, dispose : « Les fonctions que peuvent exercer les membres du personnel auxiliaire d'éducation des établissements d'enseignement primaire, secondaire et supérieur non universitaire de l'Etat sont classées en fonctions de recrutement, en fonctions de sélection et en fonctions de promotion.
Les fonctions de recrutement que peuvent exercer les membres du personnel auxiliaire d'éducation des établissements d'enseignement supérieur non universitaire sont les suivantes : a) fonctions de recrutement 1.surveillant-éducateur; 2. surveillant-éducateur d'internat;3. secrétaire-bibliothécaire;4. bibliothécaire;5. conservateur adjoint du musée instrumental;6. conservateur du musée instrumental;7. chef de service. Les fonctions de sélection et de promotion que peuvent exercer les membres du personnel auxiliaire d'éducation des établissements d'enseignement primaire, secondaire et supérieur non universitaire de l'Etat sont les suivantes : b) fonctions de sélection 9.secrétaire de direction; 10. éducateur-économe;11. bibliothécaire principal;c) fonction de promotion 12.administrateur; 13. directeur d'un centre de dépaysement et de plein air ». Le titulaire de la fonction d'éducateur-économe et le titulaire de la fonction d'administrateur appartiennent tous deux au personnel auxiliaire d'éducation des établissements d'enseignement de la Communauté française. Au sein du personnel auxiliaire d'éducation, l'éducateur-économe est le titulaire d'une fonction de sélection et l'administrateur est le titulaire d'une fonction de promotion.
B.7.2. L'article 4, 2°, du décret du 6 juin 1994 « fixant le statut des membres du personnel subsidiés de l'enseignement officiel subventionné », tel qu'il a été modifié par l'article 34 du décret du 30 avril 2009, dispose : « Les fonctions exercées par les membres du personnel visés à l'article 1er sont classées en fonctions de recrutement, en fonctions de sélection ou en fonctions de promotion telles que fixées et classées pour les mêmes catégories de personnel de l'enseignement de la Communauté, à l'exception des fonctions de sélection du personnel enseignant dans l'enseignement normal moyen et dans l'enseignement normal technique moyen, qui sont classées en fonctions de recrutement;
Par dérogation au 1er alinéa, la fonction d'éducateur-économe est classée en fonction de sélection de la catégorie du personnel auxiliaire d'éducation. [...] ».
L'article 3, § 2, du décret du 1er février 1993 « fixant le statut des membres du personnel subsidiés de l'enseignement libre subventionné », tel qu'il a été modifié par l'article 40 du décret du 30 avril 2009, dispose : « Pour l'application du présent décret, les fonctions exercées par les membres du personnel visés à l'article 1er sont classées en fonctions de recrutement, en fonctions de sélection ou fonctions de promotion conformément au classement applicable dans l'enseignement de la Communauté [...].
Par dérogation au 1er alinéa, la fonction d'éducateur-économe est classée en fonction de sélection de la catégorie du personnel auxiliaire d'éducation ».
Il découle des dispositions précitées que, dans l'enseignement officiel subventionné et dans l'enseignement libre subventionné par la Communauté française, l'éducateur-économe est également titulaire d'une fonction de sélection de la catégorie du personnel auxiliaire d'éducation.
B.7.3. L'annexe 8 de l'arrêté du Gouvernement de la Communauté française du 4 juillet 2002 « précisant les attributions et définissant les profils de fonction des titulaires d'une fonction de promotion et de sélection en application de l'article 18 du décret du 4 janvier 1999 relatif aux fonctions de promotion et de sélection » (ci-après : l'arrêté du 4 juillet 2002), dans sa version applicable jusqu'au départ définitif du dernier éducateur-économe en fonction, conformément à l'article 23 du décret du 30 avril 2009, et avant l'abrogation de l'arrêté du 4 juillet 2002 par l'article 145 du décret du 14 mars 2019, décrivait comme suit la fonction d'éducateur-économe : « Fonction Il est le collaborateur immédiat du Chef d'établissement ordonnateur et de l'administrateur dans le domaine de la gestion matérielle et comptable.
Placé sous l'autorité de l'administrateur, il assure les missions qui lui sont confiées par celui-ci.
Là où la fonction d'administrateur n'existe pas, il est le comptable de l'établissement.
Sur le plan pédagogique et éducatif, il entretient des contacts réguliers avec les surveillants éducateurs, les professeurs et les élèves.
L'éducateur économe entretient également des relations avec la Communauté éducative, les administrations et les partenaires extérieurs de l'établissement ».
L'éducateur-économe assumait donc des missions relevant de la gestion comptable et matérielle de l'établissement d'enseignement, mais également des missions pédagogiques et éducatives, par des contacts réguliers avec les surveillants éducateurs, les professeurs et les élèves.
B.8.1.1. Le décret du 30 avril 2009 a créé la fonction de comptable dans les établissements d'enseignement de la Communauté française. Il s'agit d'« une nouvelle fonction [...] au sein de la catégorie des membres du personnel administratif » (Doc. parl., Parlement de la Communauté française, 2008-2009, n° 703/1, p. 5).
Le législateur décrétal visait à répondre au « besoin d'une plus grande professionnalisation de la fonction des personnes en charge de la gestion financière et comptable de nos écoles », « tout en tenant compte des spécificités et des besoins de chaque réseau d'enseignement » (ibid., p. 4). Dans les travaux préparatoires du décret du 30 avril 2009, il était constaté que « les établissements des différents réseaux d'enseignement sont confrontés, à cet égard, à des réalités fort différentes » : « Service à gestion séparée pour le réseau d'enseignement organisé par la Communauté française, dont le chef d'établissement et son personnel assument la gestion financière et comptable; responsabilité du pouvoir organisateur dans l'enseignement subventionné mais impliquant également l'action de gestionnaires des écoles » (ibid.).
B.8.1.2. Alors que le comptable est spécifiquement chargé de la gestion financière et comptable des établissements scolaires, les missions pédagogiques et éducatives qui relevaient de la fonction d'éducateur-économe sont assumées par les proviseurs et sous-directeurs, dont la fonction est ouverte aux surveillants-éducateurs : « Un accès à la fonction de proviseur ou sous-directeur pour les surveillants-éducateurs à la place de l'ancienne fonction d'éducateur-économe semble également aujourd'hui plus opportun au regard des compétences humaines requises pour exercer ces fonctions destinées à assurer entre autres la coordination du bon encadrement des élèves.
L'ensemble de ces mesures s'accompagne enfin de mécanismes visant à préserver l'emploi et la situation statutaire des personnes actuellement en fonction. Celles-ci pourront poursuivre leur carrière grâce au cadre progressif d'extinction prévu par le présent décret, et accéder à la nomination. En effet, ce n'est qu'au départ des agents recrutés sur base des anciennes dispositions que le nouveau système sera mis progressivement en place, conformément aux dispositions transitoires de ce texte.
Par l'ensemble des mesures présentées ici, le présent texte entend dès lors apporter une réponse moderne et adaptée aux besoins de gestion comptable et financière des établissements scolaires, tout en valorisant à sa juste mesure la place du personnel auxiliaire d'éducation au sein de nos écoles » (ibid.).
B.8.2. L'article 17, § 1er, du décret de la Communauté française du 12 mai 2004 « fixant le statut des membres du personnel administratif, du personnel de maîtrise, gens de métier et de service des établissements d'enseignement organisé par la Communauté française » (ci-après : le décret du 12 mai 2004), tel qu'il a été modifié par l'article 1er du décret du 30 avril 2009, dispose : « Les fonctions des membres du personnel administratif sont classées comme suit : 1° Fonctions de recrutement : a) Auxiliaire administratif;b) Commis;c) Rédacteur;d) Correspondant-comptable;e) Secrétaire-comptable;f) Comptable.2° fonctions de promotion : a) premier surveillant en chef;b) premier commis-chef;c) assistant-bibliothécaire;d) administrateur-secrétaire ». L'article 18 du décret du 12 mai 2004, tel qu'il a été modifié par l'article 2 du décret du 30 avril 2009, dispose : « Les titres requis pour les fonctions de recrutement des membres du personnel administratif mentionnées ci-dessous sont fixés comme suit : [...] 4. Pour la fonction de comptable : au moins un titre du niveau supérieur du premier degré à orientation économique, commerciale, comptable ou en gestion.Le Gouvernement arrête la liste des titres de capacité admis dans ce cadre ».
L'annexe I de l'arrêté du Gouvernement de la Communauté française du 14 mai 2009 « fixant la liste des titres requis pour les fonctions d'éducateur-économe et de secrétaire de direction dans les établissements d'enseignement libres subventionnés et officiels subventionnés et de comptable dans les établissements d'enseignement organisés par la Communauté française » établit cette liste des titres de capacité.
B.8.3.1. L'article 7, § 1er, alinéa 1er, du décret du 30 avril 2009, tel qu'il a été remplacé par l'article 112 du décret de la Communauté française du 28 février 2013, dispose : « Tout remplacement définitif ou temporaire d'un correspondant comptable, d'un éducateur économe ou d'un éducateur chargé de la comptabilité s'opère en principe prioritairement à titre définitif, par admission au stage ou à titre temporaire dans le cadre de la fonction de comptable au sens de l'article 17, § 1, 1°, f) du décret du 12 mai 2004 ».
L'article 15 du décret du 30 avril 2009 supprime le brevet d'éducateur-économe. L'article 24 du même décret supprime la rubrique « Educateur-Econome » dans l'article 2 de l'arrêté royal du 22 juillet 1969 « déterminant les fonctions de recrutement dont doivent être titulaires les membres du personnel directeur et enseignant, du personnel auxiliaire d'éducation et du personnel paramédical des établissements de l'enseignement de l'Etat, pour pouvoir être nommés aux fonctions de sélection ».
L'article 31, § 1er, du décret du 30 avril 2009 dispose : « Les éducateurs-économes nommés à titre définitif avant l'entrée en vigueur du présent décret restent nommés à titre définitif dans cette fonction et poursuivent leur carrière en qualité de membres du personnel auxiliaire d'éducation conformément aux dispositions antérieures ».
B.8.3.2. L'article 17 du décret du 30 avril 2009 remplace les termes « éducateurs-économes » par le terme « comptables » dans l'intitulé de l'arrêté royal du 15 juillet 1969 « fixant les attributions des administrateurs, éducateurs-économes et secrétaires de direction dans les établissements d'enseignement gardien, primaire, spécialisé, moyen, technique et normal de l'Etat » (ci-après : l'arrêté royal du 15 juillet 1969).
L'article 2 de l'arrêté royal du 15 juillet 1969, tel qu'il a été modifié par les articles 18 et 19 du décret du 30 avril 2009, dispose : « Le comptable, placé sous l'autorité de l'administrateur, assure les missions de gestion matérielle et comptable qui lui sont confiées par l'administrateur.
Là où la fonction d'administrateur n'existe pas, le comptable, placé sous l'autorité du chef d'établissement, est spécialement chargé de la gestion matérielle et comptable de l'établissement auquel il est affecté. Il tient la comptabilité de l'établissement conformément aux prescriptions légales et réglementaires organisant la comptabilité de l'Etat. Il est responsable du compte des recettes et dépenses de l'établissement. Il établit l'inventaire permanent de tous les objets mis à la disposition de l'établissement. Cet inventaire est récolé tous les ans, conformément à la loi sur la comptabilité de l'Etat.
A titre transitoire, par ' comptable ' il y a lieu d'entendre ' éducateur-économe ' tant que des membres du personnel auxiliaire d'éducation exercent encore cette fonction à titre temporaire ou à titre définitif en vertu des dispositions statutaires prévues dans le décret du 30 avril 2009 concernant la comptabilité des écoles et l'accès à certaines fonctions de sélection et de promotion ».
B.8.3.3. La fonction de comptable a donc vocation à remplacer, dans l'enseignement de la Communauté française, la fonction d'éducateur-économe qui, tant que des membres du personnel auxiliaire d'éducation exercent encore cette fonction à titre temporaire ou à titre définitif, assume les missions de gestion matérielle et comptable relevant du comptable.
B.8.4. L'article 16 du décret du 30 avril 2009 a complété l'article 1er de l'arrêté royal du 31 juillet 1969 par l'alinéa suivant : « Peuvent également accéder à la fonction d'administrateur, les proviseurs ou sous-directeurs et les sous-directeurs de l'enseignement secondaire inférieur nommés à titre définitif qui ont accédé à l'une de ces fonctions à partir d'une fonction du personnel auxiliaire d'éducation ».
Cette disposition permettait aux personnes qui étaient initialement titulaires d'une fonction relevant du personnel auxiliaire d'éducation d'accéder à la fonction d'administrateur. Cette mesure s'inscrivait dans le cadre de l'ouverture aux surveillants-éducateurs de l'accès à la fonction de proviseur et sous-directeur à la place de la fonction d'éducateur-économe, évoquée dans les travaux préparatoires cités en B.8.1.2.
Cette mesure ne changeait toutefois rien au fait que l'accès à la fonction de promotion d'administrateur n'était ouvert qu'à des personnes exerçant ou ayant exercé une fonction du personnel auxiliaire d'éducation, à l'exclusion des personnes relevant du personnel administratif.
B.9.1. Il résulte de ce qui précède que la fonction de comptable et celle d'éducateur-économe diffèrent fondamentalement, en ce que, d'une part, la première est une fonction de recrutement du personnel administratif, alors que la seconde est une fonction de sélection du personnel auxiliaire d'éducation, et en ce que, d'autre part, à la différence du comptable qui n'est chargé que de la gestion financière et comptable, l'éducateur-économe assume également des missions d'ordre pédagogique et éducatif.
B.9.2. Bien qu'ils soient tous amenés à côtoyer les élèves dans les établissements d'enseignement au sein desquels ils exercent leurs fonctions, les membres du personnel auxiliaire d'éducation et les membres du personnel administratif remplissent des tâches et missions fondamentalement différentes. Les membres du personnel auxiliaire d'éducation sont appelés à remplir des tâches comprenant une dimension relationnelle, pédagogique et éducative, ce qui n'est en principe pas le cas des membres du personnel administratif. Il en résulte que l'expérience acquise par les membres du personnel auxiliaire d'éducation, dans l'exercice de leur profession qui les met directement en contact avec les élèves et leurs parents, leur permet de développer leurs aptitudes pédagogiques. En revanche, les tâches confiées aux membres du personnel administratif, même en qualité de comptable, ne les amènent en principe pas à développer les mêmes aptitudes pédagogiques.
B.9.3. Dans ce contexte, il n'est pas sans justification raisonnable de permettre aux titulaires d'une fonction d'éducateur-économe, relevant du personnel auxiliaire d'éducation, d'accéder à la nomination à la fonction d'administrateur, qui est une fonction de promotion relevant du personnel auxiliaire d'éducation, mais de ne pas permettre cet accès aux membres du personnel administratif, y compris aux titulaires de la fonction de comptable.
B.10. La circonstance que la fonction de comptable a vocation à remplacer la fonction d'éducateur-économe dans les établissements d'enseignement de la Communauté française ne modifie pas ce constat, dès lors que la création de la fonction de comptable poursuivait, comme il est dit dans les travaux préparatoires cités en B.8.1, un objectif de professionnalisation et de spécialisation des fonctions, le comptable n'assumant pas les missions éducatives qui relèvent de la fonction d'éducateur-économe.
B.11. Les questions préjudicielles appellent une réponse négative.
Par ces motifs, la Cour dit pour droit : L'article 8 du décret de la Communauté française du 4 janvier 1999 « relatif aux fonctions de promotion et de sélection », avant son remplacement par le décret de la Communauté française du 14 mars 2019 « modifiant diverses dispositions relatives aux fonctions de directeur et directrice, aux autres fonctions de promotion et aux fonctions de sélection », et l'article 1er de l'arrêté royal du 31 juillet 1969 « déterminant les fonctions de recrutement et les fonctions de sélection dont doivent être titulaires les membres du personnel de l'enseignement de l'Etat pour pouvoir être nommés aux fonctions de promotion de la catégorie du personnel auxiliaire d'éducation des établissements d'enseignement de l'Etat », tel qu'il a été modifié par l'article 16 du décret de la Communauté française du 30 avril 2009 « concernant la comptabilité des écoles et l'accès à certaines fonctions de sélection et de promotion » et avant son abrogation par le décret du 14 mars 2019 précité, ne violent pas les articles 10 et 11 de la Constitution en ce que ces dispositions ne permettaient pas au titulaire de la fonction de comptable d'être nommé à la fonction d'administrateur dans un établissement d'enseignement de la Communauté française.
Ainsi rendu en langue française et en langue néerlandaise, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, le 7 mai 2020.
Le greffier, P.-Y. Dutilleux Le président, F. Daoût