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Arrêt
publié le 16 septembre 2016

Extrait de l'arrêt n° 103/2016 du 30 juin 2016 Numéro du rôle : 6255 En cause : la question préjudicielle concernant l'article 58 de l'ordonnance de la Région de Bruxelles-Capitale du 5 mars 2009 relative à la gestion et à l'assainissement de La Cour constitutionnelle, composée des présidents E. De Groot et J. Spreutels, et des juges L. (...)

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COUR CONSTITUTIONNELLE


Extrait de l'arrêt n° 103/2016 du 30 juin 2016 Numéro du rôle : 6255 En cause : la question préjudicielle concernant l'article 58 de l'ordonnance de la Région de Bruxelles-Capitale du 5 mars 2009 relative à la gestion et à l'assainissement des sols pollués, posée par le Tribunal de première instance néerlandophone de Bruxelles.

La Cour constitutionnelle, composée des présidents E. De Groot et J. Spreutels, et des juges L. Lavrysen, A. Alen, J.-P. Snappe, J.-P. Moerman, E. Derycke, T. Merckx-Van Goey, P. Nihoul, F. Daoût, T. Giet et R. Leysen, assistée du greffier F. Meersschaut, présidée par le président E. De Groot, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet de la question préjudicielle et procédure Par jugement du 30 juillet 2015 en cause de la SA « Immo W » contre la SA « Infrabel », dont l'expédition est parvenue au greffe de la Cour le 6 août 2015, le Tribunal de première instance néerlandophone de Bruxelles a posé la question préjudicielle suivante : « L'article 58 de l' ordonnance du 5 mars 2009Documents pertinents retrouvés type ordonnance prom. 05/03/2009 pub. 10/03/2009 numac 2009031120 source ministere de la region de bruxelles-capitale Ordonnance relative à la gestion et à l'assainissement des sols pollués fermer relative à la gestion et à l'assainissement des sols pollués, interprété en ce sens que le juge n'est pas autorisé, lors de la fixation de l'indemnité d'expropriation, à déduire les coûts d'assainissement auxquels il faut s'attendre, viole-t-il les articles 10, 11 et/ou 16 de la Constitution ? ». (...) III. En droit (...) B.1. L'article 58 de l'ordonnance de la Région de Bruxelles-Capitale du 5 mars 2009 relative à la gestion et à l'assainissement des sols pollués dispose : « § 1er. L'autorité qui souhaite exproprier un terrain demande par lettre recommandée ou par voie électronique à l'Institut une attestation du sol pour chaque parcelle concernée, avant le jugement provisionnel rendu par le juge de paix dans le cadre de la procédure en expropriation. La ou les attestations sont délivrées selon les modalités visées à l'article 12, §§ 3 et 4. § 2. Une reconnaissance de l'état du sol doit être réalisée à charge de l'autorité expropriante d'un terrain inscrit à l'inventaire de l'état du sol dans la catégorie 0, sur ce terrain, et ce avant le jugement provisoire relatif à cette expropriation.

L'autorité expropriante fait réaliser d'office la reconnaissance de l'état du sol et peut faire réaliser d'office une étude détaillée sur le terrain concerné.

Les dispositions de la présente ordonnance s'appliquent par analogie, moyennant l'exécution des obligations du titulaire de droits réels par l'autorité expropriante ».

B.2.1. Les principales notions de l'ordonnance précitée sont définies à l'article 3 de cette dernière.

La « pollution du sol » est « toute contamination du sol qui est préjudiciable ou risque d'être préjudiciable, directement ou indirectement, à la santé humaine ou à l'état écologique, chimique ou quantitatif, ou au potentiel écologique du sol et des masses d'eau, du fait de l'introduction directe ou indirecte en surface ou dans le sol de substances, préparations, organismes ou microorganismes » (article 3, 2°).

Selon la cause de la pollution du sol, celle-ci est qualifiée tantôt de « pollution unique », tantôt de « pollution mélangée » ou encore de « pollution orpheline ». Une « pollution unique » est une « pollution du sol, identifiable distinctement, générée par un exploitant, par un titulaire de droits réels sur le terrain concerné ou, si la pollution a été engendrée après le 20 janvier 2005, par une personne clairement identifiée » (article 3, 16°). Une « pollution mélangée » est une « pollution du sol générée par plusieurs personnes dans des proportions non identifiables distinctement, dont un exploitant, un titulaire de droits réels sur le terrain concerné ou, si la pollution a été engendrée après le 20 janvier 2005, par une personne clairement identifiée » (article 3, 17°). Une « pollution orpheline » est une pollution n'entrant pas dans le champ des définitions de la « pollution unique » ou de la « pollution mélangée » (article 3, 18°).

Le traitement d'une pollution du sol peut consister à mettre en oeuvre des mesures de gestion du risque ou un assainissement. Une mesure de « gestion du risque » est un « traitement de la pollution du sol visant à évaluer les risques pour la santé humaine et l'environnement et à les maintenir ou à les rendre tolérables » (article 3, 21°). Un « assainissement » est le « traitement de la pollution du sol visant à atteindre les normes d'assainissement ou à éliminer l'accroissement de pollution » (article 3, 22°).

B.2.2. L'article 13 de l' ordonnance du 5 mars 2009Documents pertinents retrouvés type ordonnance prom. 05/03/2009 pub. 10/03/2009 numac 2009031120 source ministere de la region de bruxelles-capitale Ordonnance relative à la gestion et à l'assainissement des sols pollués fermer énumère les faits qui donnent lieu à une reconnaissance de l'état du sol. Dans certaines circonstances, une telle reconnaissance est requise avant l'aliénation d'un droit réel sur le terrain inscrit à l'inventaire de l'état du sol dans la catégorie 0, dans le cadre d'activités à risque, d'une demande ou de la prolongation d'un permis d'environnement relatif à une activité à risque, avant la délivrance d'un permis d'urbanisme visant un terrain inscrit à l'inventaire de l'état du sol dans la catégorie 0, dans le cadre de travaux d'excavation ou lorsqu'un événement ayant engendré une pollution du sol survient sur le terrain. Un « état du sol de catégorie 0 » vise « les parcelles potentiellement polluées, c'est-à-dire les parcelles pour lesquelles il existe une présomption de pollution du sol, y compris les parcelles sur lesquelles s'exerce une activité à risque » (article 3, 15°).

Une reconnaissance de l'état du sol qui est réalisée avant l'aliénation d'un droit réel sur un terrain inscrit à l'inventaire de l'état du sol dans la catégorie 0 est à charge du titulaire du droit réel.

En vertu de l'article 14 de l' ordonnance du 5 mars 2009Documents pertinents retrouvés type ordonnance prom. 05/03/2009 pub. 10/03/2009 numac 2009031120 source ministere de la region de bruxelles-capitale Ordonnance relative à la gestion et à l'assainissement des sols pollués fermer, la reconnaissance de l'état du sol détermine l'état du sol en mettant en évidence une pollution éventuelle du sol. Elle implique un prélèvement limité d'échantillons tenant compte, entre autres, de la localisation présumée de la pollution, dont les résultats d'analyse sont comparés aux normes d'intervention et d'assainissement. Elle est réalisée sur une zone délimitée par l'entièreté d'une ou de plusieurs parcelles.

Elle formule des conclusions motivées par parcelle, quant à l'estimation de l'ampleur et de la nature de la pollution, à la nécessité ou non de réaliser une étude détaillée et, le cas échéant, quant au délai de notification d'une telle étude à l'Institut bruxellois pour la gestion de l'environnement. La reconnaissance de l'état du sol détermine, si possible, le ou les types de pollutions : pollution unique, mélangée ou orpheline et, le cas échéant, les mesures de sécurité à prendre.

B.2.3. En vertu de l'article 19 de l' ordonnance du 5 mars 2009Documents pertinents retrouvés type ordonnance prom. 05/03/2009 pub. 10/03/2009 numac 2009031120 source ministere de la region de bruxelles-capitale Ordonnance relative à la gestion et à l'assainissement des sols pollués fermer, lorsqu'une reconnaissance de l'état du sol indique soit un dépassement des normes d'intervention, soit un dépassement des normes d'assainissement et un accroissement de pollution, une étude détaillée relative à cette pollution doit être réalisée. Lorsqu'une reconnaissance de l'état du sol permet de déterminer distinctement le type de pollution, l'étude détaillée est à charge du titulaire de l'obligation de traitement de la pollution. Dans le cas contraire, l'étude détaillée est à charge de la personne tenue de réaliser la reconnaissance de l'état du sol.

B.2.4. Les articles 20 à 22 de l' ordonnance du 5 mars 2009Documents pertinents retrouvés type ordonnance prom. 05/03/2009 pub. 10/03/2009 numac 2009031120 source ministere de la region de bruxelles-capitale Ordonnance relative à la gestion et à l'assainissement des sols pollués fermer déterminent à qui incombe les obligations relatives à l'assainissement, à la gestion du risque et aux mesures de sécurité.

Lorsqu'une étude détaillée indique la présence d'une pollution orpheline, une étude de risque relative à cette pollution doit être réalisée à charge de l'exploitant du site concerné par la pollution, si celle-ci a été engendrée après le 20 janvier 2005 ou du titulaire de droits réels sur le terrain concerné par la pollution, si celle-ci a été engendrée avant le 20 janvier 2005 ou, si elle a été engendrée après le 20 janvier 2005, en absence d'exploitant sur ce terrain (article 20, § 1er).

Lorsqu'une étude détaillée indique la présence d'une pollution mélangée, une étude de risque relative à cette pollution doit être réalisée à charge de l'exploitant ayant généré une partie de cette pollution, du titulaire de droits réels ayant généré une partie de cette pollution, ou de la personne identifiée ayant généré une partie de cette pollution (article 20, § 2).

Lorsque l'étude de risque indique un dépassement des valeurs de risque, les risques pour la santé humaine et pour l'environnement doivent être rendus tolérables, par la réalisation d'un projet de gestion du risque et la mise en oeuvre de mesures de gestion du risque, ou éventuellement par la réalisation d'un projet d'assainissement et l'exécution de travaux d'assainissement, à charge de la personne tenue de réaliser l'étude de risque (article 20, § 3).

Lorsque l'étude détaillée indique la présence d'une pollution unique, un projet d'assainissement et des travaux d'assainissement relatifs à cette pollution doivent être réalisés à charge de l'exploitant ayant généré cette pollution, du titulaire de droits réels ayant généré cette pollution ou de la personne identifiée ayant généré cette pollution. Les travaux d'assainissement visent à atteindre les normes d'assainissement (article 21).

Si l'étude détaillée indique que la pollution mélangée a été entièrement générée par des personnes visées à l'article 20, § 2, de l' ordonnance du 5 mars 2009Documents pertinents retrouvés type ordonnance prom. 05/03/2009 pub. 10/03/2009 numac 2009031120 source ministere de la region de bruxelles-capitale Ordonnance relative à la gestion et à l'assainissement des sols pollués fermer, un traitement de cette pollution par assainissement doit être réalisé solidairement à charge des personnes ayant généré la pollution (article 22, § 1er).

Si l'étude détaillée démontre que la pollution a été entièrement générée avant le 1er janvier 1993, un traitement de cette pollution par gestion du risque doit être réalisé à charge de l'exploitant ou du titulaire de droits réels ayant généré la pollution (article 22, § 2).

B.2.5. L'article 24 de l' ordonnance du 5 mars 2009Documents pertinents retrouvés type ordonnance prom. 05/03/2009 pub. 10/03/2009 numac 2009031120 source ministere de la region de bruxelles-capitale Ordonnance relative à la gestion et à l'assainissement des sols pollués fermer détermine la personne responsable des frais exposés pour la réalisation d'une reconnaissance de l'état du sol et pour le traitement de la pollution par celui ou ceux à qui incombent ces obligations, ainsi que pour les dommages causés par ces études, mesures ou travaux.

En vertu de l'article 24, § 1er, celui qui a généré une pollution du sol est responsable. En vertu de l'article 24, § 2, l'exploitant d'une installation soumise à permis d'environnement est responsable si la pollution du sol a été engendrée par l'exploitation de cette installation, à moins qu'il apporte la preuve qu'il n'a pas commis de faute ou de négligence et que la pollution du sol est due à une émission ou à un événement expressément autorisé. Conformément à l'article 24, § 3, lorsque plusieurs personnes sont responsables de la même pollution du sol, elles sont solidairement responsables.

En vertu de l'article 24, § 4, de l' ordonnance du 5 mars 2009Documents pertinents retrouvés type ordonnance prom. 05/03/2009 pub. 10/03/2009 numac 2009031120 source ministere de la region de bruxelles-capitale Ordonnance relative à la gestion et à l'assainissement des sols pollués fermer, les dispositions de cette dernière ne portent pas atteinte à la faculté dont dispose la personne responsable d'invoquer d'autres moyens de droit pour exercer son recours. En vertu de l'article 24, § 5, ces mêmes dispositions ne portent pas atteinte aux autres droits exercés par les personnes lésées ou exposant des frais contre les personnes responsables ou contre d'autres personnes.

L'article 24 de l' ordonnance du 5 mars 2009Documents pertinents retrouvés type ordonnance prom. 05/03/2009 pub. 10/03/2009 numac 2009031120 source ministere de la region de bruxelles-capitale Ordonnance relative à la gestion et à l'assainissement des sols pollués fermer garantit que la personne à laquelle incombent des obligations de prendre des mesures de gestion du risque ou à faire réaliser des travaux d'assainissement peut réclamer au pollueur initial le remboursement de tous les frais qu'il a exposés (Doc. parl., Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale, 2008-2009, A-533/1, p. 33), du moins lorsque la personne responsable peut être identifiée et lorsque l'action n'est pas encore prescrite.

Cette disposition s'inspire du principe du « pollueur payeur » (Doc. parl., Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale, 2008-2009, A-533/1, p. 9).

B.2.6. La disposition en cause détermine à qui incombent les obligations précitées lorsque les parcelles polluées ne font pas l'objet d'un transfert consensuel de droits réels mais d'une expropriation. Le législateur ordonnanciel entendait tenir compte du caractère spécifique d'une expropriation, à savoir son caractère non volontaire (Doc. parl., Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale, 2008-2009, A-533/2, p. 12).

A cet égard, les travaux préparatoires mentionnent ce qui suit : « Les articles 58 et 59 organisent la procédure pour deux faits générateurs particuliers. Leur spécificité entraîne en effet que le calendrier et le titulaire des obligations prévus à l'article 13 soient quelque peu adaptés.

L'article 58 stipule qu'en cas d'expropriation, c'est l'autorité expropriante - et non le titulaire de droits réels exproprié - qui doit réaliser, éventuellement d'office, la reconnaissance de l'état du sol. Cette étude doit être réalisée avant le jugement fixant les indemnités provisoires.

Tenant compte [lire : compte tenu] du caractère non volontaire de l'expropriation, l'exproprié ne doit en effet pas être tenu [à] la réalisation des premières études.

Par ailleurs, afin que l'autorité expropriante puisse disposer d'informations relatives à l'état du sol du terrain exproprié avant l'expropriation, elle peut éventuellement réaliser une étude détaillée, une étude de risque, un projet de gestion du risque ou un projet d'assainissement. Ces informations permettront également au tribunal [de] tenir compte des frais de traitement de la pollution, dans la fixation de l'indemnité provisoire correspondante à l'expropriation.

Afin de garantir la bonne information de l'autorité expropriante sur l'application de cette disposition, celle-ci doit demander à l'Institut une attestation du sol pour toutes les parcelles concernées par le terrain à exproprier indiquant notamment si celui-ci est repris dans la catégorie 0 de l'inventaire de l'état du sol.

Les dispositions de l'ordonnance découlant de la reconnaissance de l'état du sol s'appliquent ensuite par analogie moyennant la prise en charge des obligations du titulaire de droits réels exproprié par l'autorité expropriante » (Doc. parl., Parlement de Bruxelles-Capitale, 2008-2009, A-533/1, pp. 56-57).

B.2.7. En vertu de la disposition en cause, les dispositions de l' ordonnance du 5 mars 2009Documents pertinents retrouvés type ordonnance prom. 05/03/2009 pub. 10/03/2009 numac 2009031120 source ministere de la region de bruxelles-capitale Ordonnance relative à la gestion et à l'assainissement des sols pollués fermer s'appliquent par analogie au transfert de propriété résultant d'une expropriation, en ce que l'autorité expropriante remplit les obligations du titulaire de droits réels.

Dans la mesure où l'exproprié était, en tant que titulaire de droits réels, celui auquel incombaient les obligations visées aux articles 19 à 22 de l' ordonnance du 5 mars 2009Documents pertinents retrouvés type ordonnance prom. 05/03/2009 pub. 10/03/2009 numac 2009031120 source ministere de la region de bruxelles-capitale Ordonnance relative à la gestion et à l'assainissement des sols pollués fermer, l'autorité expropriante est également subrogée, conformément à la disposition en cause, dans le droit d'action récursoire, visé à l'article 24 de l' ordonnance du 5 mars 2009Documents pertinents retrouvés type ordonnance prom. 05/03/2009 pub. 10/03/2009 numac 2009031120 source ministere de la region de bruxelles-capitale Ordonnance relative à la gestion et à l'assainissement des sols pollués fermer, contre la personne responsable de la pollution.

B.3. Le juge a quo demande à la Cour si la disposition en cause est compatible avec les articles 10, 11 et 16 de la Constitution, dans l'interprétation selon laquelle le juge n'est pas autorisé, lors de la fixation de l'indemnité d'expropriation, à déduire les coûts d'assainissement escomptés.

B.4.1. Le Gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale conteste la pertinence de la question préjudicielle pour la solution du litige devant le juge a quo, en ce qu'il serait question, en l'espèce, d'une « pollution orpheline ».

B.4.2. C'est en règle à la juridiction qui interroge la Cour qu'il appartient d'apprécier si la réponse à la question préjudicielle est utile à la solution du litige qu'elle doit trancher. Ce n'est que lorsque tel n'est manifestement pas le cas que la Cour peut décider que la question n'appelle pas de réponse.

B.4.3. L'on ne saurait déduire de l'arrêt de renvoi s'il est question, en l'espèce, d'une « pollution unique », d'une « pollution mélangée » ou d'une « pollution orpheline ». Du reste, ni la disposition en cause, ni l'article 24 de l' ordonnance du 5 mars 2009Documents pertinents retrouvés type ordonnance prom. 05/03/2009 pub. 10/03/2009 numac 2009031120 source ministere de la region de bruxelles-capitale Ordonnance relative à la gestion et à l'assainissement des sols pollués fermer n'établissent une distinction selon le type de pollution ou l'identité de l'auteur de cette pollution.

Il n'apparaît dès lors pas que la réponse à la question préjudicielle ne serait manifestement pas utile à la solution du litige a quo.

B.5.1. La disposition en cause confie à l'autorité expropriante l'obligation de reconnaissance de l'état du sol et les étapes ultérieures de traitement de la pollution éventuellement constatée sur le terrain exproprié.

Elle instaure dès lors une différence de traitement entre les propriétaires de terrains pollués qui sont expropriés et les propriétaires de sols pollués qui ne sont pas expropriés, ces derniers devant réaliser à leur charge, dans certaines circonstances - et notamment s'ils souhaitent vendre le terrain - la reconnaissance de l'état du sol et entreprendre, le cas échéant, les étapes ultérieures du traitement de la pollution constatée. La disposition en cause fait également naître une différence de traitement entre les propriétaires de terrains pollués et les propriétaires de terrains entachés d'un autre vice.

B.5.2. Ces différences de traitement sont pertinentes pour atteindre l'objectif poursuivi par la disposition en cause. Le législateur ordonnanciel entendait en effet tenir compte, dans le cadre de l'analyse et du traitement des sols pollués, du caractère spécifique de l'expropriation, à savoir son caractère non volontaire (Doc. parl., Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale, 2008 2009, A-533/2, p. 12).

B.5.3. L'indemnité d'expropriation correspond, en principe, à la valeur de marché du bien immobilier. Cette valeur de marché est influencée par l'obligation d'assainissement qui grève le bien. Pour déterminer la valeur vénale d'un bien immobilier, il faut en effet tenir compte de tous les éléments qui influencent cette valeur, favorablement et défavorablement.

Si l'exproprié a généré la pollution, le tribunal peut, selon les travaux préparatoires de la disposition en cause, tenir compte des frais de traitement de cette pollution lorsqu'il fixe l'indemnité provisoire d'expropriation (Doc. parl., Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale, 2008-2009, A-533/1, p. 57). Si tel n'était pas le cas, l'exproprié s'enrichirait de manière abusive.

B.5.4. Si l'exproprié n'a pas généré la pollution et n'est pas tenu à l'obligation d'assainissement, l'article 16 de la Constitution exige en revanche que le tribunal ne déduise pas les frais de traitement de la pollution du sol lorsqu'il fixe le montant de l'indemnité provisoire d'expropriation. Une telle déduction aurait pour conséquence que l'exproprié devrait supporter définitivement les coûts de traitement et recevrait éventuellement une indemnité d'expropriation trop faible, puisqu'il ne dispose pas du droit d'action récursoire visé à l'article 24 de l' ordonnance du 5 mars 2009Documents pertinents retrouvés type ordonnance prom. 05/03/2009 pub. 10/03/2009 numac 2009031120 source ministere de la region de bruxelles-capitale Ordonnance relative à la gestion et à l'assainissement des sols pollués fermer.

Par ces motifs, la Cour dit pour droit : L'article 58 de l'ordonnance de la Région de Bruxelles-Capitale du 5 mars 2009 relative à la gestion et à l'assainissement des sols pollués viole les articles 10, 11 et 16 de la Constitution en ce que les coûts d'assainissement estimés sont déduits de l'indemnité d'expropriation, lorsque l'exproprié n'a pas causé la pollution des sols et n'est pas tenu à l'obligation d'assainissement.

Ainsi rendu en langue néerlandaise et en langue française, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, le 30 juin 2016.

Le greffier, F. Meersschaut Le président, E. De Groot

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