publié le 11 octobre 2018
Extrait de l'arrêt n° 105/2018 du 19 juillet 2018 Numéro du rôle : 6678 En cause : le recours en annulation des articles 5 à 12 du décret de la Communauté flamande du 25 novembre 2016 relatif au financement alternatif de l'infrastructure scol La Cour constitutionnelle, composée des présidents A. Alen et J. Spreutels, et des juges T. Merc(...)
Extrait de l'arrêt n° 105/2018 du 19 juillet 2018 Numéro du rôle : 6678 En cause : le recours en annulation des articles 5 à 12 du décret de la Communauté flamande du 25 novembre 2016 relatif au financement alternatif de l'infrastructure scolaire par le biais de conventions DBFM spécifiques d'un projet, introduit par l'organisme public doté de la personnalité civile « het Gemeenschapsonderwijs ».
La Cour constitutionnelle, composée des présidents A. Alen et J. Spreutels, et des juges T. Merckx-Van Goey, P. Nihoul, T. Giet, R. Leysen et J. Moerman, assistée du greffier P.-Y. Dutilleux, présidée par le président A. Alen, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet du recours et procédure Par requête adressée à la Cour par lettre recommandée à la poste le 16 juin 2017 et parvenue au greffe le 19 juin 2017, l'organisme public doté de la personnalité civile « het Gemeenschapsonderwijs », assisté et représenté par Me V. Pertry et Me B. Martel, avocats au barreau de Bruxelles, a introduit un recours en annulation des articles 5 à 12 du décret de la Communauté flamande du 25 novembre 2016 relatif au financement alternatif de l'infrastructure scolaire par le biais de conventions DBFM spécifiques d'un projet (publié au Moniteur belge du 10 janvier 2017). (...) II. En droit (...) Quant aux dispositions attaquées B.1. La partie requérante demande l'annulation des articles 5 à 12 du décret de la Communauté flamande du 25 novembre 2016 relatif au financement alternatif de l'infrastructure scolaire par le biais de conventions DBFM spécifiques d'un projet (ci-après : le décret du 25 novembre 2016).
B.2.1. Le décret attaqué fait suite au projet « Ecoles de demain », un programme DBFM de partenariat public-privé réglé par le décret du 7 juillet 2006 relatif au mouvement de rattrapage pour l'infrastructure scolaire. Alors que le programme DBFM « Ecoles de demain » représente un programme global dans lequel les autorités publiques n'ont désigné qu'un seul exécutant chargé de la réalisation de 182 projets de construction de bâtiments scolaires, le décret attaqué vise à créer un cadre pour l'organisation d'opérations DBFM de plus petite taille, simplifiées et plus spécifiques d'un projet (Doc. parl., Parlement flamand, 2016-2017, n° 893/1, p. 3), bénéficiant d'un appui fourni par l'Agence de l'infrastructure dans l'enseignement (ci-après : l'AGION).
B.2.2. Cette forme alternative de financement de l'infrastructure scolaire par le biais de conventions DBFM implique qu'une société privée se charge de la conception (Design), de la construction (Build), du financement (Finance) et de l'entretien pendant trente ans en tant que propriétaire (Maintain) de l'infrastructure scolaire. La société de projet met l'infrastructure scolaire à disposition pour une période de trente ans. Pendant cette période, le pouvoir organisateur concerné paie à la société de projet une indemnité de mise à disposition. Au terme de la période de trente ans, l'infrastructure scolaire est transférée sans frais au pouvoir organisateur concerné.
B.3. Les articles 5 à 12 du décret du 25 novembre 2016 disposent : CHAPITRE 1er. - Dispositions générales [...]
Art. 5.Avec l'appui de School Invest NV et du bureau de projet visé à l'article 7, AGION peut, conformément à la législation relative aux marchés publics, établir, par cluster de projets ou à défaut d'un cluster par projet de construction de bâtiments scolaires, une liste de candidats sélectionnés qui remplissent les critères de sélection qualitatifs fixés.
Le cas échéant, les pouvoirs organisateurs invitent tous les candidats de la liste visée à l'alinéa premier, à introduire une offre.
Art. 6.AGION appuie les pouvoirs organisateurs intéressés avant, pendant et après la conclusion d'une convention DBFM. Avec l'appui de School Invest NV, AGION établit des documents types relatifs aux marchés publics, dont le modèle d'une convention DBFM qui comporte au moins les éléments suivants : 1° une méthode de calcul visant à déterminer le degré de disponibilité de l'infrastructure sportive;2° le principe que l'indemnité de disponibilité n'est due qu'en fonction du degré de disponibilité de l'infrastructure scolaire;3° le principe que, à la date d'échéance de la convention DBFM, l'infrastructure scolaire doit remplir des exigences de transfert bien définies;4° les mesures correctrices et de sanction en cas de non-respect des conditions de la convention DBFM;5° la répartition des risques entre les parties contractantes. Les documents types relatifs aux marchés publics qui sont établis par AGION doivent être utilisés par les pouvoirs organisateurs. Les documents définitifs relatifs aux marchés publics sont préalablement approuvés par AGION.
Art. 7.Le Gouvernement flamand établit un bureau de projet composé de représentants des réseaux d'enseignement de l'enseignement subventionné et de l'Enseignement communautaire et d'experts désignés en vertu de leur expertise dans l'infrastructure scolaire ou le partenariat public-privé.
Le Gouvernement flamand arrête les modalités de composition et de fonctionnement du bureau de projet.
Art. 8.Le bureau de projet appuie AGION pour les activités suivantes : 1° la préparation de demandes introduites visées à l'article 9;2° l'établissement de la liste de candidats sélectionnés visée à l' [article 5,] alinéa premier;3° l'évaluation des offres introduites par les candidats sélectionnés.
Art. 9.Le pouvoir organisateur dépose, au vu d'un appel par le Ministre flamand compétent pour l'enseignement, une demande d'admissibilité au programme DBFM spécifique d'un projet. Dans le cas d'un cluster de projets auquel sont associés plusieurs pouvoirs organisateurs, les demandes sont introduites de façon groupée.
Le Gouvernement flamand peut arrêter les modalités de l'introduction, de la forme et du contenu des demandes. CHAPITRE 2. - Sélection et classement
Art. 10.Les demandes sont évaluées sur la base des critères de sélection suivants : 1° le besoin urgent d'investissements;2° la grandeur d'échelle minimale des projets de construction de bâtiments scolaires et l'homogénéité du cluster de projets;3° l'approche planifiée;4° la faisabilité financière;5° la durabilité, en ce compris l'efficacité énergétique;6° la multifonctionnalité;7° la mesure dans laquelle des facteurs spécifiques internes ou externes peuvent influencer ou entraver les possibilités d'autorisation ou la réalisation du projet de construction de bâtiments scolaires ou du cluster de projets, y compris la mesure dans laquelle des travaux préparatoires s'imposent;8° la chronologie de l'introduction des demandes sur les listes d'attente régulières;9° la plus-value éventuelle à obtenir par une approche DBFM.
Art. 11.Au vu des critères de sélection tels que visés à l'article 10, AGION rend un avis, au moyen d'un rapport écrit, sur la sélection et l'ordre des demandes introduites par l'enseignement subventionné.
AGION transmet ce rapport au Ministre flamand chargé de l'enseignement. Le ' GO! ' (l'Enseignement communautaire) transmet son avis relatif à ses projets, confrontés d'abord aux critères de sélection, directement au Ministre flamand chargé de l'enseignement.
La répartition de la marge d'investissement budgétaire totale entre les réseaux d'enseignement en vue de la réalisation des conventions DBFM spécifiques d'un projet se fait sur la base de l'application du Décret sur l'Enseignement II.
Art. 12.Au vu de l'avis d'AGION et de l'avis du GO!, et sur la proposition du Ministre flamand chargé de l'enseignement, le Gouvernement flamand décide sur la sélection et l'ordre des projets de construction de bâtiments scolaires ».
Quant à la recevabilité du recours en annulation B.4.1. Le Gouvernement flamand fait valoir que le recours en annulation pourrait être irrecevable parce qu'il n'apparaît pas clairement que la décision d'introduire le recours a été prise valablement par l'organe habilité en la matière de l'organisme public flamand « het Gemeenschapsonderwijs » (l'Enseignement communautaire) (ci-après « le GO! »).
B.4.2. L'article 7, alinéa 3, de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle prévoit que la preuve de la décision d'agir en justice de l'organe compétent de la personne morale doit être produite « à la première demande ». Cette formulation permet à la Cour de renoncer à une telle demande, notamment lorsque la personne morale est représentée par un avocat.
Cette interprétation n'empêche pas qu'une partie ait le droit de soulever que la décision d'agir en justice n'a pas été prise par l'organe compétent de la personne morale, mais elle doit faire admettre son objection, ce qu'elle peut faire par toutes voies de droit. Tel n'est pas le cas en l'espèce.
B.4.3. L'exception est rejetée.
Quant au fond B.5. La partie requérante fait valoir dans un moyen unique que les dispositions attaquées sont contraires à l'article 24, § 2, de la Constitution, qui dispose : « Si une communauté, en tant que pouvoir organisateur, veut déléguer des compétences à un ou plusieurs organes autonomes, elle ne le pourra que par décret adopté à la majorité des deux tiers des suffrages exprimés ».
B.6.1. Les travaux préparatoires indiquent ce qui suit à propos de l'article 24, § 2, de la Constitution : « Le texte proposé prévoit expressément qu'une Communauté - après la révision de l'article 59bis, § 2, alinéa 1er, 2, de la Constitution - pourra déléguer des compétences de pouvoir organisateur de l'enseignement de l'Etat, à un ou plusieurs organes autonomes. Aussi bien pour l'approbation que pour la modification de ce décret, une majorité des deux tiers est requise.
Les néerlandophones pensent à un transfert à un Conseil autonome de l'Enseignement de l'Etat et à des Conseils scolaires locaux, démocratiquement composés de personnes attachées à cet enseignement et qui reflètent la diversité idéologique et philosophique de la Communauté flamande.
Les francophones, quant à eux, s'ils sont partisans d'une large décentralisation, veulent maintenir les prérogatives du Ministre en tant que pouvoir organisateur de l'enseignement de l'Etat » (Doc. parl., Sénat, S.E. 1988, n° 100-1/1°, p. 3).
La Commission sénatoriale compétente a ajouté, lors de l'examen de cette disposition : « Le Secrétaire d'Etat à l'Education nationale déclare qu'en ce qui concerne la portée de l'autonomie visée à l'article 17, § 2, l'on peut dire que l'organe autonome reçoit toutes les compétences d'organisation comparables à celles des autres pouvoirs organisateurs et remplace ainsi les exécutifs pour organiser l'enseignement de l'Etat.
Cette délégation de compétence par décret au profit d'un organe autonome doit être réalisée sous une forme de droit public décentralisée. Elle pourra ainsi comprendre tout l'enseignement au sens de l'article 59bis, § 2, 2°, comme proposé.
Les Communautés doivent permettre à cet organe d'assurer les libertés constitutionnelles de l'article 17.
Lors de la création de cet organe, les conseils de communauté régleront la gestion administrative et financière ainsi que la tutelle y afférente » (Doc. parl., Sénat, S.E. 1988, n° 100-1/2°, p. 82).
Il ressort encore des travaux préparatoires que l'exigence de majorité spéciale prévue à l'article 24, § 2, de la Constitution vise à « éviter des modifications incessantes lors de chaque changement de majorité politique » (Doc. parl., Chambre, S.E. 1988, n° 10/17-455/4, p. 40) et donc « à garantir une plus grande stabilité » (ibid., p. 58).
B.6.2. Ainsi, la Constitution prévoit la possibilité, pour les communautés en tant que pouvoirs organisateurs de l'enseignement communautaire, de déléguer des compétences à des organes qui jouissent d'une autonomie en la matière. Au cours des travaux préparatoires, le Vice-Premier ministre et ministre des Communications et des Réformes institutionnelles a parlé d'une possibilité d'accorder une « large autonomie » (Doc. parl., Sénat, S.E. 1988, n° 100-1/2°, p. 4).
B.7.1. Il apparaît des travaux préparatoires cités en B.6.1 que le Constituant a, par « les compétences en tant que pouvoir organisateur », essentiellement visé les compétences dont disposent également les autres pouvoirs organisateurs de l'enseignement.
B.7.2. Il ressort des travaux préparatoires du décret spécial du 19 décembre 1988 relatif au Conseil autonome de l'Enseignement communautaire que les compétences qui ont été confiées au Conseil autonome doivent s'entendre dans un sens large, dans l'optique de réaliser une dépolitisation structurelle et permanente de l'enseignement communautaire.
L'exposé des motifs de ce décret indique : « Le fondement juridique pour octroyer une autonomie de gestion à l'enseignement de la Communauté flamande est prévu par l'article 17, § 2, de la Constitution [...]. Le tout fait suite aux nombreuses critiques formulées à l'encontre de l'enseignement de l'Etat par suite des normes et situations politiques existantes. Ces critiques portaient essentiellement sur la politisation de la politique de l'enseignement, ainsi que sur le manque de continuité dans la gestion du réseau. L'enseignement de l'Etat est trop dépendant des aléas politiques. Ainsi, certains ne voient pas d'un bon oeil la double compétence du ministre, qui est d'une part le pouvoir organisateur d'un seul réseau, celui de l'enseignement de l'Etat, et d'autre part le responsable de la politique dans tous les réseaux et dans toutes les écoles » (Doc. parl., Conseil flamand, 1988-1989, n° 161/1, pp. 1-2). « En vertu du décret, la compétence en matière d'enseignement communautaire est cédée à l'ARGO [Conseil autonome de l'enseignement communautaire]. Celui-ci se substitue alors à la Communauté et organise l'enseignement en toute neutralité.
L'ARGO agit en tant que pouvoir organisateur. Il reçoit les compétences qui sont celles de tout pouvoir organisateur d'enseignement » (Doc. parl., Conseil flamand, 1988-1989, n° 161/1, p. 3).
B.8.1. Le décret spécial du 14 juillet 1998 relatif à l'enseignement communautaire a remplacé le décret spécial du 19 décembre 1988 relatif au Conseil autonome de l'Enseignement communautaire. L'article 4, § 1er, du décret spécial du 14 juillet 1998 prévoit qu'à l'exclusion de tout autre organe, les groupes d'écoles et le Conseil de l'enseignement communautaire constituent le pouvoir organisateur de l'enseignement communautaire, dans les limites des attributions octroyées par ce décret spécial et en vertu de celui-ci.
Dans son avis sur le projet qui a conduit au décret spécial du 14 juillet 1998, la section de législation du Conseil d'Etat a formulé l'observation suivante : « La proposition a pour but, comme le décret ARGO, de créer un organisme public devenant, à la place de la Communauté flamande, le pouvoir organisateur de l'enseignement communautaire. Comme cela a déjà été souligné dans l'avis du Conseil d'Etat relatif au décret ARGO, cela crée clairement une scission entre, d'une part, l'exercice de la fonction normative qui, dans les limites fixées par la Constitution, est l'affaire du Parlement flamand et, par délégation, celle du Gouvernement flamand et, d'autre part, l'exercice du pouvoir organisateur de l'enseignement communautaire, qui devient l'affaire exclusive de l'organisme public dorénavant dénommé ' het Gemeenschapsonderwijs' »(Doc. parl., Parlement flamand, 1997-1998, n° 1095/3, p. 8).
B.8.2. Le décret spécial du 14 juillet 1998 octroie plusieurs compétences en matière d'infrastructure scolaire aux différents niveaux administratifs du GO!. Le conseil scolaire formule des avis à l'intention du conseil d'administration et du directeur général de l'école en matière d'infrastructure scolaire (article 11, § 1er, 2°, c). Le conseil d'administration du groupe d'écoles est compétent en matière de politique matérielle et financière pour la formulation de propositions relatives à la construction de nouveaux bâtiments ou à des travaux de rénovation (article 23, § 1er, 4°, f). Le directeur général du groupe d'écoles est habilité à formuler des propositions à l'intention du Conseil du GO! en matière de grands travaux d'infrastructure et sur la réalisation de grands travaux d'infrastructure, en collaboration avec le Conseil du GO! (article 30, § 1er, 8°). En matière de gestion matérielle et financière, l'administrateur délégué du GO! est habilité à proposer des projets généraux de constructions et de gros travaux d'infrastructure, sur la proposition des groupes d'écoles (article 44, § 1er, 4°). Le Conseil du GO! est compétent pour la fixation du planning général des constructions et du planning de grands travaux d'infrastructure sur la base de propositions faites par les groupes d'écoles et sur la proposition de l'administrateur délégué du GO!, et pour l'exécution de ces travaux, en collaboration avec le groupe d'écoles intéressé (article 36, 3° et 4°).
B.9. Il convient de vérifier si les dispositions attaquées prévoient la délégation de compétences par la Communauté flamande, en tant que pouvoir organisateur, à un organe autonome visé à l'article 24, § 2, de la Constitution.
B.10.1. Le financement alternatif de l'infrastructure scolaire par le biais de conventions DBFM spécifiques d'un projet, tel que le prévoit le décret attaqué, complète le financement et le subventionnement réguliers (voy. Doc. parl., Parlement flamand, 2016-2017, n° 893/3, pp. 4-5).
Dans le cadre du programme DBFM spécifique d'un projet, un pouvoir organisateur peut, pour un ou plusieurs biens immobiliers dont il est propriétaire ou sur lesquels il détient un droit réel, qui lui assure la jouissance jusqu'à la date de fin de la convention DBFM, conclure une convention DBFM avec une société de projet et obtenir une subvention DBFM de l'Agence de l'infrastructure dans l'enseignement (l'AGION) ou du Gouvernement flamand (article 4, alinéa 1er). Il est également possible d'opter pour un « cluster » de projets, auquel sont associés plusieurs pouvoirs organisateurs. Dans ce cas, il est fait usage d'un marché conjoint et chacun des pouvoirs organisateurs intéressés conclut une convention DBFM, chacun d'eux pouvant obtenir une subvention DBFM (article 4, alinéa 2).
Ainsi, c'est au pouvoir organisateur de l'enseignement communautaire qu'il incombe de conclure ou non des conventions DBFM spécifiques d'un projet.
B.10.2. Le pouvoir organisateur dépose, sur la base d'un appel lancé par le ministre flamand compétent en matière d'enseignement, une demande d'admissibilité au programme DBFM spécifique d'un projet. Dans le cas d'un « cluster » de projets auquel sont associés plusieurs pouvoirs organisateurs, les demandes sont introduites de façon groupée (article 9, alinéa 1er).
B.10.3. L'AGION appuie les pouvoirs organisateurs intéressés avant, pendant et après la conclusion d'une convention DBFM (article 6, alinéa 1er). Avec l'appui de la SA « School Invest », l'AGION établit des documents types relatifs aux marchés publics, dont le modèle d'une convention DBFM qui comporte au moins les éléments suivants : (1) une méthode de calcul visant à déterminer le degré de disponibilité de l'infrastructure scolaire; (2) le principe que l'indemnité de disponibilité n'est due qu'en fonction du degré de disponibilité de l'infrastructure scolaire; (3) le principe que, à la date d'échéance de la convention DBFM, l'infrastructure scolaire doit remplir des exigences de transfert bien définies; (4) les mesures correctrices et de sanction en cas de non-respect des conditions de la convention DBFM; (5) la répartition des risques entre les parties contractantes (article 6, alinéa 2). Les pouvoirs organisateurs doivent utiliser les documents types relatifs aux marchés publics établis par l'AGION. Les documents définitifs relatifs aux marchés publics doivent être préalablement approuvés par l'AGION (article 6, alinéa 3).
B.10.4. En outre, conformément à la législation relative aux marchés publics, l'AGION peut établir, par « cluster » de projets ou, à défaut d'un « cluster », par projet de construction de bâtiments scolaires, une liste de candidats sélectionnés qui remplissent les critères de sélection qualitatifs fixés. L'AGION bénéficie pour ce faire de l'appui de la SA « School Invest » et du bureau de projet composé de représentants des réseaux d'enseignement de l'enseignement subventionné et du GO! et d'experts (article 5, alinéa 1er, et articles 7 et 8). Le cas échéant, les pouvoirs organisateurs invitent tous les candidats de la liste à introduire une offre (article 5, alinéa 2). Sur cette base, « le pouvoir organisateur procédera finalement, avec l'appui de l'AGION et d'un bureau de projet, après délibération [...] à l'attribution finale du marché » (Doc. parl., Parlement flamand, 2016-2017, n° 893/1, p. 13).
Il appartient aux pouvoirs organisateurs de faire appel ou non à l'AGION pour établir une telle liste. Les travaux préparatoires soulignent dès lors le fait « que certains pouvoirs organisateurs ou clusters de projets pourraient éventuellement ne pas avoir besoin des services de facilitation de l'AGION et de la liste de candidats sélectionnés qu'elle peut établir » (Doc. parl., Parlement flamand, 2016-2017, n° 893/1, p. 13).
B.10.5. En tenant compte des critères de sélection visés à l'article 10, l'AGION rend dans un rapport écrit son avis sur la sélection et le classement des demandes introduites par l'enseignement subventionné.
En revanche, le GO! communique directement au ministre flamand chargé de l'enseignement son avis quant à ses projets, après avoir procédé à une analyse sur la base des critères de sélection (article 11). Il ressort des travaux préparatoires qu'une telle procédure a été prévue « afin de respecter la position et le rôle du GO! » (Doc. parl., Parlement flamand, 2016-2017, n° 893/1, p. 16).
B.10.6. En se basant sur l'avis de l'AGION et sur celui du GO!, ainsi que sur la proposition du ministre flamand chargé de l'enseignement, le Gouvernement flamand décide de la sélection et du classement des projets de construction de bâtiments scolaires (article 12). La répartition de la marge d'investissement budgétaire totale entre les réseaux d'enseignement en vue de la réalisation des conventions DBFM spécifiques d'un projet s'effectue sur la base de l'application du décret du 31 juillet 1990 relatif à l'enseignement-II (article 11).
B.11. Comme il est dit en B.8.1, il convient d'opérer une distinction, quant à l'exercice du pouvoir décrétal par la Communauté flamande, selon que celle-ci, d'une part, délègue en qualité de pouvoir organisateur de l'enseignement communautaire des compétences à un ou plusieurs organes autonomes et, d'autre part, règle, en tant qu'autorité normative, la matière de l'enseignement dans sa globalité, dans les limites fixées par la Constitution. Ce n'est que dans le premier cas qu'il faut respecter la majorité spéciale requise par l'article 24, § 2, de la Constitution.
B.12.1. Les dispositions attaquées règlent le financement par les autorités flamandes de projets d'infrastructure scolaire dans un contexte public-privé et ce, tant pour l'enseignement subventionné que pour l'enseignement communautaire.
B.12.2. L'exposé du moyen fait apparaître que la critique de la partie requérante porte sur le rôle que les dispositions attaquées attribuent à l'AGION et au Gouvernement flamand.
B.12.3. Comme il est dit en B.10, les pouvoirs organisateurs des différents réseaux d'enseignement restent libres d'introduire ou non une demande de convention DBFM spécifique d'un projet. Ils sont également responsables de l'organisation de la procédure d'adjudication qui conduit à la désignation de la partie privée chargée de l'exécution du projet. Ce n'est que s'ils le souhaitent que les organes du GO! peuvent solliciter l'appui de l'AGION pour l'établissement d'une liste de candidats sélectionnés, mais ils n'ont aucune obligation en ce sens (article 5).
En outre, l'AGION ne fait qu'émettre un avis par rapport à la sélection et au classement des demandes de l'enseignement subventionné. En revanche, le GO! transmet de manière autonome et directe au ministre flamand chargé de l'enseignement un avis relatif à ses projets de construction de bâtiments scolaires (article 11).
Par conséquent, l'AGION ne se substitue pas au pouvoir organisateur, qui conserve son autonomie dans le choix des projets de construction de bâtiments scolaires.
B.12.4. Le Gouvernement flamand décide de la sélection et du classement des projets de construction de bâtiments scolaires (article 12). Cette compétence est liée aux caractéristiques spécifiques du partenariat public-privé et à ses conséquences pour les finances publiques. Il ressort de l'élaboration du décret du 25 novembre 2016 que le législateur décrétal vise à garantir la neutralité des projets au sein du système européen des comptes nationaux et régionaux (neutralité SEC), afin que les investissements aient un impact nul ou quasi nul sur le résultat budgétaire et la dette publique de la Communauté flamande. L'utilisation imposée des documents types relatifs aux marchés publics qui sont établis par l'AGION et l'approbation préalable obligatoire par l'AGION des documents définitifs relatifs aux marchés publics s'inscrivent également dans ce contexte (article 6).
La décision du Gouvernement flamand est également nécessaire pour veiller à ne pas dépasser le plafond prévu annuellement au budget et à concurrence duquel des engagements peuvent être contractés. Comme il est dit en B.10, le système des conventions DBFM prévoit qu'un appel est lancé aux pouvoirs organisateurs pour qu'ils introduisent des demandes, de sorte qu'il n'est pas exclu que le nombre de demandes dépasse le budget disponible et qu'il soit nécessaire d'opérer une sélection.
Enfin, l'article 11 du décret du 25 novembre 2016 dispose que la répartition de la marge d'investissement budgétaire totale se fait sur la base de l'application du décret du 31 juillet 1990 relatif à l'enseignement-II. Ainsi donc, la part des différents réseaux d'enseignement dans les finances publiques, qui est fixée par le décret, est garantie et n'est pas modifiée par les dispositions attaquées.
B.13.1. Il ressort de ce qui précède que le législateur décrétal ne délègue aucune compétence de la Communauté, en tant que pouvoir organisateur, à un ou plusieurs organes autonomes et ne porte pas non plus atteinte aux compétences du pouvoir organisateur du GO! en matière d'infrastructure scolaire, de sorte que les dispositions attaquées ne devaient pas être adoptées à la majorité spéciale requise par l'article 24, § 2, de la Constitution.
B.13.2. Dès lors qu'elles règlent le financement de l'infrastructure scolaire pour les différents réseaux d'enseignement, les dispositions attaquées relèvent de la compétence normative générale des communautés en matière d'enseignement.
Le simple fait que les dispositions attaquées doivent également être respectées par les organes autonomes du GO! ne fait pas tomber la matière réglée dans le champ d'application de l'article 24, § 2, de la Constitution. Comme tout pouvoir organisateur, ces organes doivent en effet agir en respectant le cadre normatif général en matière de financement de l'infrastructure scolaire que le législateur décrétal peut adopter à la majorité simple.
B.14. Le moyen unique n'est pas fondé.
Par ces motifs, la Cour rejette le recours.
Ainsi rendu en langue néerlandaise, en langue française et en langue allemande, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, le 19 juillet 2018.
Le greffier, P.-Y. Dutilleux Le président, A. Alen