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Arrêt
publié le 05 juillet 2016

Extrait de l'arrêt n° 46/2016 du 24 mars 2016 Numéros du rôle : 6132 et 6133 En cause : les questions préjudicielles relatives à l'article 75, 3°, du Code des impôts sur les revenus 1992, posées par la Cour d'appel de Liège. La Cour consti composée du président J. Spreutels, du juge A. Alen, faisant fonction de président, et des juges L.(...)

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COUR CONSTITUTIONNELLE


Extrait de l'arrêt n° 46/2016 du 24 mars 2016 Numéros du rôle : 6132 et 6133 En cause : les questions préjudicielles relatives à l'article 75, 3°, du Code des impôts sur les revenus 1992, posées par la Cour d'appel de Liège.

La Cour constitutionnelle, composée du président J. Spreutels, du juge A. Alen, faisant fonction de président, et des juges L. Lavrysen, J.-P. Snappe, J.-P. Moerman, E. Derycke et R. Leysen, assistée du greffier P.-Y. Dutilleux, présidée par le président J. Spreutels, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet des questions préjudicielles et procédure Par deux arrêts du 17 décembre 2014 en cause de la SA « Les Sittelles » contre l'Etat belge, SPF Finances, dont les expéditions sont parvenues au greffe de la Cour le 7 janvier 2015, la Cour d'appel de Liège a posé les questions préjudicielles suivantes : 1. Dans le premier arrêt : « L'article 75, 3° du Code des impôts sur les revenus 1992 viole-t-il les dispositions des articles 10, 11 et 172 de la Constitution en ce qu'il a pour effet d'exclure de la déduction pour investissement une société qui répond aux critères de la PME au sens de l'article 201, alinéa 1er, 1°, du Code des impôts sur les revenus et qui en raison de l'exercice de son objet social principal ou accessoire, cède l'usage de l'immobilisation acquise par elle à une société qui ne répond pas aux critères de la PME mais sur laquelle, vu la participation dont elle dispose, elle exerce un contrôle de sorte qu'elle n'est pas elle-même contrôlée par cette société, ni instrumentalisée par cette dernière afin de lui faire profiter d'un avantage fiscal auquel elle n'aurait normalement pas droit ? »;2. Dans le second arrêt : « L'article 75, 3° du Code des impôts sur les revenus 1992 viole-t-il les dispositions des articles 10, 11 et 172 de la Constitution en ce qu'il a pour effet d'exclure de la déduction pour investissement une société qui répond aux critères de la PME au sens de l'article 201, alinéa 1er, 1°, du Code des impôts sur les revenus et qui en raison de l'exercice de son objet social principal ou accessoire, cède l'usage de l'immobilisation acquise par elle à une société qui ne répond pas aux critères de la PME du seul fait de cette participation mais sur laquelle, vu la participation dont elle dispose, elle exerce un contrôle de sorte qu'elle n'est pas elle-même contrôlée par cette société, ni instrumentalisée par cette dernière afin de lui faire profiter d'un avantage fiscal auquel elle n'aurait normalement pas droit ? ». Ces affaires, inscrites sous les numéros 6132 et 6133 du rôle de la Cour, ont été jointes. (...) III. En droit (...) B.1.1. La question préjudicielle posée dans les deux affaires jointes invite la Cour à se prononcer sur la compatibilité, avec les articles 10, 11 et 172 de la Constitution, de l'article 75, 3°, du Code des impôts sur les revenus 1992 (CIR 1992), en ce qu'il a pour effet d'exclure de la déduction pour investissement une société qui répond aux critères de la PME au sens de l'article 201, alinéa 1er, 1°, du CIR 1992 et qui, en raison de l'exercice de son objet social principal ou accessoire, cède l'usage de l'immobilisation acquise par elle à une société qui ne correspond pas aux critères de la PME mais sur laquelle, vu la participation dont elle dispose, elle exerce un contrôle, de sorte qu'elle n'est pas elle-même contrôlée par cette société, ni instrumentalisée par cette dernière afin de lui faire profiter d'un avantage fiscal auquel elle n'aurait normalement pas droit.

B.1.2. L'article 68 du CIR 1992 dispose : « Les bénéfices et profits sont exonérés à concurrence d'une quotité de la valeur d'investissement ou de revient des immobilisations corporelles acquises à l'état neuf ou constituées à l'état neuf et des immobilisations incorporelles neuves, lorsque ces immobilisations sont affectées en Belgique à l'exercice de l'activité professionnelle.

Cette exonération est dénommée ' déduction pour investissement ' ».

L'article 75 du même Code, tel qu'il est applicable au litige soumis au juge a quo, disposait : « La déduction pour investissement n'est pas non plus applicable : [...] 3° aux immobilisations dont le droit d'usage a été cédé à un autre contribuable, selon des modalités différentes de celles visées au 2°, à moins que cette cession n'ait été effectuée à une personne physique qui affecte ces immobilisations en Belgique à la réalisation de bénéfices ou de profits et qui n'en cède pas l'usage à une tierce personne en tout ou en partie. [...] ».

L'article 201 du CIR 1992, tel qu'il est applicable au litige soumis au juge a quo, disposait : « Dans les cas visés à l'article 69, § 1er, alinéa 1er, 1°), la déduction pour investissement est déterminée comme suit : 1° en ce qui concerne les sociétés résidentes dont les actions ou parts, représentant la majorité des droits de vote, sont détenues à concurrence de plus de la moitié par une ou plusieurs personnes physiques et qui ne font pas partie d'un groupe auquel appartient un centre de coordination visé à l'arrêté royal n° 187 du 30 décembre 1982 relatif à la création de centres de coordination, le pourcentage de la déduction est égal à l'augmentation exprimée en pour cent, de la moyenne des indices des prix à la consommation du Royaume de la pénultième année précédant celle dont le millésime désigne l'exercice d'imposition auquel est rattachée la période imposable au cours de laquelle l'investissement est effectué, par rapport à la moyenne des indices des prix à la consommation de l'année précédente, arrondie à l'unité supérieure ou inférieure selon que la fraction atteint ou non 50 p.c., et majorée de 1 point sans que le pourcentage ainsi obtenu puisse être inférieur à 3 p.c. ou supérieur à 10 p.c.; ce pourcentage ne s'applique qu'à la première tranche de 5.000.000 EUR d'investissements effectués par période imposable; 2° en ce qui concerne les sociétés non visées au 1°, le pourcentage de la déduction est celui visé au 1°, mais ramené à 0. Le Roi peut, lorsque les circonstances économiques le justifient, majorer, par arrêté délibéré en Conseil des ministres, le pourcentage de base de la déduction pour investissement visé à l'alinéa 1er, 1°, ainsi que le pourcentage visé à l'alinéa 1er, 2°, en tant qu'il est ramené à 0.

Le Roi saisira les Chambres législatives, immédiatement si elles sont réunies, sinon dès l'ouverture de leur plus prochaine session, d'un projet de loi de confirmation des arrêtés pris en exécution du présent article.

Le montant de 5.000.000 EUR visé à l'alinéa 1er, 1°, est adapté annuellement à l'indice des prix à la consommation du Royaume. Cette adaptation est réalisée à l'aide du coefficient qui est obtenu en divisant la moyenne des indices des prix de la pénultième année précédant celle dont le millésime désigne l'exercice d'imposition par la moyenne des indices des prix de l'année 1988. Pour les calculs, on applique les dispositions de l'article 178, § 2, alinéas 2 et 3 ».

B.2.1. La disposition en cause trouve son origine dans l'article 65 de la loi de redressement du 31 juillet 1984 (Moniteur belge, 10 août 1984), qui a inséré un article 42ter, § 6, alinéa 2, 4°, dans le CIR 1964 en vue d'exclure la déduction pour investissement pour les immobilisations dont le droit d'usage autre que celui visé au 2° (en l'occurrence la cession d'usage dans le cadre d'un crédit-bail, d'une convention d'emphytéose, de superficie ou de droits immobiliers similaires) a été cédé à un tiers, à moins que cette cession n'ait été effectuée au profit d'exploitations au sens de l'article 10, 1°, (soit les exploitations industrielles, commerciales ou agricoles) qui affectent l'usage de ces immobilisations à l'exercice de leur activité professionnelle en Belgique, sans le céder à un tiers en tout ou en partie.

Cette disposition a été justifiée comme suit dans les travaux préparatoires de la loi de redressement du 31 juillet 1984 : « L'expérience a montré que des entreprises étrangères constituent une société en Belgique, laquelle a pour objet de donner des immobilisations en location aux sociétés dont elles émanent et de pouvoir ainsi profiter de la déduction pour investissement.

La déduction pour investissement n'a bien entendu pas été instaurée pour avantager des entreprises étrangères qui n'ont pas en Belgique de siège de direction ou d'exploitation. C'est la raison pour laquelle il est proposé de ne plus accorder la déduction pour investissement dans les cas où tout droit d'usage de biens mobiliers, autre que le leasing, est cédé à des tiers, étant entendu que la cession d'un tel droit à des entreprises établies en Belgique ne tombe pas dans le champ de l'exclusion » (Doc. parl., Chambre, 1983-1984, n° 927/1, p. 28, et n° 927/27, p. 415).

B.2.2. La disposition d'origine a fait l'objet de plusieurs modifications successives. Ainsi, l'article 12 de la loi du 28 juillet 1992 portant des dispositions fiscales et financières (Moniteur belge, 31 juillet 1992) a étendu le bénéfice des déductions pour investissement aux titulaires de professions libérales, charges ou offices pour les motifs suivants : « En règle générale, la déduction pour investissement ne s'applique pas aux immobilisations dont l'usage est cédé à des tiers. Toutefois, si le preneur est une entreprise industrielle, commerciale ou agricole qui affecte ces immobilisations à son activité professionnelle en Belgique, sans en céder l'usage à un tiers, la déduction reste acquise pour le bailleur. Cette exception est étendue par le projet aux locataires, titulaires d'une profession libérale, charge ou office.

Une telle extension est logique puisque ces derniers contribuables bénéficient, depuis la loi du 7 décembre 1988, d'un droit général à la déduction pour investissement, à l'instar des entrepreneurs » (Doc. parl., Chambre, 1991-1992, n° 444/9, p. 136).

Une deuxième modification a été introduite par l'article 3 de la loi du 28 décembre 1992 portant des dispositions fiscales, financières et diverses (Moniteur belge, 31 décembre 1992), et justifiée comme suit dans les travaux préparatoires de la loi : « Le ministre rappelle que l'article 18 de la loi du 28 juillet 1992 portant des dispositions fiscales et financières (Moniteur belge du 31 juillet 1992) a ramené à zéro le taux de la déduction pour investissement pour les sociétés dont les actions ou parts ne sont détenues, à concurrence de plus de la moitié, par une ou plusieurs personnes physiques et pour les sociétés qui font partie d'un groupe auquel appartient un centre de coordination.

L'administration a cependant constaté que certaines grandes sociétés tentent de contourner cette disposition en faisant effectuer leur investissement par des PME, qui répondent quant à elles aux conditions requises.

L'article 1erter proposé vise dès lors à combattre cette pratique.

La déduction pour investissement est toutefois maintenue dans le cas où le droit d'usage des actifs immobilisés est cédé par une PME à une autre PME qui satisfait également aux conditions permettant de bénéficier de la déduction pour investissement.

L'article 1erter vise dès lors uniquement les cas où une PME bénéficie de la déduction pour investissement pour des actifs immobilisés dont elle cède le droit d'usage à une (grande) société qui ne peut elle-même bénéficier d'aucune déduction pour investissement (tarif zéro) » (Doc. parl., Chambre, 1992-1993, n° 717/5, p. 54).

B.3. Par son arrêt n° 127/2008 du 1er septembre 2008 en réponse à une question préjudicielle posée par le Tribunal de première instance de Namur dans la même affaire que celle qui oppose toujours les parties devant le juge a quo, la Cour a jugé : « B.3.2. Il ressort de l'article 201, alinéa 1er, 2°, du CIR 1992 que la déduction pour investissement est exclue dans le chef des sociétés qui ne répondent pas aux deux critères mentionnés au 1° de la même disposition, en l'occurrence ceux d'une petite et moyenne entreprise (PME) au sens de ladite disposition. En effet, pour de telles sociétés, le pourcentage de la déduction pour investissement est ramené à zéro. Pour ce qui concerne les PME, l'article 201, alinéa 1er, 1°, précité limite la déduction pour investissement à un montant de 5 millions d'euros d'investissements effectués par période imposable.

B.3.3. La mesure prévue par l'article 201, alinéa 1er, 1° et 2°, du CIR 1992 a été justifiée comme suit dans les travaux préparatoires de la loi du 28 juillet 1992 qui est à l'origine de son adoption : ' L'avantage fiscal que représente pour les sociétés la déduction pour investissement n'étant pas l'élément prépondérant dans la décision d'investir, il a été décidé de réduire à zéro - mais seulement pour les sociétés - le pourcentage de cette déduction pour les investissements réalisés à partir du 27 mars 1992 (date de l'annonce de la mesure par le Gouvernement). Celle-ci n'est cependant pas supprimée de sorte que, si les circonstances économiques l'exigent, la déduction peut être réintroduite par un arrêté royal délibéré en Conseil des ministres.

L'arrêté royal devra être confirmé par une loi. [...] ' (Doc. parl., Chambre, 1991-1992, n° 444/1, p. 16).

B.4.1. Compte tenu de ce que le régime de déduction pour investissement diffère selon qu'il s'agit ou non d'une société répondant aux critères de la PME au sens de la disposition précitée, la Cour doit opérer une distinction entre les deux types de sociétés pour se prononcer sur la première différence de traitement dénoncée.

Ainsi, une société qui ne répond pas aux critères d'une PME au sens de l'article 201, alinéa 1er, 1°, du CIR 1992 et qui, dans le cadre de l'exercice de son activité sociale, exploite l'immobilisation sans en céder l'usage, ne peut prétendre à aucune déduction pour investissement dès lors que le taux de celle-ci est ramené à zéro par l'effet du 2° de la même disposition. Il en résulte que, dans cette hypothèse, elle n'est pas traitée de manière différente d'une société qui, en raison de l'exercice de son activité sociale, exploite l'immobilisation en en cédant l'usage à un tiers autre qu'une personne physique qui affecte cette immobilisation à la réalisation de bénéfices ou de profits et qui n'en cède pas l'usage à une tierce personne en tout ou en partie, cette dernière étant elle aussi exclue du bénéfice de la déduction pour investissement.

Lorsqu'en revanche, une société répond aux critères de la PME définis à l'article 201, alinéa 1er, 1°, du CIR 1992, elle peut prétendre au bénéfice de la déduction pour investissement jusqu'à un montant de 5 millions d'euros d'investissements effectués par période imposable lorsqu'elle exploite l'immobilisation sans en céder l'usage. Tel n'est pas le cas pour une société (qu'elle réponde ou non aux critères de la PME) qui exploite l'immobilisation en en cédant l'usage à un tiers autre qu'une personne physique qui affecte cette immobilisation à la réalisation de bénéfices ou profits et qui n'en cède pas l'usage à une tierce personne en tout ou en partie. Celle-ci se trouve en effet exclue du bénéfice de la déduction pour investissement par l'effet de l'article 75, 3°, du CIR 1992 en cause.

B.4.2. Compte tenu de l'objectif décrit en B.2.2, il est raisonnablement justifié d'exclure de la déduction pour investissement une société qui répond aux critères de la PME définis à l'article 201, alinéa 1er, 1°, du CIR 1992 et qui cède le droit d'usage de l'immobilisation acquise à une société qui ne répond pas auxdits critères et ne pourrait, partant, prétendre à la déduction pour investissement prévue aux articles 68 et suivants du même Code si elle avait elle-même acquis l'immobilisation.

Toutefois, en ce qu'elle a pour effet d'exclure de la déduction pour investissement l'immobilisation acquise par une PME au sens de l'article 201, alinéa 1er, 1°, du Code lorsque celle-ci cède le droit d'usage de ladite immobilisation à une autre société PME qui pourrait elle-même prétendre à la déduction si elle avait acquis l'immobilisation, la mesure prescrite par l'article 75, 3°, du CIR 1992 n'est pas pertinente pour atteindre l'objectif du législateur. Le risque de contournement de l'interdiction de déduction est, en effet, inexistant en pareille hypothèse puisque la société cédante et la société cessionnaire peuvent toutes deux prétendre à la déduction pour investissement en vertu de l'article 201, alinéa 1er, 1°, du CIR 1992.

B.4.3. La question préjudicielle appelle, dans cette mesure, une réponse positive. [...] B.6.2. Doit encore être examinée l'hypothèse d'une société qui répond aux critères de la PME au sens de l'article 201, alinéa 1er, 1°, du CIR 1992, selon qu'elle cède l'usage de l'immobilisation acquise à une personne physique aux conditions décrites par la question ou selon qu'elle cède l'usage de l'immobilisation à un tiers autre qu'une personne physique.

Pour les motifs mentionnés en B.4.1 et B.4.2, le législateur a pu raisonnablement considérer, compte tenu de l'objectif qu'il entendait poursuivre et qui a été rappelé en B.2.2, qu'il convenait d'exclure de la déduction pour investissement les PME qui cèdent l'usage de l'immobilisation acquise à des sociétés qui n'auraient pu prétendre au bénéfice de la déduction pour investissement si elles avaient elles-mêmes acquis l'immobilisation en question.

En revanche, en ce qu'elle a pour effet d'exclure du bénéfice de la déduction pour investissement une PME au sens de l'article 201, alinéa 1er, 1°, du CIR 1992, qui cède l'usage de l'immobilisation acquise à une autre PME au sens de la même disposition, alors que celle-ci aurait pu bénéficier de la déduction pour investissement si elle avait elle-même acquis l'immobilisation, la mesure prescrite par l'article 75, 3°, du CIR 1992 n'est pas pertinente par rapport à l'objectif poursuivi.

B.6.3. La question préjudicielle appelle, dans cette mesure, une réponse positive ».

B.4.1. La Cour est interrogée sur la compatibilité de l'article 75, 3°, du CIR 1992 avec les articles 10, 11 et 172 de la Constitution dans l'hypothèse où la cession du droit d'usage a été octroyée à une société qui ne répond pas aux critères de la PME, en raison du fait que la société cédante du droit d'usage détenait au moment des faits l'ensemble des actions de la société cessionnaire mais que cette cession n'a pas été octroyée en vue de contourner les règles en matière de déduction pour investissement.

B.4.2. Cette hypothèse a été envisagée par la Cour dans son arrêt n° 127/2008 précité. En effet, comme il a été dit plus haut, la Cour a jugé que la disposition en cause ne violait pas le principe d'égalité et de non-discrimination en ce que la déduction pour investissement ne pouvait être accordée lorsqu'une société cède l'usage d'une immobilisation acquise à une société qui n'aurait pu, comme c'est le cas en l'espèce, prétendre au bénéfice de la déduction pour investissement si elle avait elle-même acquis l'immobilisation en question.

La circonstance que la seconde société est contrôlée par la première n'est pas de nature à modifier ce jugement.

Il apparaît des faits exposés dans la décision de renvoi que la société cédante a été créée dans le cadre d'une construction juridique avec la société cessionnaire et qu'elle aurait pu bénéficier de la déduction si elle n'avait pas cédé l'usage du bien à la SPRL dont elle venait de racheter les parts détenues jusque-là par des personnes physiques.

Il faut considérer que celui qui décide de constituer une ou plusieurs personnes morales dans le cadre d'une construction juridique en a évalué les avantages et les inconvénients.

Il ne saurait par conséquent être reproché à la disposition en cause d'avoir pour effet d'exclure la société cédante du droit à la déduction fiscale.

B.4.3. Les questions préjudicielles appellent une réponse négative.

Par ces motifs, la Cour dit pour droit : L'article 75, 3°, du Code des impôts sur les revenus 1992 ne viole pas les dispositions des articles 10, 11 et 172 de la Constitution en ce qu'il a pour effet d'exclure de la déduction pour investissement une société qui répond aux critères de la PME au sens de l'article 201, alinéa 1er, 1°, du même Code et qui, en raison de l'exercice de son objet social, cède l'usage de l'immobilisation acquise par elle à une société qui ne répond pas aux critères de la PME. Ainsi rendu en langue française et en langue néerlandaise, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, le 24 mars 2016.

Le greffier, P.-Y. Dutilleux Le président, J. Spreutels

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