publié le 23 décembre 2014
Extrait de l'arrêt n° 149/2014 du 9 octobre 2014 Numéro du rôle : 5769 En cause : la question préjudicielle concernant l'article 23, § 3, du décret de la Région flamande du 28 juin 1985 « relatif à l'autorisation anti-pollution », posée La Cour constitutionnelle, composée des présidents A. Alen et J. Spreutels, et des juges J.-P. S(...)
COUR CONSTITUTIONNELLE
Extrait de l'arrêt n° 149/2014 du 9 octobre 2014 Numéro du rôle : 5769 En cause : la question préjudicielle concernant l'article 23, § 3, du décret de la Région flamande du 28 juin 1985 « relatif à l'autorisation anti-pollution », posée par le Conseil d'Etat.
La Cour constitutionnelle, composée des présidents A. Alen et J. Spreutels, et des juges J.-P. Snappe, T. Merckx-Van Goey, P. Nihoul, T. Giet et R. Leysen, assistée du greffier F. Meersschaut, présidée par le président A. Alen, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet de la question préjudicielle et procédure Par arrêt n° 225.707 du 5 décembre 2013 en cause de Gunther Lambrichts contre la Région flamande, avec comme partie intervenante la SA « JM Recycling », dont l'expédition est parvenue au greffe de la Cour le 12 décembre 2013, le Conseil d'Etat a posé la question préjudicielle suivante : « L'article 23, § 3, du décret [de la Région flamande] du 28 juin 1985 ' relatif à l'autorisation anti-pollution ', tel que remplacé par l'article 17 du décret du 23 décembre 2010 ' portant diverses mesures en matière de l'environnement et de la nature ', viole-t-il les articles 10 et 11 de la Constitution en ce que, sur la base du paragraphe 3, alinéa 1er, de la disposition précitée, les personnes physiques et les personnes morales auxquelles la décision prise en premier ressort doit être notifiée individuellement disposent d'un délai complet de 30 jours pour introduire un recours administratif, alors qu'à l'égard de ceux qui dépendent de la publicité par affichage, le paragraphe 3, alinéa 2, de la même disposition fait courir le délai de recours à compter du jour qui suit celui au cours duquel il a été procédé à l'affichage de la décision? ». (...) III. En droit (...) B.1.1. L'article 23 du décret de la Région flamande du 28 juin 1985 « relatif à l'autorisation anti-pollution » dispose : « § 1er. Un recours auprès de la députation du conseil provincial, qui statuera dans un délai de quatre mois après réception de la réclamation, est ouvert contre toute décision relative aux demandes d'autorisation prise en première instance par le collège des bourgmestre et échevins. § 2. Un recours auprès du Gouvernement flamand qui statuera dans un délai de cinq mois [après] réception de la réclamation, est ouvert contre toute décision relative aux demandes d'autorisation prise en première instance par la députation du conseil provincial. § 3. Le recours doit être introduit par lettre recommandée dans un délai de trente jours après le premier jour de la notification de la décision contestée.
En ce qui concerne ceux qui dépendent d'une notification par affichage, le recours doit être introduit par lettre recommandée dans un délai de trente jours après le premier jour auquel il a été procédé à l'affichage de la décision contestée ».
B.1.2. Avant sa modification par l'article 17 du décret du 23 décembre 2010 « portant diverses mesures en matière de l'environnement et de la nature », l'article 23, § 3, du décret précité du 28 juin 1985 disposait : « Le recours visé aux §§ 1er et 2 doit être introduit par lettre recommandée dans un délai de trente jours après la publication de la décision incriminée ».
B.1.3. Selon l'arrêt n° 197.447 du 29 octobre 2009 du Conseil d'Etat, cette disposition devait être interprétée en ce sens que, pour les tiers intéressés qui dépendent de la publicité par affichage pour être informés d'une décision relative au permis, le délai de trente jours court à compter de l'expiration du délai d'affichage. Selon cette jurisprudence, si la publicité consiste en un affichage d'une durée déterminée, elle n'est en effet pas complète tant que ce délai n'a pas expiré.
B.1.4. A la suite de cet arrêt, le législateur décrétal a décidé de modifier l'article 23, § 3, du décret du 28 juin 1985 dans le sens indiqué en B.1.1. Le législateur décrétal a justifié la nécessité de cette modification comme suit : « Cette position peut poser de graves problèmes quant au respect de tous les délais dans le traitement ultérieur des recours (notification du recours d'un tiers à l'exploitant, procédure de consultation, décision, publicité) : l'affichage de la décision dure 30 jours et est suivi d'un délai de 30 jours pour introduire un recours, lequel délai peut éventuellement être prolongé de 14 jours supplémentaires en application de l'article 19bis du décret (demande incomplète).
Lorsqu'un autre recours recevable est introduit au début de la période d'affichage, deux mois et demi peuvent donc s'être déjà écoulés avant que l'on puisse réellement commencer à examiner le second recours.
Pour continuer à garantir la clarté et l'efficacité de toutes les dispositions procédurales en vigueur, il convient dès lors d'adapter au plus vite le texte des articles 23, § 3, et 26, § 3, du décret relatif à l'autorisation anti-pollution » (Doc. parl., Parlement flamand, 2010-2011, n° 665/1, pp. 6 et 7).
B.2.1. La juridiction a quo demande à la Cour si la disposition en cause viole les articles 10 et 11 de la Constitution en ce que les personnes physiques et les personnes morales auxquelles la décision relative au permis doit être notifiée individuellement disposent d'un délai complet de 30 jours pour introduire un recours administratif, alors qu'à l'égard de ceux qui dépendent de la publicité par affichage, le délai de recours commence à courir après le premier jour auquel il a été procédé à l'affichage. Lorsque, dans ce dernier cas, les tiers intéressés n'ont pas eu connaissance de la décision relative au permis le premier jour suivant l'affichage, le délai de recours dont ils disposent sera par conséquent toujours plus court que le délai de recours dont disposent les personnes qui sont averties individuellement de cette décision.
B.2.2. Il ressort des faits et de la décision de renvoi qu'il s'agit, en l'espèce, d'une autorisation anti-pollution qui devait être octroyée par la députation permanente pour un établissement de première classe, au sens de l'article 9, § 2, du décret du 28 juin 1985.
B.3.1. Comme indiqué en B.1.4, le délai de recours qui commence à courir le jour qui suit la notification individuelle ou l'affichage répond au souci d'accélérer le cours de la procédure et d'offrir une sécurité juridique au demandeur du permis, le plus rapidement possible.
B.3.2. La différence de traitement est raisonnablement justifiée en ce qui concerne la nature de la notification de la décision relative au permis. Le demandeur du permis et les pouvoirs publics concernés peuvent être immédiatement identifiés par l'autorité qui accorde le permis. Tel n'est pas le cas pour les tiers intéressés qui risqueraient de subir directement des nuisances par suite des travaux autorisés. Dans leur cas, le législateur décrétal pouvait raisonnablement estimer que l'affichage constitue une forme de publicité adéquate pour informer les personnes intéressées de l'existence de la décision relative au permis.
B.3.3. Le législateur décrétal a pu tenir compte, d'une part, du fait que lorsqu'il s'agit soit de grands projets, l'on sait suffisamment qu'ils font l'objet d'un permis et que, lorsqu'il s'agit de projets de moindre importance, leurs répercussions sont limitées à l'environnement direct du lieu concerné par la demande de permis. Il a pu, d'autre part, considérer que l'octroi d'un permis d'environnement relatif à un établissement de première classe doit être précédé par une enquête publique, laquelle doit faire l'objet d'une large publicité qui permet que les tiers intéressés soient informés du projet en cause et de la suite qui lui est donnée. On peut ainsi admettre que les tiers intéressés peuvent avoir connaissance de la décision relative au permis dans un très bref délai à compter de l'affichage.
B.3.4. Il ressort de ce qui précède que le législateur décrétal a poursuivi un équilibre entre, d'une part, la nécessité d'une procédure efficace offrant la sécurité juridique au demandeur du permis dans un délai raisonnable et, d'autre part, le souci d'informer rapidement et clairement les tiers intéressés au sujet des projets envisagés. Le délai de recours s'élevant à trente jours, le droit d'accès au juge des tiers intéressés n'est pas limité de manière disproportionnée, puisque ce délai prend cours à compter du premier jour qui suit l'affichage.
B.4. La question préjudicielle appelle une réponse négative.
Par ces motifs, la Cour dit pour droit : L'article 23, § 3, du décret de la Région flamande du 28 juin 1985 « relatif à l'autorisation anti-pollution » ne viole pas les articles 10 et 11 de la Constitution.
Ainsi rendu en langue néerlandaise et en langue française, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, le 9 octobre 2014.
Le greffier, F. Meersschaut Le président A. Alen