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Arrêt
publié le 17 août 2012

Extrait de l'arrêt n° 73/2012 du 12 juin 2012 Numéros du rôle : 5193 et 5194 En cause : les recours en annulation des articles 17 à 21 du décret-programme de la Communauté française du 15 décembre 2010 « portant diverses mesures relatives au La Cour constitutionnelle, composée des présidents R. Henneuse et M. Bossuyt, et des juges E. De(...)

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COUR CONSTITUTIONNELLE


Extrait de l'arrêt n° 73/2012 du 12 juin 2012 Numéros du rôle : 5193 et 5194 En cause : les recours en annulation des articles 17 à 21 du décret-programme de la Communauté française du 15 décembre 2010 « portant diverses mesures relatives au sport en Communauté française, aux Fonds budgétaires figurant au Budget général des dépenses de la Communauté française, au Conseil de la transmission de la mémoire, à l'enseignement obligatoire et à l'enseignement de promotion sociale, aux Bâtiments scolaires, au financement des Institutions universitaires et des Hautes Ecoles, à la politique scientifique et universitaire, au transfert de l'enseignement supérieur de l'Architecture à l'Université et aux aides aux Institutions universitaires et à la négociation en Communauté française », introduits par la commune de Waterloo et par l'ASBL « Collège Notre Dame » et autres.

La Cour constitutionnelle, composée des présidents R. Henneuse et M. Bossuyt, et des juges E. De Groot, L. Lavrysen, A. Alen, J.-P. Snappe, J.-P. Moerman, J. Spreutels, T. Merckx-Van Goey et F. Daoût, assistée du greffier F. Meersschaut, présidée par le président R. Henneuse, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet des recours et procédure Par requêtes adressées à la Cour par lettres recommandées à la poste le 28 juillet 2011 et parvenues au greffe le 29 juillet 2011, deux recours en annulation des articles 17 à 21 du décret-programme de la Communauté française du 15 décembre 2010 « portant diverses mesures relatives au sport en Communauté française, aux Fonds budgétaires figurant au Budget général des dépenses de la Communauté française, au Conseil de la transmission de la mémoire, à l'enseignement obligatoire et à l'enseignement de promotion sociale, aux Bâtiments scolaires, au financement des Institutions universitaires et des Hautes Ecoles, à la politique scientifique et universitaire, au transfert de l'enseignement supérieur de l'Architecture à l'Université et aux aides aux Institutions universitaires et à la négociation en Communauté française » (publié au Moniteur belge du 1er février 2011, deuxième édition) ont été introduits respectivement par la commune de Waterloo et par : l'ASBL « Collège Notre Dame », dont le siège est établi à 1300 Wavre, rue du Calvaire 4, l'ASBL « Enseignement secondaire catholique de la Vallée Bailly », dont le siège est établi à 1420 Braine-l'Alleud, rue Vallée Bailly 102, l'ASBL « Ecoles Fondamentales et Lycée de l'Institut de l'Enfant Jésus », dont le siège est établi à 1400 Nivelles, rue de Sotriamont 1, l'ASBL « Centre Scolaire du Sacré-Coeur de Lindthout », dont le siège est établi à 1200 Bruxelles, avenue des deux Tilleuls 2, l'ASBL « Institut du Sacré-Coeur », dont le siège est établi à 1400 Nivelles, rue Saint-Jean 2, l'ASBL « Collège du Christ-Roi », dont le siège est établi à 1340 Ottignies-Louvain-la-Neuve, rue de Renivaux 25, l'ASBL « Collège Sainte-Gertrude », dont le siège est établi à 1400 Nivelles, Faubourg de Mons 1, l'ASBL « Institut Saint-André d'Ixelles », dont le siège est établi à 1050 Bruxelles, avenue de l'Hippodrome 180, l'ASBL « Institut des Sacrés-Coeurs », dont le siège est établi à 1410 Waterloo, Place Albert 1er, l'ASBL « Centre scolaire de Berlaymont », dont le siège est établi à 1410 Waterloo, Drève d'Argenteuil 10a, l'ASBL « Comité d'Enseignement Annonciades d'Heverlee », dont le siège est établi à 1150 Bruxelles, avenue de l'Aviation 72, l'ASBL « Ecole Sainte-Anne », dont le siège est établi à 1410 Waterloo, rue Sainte-Anne 41-43, l'ASBL« Comité Organisateur de l'Institut Saint Jean-Baptiste des Frères des Ecoles Chrétiennes, section primaire et humanités », dont le siège est établi à 1300 Wavre, rue de Bruxelles 45, l'ASBL « Centre Scolaire Maria Assumpta », dont le siège est établi à 1020 Bruxelles, avenue Wannecouter 76, l'ASBL « Comité Scolaire Providence », dont le siège est établi à 1200 Bruxelles, rue des Déportés 38-40, l'ASBL « Collège Cardinal Mercier », dont le siège est établi à 1420 Braine-l'Alleud, chaussée de Mont-Saint-Jean 83, l'ASBL « Centre d'établissement secondaire libre Notre-Dame des Champs », dont le siège est établi à 1180 Bruxelles, rue Edith Cavell 143, l'Université Catholique de Louvain, dont le siège est établi à 1348 Louvain-la-Neuve, place de l'Université 1, l'ASBL « Centre Scolaire Notre-Dame de la Sagesse », dont le siège est établi à 1083 Bruxelles, avenue Van Overbeke 10, l'ASBL « Institut Saint-Dominique », dont le siège est établi à 1030 Bruxelles, rue Caporal Claes 38, l'ASBL « Institut Saint-Boniface-Parnasse », dont le siège est établi à 1050 Bruxelles, rue du Viaduc 82, l'ASBL « Centre Scolaire de Ma Campagne », dont le siège est établi à 1050 Bruxelles, rue Africaine 3, l'ASBL « Centre Scolaire Maris Stella et Notre-Dame de Lourdes », dont le siège est établi à 1020 Bruxelles, rue Félix Sterckx 44, l'ASBL « Centre d'Education et de Culture Instituts de l'Enfant Jésus et de Sainte Agnès », dont le siège est établi à 1040 Bruxelles, rue Général Leman 74, l'ASBL « Association des Parents du Collège Cardinal Mercier », dont le siège est établi à 1420 Braine-l'Alleud, chaussée de Mont Saint-Jean 83, Priscilla Leman, demeurant à 1150 Bruxelles, avenue Mostinck 80, Nathalie van den Eynde de Rivieren, demeurant à 1000 Bruxelles, rue du Magistrat 10, Pascale Pilawski, demeurant à 1180 Bruxelles, rue Paul Hankar 24, Régine Vanderhaeghen, demeurant à 1410 Waterloo, avenue des Sansonnets 28, Franck Atienzar et Sandrine Ghisgant, demeurant à 1420 Braine-l'Alleud, rue Corniche 18, Graig Cerasi et Anne Bonnaud, demeurant à 1410 Waterloo, rue de la Station 61, Iris Leenknegt, demeurant à 1410 Waterloo, rue de Mereault 8, Véronique Delmez, demeurant à 1410 Waterloo, Drève des Chasseurs 17, Nathalie Humblet, demeurant à 1410 Waterloo, avenue des Croix du Feu 46, Jacopo Giola et Isabelle Leloup, demeurant à 1410 Waterloo, avenue des Constellations 18, Jean-Claude Lovenweent, demeurant à 1495 Sart-Dame-Avelines, rue de la Houlette 43A, Sybille Vercoutere, demeurant à 1410 Waterloo, avenue du Corps de Chasse 8, Maria-Teresa Morcillo Sneiders, demeurant à 1410 Waterloo, rue Obecq 18, Valérie Sanguinetti, demeurant à 1410 Waterloo, avenue des Sansonnets 37, Vanessa Issi, demeurant à 1000 Bruxelles, chaussée de Vleurgat 184, et Jean-Guy Defraigne, demeurant à 1150 Bruxelles, avenue du Monoplan 1.

Ces affaires, inscrites sous les numéros 5193 et 5194 du rôle de la Cour, ont été jointes. (...) II. En droit (...) Quant aux dispositions attaquées B.1. Les parties requérantes poursuivent l'annulation des articles 17 à 21 du décret-programme de la Communauté française du 15 décembre 2010 « portant diverses mesures relatives au sport en Communauté française, aux Fonds budgétaires figurant au Budget général des dépenses de la Communauté française, au Conseil de la transmission de la mémoire, à l'enseignement obligatoire et à l'enseignement de promotion sociale, aux Bâtiments scolaires, au financement des Institutions universitaires et des Hautes Ecoles, à la politique scientifique et universitaire, au transfert de l'enseignement supérieur de l'Architecture à l'Université et aux aides aux Institutions universitaires et à la négociation en Communauté française ».

Ces articles font partie du titre IV du décret-programme et en constituent le chapitre V, intitulé « Dispositions relatives à l'encadrement différencié ».

Quant à la recevabilité B.2.1. La Constitution et la loi spéciale du 6 janvier 1989 imposent à toute personne physique ou morale qui introduit un recours en annulation de justifier d'un intérêt. Ne justifient de l'intérêt requis que les personnes dont la situation pourrait être affectée directement et défavorablement par les dispositions attaquées. Il s'ensuit que l'action populaire n'est pas admissible.

Les parties requérantes sont des pouvoirs organisateurs d'établissements d'enseignement catalogués dans des classes allant de 2 à 20, au sens de l'article 4 du décret du 30 avril 2009 précité, des parents d'élèves scolarisés dans des établissements de classes 13 à 20, et une association de parents d'élèves inscrits dans un établissement de classe 20.

B.2.2. Par lettre recommandée à la poste du 19 décembre 2011, parvenue au greffe de la Cour le 20 décembre 2011, l'Université catholique de Louvain, dix-huitième partie requérante dans l'affaire n° 5194, a fait savoir à la Cour qu'elle se désistait de son recours.

Rien ne s'oppose, en l'espèce, à ce que la Cour décrète le désistement.

B.2.3. Selon le Gouvernement de la Communauté française, les parties requérantes ne justifient d'aucun intérêt à poursuivre l'annulation des articles 18 et 19 du décret attaqué.

Ces dispositions, qui affectent d'un coefficient réducteur le « capital périodes du fondamental » et « le nombre total de périodes professeurs du secondaire » reconnus aux établissements d'enseignement des classes 13 à 20 et diminuent partant les moyens humains mis à disposition de ces établissements, ne porteraient pas grief aux parties requérantes. En effet, selon le Gouvernement de la Communauté française, le décret du 19 juillet 2011 « contenant l'ajustement du budget général des dépenses de la Communauté française pour l'année budgétaire 2011 », tout comme le décret du 22 décembre 2011 « contenant le budget initial de l'année budgétaire 2012 », suspendent ce prélèvement. Le Gouvernement de la Communauté française fait en outre part de l'existence d'un avant-projet de décret qui a pour objet d'abroger purement et simplement ledit prélèvement.

La circonstance que la mesure critiquée par les parties requérantes n'est pas d'application immédiate ne saurait leur faire perdre leur intérêt à en poursuivre l'annulation. Il en va de même de la simple possibilité que cette mesure soit abrogée par le législateur décrétal.

L'exception est rejetée.

B.2.4. Le Gouvernement de la Communauté française estime encore que les parties requérantes n'ont pas d'intérêt à l'annulation des corrections aux pourcentages de revalorisation fixés pour les établissements des classes 1 à 3a, apportées par l'article 17 du décret attaqué, ni à l'annulation de la suppression, par cet article, de la dénomination d'« implantations en discriminations positives ».

Les parties requérantes seraient tout autant privées d'un intérêt à obtenir l'annulation de la disposition attaquée reconduisant le principe de l'absence de toute revalorisation des dotations et subventions pour l'année 2011, cette mesure s'appliquant à tous les établissements d'enseignement. Enfin, le recours en annulation ne serait pas recevable en ce qu'il viserait les dispositions qui ont pour objet d'adapter les moyens humains disponibles au profit des établissements bénéficiaires du système de l'encadrement différencié et qui ne sauraient donc être préjudiciables aux parties requérantes.

B.2.5. Ces trois exceptions d'irrecevabilité dépendent de la portée des dispositions attaquées.

Or, lorsqu'une exception de non-recevabilité prise de l'absence d'intérêt concerne la portée à donner à la disposition attaquée, l'examen de la recevabilité se confond avec l'examen du fond de l'affaire.

Quant au fond B.3. Un premier moyen est pris de la violation, par les dispositions attaquées, des articles 10, 11 et 24 de la Constitution, en ce que le législateur décrétal traiterait différemment, sans justification raisonnable, les établissements d'enseignement des classes 13 à 20, d'une part, et les autres établissements d'enseignement, et spécialement ceux des classes 6 à 12, d'autre part, seuls les premiers devant assumer partiellement la charge financière de la mise en place de la troisième phase de la politique d'encadrement différencié, visée par le décret du 30 avril 2009 précité.

B.4.1. Les dispositions attaquées sont justifiées dans les travaux préparatoires de la manière suivante : « Le décret du 30 avril 2009 organisant un encadrement différencié au sein des établissements scolaires de la Communauté française afin d'assurer à chaque élève des chances égales d'émancipation sociale dans un environnement pédagogique de qualité prévoit à la fois une majoration de 40 millions € des moyens consacrés aux politiques de différenciation qui passeront de 22.616 m€ à 62.616 m€ et un doublement du nombre d'élèves concernés en passant de 12,5 % dans le fondamental et 13,5 % dans le secondaire à 25 %.

Ces 40 millions € supplémentaires se répartissent de manière égale entre l'enseignement fondamental ordinaire et l'enseignement secondaire ordinaire, dont 20 % sont consacrés aux moyens de fonctionnement et 80 % sont transformés en capital-périodes ou en NTPP supplémentaire.

Cet accroissement de 40 millions € aura finalement été attribué en 3 phases : + 15 millions € pour l'année scolaire 2009-2010; + 10 (25 au total) millions € supplémentaires à partir de l'année scolaire 2010-2011; + 15 (40 au total) millions € supplémentaires à partir de l'année scolaire 2011-2012;

Une 1ère tranche de 15 millions € a été mise en oeuvre dès la rentrée de septembre 2009 par l'apport de moyens nouveaux. Cette 1ère tranche respectait la clé 50-50 entre le fondamental et le secondaire et la clé 80-20 entre moyens humains (+ 4.293 périodes pour le fondamental et + 3.668 périodes pour le secondaire) et de fonctionnement (+ 1,5 million € par niveau).

Une 2e tranche a été mise en oeuvre à la rentrée 2010 par l'apport de moyens nouveaux. Cette tranche a été intégralement convertie en moyens humains sous forme de NTPP (+ 2.869 périodes) et de capital périodes (+ 3.358) supplémentaires selon la clé 50-50.

Le solde de 15 millions € sera déployé dès la rentrée 2011 dans le respect de la clé 50-50 entre niveaux et selon la clé 2/3-1/3 pour la répartition entre moyens humains (+ 3.358 périodes pour le fondamental et + 2.869 pour le secondaire et moyens complémentaires (+ 2,5 millions € par niveau), ceci afin de respecter les clés initialement prévues pour l'affectation des 40 millions € .

Les 15 derniers millions € seront financés par l'apport de 7 millions € à charge du budget et par 8 millions € de prélèvement sur les écoles que leur indice socio-économique situe dans les classes 13 à 20.

Tant en ce qui concerne l'apport nouveau que le prélèvement, on considère que 1/3 concerne les moyens de fonctionnement et que 2/3 concerne l'encadrement.

Les 8 millions € seront donc prélevés à raison de : - 2,67 millions € sur les dotations et subventions des établissements d'enseignement ordinaire ayant un indice plus favorable et scolarisant ensemble 40 % des élèves (8 dernières tranches de 5 %). Le prélèvement sera progressif et passera de 0,512 % pour la 13e tranche à 2,048 % pour la 20ème tranche par pas successifs de 0,21943 %. - 5,64 millions € au total sur le Capital Périodes du fondamental (CP) et sur le Nombre Total de Périodes Professeurs du secondaire (NTPP).

La volonté est d'immuniser le maternel et de procéder aux mêmes pourcentages de prélèvement sur le primaire et le secondaire. Le prélèvement s'effectue aussi sur les 8 dernières tranches. Le prélèvement sera progressif et passera de 0,1733 % pour la 13ème tranche à 1,3867 % pour la 20ème tranche par pas successifs de 0,1733 %. [...] En résumé, 25 % des élèves classés en 5 tranches de 5 % bénéficient de manière dégressive du nouveau mécanisme (ceux des écoles à indices les plus faibles), les 7 tranches suivantes ne bénéficient ni ne contribuent, les 8 dernières tranches contribuent légèrement et de manière progressive » (Doc. parl., Parlement de la Communauté française, 2010-2011, n° 142/1, pp. 6-7).

B.4.2. Le législateur décrétal a eu pour objectif de faire contribuer financièrement les établissements d'enseignement des classes 13 à 20 à la mise en oeuvre de la troisième phase de la politique de l'encadrement différencié en limitant leur dotation ou subvention de fonctionnement ainsi que les moyens humains mis à leur disposition.

Ainsi, les moyens financiers des établissements des classes 13 à 20 continuent à augmenter, sauf les moyens des établissements de la classe 20 qui restent constants, mais moins vite que les moyens financiers des autres écoles.

B.5.1. Le principe d'égalité et de non-discrimination ne s'oppose pas à ce que le législateur décrétal renonce à ses objectifs initiaux pour en poursuivre d'autres. D'une manière générale, les pouvoirs publics doivent d'ailleurs pouvoir adapter leur politique aux exigences changeantes de l'intérêt général. Il appartient au législateur décrétal d'apprécier, compte tenu de la marge budgétaire limitée dont il dispose, si un changement de politique en matière de financement des établissements d'enseignement est nécessaire.

La Cour ne peut apprécier un tel changement de politique que dans les limites de sa compétence, définies par la Constitution et la loi spéciale du 6 janvier 1989. Le principe d'égalité et de non-discrimination n'est pas violé pour la seule raison qu'une nouvelle disposition déjouerait les calculs de ceux qui avaient compté sur le maintien de la politique antérieure.

B.5.2. Par ailleurs, c'est au législateur décrétal qu'il revient de choisir les modes les plus appropriés de financement des établissements qui entrent dans le champ de sa compétence. Il n'appartient pas à la Cour d'apprécier si ce choix est opportun ou souhaitable.

B.6. Les dispositions attaquées visent à apporter une réponse au problème de l'inégalité des chances dans l'enseignement en tenant compte des contraintes qui pèsent sur le budget de la Communauté française, et poursuivent donc un objectif légitime en assurant le financement des mesures d'encadrement différencié prévues par le décret du 30 avril 2009 précité.

B.7.1. En application de l'article 4, alinéa 4, du décret du 30 avril 2009 précité, les établissements d'enseignement sont répartis en différentes classes en fonction d'un indice attribué à chaque implantation scolaire qui correspond à la moyenne des indices socio-économiques des élèves qui y sont inscrits. L'indice de chaque élève est déterminé par l'indice qu'une étude interuniversitaire a attribué à son lieu de résidence, en application de l'article 3 du même décret.

B.7.2. La Cour a jugé, par son arrêt n° 4/2011 du 13 janvier 2011, que le législateur décrétal pouvait recourir à une telle classification afin de déterminer si, en fonction de son établissement scolaire primaire d'origine, un élève devait être considéré comme disposant d'un indice socio-économique faible et bénéficier, par conséquent, des places réservées en première année d'enseignement secondaire à cette catégorie d'élèves : « Le choix du législateur décrétal de retenir un critère tiré du classement socio-économique de l'école fondamentale ou primaire d'origine de l'élève, plutôt que de son quartier de résidence, n'est pas manifestement déraisonnable. En effet, la place occupée par l'école primaire dans le classement socio-économique des écoles reflète la situation socio-économique moyenne des élèves qui la fréquentent, et n'est donc pas sans lien avec l'indice socio-économique personnel de chaque élève. S'il est évident que certains élèves ont un indice socio-économique plus élevé, ou plus faible, selon les cas, que la moyenne des élèves qui fréquentent le même établissement, une situation semblable pourrait être observée si l'indice socio-économique était déterminé en fonction du quartier de résidence. En effet, dès lors que l'indice socio-économique du quartier est également basé sur la moyenne des résultats des habitants du quartier pour chaque facteur pris en considération, certains habitants ont un indice socio-économique plus élevé ou plus faible, selon les cas, que la moyenne des habitants du quartier, de sorte qu'aucune de ces deux solutions n'offre la possibilité d'ajuster complètement l'indice socio-économique attribué à un élève à sa situation personnelle. Enfin, la prise en compte du classement socio-économique de l'école s'inscrit dans le prolongement du processus mis en place par le décret du 30 avril 2009 précité » (B.6.6).

B.7.3. Pour les mêmes raisons, le recours à pareil indice socio-économique afin d'identifier les établissements d'enseignement qui, en raison de leur population, doivent faire l'objet d'un soutien particulier en termes de moyens financiers et humains n'est pas dépourvu de justification raisonnable.

Il s'ensuit qu'en tant qu'il prend en compte l'indice socio-économique des établissements pour déterminer lesquels d'entre eux doivent contribuer à la mise sur pied d'une politique d'égalité des chances, à savoir les établissements regroupant les 40 % de la population scolaire considérés comme les plus favorisés d'un point de vue socio-économique, le législateur décrétal utilise un critère qui est dans un rapport raisonnable de proportionnalité avec l'objectif qu'il poursuit.

B.8. La différence de traitement en termes de moyens humains et financiers entre les établissements des classes 13 à 20 et les établissements des classes 1 à 5 est raisonnablement justifiée par les besoins manifestement différents des deux sortes d'établissements.

La différence de traitement en termes de moyens humains et financiers entre les établissements des classes 13 à 20 et les établissements des classes 6 à 12 est raisonnablement justifiée en raison des différences qui existent entre les populations scolaires de ces deux types d'établissements. Les écoles relevant des classes 6 à 12 présentent en effet un indice socio-économique moyen qui, s'il peut justifier qu'elles ne bénéficient pas des mécanismes d'encadrement différencié, explique également qu'elles ne soient pas mises à contribution afin de financer ce dernier.

Certes, les différences socio-économiques existant entre des établissements appartenant tantôt à la classe 12 tantôt à la classe 13 peuvent apparaître d'une faible ampleur. Cette circonstance n'est toutefois pas de nature à priver la différence de traitement attaquée de sa justification, puisque le législateur décrétal peut, dans une matière aussi technique, appréhender la diversité des situations en faisant usage de catégories qui, tout à la fois, peuvent ne correspondre aux réalités que de manière simplifiée et approximative et résulter de la nécessité de tracer quelque part une limite.

B.9.1. En outre, l'effort est réparti progressivement sur les écoles, dans lesquelles sont inscrits les 40 % de la population scolaire jugés les plus favorisés d'un point de vue socio-économique, et pour lesquelles la limitation des moyens humains et financiers concourt au financement des mesures d'encadrement différencié au profit des écoles dans lesquelles sont inscrits les 25 % de la population scolaire jugés les plus défavorisés d'un point de vue socio-économique.

B.9.2. Par ailleurs, les moyens financiers alloués aux implantations scolaires des classes 13 à 19 continuent d'augmenter, même si c'est à un rythme moindre que les moyens reconnus aux autres établissements scolaires.

B.10. Le premier moyen n'est pas fondé.

B.11. Les parties requérantes prennent un deuxième moyen de la violation par les dispositions attaquées des articles 10, 11 et 24 de la Constitution en ce que le législateur décrétal aurait concédé une délégation trop large au Gouvernement de la Communauté française et à des experts indépendants dans la détermination du mode de calcul de l'indice socio-économique permettant de répartir les établissements scolaires en différentes classes.

B.12. Le mode de calcul de l'indice socio-économique est défini à l'article 3 du décret du 30 avril 2009 précité.

Tel qu'il a été modifié par le décret du 8 juillet 2010, l'article 3 de ce décret dispose : « Tous les cinq ans, avant le 30 novembre, et pour la première fois au plus tard le 30 avril 2010, une étude interuniversitaire établit pour la Communauté française l'indice socioéconomique de chaque secteur statistique, c'est-à-dire de chaque subdivision territoriale la plus petite déterminée par la Direction générale Statistique et Information économique du Service public fédéral Economie, Petites et Moyennes Entreprises, Classes moyennes et Energie, au moyen d'une formule de calcul prenant en compte les dernières données statistiques disponibles pour les critères suivants : 1° Revenu par habitant;2° Niveau des diplômes;3° Taux de chômage, taux d'activité et taux de bénéficiaires du revenu mensuel minimum moyen garanti;4° Activités professionnelles;5° Confort des logements. Chacun des critères est déterminé en fonction d'une ou de plusieurs variables.

L'indice socio-économique de chaque secteur statistique est exprimé à l'aide d'un indice composite dont une valeur faible indique un niveau socio-économique moins favorisé. La formule de calcul de cet indice est soumise à l'approbation du Gouvernement de la Communauté française, ci-après dénommé ' le Gouvernement ', et fait apparaître les variables déterminant chacun des critères et la part respective de chacune d'elles dans le cadre de la formule de calcul.

Le cas échéant, afin de parfaire la typologie socio-économique des différents secteurs statistiques ou de suppléer à un ou plusieurs critères pour lesquels les données statistiques seraient indisponibles, incomplètes ou désuètes, l'étude visée à l'alinéa 1er peut proposer de faire intervenir dans la formule d'autres critères déterminés en fonction d'une ou de plusieurs variables, lesquels sont également soumis à l'approbation du Gouvernement ».

B.13. Les parties requérantes critiquent l'importance de la délégation de compétences, contenue dans cette disposition, au Gouvernement de la Communauté française et aux experts chargés de l'étude interuniversitaire qui y est visée. Or, ce grief est étranger aux dispositions attaquées. Il porte, en réalité, exclusivement sur la règle contenue à l'article 3 du décret du 30 avril 2009. La circonstance que certaines dispositions attaquées s'appuient sur la classification obtenue grâce à cette méthode de calcul et se réfèrent, à cette fin, à l'article 4 du décret du 30 avril 2009, peut être tout au plus considérée comme un renvoi purement technique qui n'exprime pas la volonté du législateur décrétal de légiférer à nouveau sur cette question.

B.14. Le second moyen est irrecevable.

Par ces motifs, la Cour - décrète le désistement du recours de l'Université catholique de Louvain; - rejette les recours.

Ainsi prononcé en langue française, en langue néerlandaise et en langue allemande, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, à l'audience publique du 12 juin 2012.

Le greffier, F. Meersschaut Le président, R. Henneuse

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