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Arrêt
publié le 08 novembre 2019

Extrait de l'arrêt n° 59/2019 du 8 mai 2019 Numéro du rôle : 6843 En cause : la question préjudicielle relative à l'article 2 de la loi du 5 décembre 1968 sur les conventions collectives de travail et les commissions paritaires, posée par le La Cour constitutionnelle, composée des présidents A. Alen et F. Daoût, et des juges J.-P. Snapp(...)

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COUR CONSTITUTIONNELLE


Extrait de l'arrêt n° 59/2019 du 8 mai 2019 Numéro du rôle : 6843 En cause : la question préjudicielle relative à l'article 2 de la loi du 5 décembre 1968Documents pertinents retrouvés type loi prom. 05/12/1968 pub. 22/05/2009 numac 2009000346 source service public federal interieur Loi sur les conventions collectives de travail et les commissions paritaires. - Coordination officieuse en langue allemande fermer sur les conventions collectives de travail et les commissions paritaires, posée par le Tribunal du travail d'Anvers, division Anvers.

La Cour constitutionnelle, composée des présidents A. Alen et F. Daoût, et des juges J.-P. Snappe, E. Derycke, T. Giet, R. Leysen et M. Pâques, assistée du greffier P.-Y. Dutilleux, présidée par le président A. Alen, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet de la question préjudicielle et procédure Par jugement du 25 janvier 2018 en cause de K.S. contre la SPRL « A-M Cleaning », dont l'expédition est parvenue au greffe de la Cour le 2 février 2018, le Tribunal du travail d'Anvers, division Anvers, a posé la question préjudicielle suivante : « L'article 2 de la loi du 5 décembre 1968Documents pertinents retrouvés type loi prom. 05/12/1968 pub. 22/05/2009 numac 2009000346 source service public federal interieur Loi sur les conventions collectives de travail et les commissions paritaires. - Coordination officieuse en langue allemande fermer sur les conventions collectives de travail et les commissions paritaires viole-t-il les articles 10 et 11 de la Constitution, combinés ou non avec les articles 3 et 11 de la Charte sociale européenne révisée, avec les articles 22 et 23 de la Constitution et avec l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme, en ce que cette disposition, en considérant comme employeur les seules personnes ou sociétés qui, au moment où une convention collective de travail est invoquée à leur encontre, occupent déjà des travailleurs, établit une inégalité de traitement entre les travailleurs de sociétés de nettoyage dont le contrat d'entretien est repris par une personne ou société qui occupe déjà du personnel au moment de la reprise, d'une part, et les travailleurs des mêmes sociétés dont le contrat d'entretien est repris par une personne ou société qui, au moment de la reprise, n'occupe pas encore de personnel, d'autre part, et plus généralement entre les travailleurs qui, en vertu d'une convention collective de travail prévoyant leur reprise par un autre employeur, s'adressent à une personne ou société occupant déjà du personnel, d'une part, et les travailleurs qui, en vertu de la même convention collective de travail, s'adressent à une personne ou société n'occupant pas encore de personnel ? ». (...) III. En droit (...) B.1.1. La question préjudicielle porte sur l'article 2 de la loi du 5 décembre 1968Documents pertinents retrouvés type loi prom. 05/12/1968 pub. 22/05/2009 numac 2009000346 source service public federal interieur Loi sur les conventions collectives de travail et les commissions paritaires. - Coordination officieuse en langue allemande fermer sur les conventions collectives de travail et les commissions paritaires (ci-après : la loi du 5 décembre 1968Documents pertinents retrouvés type loi prom. 05/12/1968 pub. 22/05/2009 numac 2009000346 source service public federal interieur Loi sur les conventions collectives de travail et les commissions paritaires. - Coordination officieuse en langue allemande fermer), qui dispose : « § 1er. La présente loi s'applique aux travailleurs et aux employeurs ainsi qu'aux organisations.

Pour l'application de la présente loi, sont assimilés : 1. aux travailleurs : les personnes qui, autrement qu'en vertu d'un contrat de louage de travail, fournissent des prestations de travail sous l'autorité d'une autre personne, à l'exception des personnes au sens du chapitre 1er et 2 du titre 2 de la loi du 18 juillet 2018Documents pertinents retrouvés type loi prom. 18/07/2018 pub. 26/07/2018 numac 2018040291 source service public federal chancellerie du premier ministre Loi relative à la relance économique et au renforcement de la cohésion sociale fermer relative à la relance économique et au renforcement de la cohésion sociale, dans la mesure où les conditions imposées par l'article 26 de la loi précitée sont remplies, ou aux personnes qui fournissent des prestations en vue d'obtenir l'indemnité conformément à l'article 90, alinéa 1er, 1°bis, du Code des impôts sur les revenus 1992;2. aux employeurs : les personnes qui occupent les personnes visées au 1;3. à un contrat de louage de travail : les relations de travail entre personnes assimilées à des travailleurs et à des employeurs;4. à une branche d'activité : les groupes de personnes assimilées aux employeurs qui, en dehors d'un secteur de l'économie, exercent des activités identiques ou connexes;5. à une entreprise : les établissements des personnes assimilées aux employeurs. § 2. La nullité du contrat de louage de travail ne peut être opposée à l'application de la présente loi lorsque des prestations de travail sont fournies : 1. en vertu d'un contrat de louage de travail frappé de nullité du chef d'infraction aux dispositions ayant pour objet la réglementation des relations du travail;2. dans des salles de jeu. § 3. La présente loi ne s'applique pas : 1. aux personnes occupées par l'Etat, les Communautés, les Régions, les Commissions communautaires, les provinces, les communes, les établissements publics qui en dépendent et les organismes d'intérêt public à l'exception de la Société fédérale de Participations et d'Investissement, de l'Autorité des services et marchés financiers, du Fonds de Participation, de l'Office National du Ducroire, de la Banque Nationale de Belgique, de la SA CREDIBE, de la SA Loterie Nationale, de la ' Vlaamse Instelling voor Technologisch Onderzoek ', des sociétés de logement social agréées conformément aux codes du logement des Régions et des sociétés anonymes de droit public ' Brussels South Charleroi Airport-Security ' et ' Liège-Airport-Security '. Toutefois, le Roi peut, par arrêté motivé et délibéré en Conseil des Ministres, étendre en tout ou en partie, l'application de la présente loi à ces personnes ou certaines catégories d'entre elles.

Les pouvoirs du Roi visés à l'alinéa 2, expirent à la date à laquelle le régime institué par la loi du 19 décembre 1974Documents pertinents retrouvés type loi prom. 19/12/1974 pub. 05/10/2012 numac 2012000586 source service public federal interieur Loi organisant les relations entre les autorités publiques et les syndicats des agents relevant de ces autorités. - Coordination officieuse en langue allemande fermer organisant les relations entre les autorités publiques et les syndicats des agents relevant de ces autorités est rendu applicable aux personnes intéressées occupées par l'Etat, les provinces, les communes, les établissements publics et les organismes d'intérêt public. 1/1. aux personnes occupées par les autorités publiques étrangères, à l'exception des missions diplomatiques, des missions auprès des organisations internationales ayant leur siège en Belgique, des postes consulaires et des agents diplomatiques ou des fonctionnaires consulaires étrangers, en ce qui concerne leur personnel qui ne bénéficie pas d'un statut privilégié en vertu des Conventions de Vienne du 18 avril 1961 sur les relations diplomatiques et du 24 avril 1963 sur les relations consulaires ou de tout autre instrument international applicable; 2. aux personnes occupées dans des centres de formation professionnelle en application de la législation relative à l'emploi ou à la formation professionnelle des demandeurs d'emploi;3. aux membres du personnel subventionnés par l'Etat occupés par les établissements d'enseignement libre subventionnés;4. aux travailleurs engagés dans le cadre d'un contrat de travail ALE ». B.1.2. Le juge a quo demande à la Cour si l'article 2 de la loi du 5 décembre 1968Documents pertinents retrouvés type loi prom. 05/12/1968 pub. 22/05/2009 numac 2009000346 source service public federal interieur Loi sur les conventions collectives de travail et les commissions paritaires. - Coordination officieuse en langue allemande fermer est compatible avec les articles 10 et 11 de la Constitution, lus ou non en combinaison avec les articles 22 et 23 de la Constitution, avec les articles 3 et 11 de la Charte sociale européenne révisée et avec l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme, en désignant comme employeur les seules personnes ou entreprises qui, au moment où une convention collective de travail est invoquée à leur encontre, occupent déjà des travailleurs.

Par suite de cette interprétation de la notion d'« employeur », il est, selon le juge a quo, établi un traitement inégal « entre les travailleurs de sociétés de nettoyage dont le contrat d'entretien est repris par une personne ou société qui occupe déjà du personnel au moment de la reprise, d'une part, et les travailleurs des mêmes sociétés dont le contrat d'entretien est repris par une personne ou société qui, au moment de la reprise, n'occupe pas encore de personnel, d'autre part ».

Le juge a quo suit l'interprétation de la notion d'« employeur » donnée par la Cour de cassation dans son arrêt du 2 juin 2014 (S.12.0113.N), en vertu de laquelle, « en règle, seule la personne qui occupe au moins une autre personne dans les liens d'un contrat de travail est un employeur au sens de la loi du 5 décembre 1968Documents pertinents retrouvés type loi prom. 05/12/1968 pub. 22/05/2009 numac 2009000346 source service public federal interieur Loi sur les conventions collectives de travail et les commissions paritaires. - Coordination officieuse en langue allemande fermer ».

B.1.3. Le litige soumis au juge a quo porte sur le champ d'application de la convention collective de travail du 12 mai 2003 « relative à la reprise de personnel suite à un transfert d'un contrat d'entretien », conclue au sein de la commission paritaire pour les entreprises de nettoyage et de désinfection (ci-après : la CCT du 12 mai 2003), rendue obligatoire par l'arrêté royal du 19 juillet 2006. Cette CCT est applicable « aux employeurs et aux ouvriers et ouvrières des entreprises ressortissant à la Commission paritaire pour les entreprises de nettoyage et de désinfection » (article 1er, alinéa 1er, de la CCT du 12 mai 2003), et ainsi à l'« employeur » au sens de l'article 2 de la loi du 5 décembre 1968Documents pertinents retrouvés type loi prom. 05/12/1968 pub. 22/05/2009 numac 2009000346 source service public federal interieur Loi sur les conventions collectives de travail et les commissions paritaires. - Coordination officieuse en langue allemande fermer.

La convention collective de travail précitée contient un régime par lequel les travailleurs concernés par l'exécution d'un contrat d'entretien, lorsque leur employeur perd ce contrat, entrent de plein droit au service de l'entreprise qui obtient le contrat en tant que successeur de leur employeur. L'article 3, alinéa 1er, de la CCT du 12 mai 2003 dispose à cet égard : « Pour les transferts de contrat d'entretien pour lesquels au moins 3 ouvriers sont concernés, les ouvriers ayant au moins neuf mois de prestations (périodes de suspension du contrat de travail incluses) sur le chantier, précédant immédiatement la date de l'entrée en vigueur du nouveau contrat commercial, qui n'atteignent pas l'âge de la pension et qui n'ont pas, dans le respect des clauses essentielles du contrat de travail, accepté la proposition éventuelle de reclassement faite par l'entreprise sortante, entrent de plein droit en service de l'entreprise qui obtient le contrat d'entretien ».

B.2.1. Le Conseil des ministres estime que la question préjudicielle est partiellement irrecevable et n'appelle partiellement ou entièrement pas de réponse.

En ce qui concerne l'irrecevabilité partielle, le Conseil des ministres observe qu'il n'est nullement indiqué en quoi les articles 3 et 11 de la Charte sociale européenne révisée, les articles 22 et 23 de la Constitution et l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme seraient violés.

En ce qui concerne le constat que la question préjudicielle n'appelle partiellement aucune réponse, le Conseil des ministres fait valoir que la question préjudicielle porte uniquement sur la notion d'« employeur » telle qu'elle est contenue dans l'article 2, § 1er, alinéa 1er, de la loi du 5 décembre 1968Documents pertinents retrouvés type loi prom. 05/12/1968 pub. 22/05/2009 numac 2009000346 source service public federal interieur Loi sur les conventions collectives de travail et les commissions paritaires. - Coordination officieuse en langue allemande fermer et non sur les autres notions.

En ce qui concerne le constat que la question préjudicielle n'appelle pas de réponse, le Conseil des ministres fait valoir que le juge a quo se fonde sur une lecture erronée de l'article 2 de la loi du 5 décembre 1968Documents pertinents retrouvés type loi prom. 05/12/1968 pub. 22/05/2009 numac 2009000346 source service public federal interieur Loi sur les conventions collectives de travail et les commissions paritaires. - Coordination officieuse en langue allemande fermer.

B.2.2. La question préjudicielle porte sur la notion d'« employeur » au sens de l'article 2 de la loi du 5 décembre 1968Documents pertinents retrouvés type loi prom. 05/12/1968 pub. 22/05/2009 numac 2009000346 source service public federal interieur Loi sur les conventions collectives de travail et les commissions paritaires. - Coordination officieuse en langue allemande fermer, et non sur d'autres notions, de sorte que l'examen est limité à l'article 2, § 1er, alinéa 1er, de la loi du 5 décembre 1968Documents pertinents retrouvés type loi prom. 05/12/1968 pub. 22/05/2009 numac 2009000346 source service public federal interieur Loi sur les conventions collectives de travail et les commissions paritaires. - Coordination officieuse en langue allemande fermer.

Pour le surplus, les exceptions du Conseil des ministres sont étroitement liées à la portée qu'il convient de donner à la disposition en cause, de sorte que l'examen des exceptions se confond avec celui du fond de l'affaire.

B.3.1. La loi du 5 décembre 1968Documents pertinents retrouvés type loi prom. 05/12/1968 pub. 22/05/2009 numac 2009000346 source service public federal interieur Loi sur les conventions collectives de travail et les commissions paritaires. - Coordination officieuse en langue allemande fermer ne définit pas la notion d'« employeur ». Les travaux préparatoires mentionnent à cet égard : « Cet article définit les notions de ' travailleur ', ' employeur ', ' contrat de louage de travail ', ' branche d'activité ', et ' entreprise '. Elles ont dans le projet une signification beaucoup plus large que dans d'autres lois » (Doc. parl., Sénat, 1966-1967, n° 148, p. 8). « Au surplus, le Ministre signale que le véritable champ d'application sera déterminé soit dans les conventions collectives de travail mêmes (art. 16, 4), soit dans l'arrêté royal instituant une commission paritaire (art. 36).

Le Ministre souligne à nouveau, comme il l'a déjà fait à l'article 1er, que les articles 1 et 2 ne déterminent pas le champ d'application de la loi mais ne font qu'expliquer certains termes ou notions, en vue d'éviter qu'il faille revenir sur ces notions dans divers articles. [...] Les droits et obligations des employeurs, des travailleurs et des organisations ne dérivent pas directement de la loi mais découlent des conventions conclues en vertu de celle-ci. Sans doute ces conventions ne peuvent-elles être conclues que par des organisations et par des employeurs, et les droits et obligations qu'elles comportent ne peuvent-ils s'appliquer qu'à des employeurs, à des travailleurs et à des organisations. Cela ne résulte toutefois pas du champ d'application de la loi, mais de la définition de la convention collective de travail, telle qu'elle est énoncée à l'article 5 du projet. [...] Il n'y a aucune raison, dans ces conditions, de disposer à l'article 2 que la loi s'applique aux travailleurs, aux employeurs et aux organisations. Une telle disposition est superflue et d'un certain point de vue inexacte même. En outre, elle n'a pas pour effet de rendre le projet plus clair, la mesure dans laquelle et la manière dont les organisations, d'une part, et les employeurs et les travailleurs, d'autre part, concourent à l'exécution de la loi diffèrent à ce point qu'il est impossible de les exprimer dans une disposition générale » (Doc. parl., Sénat, 1967-1968, n° 78, pp. 27-28).

B.3.2. Bien que la loi du 5 décembre 1968Documents pertinents retrouvés type loi prom. 05/12/1968 pub. 22/05/2009 numac 2009000346 source service public federal interieur Loi sur les conventions collectives de travail et les commissions paritaires. - Coordination officieuse en langue allemande fermer dispose en son article 2 que la loi s'applique aux travailleurs et aux employeurs ainsi qu'aux organisations représentatives de travailleurs et d'employeurs, chaque convention collective de travail délimite elle-même son champ d'application.

B.4.1. Conformément à l'article 5 de la loi du 5 décembre 1968Documents pertinents retrouvés type loi prom. 05/12/1968 pub. 22/05/2009 numac 2009000346 source service public federal interieur Loi sur les conventions collectives de travail et les commissions paritaires. - Coordination officieuse en langue allemande fermer, une convention collective de travail est un « accord conclu entre une ou plusieurs organisations de travailleurs et une ou plusieurs organisations d'employeurs ou un ou plusieurs employeurs déterminant les relations individuelles et collectives entre employeurs et travailleurs au sein d'entreprises ou de branche d'activité et réglant les droits et obligations des parties contractantes ».

Au niveau du contenu, les conventions collectives de travail règlent les relations entre les employeurs et les travailleurs, d'une part, et les droits et obligations des parties contractantes, d'autre part.

B.4.2. Selon les travaux préparatoires, « il convient de donner à la notion de convention collective de travail le sens le plus large » (Doc. parl., Sénat, 1966-1967, n° 148, p. 15) : « [...] la liberté contractuelle gouverne l'aménagement des conventions collectives de travail et les parties ont, en principe, carte blanche. Elles peuvent, sous réserve des impératifs légaux, traiter de toutes les matières relatives au travail et aux relations collectives » (ibid., p. 15). « La notion de convention collective est prise dans son sens le plus large (art. 5).

Les parties peuvent traiter de toutes les matières relatives au travail et aux relations collectives.

La convention collective peut contenir des règles sur des matières aussi bien d'ordre social (ex. rémunération) qu'économique ( [p.ex.] productivité, exercice de la profession, l'organisation de la branche d'activité) qui concernent directement les partenaires sociaux » (Doc. parl., Sénat, 1967-1968, n° 78, p. 8).

Par conséquent, le contenu éventuel des conventions collectives de travail doit être pris dans un sens très large.

B.5. Le principe d'égalité et de non-discrimination n'exclut pas qu'une différence de traitement soit établie entre des catégories de personnes, pour autant qu'elle repose sur un critère objectif et qu'elle soit raisonnablement justifiée.

L'existence d'une telle justification doit s'apprécier en tenant compte du but et des effets de la mesure critiquée ainsi que de la nature des principes en cause; le principe d'égalité et de non-discrimination est violé lorsqu'il est établi qu'il n'existe pas de rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et le but visé.

B.6.1. La différence de traitement repose sur un critère objectif, à savoir la circonstance que la personne, au moment de la reprise, occupe ou non déjà du personnel sur la base d'un contrat de travail.

B.6.2. La différence de traitement en cause est contraire à l'objectif mentionné en B.4.2, qui ne peut être atteint si certaines relations entre travailleurs et employeurs sont exclues a priori de la concertation collective et du champ d'application des CCT. D'ailleurs, dans le cadre d'une reprise de personnel, des travailleurs se trouvent dans une situation précaire, de sorte que dans de telles circonstances, ils doivent spécialement pouvoir bénéficier de la protection des CCT en vigueur.

B.6.3. Dans l'interprétation qu'en donne le juge a quo, l'article 2, § 1er, alinéa 1er, de la loi du 5 décembre 1968Documents pertinents retrouvés type loi prom. 05/12/1968 pub. 22/05/2009 numac 2009000346 source service public federal interieur Loi sur les conventions collectives de travail et les commissions paritaires. - Coordination officieuse en langue allemande fermer n'est pas compatible avec le principe d'égalité et de non-discrimination.

Dans cette interprétation, la question préjudicielle appelle une réponse affirmative.

B.7. Mais comme l'indique le Conseil des ministres, la disposition en cause est également susceptible d'une autre interprétation. En effet, cette disposition et ses travaux préparatoires n'établissent aucune distinction entre employeurs selon qu'ils occupent ou non des travailleurs au moment où une CCT est invoquée contre eux.

Dans cette interprétation, la différence de traitement soulevée dans la question préjudicielle n'existe pas et la question préjudicielle appelle une réponse négative.

Par ces motifs, la Cour dit pour droit : - Dans l'interprétation selon laquelle, par la notion d'« employeur », il faut entendre uniquement des personnes qui, au moment où une CCT est invoquée contre elles, occupent déjà du personnel sur la base d'un contrat de travail, l'article 2, § 1er, alinéa 1er, de la loi du 5 décembre 1968Documents pertinents retrouvés type loi prom. 05/12/1968 pub. 22/05/2009 numac 2009000346 source service public federal interieur Loi sur les conventions collectives de travail et les commissions paritaires. - Coordination officieuse en langue allemande fermer sur les conventions collectives de travail et les commissions paritaires viole les articles 10 et 11 de la Constitution. - Dans l'interprétation selon laquelle, par la notion d'« employeur », il faut également entendre des personnes qui, au moment où une CCT est invoquée contre elles, n'occupent pas encore de personnel sur la base d'un contrat de travail, l'article 2, § 1er, alinéa 1er, de la loi du 5 décembre 1968Documents pertinents retrouvés type loi prom. 05/12/1968 pub. 22/05/2009 numac 2009000346 source service public federal interieur Loi sur les conventions collectives de travail et les commissions paritaires. - Coordination officieuse en langue allemande fermer sur les conventions collectives de travail et les commissions paritaires ne viole pas les articles 10 et 11 de la Constitution.

Ainsi rendu en langue néerlandaise et en langue française, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, le 8 mai 2019.

Le greffier, P.-Y. Dutilleux Le président, A. Alen

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