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Arrêt
publié le 04 juin 2018

Extrait de l'arrêt n° 38/2018 du 29 mars 2018 Numéro du rôle : 6483 En cause : le recours en annulation de la loi du 16 décembre 2015 modifiant la loi du 21 mars 1991 portant réforme de certaines entreprises publiques économiques, introduit p La Cour constitutionnelle, composée des présidents J. Spreutels et A. Alen, des juges T. Merckx-(...)

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COUR CONSTITUTIONNELLE


Extrait de l'arrêt n° 38/2018 du 29 mars 2018 Numéro du rôle : 6483 En cause : le recours en annulation de la loi du 16 décembre 2015Documents pertinents retrouvés type loi prom. 16/12/2015 pub. 12/01/2016 numac 2016014002 source service public federal mobilite et transports Loi modifiant la loi du 21 mars 1991 portant réforme de certaines entreprises publiques économiques fermer modifiant la loi du 21 mars 1991Documents pertinents retrouvés type loi prom. 21/03/1991 pub. 09/01/2013 numac 2012000673 source service public federal interieur Loi portant réforme de certaines entreprises publiques économiques. - Coordination officieuse en langue allemande type loi prom. 21/03/1991 pub. 18/01/2016 numac 2015000792 source service public federal interieur Loi portant réforme de certaines entreprises publiques économiques. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer portant réforme de certaines entreprises publiques économiques, introduit par l'ASBL « Mouvement de la Gauche Démocrate et Citoyenne » et autres.

La Cour constitutionnelle, composée des présidents J. Spreutels et A. Alen, des juges T. Merckx-Van Goey, P. Nihoul, F. Daoût et T. Giet, et, conformément à l'article 60bis de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, du président émérite E. De Groot, assistée du greffier P.-Y. Dutilleux, présidée par le président J. Spreutels, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet du recours et procédure Par requête adressée à la Cour par lettre recommandée à la poste le 11 juillet 2016 et parvenue au greffe le 12 juillet 2016, un recours en annulation de la loi du 16 décembre 2015Documents pertinents retrouvés type loi prom. 16/12/2015 pub. 12/01/2016 numac 2016014002 source service public federal mobilite et transports Loi modifiant la loi du 21 mars 1991 portant réforme de certaines entreprises publiques économiques fermer modifiant la loi du 21 mars 1991Documents pertinents retrouvés type loi prom. 21/03/1991 pub. 09/01/2013 numac 2012000673 source service public federal interieur Loi portant réforme de certaines entreprises publiques économiques. - Coordination officieuse en langue allemande type loi prom. 21/03/1991 pub. 18/01/2016 numac 2015000792 source service public federal interieur Loi portant réforme de certaines entreprises publiques économiques. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer portant réforme de certaines entreprises publiques économiques (publiée au Moniteur belge du 12 janvier 2016) a été introduit par l'ASBL « Mouvement de la Gauche Démocrate et Citoyenne », l'ASBL « OEuvre Fédérale Les Amis des Aveugles et Malvoyants », Lucette Royez, Freddy Dewille, Gérard Gillard, Pierre Eyben, Fabrice Dupont, Maxime Yu, Isabella Cantamessa, Marc Eyen, Nicolas Vandewynckel et Thomas Thierry, assistés et représentés par Me M.-F. Lecomte, avocat au barreau de Charleroi. (...) II. En droit (...) Quant à l'objet du recours B.1.1. Le recours tend à l'annulation de la loi du 16 décembre 2015Documents pertinents retrouvés type loi prom. 16/12/2015 pub. 12/01/2016 numac 2016014002 source service public federal mobilite et transports Loi modifiant la loi du 21 mars 1991 portant réforme de certaines entreprises publiques économiques fermer « modifiant la loi du 21 mars 1991Documents pertinents retrouvés type loi prom. 21/03/1991 pub. 09/01/2013 numac 2012000673 source service public federal interieur Loi portant réforme de certaines entreprises publiques économiques. - Coordination officieuse en langue allemande type loi prom. 21/03/1991 pub. 18/01/2016 numac 2015000792 source service public federal interieur Loi portant réforme de certaines entreprises publiques économiques. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer portant réforme de certaines entreprises publiques économiques ».

B.1.2. Par cette loi, le législateur entendait moderniser la législation sur les entreprises publiques économiques en assouplissant certaines contraintes organisationnelles qui pèsent sur les entreprises publiques autonomes principalement actives dans des secteurs ouverts à la concurrence, en alignant le mode de nomination et de fonctionnement des organes de gestion de ces entreprises lorsqu'elles sont cotées en bourse sur les règles ordinaires de gouvernance d'entreprises applicables aux sociétés cotées et enfin en définissant le cadre dans lequel la participation des autorités publiques dans les entreprises publiques autonomes cotées en bourse pourrait être ramenée à un niveau inférieur à 50 % plus une action (Doc. parl., Chambre, 2014-2015, DOC 54-1287/001, p. 4).

B.2. Il ressort de l'exposé des moyens que le recours en annulation ne porte que sur les articles 12 à 14 de la loi attaquée.

B.3. L'article 9 de la loi du 16 décembre 2015Documents pertinents retrouvés type loi prom. 16/12/2015 pub. 12/01/2016 numac 2016014002 source service public federal mobilite et transports Loi modifiant la loi du 21 mars 1991 portant réforme de certaines entreprises publiques économiques fermer précitée insère, dans le titre Ier de la loi du 21 mars 1991Documents pertinents retrouvés type loi prom. 21/03/1991 pub. 09/01/2013 numac 2012000673 source service public federal interieur Loi portant réforme de certaines entreprises publiques économiques. - Coordination officieuse en langue allemande type loi prom. 21/03/1991 pub. 18/01/2016 numac 2015000792 source service public federal interieur Loi portant réforme de certaines entreprises publiques économiques. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer, un chapitre XIV intitulé « Dispositions particulières relatives aux entreprises publiques autonomes cotées en bourse ».

L'article 12 attaqué insère, dans ce chapitre XIV, un article 54/7 rédigé comme suit : « § 1er. Par dérogation à l'article 39, § § 3 et 4, et, le cas échéant, aux articles 60/1, § 3, et 147bis, le Roi peut, par arrêté délibéré en Conseil des ministres, aux conditions qu'Il détermine, autoriser des opérations ayant pour conséquence que la participation des autorités publiques dans le capital des entreprises publiques autonomes visées à l'article 54/5 descende en dessous de cinquante pour cent plus une action. Dans ce cadre, le Roi se laisse guider par l'importance stratégique d'une participation dans l'entreprise concernée, la nécessité d'un ancrage belge, la contribution essentielle que l'entreprise peut apporter à l'égard de l'objectif d'une croissance économique durable, son utilité sociale et l'impact sur l'emploi.

Le pouvoir accordé au Roi par l'alinéa 1er expire le 31 décembre 2018. § 2. Dès que la participation des autorités publiques dans le capital de l'une des entreprises publiques autonomes visées à l'article 54/5 descend en dessous de cinquante pour cent plus une action en application du paragraphe 1er, cette entreprise cesse de ressortir de la catégorie des entreprises publiques autonomes et est supprimée de la liste de l'article 1er, § 4, sans préjudice des dispositions transitoires prises en vertu de l'article 54/8. Elle est alors convertie en une société anonyme de droit privé, sans interruption de personnalité juridique ».

L'article 13 attaqué insère, dans le même chapitre, un article 54/8 rédigé comme suit : « Dans le cas où le Roi autorise une opération visée à l'article 54/7, § 1er, Il prend, par arrêté délibéré en Conseil des ministres, toutes les mesures nécessaires pour : 1° maintenir, en vue de la continuité du service public, les dispositions relatives aux missions de service public de l'entreprise concernée et au contrat de gestion y afférent, et ce, pour une période transitoire expirant au plus tard le 31 décembre 2020;2° supprimer les dispositions légales liées au statut de droit public de l'entreprise concernée;3° régler les relations individuelles de travail entre l'entreprise concernée et les travailleurs qui, à la date effective de l'opération visée à l'article 54/7, § 1er, appartiennent au personnel statutaire de l'entreprise, de manière à assurer la continuité des droits de ces travailleurs en matière de stabilité d'emploi, de rémunération et de pension prévus dans les réglementations de base du statut du personnel établi conformément aux articles 34 et 35;4° régler l'application des lois en matière de sécurité sociale des travailleurs aux membres du personnel visés au 3°, y compris aligner les interdictions en matière de cumul de pensions avec celles applicables dans le secteur privé;5° organiser un régime transitoire en matière de relations collectives de travail au sein de l'entreprise concernée jusqu'aux élections sociales qui doivent se tenir dans les trois ans de l'opération visée à l'article 54/7, § 1er ». Enfin, l'article 14 attaqué insère, dans le même chapitre, un article 54/9 rédigé comme suit : « Les arrêtés pris en vertu de l'article 54/8 peuvent modifier, compléter, remplacer ou abroger les dispositions légales en vigueur.

Les pouvoirs accordés au Roi par l'article 54/8 expirent le 31 décembre 2018. Après cette date, les arrêtés pris en vertu de l'article 54/8 ne peuvent plus être modifiés, complétés, remplacés ou abrogés que par une loi.

Les dispositions prises en vertu de l'article 54/8, 3°, 4° et 5°, cessent de produire leurs effets si elles n'ont pas été confirmées par la loi dans les six mois de leur date d'entrée en vigueur. La confirmation produit ses effets à partir de cette date ».

Quant à l'intérêt des parties requérantes B.4. D'après le Conseil des ministres, aucune des parties requérantes ne peut justifier d'un intérêt à l'annulation de la loi attaquée à défaut de démontrer que leur situation serait directement et défavorablement affectée par cette loi. Le Conseil des ministres précise que tel ne pourrait être le cas que si la loi avait pour conséquence de privatiser Proximus, Bpost et la SNCB, et entraîner de ce fait une diminution du niveau de qualité du service actuellement fourni par ces entreprises. Or, la loi ne fait qu'habiliter le Roi à procéder le cas échéant à une telle privatisation pour les deux premières tandis qu'aucune opération de privatisation n'est rendue possible en ce qui concerne la SNCB. B.5.1. La première partie requérante, l'ASBL « Mouvement de la Gauche Démocrate et Citoyenne », s'est donné pour objet social de combattre l'injustice et toutes les rétrogradations des droits en général et des droits sociaux en particulier d'un individu ou d'une collectivité, notamment au regard de l'article 23 de la Constitution et du « principe » de standstill, par l'introduction éventuelle de procédures juridictionnelles en vue d'obtenir l'annulation des arrêtés et des lois contraires à la Constitution ou à la Convention européenne des droits de l'homme.

La deuxième partie requérante, l'ASBL « OEuvre Fédérale Les Amis des Aveugles et Malvoyants » s'est donné pour objet social le bien-être des non-voyants et malvoyants, envisagé sous ses formes les plus étendues et les plus variées. L'association prétend que la fermeture des bureaux de poste et des gares affecte la mobilité des usagers non-voyants et malvoyants.

B.5.2. Les autres parties requérantes sont des particuliers qui fondent leur intérêt sur l'exercice d'un mandat public ou d'une profession dans l'un des secteurs publics concernés par la loi attaquée ou encore sur leur qualité d'usager de ces services.

Elles prétendent que les dispositions attaquées vont avoir pour effet de diminuer la qualité des services aux usagers assurés par les entreprises publiques concernées.

La quatrième partie requérante entame sa quarante-quatrième année comme agent statutaire au sein de la Régie des télégraphes et téléphones, devenue ensuite Belgacom puis Proximus. Elle précise également qu'elle y exerce des fonctions de délégué syndical.

B.6.1. Les dispositions attaquées habilitent le Roi jusqu'au 31 décembre 2018 à autoriser, par arrêté délibéré en Conseil des ministres, des opérations qui ont pour conséquence que la participation des autorités publiques dans le capital des entreprises publiques autonomes cotées en bourse puisse être réduite en dessous de 50 % plus une action, ces entreprises cessant, dès cet instant, de ressortir à la catégorie des entreprises publiques autonomes et, partant, au champ d'application de la loi du 21 mars 1991Documents pertinents retrouvés type loi prom. 21/03/1991 pub. 09/01/2013 numac 2012000673 source service public federal interieur Loi portant réforme de certaines entreprises publiques économiques. - Coordination officieuse en langue allemande type loi prom. 21/03/1991 pub. 18/01/2016 numac 2015000792 source service public federal interieur Loi portant réforme de certaines entreprises publiques économiques. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer, pour être entièrement régies par le droit privé, sous réserve de dispositions transitoires.

Plusieurs critères fixés par la loi devront être pris en compte par le Roi : l'importance stratégique d'une participation dans l'entreprise concernée, la nécessité d'un ancrage belge, la contribution essentielle que l'entreprise peut apporter à l'égard de l'objectif d'une croissance économique durable, son utilité sociale et l'impact sur l'emploi.

Comme le relève le Conseil des ministres, et contrairement à ce que soutiennent les parties requérantes, la SNCB n'est pas concernée par les dispositions attaquées puisqu'elle n'est pas cotée en bourse.

Les dispositions attaquées habilitent également le Roi, dans le cadre des opérations précitées, à régler, par arrêté délibéré en Conseil des ministres, les relations individuelles de travail entre l'entreprise concernée et les membres du personnel, l'application des lois en matière de sécurité sociale et à organiser un régime transitoire en matière de relations collectives de travail au sein de l'entreprise.

B.6.2. Compte tenu de ce que l'habilitation conférée au Roi par l'article 13 peut avoir une incidence sur la situation des membres du personnel des entreprises concernées, la quatrième partie requérante dispose en tant que membre du personnel de Proximus et délégué syndical d'un intérêt à demander l'annulation de l'article 13 de la loi attaquée ainsi que des articles 12 et 14 qui y sont indissociablement liés.

B.7. Dès lors que l'une des parties requérantes justifie d'un intérêt à poursuivre l'annulation des dispositions attaquées, il n'est pas nécessaire d'examiner si les autres parties requérantes justifient également de l'intérêt requis.

Quant au fond B.8. Le premier moyen de la requête est pris de la violation des articles 74, 105 et 108 de la Constitution. Les parties requérantes reprochent aux dispositions attaquées d'habiliter immédiatement le Roi à réaliser la continuation de la privatisation des entreprises publiques visées alors que cette compétence serait, à leur estime, réservée au législateur.

B.9. La Cour n'est pas compétente pour contrôler directement la violation des dispositions constitutionnelles visées au moyen.

B.10. Le deuxième moyen est pris de la violation des articles 7bis, 10, 11, 22bis, 23, 23, 5°, de la Constitution lus seuls ou en combinaison avec « le principe » de standstill.

Les parties requérantes soutiennent que la loi attaquée peut avoir un impact direct et défavorable sur les conditions de travail des travailleurs compte tenu de l'abandon de la règle du recrutement statutaire, sur l'aménagement des conditions de travail des statutaires ainsi que sur l'accès à des services de qualité à des prix accessibles des allocataires sociaux, des personnes à mobilité réduite ainsi que de leurs enfants. Dans cette mesure, la loi porterait atteinte au droit de mener une vie conforme à la dignité humaine et diminuerait le niveau de protection d'un droit économique, social ou culturel sans qu'existe un motif impérieux d'intérêt général qui justifie pareille atteinte.

B.11.1. En ce qui concerne la violation de l'article 7bis de la Constitution, les parties requérantes soutiennent qu' « en revendant des actions qui rapportent des dividendes plantureux, c'est une politique à visée courte qui est menée et, en conséquence, non conforme à [la disposition constitutionnelle précitée] qui prévoit les objectifs d'un développement durable dans ses dimensions sociale, économique, environnementale, en tenant compte de la solidarité entre les générations ».

B.11.2. L'article 7bis de la Constitution a été inséré, par la disposition constitutionnelle du 25 avril 2007, dans un nouveau titre Ierbis intitulé « Des objectifs de politique générale de la Belgique fédérale, des communautés et des régions ». La Cour n'est pas compétente pour statuer directement sur la violation de cette disposition constitutionnelle.

B.12.1. L'article 22bis de la Constitution dispose : « Chaque enfant a droit au respect de son intégrité morale, physique, psychique et sexuelle.

Chaque enfant a le droit de s'exprimer sur toute question qui le concerne; son opinion est prise en considération, eu égard à son âge et à son discernement.

Chaque enfant a le droit de bénéficier des mesures et services qui concourent à son développement.

Dans toute décision qui le concerne, l'intérêt de l'enfant est pris en considération de manière primordiale.

La loi, le décret ou la règle visée à l'article 134 garantissent ces droits de l'enfant ».

B.12.2. Pour satisfaire aux exigences de l'article 6 de la loi spéciale sur la Cour constitutionnelle, les moyens de la requête doivent faire connaître, parmi les règles dont la Cour garantit le respect, celles qui seraient violées ainsi que les dispositions qui violeraient ces règles et exposer en quoi ces règles auraient été transgressées par ces dispositions.

B.12.3. Comme le relève le Conseil des ministres dans son mémoire, les parties requérantes restent en défaut d'exposer en quoi l'article 22bis de la Constitution serait violé. En effet, elles n'expliquent pas de quelle manière les dispositions attaquées seraient de nature à porter atteinte au droit au développement de l'enfant.

B.12.4. En ce qu'il allègue la violation de l'article 22bis de la Constitution, le moyen est irrecevable.

B.13.1. En ce qui concerne la violation prétendue de l'article 23 de la Constitution, les parties requérantes soutiennent qu'il se déduit du droit fondamental à la sécurité sociale consacré par cette disposition, une obligation de standstill qui assigne au législateur l'obligation de réaliser positivement le droit à la sécurité sociale et de ne pas légiférer à rebours des droits garantis sauf s'il existe un motif d'intérêt général. A leur estime, le seul intérêt qui serait servi est « celui de l'idéologie capitaliste ou néo-libérale qui poursuit de manière irraisonnée le retrait de l'Etat dans les services aux citoyens, l'abandon du recrutement de fonctionnaires au profit d'emplois précaires, intérimaires ou indépendants et à inscrire les entreprises publiques sur le marché ».

B.13.2. L'article 23 de la Constitution dispose que chacun a le droit de mener une vie conforme à la dignité humaine. A cette fin, les différents législateurs garantissent, en tenant compte des obligations correspondantes, les droits économiques, sociaux et culturels, et déterminent les conditions de leur exercice. Ces droits comprennent notamment le droit à l'aide sociale ainsi que le droit à l'épanouissement culturel et social. L'article 23 de la Constitution ne précise pas ce qu'impliquent ces droits dont seul le principe est exprimé, chaque législateur étant chargé de les garantir, conformément à l'alinéa 2 de cet article, en tenant compte des obligations correspondantes.

Cette disposition constitutionnelle n'interdit cependant pas à ce législateur d'accorder des délégations au pouvoir exécutif pour autant qu'elles portent sur l'exécution de mesures dont le législateur a déterminé l'objet.

B.13.3. Comme il est dit en B.6.1, les dispositions attaquées contiennent plusieurs habilitations faites au Roi.

Selon les travaux préparatoires de l'article 13 attaqué, « la sortie d'une entreprise publique autonome du périmètre de la loi du 21 mars 1991Documents pertinents retrouvés type loi prom. 21/03/1991 pub. 09/01/2013 numac 2012000673 source service public federal interieur Loi portant réforme de certaines entreprises publiques économiques. - Coordination officieuse en langue allemande type loi prom. 21/03/1991 pub. 18/01/2016 numac 2015000792 source service public federal interieur Loi portant réforme de certaines entreprises publiques économiques. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer devra s'accompagner de certaines dispositions transitoires qui s'imposent en vue notamment d'assurer la continuité du service public, une protection appropriée de certains droits de base que le personnel statutaire tire du statut du personnel existant, et une transition ordonnée du modèle de dialogue social du secteur public vers celui du secteur privé » (Doc. parl., Chambre, 2014-2015, DOC 54-1287/001, p. 12).

Le commentaire de l'article 13 de la loi en projet indique encore : « Ainsi, il est proposé d'habiliter le Roi à prendre les dispositions suivantes par arrêté délibéré en Conseil des ministres : - maintenir les dispositions de la loi du 21 mars 1991Documents pertinents retrouvés type loi prom. 21/03/1991 pub. 09/01/2013 numac 2012000673 source service public federal interieur Loi portant réforme de certaines entreprises publiques économiques. - Coordination officieuse en langue allemande type loi prom. 21/03/1991 pub. 18/01/2016 numac 2015000792 source service public federal interieur Loi portant réforme de certaines entreprises publiques économiques. - Traduction allemande de dispositions modificatives fermer relatives aux missions de service public de l'entreprise concernée et au contrat de gestion y afférent pour une période transitoire expirant au plus tard le 31 décembre 2020; - définir le régime applicable aux relations individuelles de travail entre l'entreprise concernée et les membres du personnel statutaire existant, de manière à protéger les droits de ces travailleurs en matière de stabilité d'emploi, de rémunération et de pension qui découlent des réglementations de base du statut du personnel en vigueur; - régler l'application des lois en matière de sécurité sociale à ces membres du personnel; et - assurer la transition de l'organisation des relations collectives de travail vers le modèle en vigueur dans le secteur privé au cours d'une période transitoire de trois ans maximum.

Ces trois derniers points devront évidemment être élaborés en dialogue étroit avec les organisations représentatives du personnel » (ibid., pp. 12-13).

Dans son intervention devant la commission compétente, le ministre de la Coopération au développement, de l'Agenda numérique, des Télécommunications et de la Poste a encore indiqué que la délégation au Roi ne portait que jusqu'en 2018 et devrait faire l'objet d'une confirmation législative. Il a encore été précisé qu'on ne pourrait transformer les entreprises publiques en entreprises privées qu'au moyen d'une décision politique prise dans le respect des conditions énumérées clairement à l'article 12. En ce qui concerne la concertation sociale, le ministre a souligné que celle-ci est également réglée par la loi sur les entreprises privées, le démantèlement de l'emploi statutaire devant faire éventuellement l'objet de négociations distinctes. Le ministre a souligné qu'il consultait les organisations syndicales reconnues tous les deux mois.

D'autres explications ont encore été apportées concernant les craintes de délocalisation, la réduction du cadre du personnel ou encore la diminution des prix dans le secteur des télécoms (Doc. parl., Chambre, 2015-2016, DOC 54-1287/004, pp. 15-17).

B.13.4. Il résulte de ceci que, compte tenu de l'objectif général invoqué par le législateur, décrit en B.1.2, il pouvait attribuer au Roi le pouvoir de prendre les mesures prévues par les dispositions attaquées.

B.13.5. Ces dispositions ne sont pas incompatibles avec les articles 10 et 11, combinés avec l'article 23, de la Constitution étant donné que l'habilitation que le législateur confère au Roi est suffisamment circonscrite dans les limites qu'il a fixées.

B.14. Le deuxième moyen n'est pas fondé.

B.15. Le troisième moyen est pris de la violation de l'article 16 de la Constitution et de l'article 1er du Premier Protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme ainsi que du principe de proportionnalité.

Les parties requérantes reprochent aux dispositions attaquées de laisser à la libre et entière appréciation du Roi l'opportunité de céder ainsi que les modalités de cession des entreprises publiques concernées, en violation du principe de proportionnalité et de légalité.

B.16.1. L'article 16 de la Constitution dispose : « Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique, dans les cas et de la manière établis par la loi, et moyennant une juste et préalable indemnité ».

L'article 1er du Premier Protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme dispose : « Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens.

Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international.

Les dispositions précédentes ne portent pas atteinte au droit que possèdent les Etats de mettre en vigueur les lois qu'ils jugent nécessaires pour réglementer l'usage des biens conformément à l'intérêt général ou pour assurer le paiement des impôts ou d'autres contributions ou des amendes ».

Cette disposition de droit international ayant une portée analogue à celle de l'article 16 de la Constitution, les garanties qu'elle contient forment un ensemble indissociable avec celles qui sont inscrites dans cette disposition constitutionnelle, de sorte que la Cour en tient compte lors de son contrôle des dispositions attaquées.

B.16.2. Sans qu'il soit besoin d'examiner si les dispositions attaquées relèvent du champ d'application des dispositions constitutionnelle et internationale précitées, il y a lieu de relever que celles-ci n'entendent pas protéger le droit de propriété de l'Etat lui-même contre d'éventuelles expropriations, à supposer, quod non, que des opérations qui ont pour conséquence que la participation des autorités publiques dans le capital des entreprises publiques autonomes descende au-dessous de cinquante pour cent plus une action soient considérées comme une privation forcée du droit de propriété de l'Etat sur ces biens.

B.17. Le troisième moyen n'est pas fondé.

B.18. Le quatrième moyen est pris de la violation des articles 10 et 11 de la Constitution.

Il est reproché aux dispositions attaquées de permettre au pouvoir exécutif de céder les actions des entreprises publiques, en l'absence de transparence des procédures de privatisation, au mépris de l'égalité qui devrait régner entre les potentiels candidats acquéreurs.

B.19.1. Il n'appartient pas à la Cour de présumer de quelle manière sera mise en oeuvre l'habilitation contenue dans les dispositions attaquées.

Lorsque le législateur confère une habilitation, il faut supposer qu'il n'entend habiliter le délégué qu'à faire de son pouvoir un usage compatible avec les dispositions de la Constitution dont la Cour garantit le respect.

B.19.2. Il appartient, le cas échéant, au juge compétent de contrôler la mesure dans laquelle le délégué aurait excédé les termes de l'habilitation qui lui a été conférée.

B.20. Le quatrième moyen n'est pas fondé.

Par ces motifs, la Cour rejette le recours.

Ainsi rendu en langue française, en langue néerlandaise et en langue allemande, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, le 29 mars 2018.

Le greffier, P.-Y. Dutilleux Le président, J. Spreutels

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