publié le 06 janvier 2016
Extrait de l'arrêt n° 156/2015 du 29 octobre 2015 Numéro du rôle : 6079 En cause : la question préjudicielle relative à l'article 6 de la loi du 10 avril 1990 réglementant la sécurité privée et particulière, posée par le Conseil d'Etat. La composée des présidents J. Spreutels et A. Alen, et des juges J.-P. Snappe, E. Derycke, T. Merckx-V(...)
Extrait de l'arrêt n° 156/2015 du 29 octobre 2015 Numéro du rôle : 6079 En cause : la question préjudicielle relative à l'article 6 de la loi du 10 avril 1990Documents pertinents retrouvés type loi prom. 10/04/1990 pub. 08/04/2000 numac 2000000153 source ministere de l'interieur Loi sur les entreprises de gardiennage, sur les entreprises de sécurité et sur les services internes de gardiennage . - Traduction allemande fermer réglementant la sécurité privée et particulière, posée par le Conseil d'Etat.
La Cour constitutionnelle, composée des présidents J. Spreutels et A. Alen, et des juges J.-P. Snappe, E. Derycke, T. Merckx-Van Goey, P. Nihoul et R. Leysen, assistée du greffier F. Meersschaut, présidée par le président J. Spreutels, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet de la question préjudicielle et procédure Par arrêt n° 228.847 du 21 octobre 2014 en cause de B.C. contre l'Etat belge, dont l'expédition est parvenue au greffe de la Cour le 4 novembre 2014, le Conseil d'Etat a posé la question préjudicielle suivante : « L'article 6 de la loi du 10 avril 1990Documents pertinents retrouvés type loi prom. 10/04/1990 pub. 08/04/2000 numac 2000000153 source ministere de l'interieur Loi sur les entreprises de gardiennage, sur les entreprises de sécurité et sur les services internes de gardiennage . - Traduction allemande fermer réglementant la sécurité privée et particulière en ce qu'il exclut toute personne de la profession d'agent de sécurité lorsqu'elle a été condamnée pour des faits de coups et blessures même lorsque la condamnation est une peine de travail, alors que pour la majorité des infractions, dont celles prévues aux articles 433decies et suivants [du Code pénal] aussi relatives à la sécurité des personnes, cette exclusion n'interviendra que pour une condamnation supérieure ou égale à six mois, est-il compatible avec les articles 10 et 11 de la Constitution et proportionné aux buts poursuivis et à celui poursuivi par les articles 37ter et suivants du Code pénal soit justement d'éviter l'exclusion sociale du condamné ? ». (...) III. En droit (...) B.1.1. L'article 6, alinéa 1er, 1°, première phrase, de la loi du 10 avril 1990Documents pertinents retrouvés type loi prom. 10/04/1990 pub. 08/04/2000 numac 2000000153 source ministere de l'interieur Loi sur les entreprises de gardiennage, sur les entreprises de sécurité et sur les services internes de gardiennage . - Traduction allemande fermer réglementant la sécurité privée et particulière dispose : « Les personnes qui exercent, dans une entreprise, service ou organisme, visé à l'article 1er, une autre fonction que celles qui sont visées à l'article 5, doivent satisfaire aux conditions suivantes : 1° ne pas avoir été condamnées, même avec sursis, à une peine d'emprisonnement de six mois au moins du chef d'une infraction quelconque, à un emprisonnement, ou à une autre peine du chef de vol, recel, extorsion, abus de confiance, escroquerie, faux en écritures, coups et blessures volontaires, attentat à la pudeur, viol ou d'infractions visées aux articles 379 à 386ter du Code pénal, à l'article 227 du Code pénal, à l'article 259bis du Code pénal, à l'article 280 du Code pénal, aux articles 323, 324 et 324ter du Code pénal, dans la loi du 24 février 1921 concernant le trafic des substances vénéneuses, soporifiques, stupéfiantes, désinfectantes ou antiseptiques et ses arrêtés d'exécution, la loi du 3 janvier 1933 relative à la fabrication, au commerce et au port des armes et au commerce des munitions et ses arrêtés d'exécution, ou la loi du 8 décembre 1992 relative à la protection de la vie privée à l'égard des traitements de données à caractère personnel ou la loi du 30 juillet 1981 tendant à réprimer certains actes inspirés par le racisme et la xénophobie ». B.1.2. Les articles 433decies et suivants du Code pénal disposent : «
Art. 433decies.Sera puni d'un emprisonnement de six mois à trois ans et d'une amende de cinq cents euros à vingt-cinq mille euros, quiconque aura abusé, soit directement, soit par un intermédiaire, de la situation de vulnérabilité dans laquelle se trouve une personne en raison de sa situation administrative illégale ou précaire, de sa situation sociale précaire, de son âge, d'un état de grossesse, d'une maladie, d'une infirmité ou d'une déficience physique ou mentale, en vendant, louant ou mettant à disposition, dans l'intention de réaliser un profit anormal, un bien meuble, une partie de celui-ci, un bien immeuble, une chambre ou un autre espace visé à l'article 479 du Code pénal dans des conditions incompatibles avec la dignité humaine.
L'amende sera appliquée autant de fois qu'il y a de victimes.
Art. 433undecies.L'infraction visée à l'article 433decies sera punie d'un an à cinq ans d'emprisonnement et d'une amende de mille euros à cent mille euros dans les cas suivants : 1° lorsque l'activité concernée constitue une activité habituelle;2° lorsqu'elle constitue un acte de participation à l'activité principale ou accessoire d'une association, et ce, que le coupable ait ou non la qualité de dirigeant. L'amende sera appliquée autant de fois qu'il y a de victimes.
Art. 433duodecies.L'infraction visée à l'article 433decies sera punie de réclusion de cinq ans à dix ans et d'une amende de mille euros à cent cinquante mille euros si elle constitue un acte de participation à l'activité principale ou accessoire d'une organisation criminelle, et ce, que le coupable ait ou non la qualité de dirigeant.
L'amende sera appliquée autant de fois qu'il y a de victimes.
Art. 433terdecies.Dans les cas visés aux articles 433undecies et 433duodecies, les coupables seront en outre condamnés à l'interdiction des droits spécifiés à l'article 31, alinéa 1er.
La confiscation spéciale prévue à l'article 42, 1°, est appliquée aux coupables de l'infraction visée à l'article 433decies, même lorsque la propriété des choses sur lesquelles elle porte n'appartient pas au condamné, sans que cette confiscation puisse cependant porter préjudice aux droits des tiers sur les biens susceptibles de faire l'objet de la confiscation. Elle doit également être appliquée, dans les mêmes circonstances, au bien meuble, à la partie de celui-ci, au bien immeuble, à la chambre ou à tout autre espace visé par cet article.
Elle peut également être appliquée à la contre-valeur de ces meubles ou immeubles aliénés entre la commission de l'infraction et la décision judiciaire définitive.
Art. 433quaterdecies.Selon le cas, le procureur du Roi ou le juge d'instruction peut saisir le bien meuble, la partie de celui-ci, le bien immeuble, la chambre ou tout autre espace visé à l'article 433decies. S'il décide de pratiquer la saisie, le bien meuble, la partie de celui-ci, le bien immeuble, la chambre ou tout autre espace visé à l'article 433decies doit être scellé ou, avec l'accord écrit du propriétaire ou du bailleur, être mis à la disposition du C.P.A.S. afin d'être restauré et loué temporairement. La décision du procureur du Roi ou du juge d'instruction, selon le cas, de procéder à la saisie est signifiée au propriétaire ou au bailleur. En cas de saisie d'un bien immeuble, la décision doit en outre être signifiée au plus tard dans les vingt-quatre heures et être présentée pour transcription au bureau des hypothèques du lieu où le bien est établi. Le jour de la transcription pris en compte est celui de la signification de la décision de saisie. La saisie reste valable jusqu'au moment de la décision judiciaire définitive par laquelle soit la confiscation a été prononcée, soit la levée de la saisie est prononcée. Une levée de la saisie peut auparavant être accordée à tout moment, selon le cas, par le procureur du Roi ou par le juge d'instruction après que celui-ci en a avisé le procureur du Roi. La personne saisie ne peut intenter les recours prévus aux articles 28sexies et 61quater du Code d'instruction criminelle qu'après un délai d'un an à compter de la date de la saisie.
Art. 433quinquiesdecies.Dans les cas visés à l'article 433decies, les victimes peuvent être, le cas échéant, accueillies ou relogées sur décision, selon le cas, du ministre compétent, de l'autorité compétente ou des fonctionnaires désigné par eux, et ce, en concertation avec les services compétents en la matière. Les frais de logement sont à charge du prévenu. Lorsque le prévenu est acquitté, les frais sont mis à la charge, selon le cas, de l'Etat ou du C.P.A.S. compétent ».
B.1.3. Avant leur renumérotation par l'article 9 de la loi du 7 février 2014Documents pertinents retrouvés type loi prom. 07/02/2014 pub. 28/02/2014 numac 2014009072 source service public federal justice Loi instaurant la surveillance électronique comme peine autonome fermer « instaurant la surveillance électronique comme peine autonome » et les modifications apportées par la loi du 10 avril 2014 « insérant la probation comme peine autonome dans le Code pénal, et modifiant le Code d'instruction criminelle, et la loi du 29 juin 1964 concernant la suspension, le sursis et la probation », les articles 37ter et 37quater du Code pénal disposaient : «
Art. 37ter.§ 1er. Lorsqu'un fait est de nature à entraîner une peine de police ou une peine correctionnelle, le juge peut condamner à titre de peine principale à une peine de travail. Le juge prévoit, dans les limites des peines prévues pour l'infraction et par la loi en fonction de sa saisine, une peine d'emprisonnement ou une amende qui peut être applicable en cas de non-exécution de la peine de travail.
La peine de travail ne peut être prononcée pour les faits visés : - à l'article 347bis; - aux articles 375 à 377; - aux articles 379 à 387, si les faits ont été commis sur des mineurs ou à l'aide de mineurs; - aux articles 393 à 397; - à l'article 475. § 2. La durée d'une peine de travail ne peut être inférieure à vingt heures ni supérieure à trois cents heures. Une peine de travail égale ou inférieure à quarante-cinq heures constitue une peine de police.
Une peine de travail de plus de quarante-cinq heures constitue une peine correctionnelle.
La peine de travail doit être exécutée dans les douze mois qui suivent la date à laquelle la décision judiciaire est passée en force de chose jugée. La commission de probation peut d'office ou à la demande du condamné prolonger ce délai. § 3. Lorsqu'une peine de travail est envisagée par le juge, requise par le ministère public ou sollicitée par le prévenu, le juge informe celui-ci, avant la clôture des débats, de la portée d'une telle peine et l'entend dans ses observations. Le juge peut également tenir compte, à cet égard, des intérêts des victimes éventuelles. Le juge ne peut prononcer la peine de travail que si le prévenu est présent ou représenté à l'audience et après qu'il ait donné, soit en personne, soit par l'intermédiaire de son conseil, son consentement.
Le juge qui refuse de prononcer une peine de travail doit motiver sa décision. § 4. Le juge détermine la durée de la peine de travail et peut donner des indications concernant le contenu concret de la peine de travail.
Art. 37quater.§ 1er. La peine de travail est effectuée gratuitement par le condamné pendant le temps laissé libre par ses éventuelles activités scolaires ou professionnelles.
La peine de travail ne peut être effectuée qu'auprès des services publics de l'Etat, des communes, des provinces, des communautés et des régions ou auprès d'associations sans but lucratif ou de fondations à but social, scientifique ou culturel.
La peine de travail ne peut consister en un travail qui, dans le service public ou l'association désignée, est généralement exécuté par des travailleurs rémunérés. § 2. En vue de l'application de l'article 37ter, le ministère public, le juge d'instruction, les juridictions d'instruction et les juridictions de jugement peuvent charger la section du Service des maisons de justice du SPF Justice de l'arrondissement judiciaire du lieu de la résidence de l'inculpé, du prévenu ou du condamné de la rédaction d'un rapport d'information succinct et/ou d'une enquête sociale.
Le Roi précise les règles relatives au rapport d'information succinct et à l'enquête sociale.
Ces rapports et ces enquêtes ne peuvent contenir que les éléments pertinents de nature à éclairer l'autorité qui a adressé la demande au service des maisons de justice sur l'opportunité de la mesure ou la peine envisagée. § 3. Chaque section d'arrondissement du Service des maisons de justice du SPF Justice établit deux fois par an un rapport des activités existantes qui se prêtent à l'accomplissement de la peine de travail.
La section délivre copie de ce rapport au président du tribunal de première instance et au procureur du Roi de l'arrondissement concerné et, sur simple demande, à toute personne pouvant justifier d'un intérêt. § 4. Aux niveaux fédéral et local des structures de concertation relatives à l'application de la peine de travail sont créées. Ces structures de concertation ont pour mission de réunir sur une base régulière les instances concernées par l'exécution de la peine de travail afin d'évaluer leur collaboration. Le Roi arrête les modalités de composition et de fonctionnement de ces structures de concertation ».
B.2. La Cour est interrogée sur la compatibilité de l'article 6, alinéa 1er, 1°, première phrase, de la loi du 10 avril 1990Documents pertinents retrouvés type loi prom. 10/04/1990 pub. 08/04/2000 numac 2000000153 source ministere de l'interieur Loi sur les entreprises de gardiennage, sur les entreprises de sécurité et sur les services internes de gardiennage . - Traduction allemande fermer avec les articles 10 et 11 de la Constitution en ce que cette disposition exclut toute personne de la profession d'agent de sécurité lorsqu'elle a été condamnée pour des faits de coups et blessures volontaires même lorsque la condamnation est une peine de travail, alors que pour la majorité des infractions, dont celles prévues aux articles 433decies et suivants du Code pénal qui sont aussi relatives à la sécurité des personnes, cette exclusion n'intervient que pour une condamnation supérieure ou égale à une peine d'emprisonnement de six mois, compte tenu du but poursuivi par les articles 37ter et suivants du Code pénal qui est d'éviter l'exclusion sociale du condamné.
B.3. En ce qu'elle s'applique aux personnes qui ont été condamnées « à une autre peine » du chef de coups et blessures volontaires, la disposition en cause trouve son origine dans l'article 8, 2°, de la loi du 7 mai 2004Documents pertinents retrouvés type loi prom. 07/05/2004 pub. 03/06/2004 numac 2004000264 source service public federal interieur Loi modifiant la loi du 10 avril 1990 sur les entreprises de gardiennage, les entreprises de sécurité et les services internes de gardiennage, la loi du 29 juillet 1934 interdisant les milices privées et la loi du 19 juillet 1991 organisant la profession de détective privé fermer modifiant la loi du 10 avril 1990Documents pertinents retrouvés type loi prom. 10/04/1990 pub. 08/04/2000 numac 2000000153 source ministere de l'interieur Loi sur les entreprises de gardiennage, sur les entreprises de sécurité et sur les services internes de gardiennage . - Traduction allemande fermer sur les entreprises de gardiennage, les entreprises de sécurité et les services internes de gardiennage, la loi du 29 juillet 1934 interdisant les milices privées et la loi du 19 juillet 1991 organisant la profession de détective privé. Avant cette modification législative, la disposition en cause s'appliquait, notamment, aux personnes condamnées, même avec sursis, à un emprisonnement de trois mois au moins du chef de coups et blessures volontaires.
Il ressort des travaux préparatoires de la loi du 7 mai 2004Documents pertinents retrouvés type loi prom. 07/05/2004 pub. 03/06/2004 numac 2004000264 source service public federal interieur Loi modifiant la loi du 10 avril 1990 sur les entreprises de gardiennage, les entreprises de sécurité et les services internes de gardiennage, la loi du 29 juillet 1934 interdisant les milices privées et la loi du 19 juillet 1991 organisant la profession de détective privé fermer que : « Cette disposition est vécue comme étant problématique car l'administration a déjà été confrontée à maintes reprises à des candidats agents de gardiennage, par exemple, qui, il est vrai, ont été condamnés à une peine correctionnelle du chef de vol, par exemple, mais qui ne peuvent cependant être refusés car ils ont été condamnés à une lourde amende ou à une peine de travail et non à un emprisonnement.
De plus, on estime qu'il est essentiel que les agents de gardiennage chargés de procéder à des constatations et le personnel d'exécution d'entreprises de consultance en sécurité et d'organismes de formation, soient tout à fait dignes de confiance. Il se fait en effet que le personnel, via des entretiens avec le client, via un audit ou via une autre voie, obtient de nombreuses informations sensibles sur ce qui a trait à la sécurité chez le client. C'est pourquoi ils sont soumis aux mêmes conditions en matière d'absence de condamnation et de déontologie professionnelle que le personnel dirigeant » (Doc. parl., Chambre, 2002-2003, DOC 50-2328/001 et 50-2329/001, p. 27).
B.4. Les conditions de sécurité fixées à l'article 6 de la loi en cause pour le personnel non dirigeant des entreprises, services et organismes visés à l'article 1er de cette loi visent à assurer que ces personnes soient fiables. Cette disposition poursuit ainsi un but légitime.
B.5. Dès l'origine, le législateur a entendu que les activités de gardiennage et de sécurité soient pourvues d'une réglementation stricte et restrictive en considération de ce que le maintien de l'ordre public est au premier chef une responsabilité de l'autorité publique (Doc. parl., Sénat, 1988-1989, n° 775-1, p. 1).
L'exigence de fiabilité évoquée plus haut et liée à cette préoccupation du législateur s'est traduite par la définition des conditions d'exercice des activités en cause, tant en ce qui concerne le personnel dirigeant qu'en ce qui concerne le personnel d'exécution; les articles 5 et 6 de la loi du 10 avril 1990Documents pertinents retrouvés type loi prom. 10/04/1990 pub. 08/04/2000 numac 2000000153 source ministere de l'interieur Loi sur les entreprises de gardiennage, sur les entreprises de sécurité et sur les services internes de gardiennage . - Traduction allemande fermer, applicables respectivement à chacune de ces deux catégories de personnes et rédigés de manière analogue, exigent, notamment, que les intéressés n'aient pas encouru les condamnations pénales définies par ces dispositions. Ce régime a été préféré à celui dans lequel aurait été exigée une condition d'être de bonnes conduite, vie et moeurs et d'en rapporter la preuve annuellement et ce, à la suite d'une observation du Conseil d'Etat indiquant que « mieux vaudrait préciser que les personnes concernées ne doivent pas avoir fait l'objet d'une condamnation à une peine dépassant un certain taux du chef d'infraction contre les biens ou de violence contre les personnes » (Doc. parl., Sénat, 1988-1989, n° 775-1, p. 52). Il fut dès lors décidé de compléter par un critère de condamnation pénale général l'énumération des délits du chef desquels les intéressés ne peuvent être condamnés; le législateur indiqua à cette occasion : « [...] Une énumération de délits déterminés est toujours limitative et fait courir le danger que des personnes condamnées à des peines privatives de liberté par des délits non repris dans la liste puissent néanmoins assurer la gestion d'une entreprise de gardiennage ou de sécurité ou y être recrutés, bien que ces personnes n'aient pas le degré de moralité requis » (ibid., p. 12).
Le législateur a exprimé le même souci de fiabilité évoqué en B.4 lorsqu'il a modifié l'article 6 pour y compléter, à plusieurs reprises, la liste des infractions qu'il vise (Doc. parl., Chambre, 2002-2003, DOC 50-2328/001 et 50-2329/001, p. 25).
B.6.1. La mesure en cause, qui repose sur un critère objectif, est pertinente au regard de l'objectif de fiabilité poursuivi par le législateur. Celui-ci a pu raisonnablement considérer que des personnes qui ont été condamnées à une peine de travail du chef de coups et blessures volontaires représentent, s'il leur est permis d'exercer une activité connexe à celle du maintien de l'ordre public, un danger plus grand que des personnes ayant été condamnées à un emprisonnement, d'une durée supérieure à six mois, pour certaines autres infractions, en particulier les infractions prévues par les articles 433decies, 433undecies et 433duodecies précités.
B.6.2. A cet égard, les travaux préparatoires de la loi du 10 juin 2001Documents pertinents retrouvés type loi prom. 10/06/2001 pub. 19/07/2001 numac 2001000715 source ministere de l'interieur Loi modifiant la loi du 10 avril 1990 sur les entreprises de gardiennage, sur les entreprises de sécurité et sur les services internes de gardiennage type loi prom. 10/06/2001 pub. 23/06/2001 numac 2001003295 source ministere des finances Loi modifiant les articles 4, 8, 9, 12 et 13 de la loi du 27 décembre 1994 portant assentiment de l'accord relatif à la perception d'un droit d'usage pour l'utilisation de certaines routes par des véhicules utilitaires lourds, signé à Bruxelles le 9 février 1994, entre les Gouvernements de la République fédérale d'Allemagne, du Royaume de Belgique, du Royaume du Danemark, du Grand Duché de Luxembourg et du Royaume des Pays-Bas et instaurant une eurovignette, conformément à la directive 93/89/CEE du Conseil des Communautés européennes du 25 octobre 1993 fermer qui modifia, notamment, les articles 5 et 6 de la loi du 10 avril 1990Documents pertinents retrouvés type loi prom. 10/04/1990 pub. 08/04/2000 numac 2000000153 source ministere de l'interieur Loi sur les entreprises de gardiennage, sur les entreprises de sécurité et sur les services internes de gardiennage . - Traduction allemande fermer pour étendre la liste des délits qu'ils visent et y inclure ceux conduisant leur auteur à se voir condamnés à un emprisonnement d'au moins trois mois du chef de coups et blessures volontaires, indiquent : « Art. 5. [...] La pratique a démontré qu'il est essentiel de compléter l'énumération contenue à l'article 5, alinéa 1er, 1° de la loi par un certain nombre de délits qui sont considérés comme particulièrement graves dans le chef de personnes qui exercent des activités dans le cadre de la présente loi. L'objectif est d'exclure de ce secteur professionnel les personnes qui ont encouru une quelconque condamnation du chef de recel ou de racisme. Ceci est également valable pour quiconque a subi une condamnation à une peine de prison d'au moins trois mois, du chef de coups et blessures volontaires. [...] [...] Art. 6. [...] Les raisons fondant le changement de ces dispositions sont identiques à celles évoquées pour justifier la modification de l'article 5, alinéa 1er, 1° » (Doc. parl., Chambre, 2000-2001, DOC 50-1142/001, p. 10; dans le même sens, ibid., DOC 50-1142/004, pp. 21 et 22).
B.6.3. La même préoccupation a encore été exprimée lors des travaux préparatoires de la loi du 1er mars 2007Documents pertinents retrouvés type loi prom. 01/03/2007 pub. 14/03/2007 numac 2007200604 source service public federal chancellerie du premier ministre Loi portant des dispositions diverses (1) fermer portant des dispositions diverses, dont est issue la disposition en cause telle qu'elle est reproduite en B.1. « Art. 442.
Cet article vise à modifier l'article 6 de la loi du 10 avril 1990Documents pertinents retrouvés type loi prom. 10/04/1990 pub. 08/04/2000 numac 2000000153 source ministere de l'interieur Loi sur les entreprises de gardiennage, sur les entreprises de sécurité et sur les services internes de gardiennage . - Traduction allemande fermer précitée contenant les conditions auxquelles un membre du personnel d'exécution d'une entreprise, d'un service ou d'un organisme doit satisfaire.
Une première modification vise à supprimer la condition d'absence de condamnation à une peine de prison de trois mois au moins pour des faits de coups et blessures volontaires et à la remplacer par une interdiction de condamnation à quelconque peine, même avec sursis, du chef de coups et blessures volontaires.
On estime essentiel que les membres du personnel d'exécution soient des personnes présentant un profil adapté à l'exercice de leurs activités et n'aient donc pas fait l'objet d'une condamnation, même avec sursis, pour des faits de coups et blessures volontaires. En effet, pareille condamnation démontre le caractère violent de l'intéressé ainsi que son incapacité à faire preuve de réserve et à pouvoir exercer sa fonction sans avoir recours à la violence.
Les personnes ayant été condamnées à une peine de prison moindre ou à une quelconque peine pour des faits de coups et blessures volontaires sont en pratique déjà repoussées, mais sur la base de la non-satisfaction aux conditions de sécurité (article 6, alinéa 1er, 8°, de la loi) » (Doc. parl., Chambre, 2006-2007, DOC 51-2760/001, p. 225; dans le même sens, ibid., DOC 51-2788/010, pp. 3, 4 et 7).
B.7. Le législateur a pu raisonnablement considérer qu'une condamnation à une peine de travail pour coups et blessures volontaires était de nature, davantage qu'une condamnation à une peine d'emprisonnement pour certaines autres infractions, à faire apparaître que les intéressés ne présentent pas les qualités requises pour exercer les fonctions en cause.
B.8. La disposition en cause n'a pas d'effets disproportionnés, compte tenu de ce qu'elle est de nature à protéger une valeur essentielle, à savoir l'intégrité physique des personnes.
B.9. La question préjudicielle appelle une réponse négative.
Par ces motifs, la Cour dit pour droit : L'article 6, alinéa 1er, 1°, de la loi du 10 avril 1990Documents pertinents retrouvés type loi prom. 10/04/1990 pub. 08/04/2000 numac 2000000153 source ministere de l'interieur Loi sur les entreprises de gardiennage, sur les entreprises de sécurité et sur les services internes de gardiennage . - Traduction allemande fermer réglementant la sécurité privée et particulière, tel qu'il a été modifié par la loi du 7 mai 2004Documents pertinents retrouvés type loi prom. 07/05/2004 pub. 03/06/2004 numac 2004000264 source service public federal interieur Loi modifiant la loi du 10 avril 1990 sur les entreprises de gardiennage, les entreprises de sécurité et les services internes de gardiennage, la loi du 29 juillet 1934 interdisant les milices privées et la loi du 19 juillet 1991 organisant la profession de détective privé fermer, ne viole pas les articles 10 et 11 de la Constitution.
Ainsi rendu en langue française et en langue néerlandaise, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, le 29 octobre 2015.
Le greffier, F. Meersschaut Le président, J. Spreutels