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Arrêt
publié le 31 octobre 2017

Extrait de l'arrêt n° 76/2017 du 15 juin 2017 Numéros du rôle : 6513, 6514, 6515, 6522, 6523, 6524 et 6525 En cause : les questions préjudicielles concernant l'article 38, § 6, de la loi relative à la police de la circulation routière, c La Cour constitutionnelle, composée des présidents J. Spreutels et E. De Groot, et des juges A. (...)

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COUR CONSTITUTIONNELLE


Extrait de l'arrêt n° 76/2017 du 15 juin 2017 Numéros du rôle : 6513, 6514, 6515, 6522, 6523, 6524 et 6525 En cause : les questions préjudicielles concernant l'article 38, § 6, de la loi relative à la police de la circulation routière, coordonnée le 16 mars 1968, inséré par l'article 9 de la loi du 9 mars 2014Documents pertinents retrouvés type loi prom. 09/03/2014 pub. 30/04/2014 numac 2014014174 source service public federal mobilite et transports Loi modifiant la loi relative à la police de la circulation routière, coordonnée le 16 mars 1968, la loi du 29 juin 1964 concernant la suspension, le sursis et la probation, la loi du 21 juin 1985 relative aux conditions techniques auxquelles doivent répondre tout véhicule de transport par terre, ses éléments ainsi que les accessoires de sécurité et la loi du 21 novembre 1989 relative à l'assurance obligatoire de la responsabilité en matière de véhicules automoteurs fermer, posées par le Tribunal correctionnel de Liège, division Verviers.

La Cour constitutionnelle, composée des présidents J. Spreutels et E. De Groot, et des juges A. Alen, T. Merckx-Van Goey, P. Nihoul, T. Giet et R. Leysen, assistée du greffier F. Meersschaut, présidée par le président J. Spreutels, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet des questions préjudicielles et procédure 1. Par trois jugements du 1er septembre 2016 en cause du ministère public respectivement contre P.G. et J.C., contre N. K.F. et contre V.B., dont les expéditions sont parvenues au greffe de la Cour le 21 septembre 2016, le Tribunal correctionnel de Liège, division Verviers, a posé la question préjudicielle suivante : « L'article 38, § 6, de la loi du 16 mars 1968Documents pertinents retrouvés type loi prom. 16/03/1968 pub. 21/10/1998 numac 1998000446 source ministere de l'interieur Loi relative à la police de la circulation routière, coordonnée par l'arrêté royal du 16 mars 1968 portant coordination des lois relatives à la police de la circulation routière . - Traduction allemande Le texte q(...) - la loi du 10 octobre 1967 contenant le Code judiciaire (Moniteur belge du 31 octobre 1967); - (...) fermer, tel qu'y introduit par l'article 9 de la loi du 9 mars 2014Documents pertinents retrouvés type loi prom. 09/03/2014 pub. 30/04/2014 numac 2014014174 source service public federal mobilite et transports Loi modifiant la loi relative à la police de la circulation routière, coordonnée le 16 mars 1968, la loi du 29 juin 1964 concernant la suspension, le sursis et la probation, la loi du 21 juin 1985 relative aux conditions techniques auxquelles doivent répondre tout véhicule de transport par terre, ses éléments ainsi que les accessoires de sécurité et la loi du 21 novembre 1989 relative à l'assurance obligatoire de la responsabilité en matière de véhicules automoteurs fermer modifiant la loi relative à la police de la circulation routière, viole-t-il les articles 10 et 11 de la Constitution combinés avec les articles 2 du Code pénal, 15 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques du 19 décembre 1966 et 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en ce qu'il impose au juge saisi après l'entrée en vigueur de la loi du 9 mars 2014Documents pertinents retrouvés type loi prom. 09/03/2014 pub. 30/04/2014 numac 2014014174 source service public federal mobilite et transports Loi modifiant la loi relative à la police de la circulation routière, coordonnée le 16 mars 1968, la loi du 29 juin 1964 concernant la suspension, le sursis et la probation, la loi du 21 juin 1985 relative aux conditions techniques auxquelles doivent répondre tout véhicule de transport par terre, ses éléments ainsi que les accessoires de sécurité et la loi du 21 novembre 1989 relative à l'assurance obligatoire de la responsabilité en matière de véhicules automoteurs fermer, en cas de condamnation d'un prévenu récidiviste à une peine de déchéance du droit de conduire tout véhicule à moteur, du chef d'une infraction commise avant l'entrée en vigueur de cette loi, de subordonner la réintégration dans le droit de conduire à la réussite des examens théorique, pratique, médical et psychologique, dès lors que la prononciation de ces examens aggrave en fait la situation du prévenu par rapport à l'état de la législation antérieure ? ». 2. Par deux jugements du 8 septembre 2016 et deux jugements du 15 septembre 2016 en cause du ministère public respectivement contre M.F., contre D.W. et K.W., contre R.D. et contre R.D., dont les expéditions sont parvenues au greffe de la Cour le 5 octobre 2016, le Tribunal correctionnel de Liège, division Verviers, a posé la même question préjudicielle.

Ces affaires, inscrites sous les numéros 6513, 6514, 6515, 6522, 6523, 6524 et 6525 du rôle de la Cour, ont été jointes. (...) III. En droit (...) B.1.1. L'article 38, §§ 1er à 5, de la loi relative à la police de la circulation routière, coordonnée le 16 mars 1968, repris sous la section 1 intitulée « Déchéance prononcée à titre de peine », dispose : « § 1. Le juge peut prononcer la déchéance du droit de conduire un véhicule à moteur : 1° s'il condamne du chef d'infraction aux articles 34, 37, 37bis, § 1er, 49/1 ou 62bis;2° s'il condamne du chef d'accident de roulage imputable au fait personnel de son auteur et que la condamnation est infligée pour cause d'homicide ou de blessures;3° s'il condamne du chef d'une des infractions du 2e ou 3e degré visées à l'article 29, § 1er; 3°bis s'il condamne du chef d'un dépassement de la vitesse maximale autorisée déterminée dans les règlements pris en exécution des présentes lois coordonnées, sur base de l'article 29, § 3, lorsque : - la vitesse maximale autorisée est dépassée de plus de 30 kilomètres par heure et de 40 kilomètres par heure au maximum, ou : - la vitesse maximale autorisée est dépassée de plus de 20 kilomètres par heure et de 30 kilomètres par heure au maximum dans une agglomération, dans une zone 30, aux abords d'écoles, dans une zone de rencontre ou une zone résidentielle; 4° s'il condamne du chef d'une infraction quelconque à la présente loi et aux règlements pris en exécution de celle-ci et que, dans les trois ans précédant l'infraction, le coupable a encouru trois condamnations dudit chef;5° s'il condamne du chef d'une infraction aux articles 30, § 1er ou 33, § 1er, 33, § 3, 1°. Les déchéances prononcées en vertu du présent paragraphe seront de huit jours au moins et de cinq ans au plus; elles peuvent toutefois être prononcées pour une période supérieure à cinq ans ou à titre définitif, si, dans les trois ans précédant les infractions visées au 1° et au 5°, le coupable a encouru une condamnation du chef d'une de ces infractions et dans le cas visé au 4°. § 2. Si le juge condamne simultanément du chef d'une infraction à l'article 419 du Code pénal et d'une infraction aux articles 29, §§ 1er et 3, 34, § 2, 35 ou 37bis, § 1er, des présentes lois coordonnées, la déchéance du droit de conduire sera prononcée pour une période de 3 mois au moins.

La réintégration dans le droit de conduire est subordonnée à la réussite des quatre examens visés au § 3, alinéa 1er.

S'il condamne simultanément du chef d'une infraction à l'article 419 du Code pénal et d'une infraction aux articles 36 ou 37bis, § 2, des présentes lois coordonnées, la déchéance du droit de conduire sera prononcée pour une période de 1 an au moins.

La réintégration dans le droit de conduire est subordonnée à la réussite des quatre examens visés au § 3, alinéa 1er.

S'il condamne simultanément du chef d'une infraction à l'article 420 du Code pénal et d'une infraction aux articles 36 ou 37bis, § 2, des présentes lois coordonnées, la déchéance du droit de conduire sera prononcée pour une période de 6 mois au moins.

La réintégration dans le droit de conduire est subordonnée à la réussite des quatre examens visés au § 3, alinéa 1er. § 2bis. Sauf dans le cas visé à l'article 37/1, alinéa 1er, ou lorsqu'il subordonne la réintégration dans le droit de conduire à la condition d'avoir satisfait à un ou plusieurs des examens visés au § 3, le juge peut ordonner, à l'égard de tout conducteur détenteur d'un permis de conduire ou d'un titre qui en tient lieu, que la déchéance effective sera mise en exécution uniquement : - du vendredi 20 heures au dimanche 20 heures; - à partir de 20 heures la veille d'un jour férié jusqu'à 20 heures le jour férié même. § 3. Le juge peut subordonner la réintégration dans le droit de conduire à la condition d'avoir satisfait à un ou plusieurs des examens cités ci-après : 1° un examen théorique;2° un examen pratique;3° un examen médical;4° un examen psychologique;5° des formations spécifiques déterminées par le Roi. Les examens prévus par le présent paragraphe ne sont pas applicables aux titulaires d'un permis de conduire étranger qui ne répondent pas aux conditions fixées par le Roi pour pouvoir obtenir un permis de conduire belge. § 4. Le juge doit subordonner la réintégration dans le droit de conduire du déchu du chef d'infraction mentionnée au § 1er, 1° de cet article et présentant un défaut physique ou une affection déterminé par le Roi, en exécution de l'article 23, 3°, à la preuve par le déchu qu'il ne présente plus ce défaut physique ou cette affection.

A ces fins, ce dernier introduit une demande par requête donnée au ministère public devant la juridiction qui a prononcé la mesure de déchéance. Cette juridiction statue sans appel.

Si la demande est rejetée, elle ne peut être renouvelée avant l'expiration d'un délai de six mois prenant cours à la date du rejet.

En cas d'infraction aux articles 30, § 1er, 3°, 3°, 35, 36 ou 37bis, § 2, la réintégration dans le droit de conduire doit être subordonnée à la réussite des examens visés au § 3, 3° et 4°. § 5. Le juge doit prononcer la déchéance du droit de conduire et rendre la réintégration du droit de conduire dépendante au moins de la réussite des examens théorique ou pratique s'il condamne du chef d'une infraction commise avec un véhicule à moteur pouvant donner lieu à une déchéance du droit de conduire, et que le coupable est titulaire depuis moins de deux ans du permis de conduire B. L'alinéa 1er n'est pas d'application à l'article 38, § 1er, 2°, en cas d'un accident de la circulation avec seulement des blessés légers.

L'alinéa 1er n'est pas d'application aux infractions du deuxième degré visées à l'article 29, § 1er ».

B.1.2. L'article 38, § 6, de cette loi, qui fait l'objet des questions préjudicielles, a été inséré par l'article 9 de la loi du 9 mars 2014Documents pertinents retrouvés type loi prom. 09/03/2014 pub. 30/04/2014 numac 2014014174 source service public federal mobilite et transports Loi modifiant la loi relative à la police de la circulation routière, coordonnée le 16 mars 1968, la loi du 29 juin 1964 concernant la suspension, le sursis et la probation, la loi du 21 juin 1985 relative aux conditions techniques auxquelles doivent répondre tout véhicule de transport par terre, ses éléments ainsi que les accessoires de sécurité et la loi du 21 novembre 1989 relative à l'assurance obligatoire de la responsabilité en matière de véhicules automoteurs fermer, entré en vigueur le 1er janvier 2015. Il dispose : « Sauf dans le cas visé à l'article 37/1, alinéa 1er, le juge doit prononcer la déchéance du droit de conduire un véhicule à moteur pour une période de 3 mois au moins, et subordonner la réintégration dans le droit de conduire à la réussite des quatre examens visés au § 3, alinéa 1er, si le coupable, dans la période de 3 ans à compter du jour du prononcé d'un précédent jugement de condamnation coulé en force de chose jugée du chef de l'une des infractions visées aux articles 29, § 1er, alinéa 1er, 29, § 3, alinéa 3, 30, §§ 1er, 2 et 3, 33, §§ 1er et 2, 34, § 2, 35, 37, 37bis, § 1er, 48 et 62bis, commet à nouveau l'une de ces infractions.

Si le coupable, dans les 3 ans à compter du jour du prononcé d'un précédent jugement de condamnation coulé en force de chose jugée du chef de l'une des infractions visées à l'alinéa 1er, commet à nouveau deux de ces infractions, la déchéance du droit de conduire un véhicule à moteur est de 6 mois au moins et la réintégration dans le droit de conduire est subordonnée à la réussite des quatre examens visés au § 3, alinéa 1er.

Si le coupable, dans les 3 ans à compter du jour du prononcé d'un précédent jugement de condamnation coulé en force de chose jugée du chef de l'une des infractions visées à l'alinéa 1er, commet à nouveau trois ou plus de ces infractions, la déchéance du droit de conduire un véhicule à moteur est de 9 mois au moins et la réintégration dans le droit de conduire est subordonnée à la réussite des quatre examens visés au § 3, alinéa 1er ».

B.2.1. Comme il l'a fait dans les affaires qui ont donné lieu à l'arrêt n° 168/2016 du 22 décembre 2016, le juge a quo interroge la Cour sur la compatibilité de cette disposition avec les articles 10 et 11 de la Constitution, combinés avec l'article 2 du Code pénal, avec l'article 15 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques et avec l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, en ce qu'elle impose au juge saisi après l'entrée en vigueur de la loi du 9 mars 2014Documents pertinents retrouvés type loi prom. 09/03/2014 pub. 30/04/2014 numac 2014014174 source service public federal mobilite et transports Loi modifiant la loi relative à la police de la circulation routière, coordonnée le 16 mars 1968, la loi du 29 juin 1964 concernant la suspension, le sursis et la probation, la loi du 21 juin 1985 relative aux conditions techniques auxquelles doivent répondre tout véhicule de transport par terre, ses éléments ainsi que les accessoires de sécurité et la loi du 21 novembre 1989 relative à l'assurance obligatoire de la responsabilité en matière de véhicules automoteurs fermer, en cas de condamnation d'un prévenu récidiviste à une peine de déchéance du droit de conduire tout véhicule à moteur, du chef d'une infraction commise avant l'entrée en vigueur de cette loi, de subordonner la réintégration dans le droit de conduire à la réussite des examens théorique, pratique, médical et psychologique, dès lors que la prononciation de ces examens aggrave en fait la situation du prévenu par rapport à la législation antérieure.

B.2.2. L'article 2 du Code pénal dispose : « Nulle infraction ne peut être punie de peines qui n'étaient pas portées par la loi avant que l'infraction fût commise.

Si la peine établie au temps du jugement diffère de celle qui était portée au temps de l'infraction, la peine la moins forte sera appliquée ».

Cette disposition interdit d'appliquer à un prévenu une peine plus forte que celle qui était applicable au moment de l'infraction.

B.2.3. L'article 15, paragraphe 1, du Pacte international relatif aux droits civils et politiques dispose : « Nul ne sera condamné pour des actions ou omissions qui ne constituaient pas un acte délictueux d'après le droit national ou international au moment où elles ont été commises. De même, il ne sera infligé aucune peine plus forte que celle qui était applicable au moment où l'infraction a été commise. Si, postérieurement à cette infraction, la loi prévoit l'application d'une peine plus légère, le délinquant doit en bénéficier ».

B.2.4. La Cour n'est pas compétente pour contrôler la disposition en cause au regard de normes législatives. Elle prend cependant en compte le principe général de la non-rétroactivité des lois en matière pénale, tel qu'il est notamment exprimé par l'article 15 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques et par l'article 2 du Code pénal.

B.3.1. Il ressort des motifs des décisions de renvoi que le juge a quo est saisi en appel de jugements du Tribunal de police condamnant les prévenus à une peine d'emprisonnement, à une peine de travail ou à une amende ainsi qu'à une déchéance du droit de conduire tout véhicule à moteur et subordonnant leur réintégration dans le droit de conduire à la condition d'avoir réussi les examens théorique, pratique, médical et psychologique pour des faits intervenus avant l'entrée en vigueur de l'article 9 de la loi du 9 mars 2014Documents pertinents retrouvés type loi prom. 09/03/2014 pub. 30/04/2014 numac 2014014174 source service public federal mobilite et transports Loi modifiant la loi relative à la police de la circulation routière, coordonnée le 16 mars 1968, la loi du 29 juin 1964 concernant la suspension, le sursis et la probation, la loi du 21 juin 1985 relative aux conditions techniques auxquelles doivent répondre tout véhicule de transport par terre, ses éléments ainsi que les accessoires de sécurité et la loi du 21 novembre 1989 relative à l'assurance obligatoire de la responsabilité en matière de véhicules automoteurs fermer.

Le constat que les conditions de la récidive sont réunies conduit, selon le juge a quo, à l'application immédiate, dans ces affaires, de la disposition en cause en ce qu'elle oblige le juge à subordonner la réintégration dans le droit de conduire un véhicule à moteur à la réussite des quatre examens, théorique, pratique, médical et psychologique, lorsqu'une peine de déchéance est prononcée à l'encontre d'un prévenu se trouvant en état de récidive. Il se fonde à cet égard sur les arrêts de la Cour de cassation des 1er février 2005 (Pas., 2005, n° 64) et 27 avril 2016 (P.15.1468.F) qui ont jugé que l'obligation de se soumettre à ces examens avant d'obtenir la réintégration dans le droit de conduire constitue une mesure de sûreté applicable dès l'entrée en vigueur de la loi qui les prévoit, l'article 2 du Code pénal concernant uniquement les peines proprement dites et non les mesures de sûreté qui visent à la protection de l'intérêt général.

B.3.2. Selon le Conseil des ministres, la question préjudicielle est obscure en ce qu'elle ne vise pas un groupe de citoyens de manière suffisamment précise et n'opère aucune comparaison.

Contrairement à ce qu'affirme le Conseil des ministres, la question préjudicielle fait apparaître de manière suffisamment claire quelles catégories de personnes doivent être comparées : les prévenus récidivistes d'une infraction commise avant l'entrée en vigueur de la disposition en cause selon qu'ils sont condamnés du chef de cette infraction avant ou après l'entrée en vigueur de cette disposition.

Par ailleurs, lorsqu'une violation du principe d'égalité et de non-discrimination est alléguée en combinaison avec un autre droit fondamental garanti par la Constitution ou par une disposition de droit international, ou découlant d'un principe général du droit, la catégorie de personnes pour lesquelles ce droit fondamental est violé doit être comparée à la catégorie de personnes envers lesquelles ce droit fondamental est garanti.

Il ressort du reste du mémoire du Conseil des ministres que celui-ci a bien compris la question et a donc été en mesure de mener une défense utile.

B.4. Il découle des travaux préparatoires de la loi du 9 mars 2014Documents pertinents retrouvés type loi prom. 09/03/2014 pub. 30/04/2014 numac 2014014174 source service public federal mobilite et transports Loi modifiant la loi relative à la police de la circulation routière, coordonnée le 16 mars 1968, la loi du 29 juin 1964 concernant la suspension, le sursis et la probation, la loi du 21 juin 1985 relative aux conditions techniques auxquelles doivent répondre tout véhicule de transport par terre, ses éléments ainsi que les accessoires de sécurité et la loi du 21 novembre 1989 relative à l'assurance obligatoire de la responsabilité en matière de véhicules automoteurs fermer qu'en vue d'atteindre l'objectif fixé pour 2020 par les Etats Généraux de la sécurité routière, conformément à la proposition de la Commission européenne, qui consiste à diminuer le nombre annuel de morts sur les routes, le législateur a voulu prendre des mesures qui ont un impact à long terme et notamment renforcer la sévérité de la répression de la récidive en matière d'infractions à la loi relative à la police de la circulation routière (Doc. parl., Chambre, 2012-2013, DOC 53-2880/001, p. 3) : « De plus, la récidive des infractions les plus graves sera punie plus sévèrement. Depuis la modification légale du 2 décembre 2011, il est déjà question de récidive en cas de combinaison de conduite sous influence de l'alcool, d'ivresse et de conduite sous l'emprise de drogues. A présent, c'est également le cas pour le délit de fuite, la conduite sans permis de conduire, les infractions du quatrième degré, les infractions les plus graves en matière de vitesse et l'usage d'un détecteur de radar. Lorsque l'on est condamné pour l'une de ces infractions et que l'on commet à nouveau l'une de ces infractions dans une période de trois ans, le juge devra prononcer une déchéance obligatoire du droit de conduire un véhicule automobile, à côté de l'obligation de repasser l'examen théorique et pratique et l'examen médical et psychologique. La durée de la déchéance obligatoire varie en fonction de ' l'importance ' de la récidive.

Une exception à la déchéance obligatoire du droit de conduire est prévue si le juge impose un éthylotest antidémarrage. La combinaison éthylotest antidémarrage - déchéance du week-end, déchéance du week-end - examen de réintégration est rendue impossible. En effet, il est illogique qu'une personne soit inapte médicalement et psychologiquement le week-end et qu'elle ne le soit pas en semaine.

Dans la même logique, la combinaison de la déchéance du droit de conduire limitée à certaines catégories de véhicules avec des examens de réintégration est exclue » (ibid., p. 4).

B.5. Il appartient au législateur, spécialement lorsqu'il entend lutter contre un fléau que d'autres mesures préventives n'ont pu jusqu'ici suffisamment endiguer, de décider s'il convient d'opter pour une répression aggravée à l'égard de certaines formes de délinquance.

Le nombre d'accidents de la route et les conséquences qui en découlent justifient que les auteurs d'atteintes à la sécurité routière fassent l'objet de procédures et de sanctions propres.

B.6.1. Pour répondre à la question préjudicielle, la Cour doit déterminer si l'obligation de réussir des examens théorique, pratique, médical et psychologique pour obtenir la réintégration dans le droit de conduire après avoir été déchu par jugement du droit de conduire est une peine.

B.6.2. Afin de déterminer l'existence d'une « accusation en matière pénale » au sens de l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, la Cour européenne des droits de l'homme a égard à trois critères : « la qualification juridique de la mesure litigieuse en droit national, la nature même de celle-ci, et la nature et le degré de sévérité de la ' sanction ' » (voy. notamment, concernant le retrait immédiat de permis, CEDH, 28 octobre 1999, Escoubet c.

Belgique, § 32). Cette Cour utilise les mêmes critères pour l'application de l'article 7 de la Convention précitée, qui a une portée analogue à celle de l'article 15 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques (par exemple, CEDH, 4 octobre 2016, Zaja c. Croatie, § 86).

B.6.3. Comme le relève le juge a quo, la Cour de cassation considère que l'obligation de se soumettre à ces examens avant d'obtenir la réintégration dans le droit de conduire constitue une mesure de sûreté.

B.6.4. La Cour doit encore vérifier si, en raison de sa nature ou de sa sévérité, cette obligation doit être considérée comme une peine.

La Cour européenne rappelle à cet égard dans son arrêt Escoubet c.

Belgique précité « que ' selon le sens ordinaire des termes, relèvent en général du droit pénal les infractions dont les auteurs s'exposent à des peines destinées notamment à exercer un effet dissuasif et qui consistent d'habitude en des mesures privatives de liberté et en des amendes ' (arrêt Özturk précité, pp. 20-21, § 53), à l'exception de ' celles qui par leur nature, leur durée ou leurs modalités d'exécution ne sauraient causer un préjudice important ' (voir, en matière de privation de liberté, l'arrêt Engel et autres précité, pp. 34-35, § 82) » ( § 36). B.6.5. Contrairement à la déchéance du droit de conduire (voy. l'arrêt n° 88/2016 du 2 juin 2016, B.4.2), l'obligation de réussir des examens théorique, pratique, médical et psychologique pour obtenir la réintégration dans le droit de conduire après avoir été déchu par jugement du droit de conduire n'est pas une sanction pénale mais constitue une mesure préventive de sûreté dans un objectif d'intérêt général. Ces examens permettent, en effet, de vérifier que l'état médical et psychologique de conducteurs dangereux répond aux normes minimales légales requises pour la conduite d'un véhicule en toute sécurité, de manière à réduire le risque de récidive et à garantir la sécurité routière. Les autorités publiques subordonnent, en effet, l'octroi du droit de conduire à la réussite d'examens. Cette mesure fait partie du contrôle de la sécurité routière, en réservant la participation à la circulation avec un véhicule motorisé aux personnes qui ont démontré leur connaissance des règles de circulation et leur aptitude à conduire et qui sont donc suffisamment aptes à se déplacer de manière sûre dans la circulation.

B.6.6. L'obligation de réussir des examens théorique, pratique, médical et psychologique pour obtenir la réintégration dans le droit de conduire après avoir été déchu par jugement du droit de conduire ne vise donc pas à sanctionner le conducteur récidiviste, mais à protéger la société contre les comportements irresponsables dans la circulation. La mesure qui vise à s'assurer qu'une personne réunit les capacités et qualifications nécessaires pour circuler sur la voie publique est proportionnée au but poursuivi et ne pourrait pas être considérée comme une mesure pénale uniquement en raison de sa sévérité. Elle n'implique donc pas une décision sur le bien-fondé d'une accusation en matière pénale au sens de l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme et ne constitue pas une peine au sens de l'article 15, paragraphe 1, du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.

B.7. La question préjudicielle appelle dès lors une réponse négative.

Par ces motifs, la Cour dit pour droit : L'article 38, § 6, de la loi relative à la police de la circulation routière, coordonnée le 16 mars 1968, inséré par l'article 9 de la loi du 9 mars 2014Documents pertinents retrouvés type loi prom. 09/03/2014 pub. 30/04/2014 numac 2014014174 source service public federal mobilite et transports Loi modifiant la loi relative à la police de la circulation routière, coordonnée le 16 mars 1968, la loi du 29 juin 1964 concernant la suspension, le sursis et la probation, la loi du 21 juin 1985 relative aux conditions techniques auxquelles doivent répondre tout véhicule de transport par terre, ses éléments ainsi que les accessoires de sécurité et la loi du 21 novembre 1989 relative à l'assurance obligatoire de la responsabilité en matière de véhicules automoteurs fermer, ne viole pas les articles 10 et 11 de la Constitution combinés avec l'article 15, paragraphe 1, du Pacte international relatif aux droits civils et politiques et avec l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme.

Ainsi rendu en langue française et en langue néerlandaise, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, le 15 juin 2017.

Le greffier, F. Meersschaut Le président, J. Spreutels

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