publié le 19 juin 2014
Extrait de l'arrêt n° 66/2014 du 24 avril 2014 Numéro du rôle : 5589 En cause : les questions préjudicielles relatives à l'article 41 de la loi-programme du 11 juillet 2005 La Cour constitutionnelle, composée des présidents J. Spreutels et A. Alen, et des juges E. De G(...)
COUR CONSTITUTIONNELLE
Extrait de l'arrêt n° 66/2014 du 24 avril 2014 Numéro du rôle : 5589 En cause : les questions préjudicielles relatives à l'article 41 de la
loi-programme du 11 juillet 2005Documents pertinents retrouvés
type
loi-programme
prom.
11/07/2005
pub.
12/07/2005
numac
2005021090
source
service public federal chancellerie du premier ministre
Loi-programme
fermer (modification de l'article 342 du Code des impôts sur les revenus 1992), posées par le Tribunal de première instance de Namur.
La Cour constitutionnelle, composée des présidents J. Spreutels et A. Alen, et des juges E. De Groot, L. Lavrysen, J.-P. Snappe, J.-P. Moerman, E. Derycke, T. Merckx-Van Goey, P. Nihoul, F. Daoût, T. Giet et R. Leysen, assistée du greffier F. Meersschaut, présidée par le président J. Spreutels, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet des questions préjudicielles et procédure Par jugement du 19 avril 2012 en cause de Jean-Luc Bulteau contre l'Etat belge, dont l'expédition est parvenue au greffe de la Cour le 22 février 2013, le Tribunal de première instance de Namur a posé les questions préjudicielles suivantes : « - L'article 41 de la loi-programme du 11 juillet 2005Documents pertinents retrouvés type loi-programme prom. 11/07/2005 pub. 12/07/2005 numac 2005021090 source service public federal chancellerie du premier ministre Loi-programme fermer, en tant qu'il ajoute un § 3 à l'article 342 du CIR/92 ayant pour objet d'étendre les minima imposables visés au § 2 du même article aux entreprises et titulaires de professions libérales, en cas d'absence de déclaration fiscale, et non aux autres contribuables viole-t-il les articles 10 et 11 de la Constitution ? - L'article 41 de la loi-programme du 11 juillet 2005Documents pertinents retrouvés type loi-programme prom. 11/07/2005 pub. 12/07/2005 numac 2005021090 source service public federal chancellerie du premier ministre Loi-programme fermer, en tant qu'il ajoute un § 3 à l'article 342 du CIR/92 ayant pour objet d'étendre les minima imposables visés au § 2 du même article aux entreprises et titulaires de professions libérales, en cas d'absence de déclaration fiscale, sans différencier, parmi ces derniers, les activités exercées à titre principal de celles exercées à titre accessoire et, dès lors, en appliquant une règle identique à des catégories de contribuables différentes, viole-t-il les articles 10 et 11 de la Constitution ? - L'article 41 de la loi-programme du 11 juillet 2005Documents pertinents retrouvés type loi-programme prom. 11/07/2005 pub. 12/07/2005 numac 2005021090 source service public federal chancellerie du premier ministre Loi-programme fermer, en tant qu'il ajoute un § 3 à l'article 342 du CIR/92 ayant pour objet d'étendre aux entreprises et titulaires de professions libérales, en cas d'absence de déclaration fiscale, les minima imposables fixés au § 2 lesquels ont été initialement conçus pour les seules entreprises étrangères n'ayant pas déposé de déclaration dans les délais impartis, dès lors que, ce faisant, une même règle est appliquée à des catégories différentes de contribuables, viole-t-il les articles 10 et 11 de la Constitution ? ». (...) III. En droit (...) B.1. La Cour est saisie de trois questions préjudicielles relatives à l'article 342, § 3, du Code des impôts sur les revenus 1992 (ci-après : CIR 1992), inséré par l'article 41 de la loi-programme du 11 juillet 2005Documents pertinents retrouvés type loi-programme prom. 11/07/2005 pub. 12/07/2005 numac 2005021090 source service public federal chancellerie du premier ministre Loi-programme fermer (Moniteur belge, 12 juillet 2005).
B.2.1. L'article 342 du CIR 1992 dispose : « § 1er. A défaut d'éléments probants fournis soit par les intéressés, soit par l'administration, les bénéfices ou profits visés à l'article 23, § 1er, 1° et 2,° sont déterminés, pour chaque contribuable, eu égard aux bénéfices ou profits normaux d'au moins trois contribuables similaires et en tenant compte, suivant le cas, du capital investi, du chiffre d'affaires, du nombre d'ouvriers, de la force motrice utilisée, de la valeur locative des terres exploitées, ainsi que de tous autres renseignements utiles.
L'administration peut, à cet effet, arrêter, d'accord avec les groupements professionnels intéressés, des bases forfaitaires de taxation.
Les bases forfaitaires de taxation visées à l'alinéa qui précède peuvent être arrêtées pour trois exercices d'imposition successifs.
L'administration peut également arrêter, d'accord avec les groupements professionnels intéressés, des forfaits pour l'évaluation des dépenses ou charges professionnelles qu'il n'est généralement pas possibles de justifier au moyen de documents probants. § 2. Le Roi détermine, eu égard aux éléments indiqués au § 1er, alinéa 1er, le minimum des bénéfices imposables dans le chef des firmes étrangères opérant en Belgique. § 3. En cas d'absence de déclaration ou de remise tardive de celle-ci, les minima imposables établis par le Roi en exécution du § 2 sont également applicables à toute entreprise et titulaire de profession libérale ».
B.2.2. L'article 182 de l'arrêté royal du 27 août 1993 d'exécution du CIR 1992, pris en application de la délégation inscrite au paragraphe 2 de l'article précité, dispose : « § 1er. Le minimum des bénéfices imposables dans le chef des firmes étrangères opérant en Belgique qui sont taxables selon la procédure de comparaison prévue à l'article 342, § 1er, alinéa 1er, du Code des impôts sur les revenus 1992, ainsi que, en cas d'absence de déclaration ou de remise tardive de celle-ci, le minimum des bénéfices imposables dans le chef des entreprises belges, sont fixés comme suit : 1° exploitations agricoles, exploitations horticoles ou pépinières : barème forfaitaire établi pour les contribuables belges exerçant une profession similaire dans la même région agricole;2° entreprises appartenant à : a) l'industrie chimique : 22 000 EUR par membre du personnel (nombre moyen pour l'année envisagée);b) l'industrie alimentaire: 12 000 EUR par membre du personnel (nombre moyen pour l'année envisagée);c) l'industrie métallurgique, l'industrie de la mécanique de précision, les exploitations et les entreprises d'extraction et de transformation de minéraux non énergétiques, l'industrie de la construction et toutes autres industries, exploitations et entreprises, non visées sub a et b ci-avant : 7 000 EUR par membre du personnel (nombre moyen pour l'année envisagée); 3° entreprises des secteurs du commerce et de la fourniture de services : a) commerce en gros, commerce de détail, transports, horeca, bureaux d'ingénieurs et d'études, informatique et électronique et autres services aux entreprises : 2,50 EUR par 25 EUR de chiffre d'affaires avec un minimum de 7.000 EUR par membre du personnel (nombre moyen pour l'année envisagée); b) intermédiaires du commerce et des transports : 2,50 EUR par 25 EUR de chiffre d'affaires, avec un minimum de 14.500 EUR par membre du personnel (nombre moyen pour l'année envisagée); c) banques, établissements de crédit et de change : 24.000 EUR par membre du personnel (nombre moyen pour l'année envisagée); d) assurances : 2,50 EUR par 25 EUR de primes encaissées; e) toutes autres exploitations et entreprises de commerce et de fourniture de services: 2,50 EUR par 25 EUR de chiffre d'affaires, avec un minimum de 7.000 EUR par membre du personnel (nombre moyen pour l'année envisagée). § 2. En aucun cas, le montant des bénéfices imposables déterminé conformément au § 1er ne peut être inférieur à 19.000 EUR. En cas d'absence de déclaration ou de remise tardive de celle-ci, le montant minimum prévu à l'alinéa 1er est également applicable aux profits imposables des titulaires de profession libérale. § 3. Les revenus imposables fixés conformément au § 1er ne comprennent pas les plus-values visées à l'article 228, § 2, 9°, g et i, du même Code ».
B.3. Contrairement à ce que soutient le Conseil des ministres, les trois questions préjudicielles dont la Cour est saisie permettent à suffisance de déterminer les catégories de personnes qu'elle est invitée à comparer.
B.4.1. La première question invite la Cour à examiner la compatibilité de l'article 342, § 3, du CIR 1992 avec les articles 10 et 11 de la Constitution, en ce qu'il s'applique aux entreprises et titulaires de professions libérales et non aux autres contribuables, en l'occurrence les travailleurs salariés.
B.4.2. La deuxième question préjudicielle invite la Cour à se prononcer sur l'identité de traitement qui résulte de la disposition en cause entre les contribuables qui exercent une activité indépendante à titre principal et ceux qui exercent une activité indépendante à titre accessoire.
B.4.3. Enfin, par une troisième question préjudicielle, la Cour est interrogée sur le fait qu'en cas d'absence de déclaration fiscale, la disposition en cause traite les entreprises et titulaires de professions libérales de la même manière que les entreprises étrangères visées à l'article 342, § 2, du CIR 1992.
B.4.4. L'article 342, § 3, du CIR 1992 en cause permet à l'administration fiscale d'avoir recours au système du minimum forfaitaire des bénéfices lorsque les contribuables concernés n'ont pas rempli ou n'ont pas rempli à temps leur déclaration de revenus.
La troisième question préjudicielle concerne l'application du système du minimum forfaitaire des bénéfices à la catégorie concernée d'entreprises ou de personnes en tant que telles, tandis que les première et deuxième questions portent sur l'ampleur du champ d'application de la disposition en cause. Pour cette raison, il y a lieu de répondre d'abord à la troisième question préjudicielle.
Quant à la troisième question préjudicielle B.5. La Cour est interrogée sur la compatibilité, avec les articles 10 et 11 de la Constitution, de l'identité de traitement qui découle du fait que le système du minimum forfaitaire des bénéfices imposables, institué par l'article 342, § 2, pour les entreprises étrangères qui ne peuvent produire d'éléments probants, a été étendu, par la disposition en cause, aux entreprises ou aux titulaires de professions libérales qui ne remplissent pas de déclaration fiscale ou ne la remettent pas dans les délais.
B.6.1. L'article 342 du CIR 1992 constitue un moyen de preuve par présomptions légales dont dispose l'administration pour établir l'existence et le montant de la dette d'impôt lorsque le contribuable néglige pour l'une ou l'autre raison de mettre ces informations à disposition de l'administration. Son champ d'application est limité aux revenus professionnels constitués par les bénéfices ou profits visés à l'article 23, § 1er, 1° et 2°, du CIR 1992. Le législateur prévoit différents modes de preuve pour établir le revenu imposable, notamment une comparaison avec au moins trois contribuables similaires, les bases forfaitaires de taxation et le minimum des bénéfices imposables.
B.6.2. En ce qui concerne les entreprises étrangères opérant en Belgique, l'article 342, § 2, dispose que le Roi peut déterminer le minimum des bénéfices imposables lorsqu'elles ne produisent pas d'éléments probants à l'administration fiscale. La disposition précitée a été exécutée par l'article 182 de l'arrêté royal du 27 août 1993 mentionné en B.2.2.
B.6.3. En adoptant l'article 41 de la loi-programme du 11 juillet 2005Documents pertinents retrouvés type loi-programme prom. 11/07/2005 pub. 12/07/2005 numac 2005021090 source service public federal chancellerie du premier ministre Loi-programme fermer, le législateur a étendu le système existant du minimum forfaitaire des bénéfices prévu à l'article 342, § 2, du CIR 1992, jusqu'alors applicable uniquement aux entreprises étrangères opérant en Belgique, à toute entreprise (personne physique et personne morale) et à tout titulaire de profession libérale qui ne remplissent pas de déclaration fiscale à l'impôt sur les revenus ou qui remettent celle-ci en dehors des délais prévus aux articles 308 à 311 du CIR 1992.
B.7.1. L'exposé des motifs du projet devenu la loi-programme précise : « La présente disposition vise à étendre le système existant du minimum forfaitaire des bénéfices prévu à l'article 342, § 2, du Code des impôts sur les revenus 1992 (CIR 92), à toute entreprise (personne physique et personne morale) et titulaire de profession libérale qui ne remplissent pas de déclaration fiscale à l'impôt sur les revenus ou qui remettent celle-ci en dehors des délais prévus aux articles 308 à 311, CIR 92.
Ce système de minima qui s'inscrit dans le cadre de la taxation par présomption légale, et notamment de la taxation par comparaison avec au moins trois contribuables similaires prévue au § 1er de l'article 342 CIR 92, est en effet actuellement applicable uniquement aux entreprises étrangères opérant en Belgique. Pour ces entreprises, l'article 182, AR/CIR 92 fixe forfaitairement et par secteur des minima de bénéfices imposables.
L'extension de ces minima à toute entreprise ou tout titulaire de profession libérale permettrait dès lors d'éviter l'écueil que représente trop souvent pour le fisc l'obligation d'établir une taxation d'office suffisamment motivée en l'absence de déclaration fiscale.
La mesure vise donc à inciter toutes les entreprises et les titulaires de profession libérale à respecter leurs obligations fiscales en matière de dépôt de déclaration.
Cette disposition concrétise ainsi dans son principe la proposition de loi déposée le 22 juillet 2004 par [...] (DOC 51-1300/01) dont elle partage les objectifs, à savoir notamment doter le fisc d'un moyen de défense plus efficace lorsque les entreprises ou les titulaires de profession libérale ne remettent pas de déclaration fiscale ou la remettent tardivement » (Doc. parl., Chambre, 2004-2005, DOC 51-1820/001, p. 30).
B.7.2. Comme cela ressort du texte de l'article 342, § 3, en cause du CIR 1992 et de ses travaux préparatoires, lorsqu'une entreprise ou le titulaire d'une profession libérale établi en Belgique est en défaut de remettre sa déclaration fiscale ou de la remettre dans les délais prescrits, l'absence de déclaration qui en découle a pour effet de permettre à l'administration d'imposer cette catégorie de contribuables en tenant compte de la base forfaitaire minimale fixée par le Roi. Les minimas fixés constituent une présomption légale par comparaison non seulement avec trois contribuables similaires, mais aussi avec tout un secteur ou un groupe de contribuables.
B.8.1. Tant à l'égard des entreprises étrangères visées à l'article 342, § 2, du CIR 1992 qu'à l'égard des entreprises ou des titulaires de professions libérales visés à l'article 342, § 3, le législateur poursuit un même but. Dans les deux cas, il s'agit en effet d'inciter ces catégories de contribuables à respecter leurs obligations fiscales en dotant le fisc d'un moyen de défense plus efficace lorsqu'ils restent en défaut de le faire (Doc. parl., Chambre, 2004-2005, DOC 51-1820/001, p. 30).Dans les deux cas, le législateur recourt à une présomption légale afin de permettre à l'administration fiscale d'établir la base imposable lorsque le contribuable ne fournit pas les informations nécessaires à cet effet, soit à défaut d'éléments probants (article 342, § 2), soit parce qu'il ne remet pas ou remet tardivement sa déclaration (article 342, § 3). L'efficacité des contrôles fiscaux constitue un motif d'intérêt général et la poursuite de celle-ci est un objectif légitime.
B.8.2. La Cour doit toutefois examiner si le législateur n'a pas porté une atteinte disproportionnée aux droits des contribuables visés à l'article 342, § 3, du CIR 1992 en permettant à l'administration de leur appliquer des minimas imposables fixés par l'article 182 de l'arrêté d'exécution du CIR 1992, lorsque ces contribuables sont restés en défaut de rentrer une déclaration d'impôt ou de la remettre dans les délais.
B.9. Concernant la mesure en cause, il a été mentionné dans les travaux préparatoires : « Le Gouvernement tient à préciser à ce sujet que la mesure proposée s'inscrit dans le cadre de la procédure de taxation d'office prévue aux articles 351 à 352bis, CIR 92 dont elle tend uniquement à accélérer la mise en oeuvre par une estimation forfaitaire de la base imposable. De la sorte, le contribuable taxé par application des minima de bénéfices ou de profits imposables du fait du non-respect de ses obligations fiscales en matière de déclaration, conserve l'ensemble des droits prévus par cette procédure, notamment le droit d'apporter la preuve du chiffre exact de ses revenus imposables, conformément à l'article 352, alinéa 1er, CIR 92.
De plus, la nouvelle mesure se rattache à la présomption légale de l'article 342, CIR 92, mais uniquement pour les contribuables qui n'ont pas introduit leur déclaration ou qui l'ont fait tardivement. Il convient à ce sujet d'attirer l'attention sur le fait que les minima fixés consistent en soi également en une présomption légale par comparaison non seulement avec trois contribuables similaires, mais avec tout un secteur ou un groupe de contribuables » (ibid., p. 31).
B.10.1. L'article 342, § 3, du CIR 1992 est par conséquent lié à la procédure de taxation d'office visée aux articles 351 à 352bis du même Code et elle a pour but d'en accélérer l'application en prévoyant une estimation forfaitaire de la base imposable. La procédure de taxation d'office a pour effet de renverser la charge de la preuve en ce qui concerne la détermination du montant imposable.
B.10.2. Avant d'établir l'imposition d'office, l'administration notifie, par lettre recommandée à la poste, au contribuable n'ayant pas remis ou ayant remis tardivement sa déclaration les motifs du recours à cette procédure, le montant des revenus et autres éléments sur lesquels la taxation sera basée, ainsi que le mode de détermination de ces revenus et éléments (article 351, alinéa 2). En principe, le contribuable dispose d'un délai d'un mois pour faire valoir ses observations et la cotisation ne peut être établie avant l'expiration de ce délai (article 351, alinéa 3).
B.10.3. Conformément à l'article 352 du CIR 1992, le contribuable a, en outre, toujours le droit de contester la cotisation forfaitaire en apportant la preuve contraire, c'est-à -dire le chiffre exact de ses revenus.
B.10.4. Il ressort de ce qui précède que la disposition en cause est un moyen pertinent pour atteindre l'objectif rappelé en B.8.1 qui consiste à fournir à l'administration les éléments nécessaires pour pouvoir établir la cotisation fiscale. Elle n'a pas non plus d'effets disproportionnés dès lors que la présomption légale qui en résulte peut être renversée par le contribuable défaillant en apportant la preuve du montant exact des revenus générés par l'exercice de sa profession. Par ailleurs, en cas de déclaration tardive, le contribuable peut invoquer la force majeure si les conditions sont remplies.
B.11. La troisième question préjudicielle appelle une réponse négative.
Quant à la première question préjudicielle B.12. La première question invite la Cour à examiner la compatibilité de l'article 342, § 3, du CIR 1992 avec les articles 10 et 11 de la Constitution, en ce qu'il s'applique aux entreprises et titulaires de professions libérales et non aux autres contribuables, en l'occurrence les travailleurs salariés.
B.13.1. Il existe des différences fondamentales entre les travailleurs indépendants et les travailleurs salariés, en ce qui concerne les régimes fiscaux qui leur sont applicables. Ces différences ne permettent pas de comparer à tous égards ces catégories de personnes.
B.13.2. L'établissement de modes de preuve particuliers pour déterminer la base d'imposition applicable aux revenus des entreprises ou titulaires de professions libérales peut se justifier par une plus grande difficulté, pour l'administration fiscale, d'établir le montant des revenus que les titulaires de professions libérales perçoivent, ces revenus provenant de sources diverses et étant susceptibles de varier fortement d'une année à l'autre, alors que les rémunérations des travailleurs salariés sont en principe déterminées à l'avance et ne sont pas soumises à des variations aléatoires.
B.13.3. La disposition en cause est un moyen pertinent pour atteindre l'objectif rappelé en B.8.1, qui consiste à inciter les contribuables à respecter leurs obligations dans les délais impartis.
Elle n'a pas d'effets disproportionnés dès lors que, comme il est exposé en B.10, la présomption légale qui en résulte au profit de l'administration fiscale peut être renversée par le contribuable défaillant en apportant la preuve du montant exact des revenus générés par l'exercice de sa profession.
B.14. La première question préjudicielle appelle une réponse négative.
Quant à la deuxième question préjudicielle B.15. La deuxième question préjudicielle interroge la Cour sur la compatibilité, avec les articles 10 et 11 de la Constitution, de l'article 342, § 3, du CIR 1992 dans la mesure où ce dernier traite de manière identique, en cas d'absence de déclaration ou de déclaration tardive, les contribuables qui exercent une activité indépendante à titre principal et ceux qui exercent une activité indépendante à titre accessoire.
B.16. A la différence des salariés qui sont le plus souvent rémunérés à l'heure, les revenus générés par les professions telles que celles visées en l'espèce ne se mesurent pas tant à l'heure d'activité prestée qu'au regard de la prestation ou de la réalisation d'un contrat faisant appel à une qualité de services reposant sur un savoir dont le facteur temps n'est qu'un des paramètres pour définir le revenu. La diversité des activités considérées dans le chef d'entrepreneurs et de titulaires de professions libérales est telle qu'introduire un forfait tenant compte de la durée effective d'activité aurait pu être de nature à causer plus d'inégalités encore.
Ainsi, un même revenu imposable pourra être produit en un nombre différent d'heures selon la qualité du professionnel, les moyens investis, l'environnement de sa profession libérale et les modalités du contrat qui le lie au bénéficiaire de ses services.
B.17. La deuxième question préjudicielle appelle une réponse négative.
Par ces motifs, la Cour dit pour droit : L'article 342, § 3, du Code des impôts sur les revenus 1992 ne viole pas les articles 10 et 11 de la Constitution.
Ainsi prononcé en langue française et en langue néerlandaise, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, à l'audience publique du 24 avril 2014.
Le greffier, F. Meersschaut Le président, J. Spreutels