publié le 07 mai 2012
Extrait de l'arrêt n° 6/2012 du 18 janvier 2012 Numéro du rôle : 5099 En cause : le recours en annulation des articles 56, 57 et 58 du décret de la Région flamande du 16 juillet 2010 portant adaptation du Code flamand de l'Aménagement du Terr La Cour constitutionnelle, composée des présidents M. Bossuyt et R. Henneuse, et des juges E. De(...)
Extrait de l'arrêt n° 6/2012 du 18 janvier 2012 Numéro du rôle : 5099 En cause : le recours en annulation des articles 56, 57 et 58 du décret de la Région flamande du 16 juillet 2010 portant adaptation du Code flamand de l'Aménagement du Territoire du 15 mai 2009 et du décret du 10 mars 2006 portant adaptations décrétales en matière d'aménagement du territoire et du patrimoine immobilier suite à la politique administrative, introduit par Alfred Vander Elst et autres.
La Cour constitutionnelle, composée des présidents M. Bossuyt et R. Henneuse, et des juges E. De Groot, L. Lavrysen, A. Alen, J.-P. Snappe, J.-P. Moerman, E. Derycke, J. Spreutels, T. Merckx-Van Goey, P. Nihoul et F. Daoût, assistée du greffier P.-Y. Dutilleux, présidée par le président M. Bossuyt, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet du recours et procédure Par requête adressée à la Cour par lettre recommandée à la poste le 8 février 2011 et parvenue au greffe le 9 février 2011, un recours en annulation des articles 56, 57 et 58 du décret de la Région flamande du 16 juillet 2010 portant adaptation du Code flamand de l'Aménagement du Territoire du 15 mai 2009 et du décret du 10 mars 2006 portant adaptations décrétales en matière d'aménagement du territoire et du patrimoine immobilier suite à la politique administrative (publié au Moniteur belge du 9 août 2010) a été introduit par Alfred Vander Elst et Maria Carels, demeurant à 3060 Bertem, Kuipersberg 23, et Bart Deputter et Stijn Deputter, demeurant à 3060 Bertem, Kuipersberg 6. (...) II. En droit (...) Quant aux dispositions attaquées et à leur contexte B.1.1. Les parties requérantes demandent l'annulation des articles 56, 57 et 58 du décret de la Région flamande du 16 juillet 2010 portant adaptation du Code flamand de l'Aménagement du Territoire du 15 mai 2009 et du décret du 10 mars 2006 portant adaptations décrétales en matière d'aménagement du territoire et du patrimoine immobilier suite à la politique administrative. Ces articles disposent : «
Art. 56.Dans l'article 7.5.4 du même Code, un alinéa est inséré entre les alinéas quatre et cinq, rédigé comme suit : ' Aux présents lots s'appliquent les articles 4.6.4 à 4.6.8, étant entendu que le délai de dix ans après la délivrance du permis de lotir, visé à l'article 4.6.4, § 1er, alinéa premier, 2°, respectivement § 2, 2°, est remplacé par un délai de cinq ans à partir du 1er mai 2000. le délai de quinze ans après la délivrance du permis de lotir, visé à l'article 4.6.4, § 2, 3°, est remplacé par un délai de dix ans à partir du 1er mai 2000 '.
Art. 57.Dans l'article 7.5.6, alinéa premier, première phrase, les mots ' à partir du 22 décembre 1970 et ' sont insérés entre les mots ' aux permis de lotir qui ont été octroyés ' et les mots ' avant le 1er mai 2000 '.
Art. 58.Dans l'article 7.5.6, alinéa premier, du même Code, la phrase ' La restriction de l'article 4.6.4, § 1er, deuxième alinéa, 2°, ne vaut toutefois pas pour les ventes de lots dans leur intégralité ayant obtenu date certaine avant le 1er septembre 2009; de telles ventes étaient bien en mesure d'empêcher l'échéance d'un permis de lotir. ' est remplacée par les phrases ' La restriction de l'article 4.6.4, § 1er, alinéa deux, 2°, ne vaut toutefois pas pour les ventes de lots dans leur intégralité ayant obtenu date certaine avant le 1er septembre 2009, à condition que l'autorité a délivrée des attestations urbanistiques ou des permis de bâtir soit sur la base de ou par référence au permis de lotir, soit a autorisé des adaptations au permis de lotir, dans la mesure où l'autorité supérieure ou le juge ne les a pas jugés illégitimes. De telles ventes dans leur intégralité étaient bien en mesure d'empêcher l'échéance d'un permis de lotir '. ».
B.1.2. Les articles 7.5.4 et 7.5.6, alinéa 1er, ainsi modifiés, du Code flamand de l'Aménagement du Territoire disposent (modifications indiquées en italique) : « Art. 7.5.4. Jusqu'à l'établissement intégral par la commune et à l'approbation par le fonctionnaire urbaniste régional de la partie du registre des permis visée à l'article 7.6.2, § 1er, troisième alinéa, 4°, il existe une présomption qu'un permis de lotir pour une partie non bâtie d'un lotissement datant d'avant le 22 décembre 1970 et n'ayant pas, à partir de cette date, fait l'objet d'une modification de lotissement engendrant un relotissement ou une augmentation ou une diminution du nombre de lots, est échu. Le fonctionnaire urbaniste régional statue sur cette partie du registre des permis dans les soixante jours suivant la date à laquelle la commune lui en a fait la demande.
Dans chaque commune, un avis est affiché invitant les propriétaires d'un lot non bâti ou de plusieurs lots non bâtis dans des lotissements autorisés non échus datant d'avant le 22 décembre 1970, à se présenter auprès du Collège des bourgmestre et échevins. Le Gouvernement flamand adopte les mesures nécessaires pour veiller à l'affichage immédiat après l'entrée en vigueur le 1er mai 2000 du décret du 18 mai 1999 portant organisation de l'aménagement du territoire et à la publication d'un avis dans au moins trois quotidiens distribués en Région flamande.
Lorsqu'aucun propriétaire d'un lot non bâti ne s'est présenté auprès du Collège des bourgmestre et échevins dans un délai de nonante jours suivant la date du 1er mai 2000, le permis de lotir pour le lot non bâti ou les lots non bâtis est définitivement échu.
Lorsqu'un propriétaire s'est présenté auprès du Collège des bourgmestre et échevins dans un délai de nonante jours suivant le 1er mai 2000, le Collège des bourgmestre et échevins vérifiera si le permis de lotir n'est pas déjà échu en application du règlement visé au point 12 de l'annexe 2, ' Dispositions non reprises dans la coordination : les dispositions de modification, de transition et d'abrogation, ainsi que les dispositions déjà obsolètes ', jointe à l'arrêté du Gouvernement flamand du 22 octobre 1996 portant coordination de la loi organique de l'aménagement du territoire et de l'urbanisme du 29 mars 1962. Ce n'est que lorsque le permis de lotir n'est pas encore échu que tous les lots non bâtis sont repris dans le registre des permis.
Aux présents lots s'appliquent les articles 4.6.4 à 4.6.8, étant entendu que le délai de dix ans après la délivrance du permis de lotir, visé à l'article 4.6.4, § 1er, alinéa premier, 2°, respectivement § 2, 2°, est remplacé par un délai de cinq ans à partir du 1er mai 2000. le délai de quinze ans après la délivrance du permis de lotir, visé à l'article 4.6.4, § 2, 3°, est remplacé par un délai de dix ans à partir du 1er mai 2000.
L'expiration des permis de lotir mentionnés dans le premier alinéa qui ne devaient pas être déclarés parce qu'ils avaient fait l'objet, à partir du 22 décembre 1970, d'une modification de lotissement ayant engendré un relotissement ou une augmentation ou une diminution du nombre de lots, est jugée en vertu du règlement mentionné dans le quatrième alinéa ». « Art. 7.5.6. Les articles 4.6.4 à 4.6.8 inclus sont d'application aux permis de lotir qui ont été octroyés à partir du 22 décembre 1970 et avant le 1er mai 2000. La restriction de l'article 4.6.4, § 1er, alinéa deux, 2°, ne vaut toutefois pas pour les ventes de lots dans leur intégralité ayant obtenu date certaine avant le 1er septembre 2009, à condition que l'autorité a délivrée des attestations urbanistiques ou des permis de bâtir soit sur la base de ou par référence au permis de lotir, soit a autorisé des adaptations au permis de lotir, dans la mesure où l'autorité supérieure ou le juge ne les a pas jugés illégitimes. De telles ventes dans leur intégralité étaient bien en mesure d'empêcher l'échéance d'un permis de lotir. Ce qui précède n'entraîne jamais la révocation des décisions passées en force de choses jugées, qui ont déterminé l'expiration de permis de lotir en vertu de l'avis que la vente de lotissements dans leur intégralité n'est pas de nature à empêcher le délabrement [lire : la caducité] d'un lotissement. [...] ».
B.1.3. Les dispositions précitées se réfèrent notamment, en ce qui concerne la péremption du permis de lotir, à l'article 4.6.4 du Code flamand de l'Aménagement du Territoire, en particulier à la restriction contenue dans le paragraphe 1er, alinéa 2, 2°, de cet article.
L'article 4.6.4, § 1er, du Code flamand de l'Aménagement du Territoire dispose : « § 1er. Un permis de lotir, qui n'implique pas la construction de nouvelles routes, ni la modification, l'élargissement ou le rehaussement du tracé des routes communales existantes, expire de droit quand : 1° l'enregistrement de la vente, la location pour plus de neuf ans ou l'établissement d'une emphytéose ou d'un droit de superficie par rapport à au moins un tiers des lots n'a pas eu lieu dans les cinq ans suivant l'octroi du permis en dernier ressort administratif;2° un tel enregistrement par rapport à au moins deux tiers des lots n'a pas eu lieu dans les dix ans suivant l'octroi du permis en dernier ressort administratif. Pour l'application du premier alinéa : 1° sont assimilées à la vente : la répartition d'une succession et la donation, étant entendu qu'une seule parcelle entre en ligne de compte par copartageant ou bénéficiaire;2° la vente du lotissement dans sa totalité n'entre pas en ligne de compte;3° seule la location visant à faire construire le locataire sur le bien loué entre en ligne de compte. Pour l'application de l'alinéa premier, la construction à temps par le lotisseur conformément au permis de lotir est assimilée à la vente ».
B.2.1. Les dispositions attaquées modifient la réglementation relative à la péremption du permis de lotir, plus précisément par suite de la vente du lotissement « dans son intégralité », dite « vente globale ».
B.2.2. La notion juridique du « permis de lotir » a été introduite par la loi du 29 mars 1962 organique de l'aménagement du territoire et de l'urbanisme (ci-après : loi organique de l'urbanisme).
La loi du 22 décembre 1970 modifiant la loi organique de l'urbanisme a prévu une réglementation relative à la péremption du permis de lotir.
Pour les permis de lotir qui ont été délivrés avant l'entrée en vigueur de la loi du 22 décembre 1970, il a été prévu un régime transitoire (article 74 de la loi organique de l'urbanisme, remplacé par l'article 27 de la loi du 22 décembre 1970).
Dans son arrêt n° 117/2004 du 30 juin 2004, la Cour s'est prononcée sur ce régime transitoire, étant entendu que cet arrêt concernait uniquement la comparaison entre le régime transitoire pour les accords de lotissement et celui des permis de lotir : « B.5. L'article 74 de la loi du 29 mars 1962, tel qu'il a été modifié par l'article 27 de la loi du 22 décembre 1970, instaure un régime transitoire relatif à la péremption des accords de lotissement et des permis de lotir antérieurs à l'entrée en vigueur de la loi du 22 décembre 1970. (voir Doc. parl., Sénat, 1968-1969, n° 559, p. 15) Ce régime transitoire tient au fait que la loi du 22 décembre 1970 a limité la durée de validité des permis de lotir et a donc mis fin aux lotissements ' perpétuels '. S'agissant des lotissements qui n'impliquent pas l'ouverture de nouvelles voies de communication ou la modification du tracé, l'élargissement ou la suppression de voies existantes - le lotissement dit ' petit ' - l'article 57, § 4, alinéa 1er, première phrase, de la loi organique de l'urbanisme, tel qu'il a été modifié par l'article 14 de la loi du 22 décembre 1970, précise ce qui suit : ' Lorsque le lotissement n'implique pas l'ouverture de nouvelles voies de communication, la modification du tracé de voies communales existantes, l'élargissement ou la suppression de celles-ci, le permis est périmé pour la partie restante lorsque la vente ou la location pour plus de neuf ans, la constitution d'emphytéose ou de superficie d'au moins un tiers des lots n'a pas été enregistrée dans le délai de cinq ans de sa délivrance. ' B.6. En ce qui concerne les ' petits ' lotissements, l'article 74 de la loi organique de l'urbanisme établit une distinction entre, d'abord, les accords de lotissement antérieurs au 22 avril 1962 - date d'entrée en vigueur de la loi organique de l'urbanisme - qui sont périmés ' lorsque la vente d'au moins un tiers des parcelles n'a pas été enregistrée avant le 1er octobre 1970 ' (article 74, § 1er, alinéa 4), ensuite, les permis de lotir délivrés entre le 22 avril 1962 et le 31 décembre 1965, qui sont périmés ' lorsque la vente d'au moins une des parcelles n'a pas été soumise à la formalité de l'enregistrement avant le 1er octobre 1970 ' (article 74, § 3, alinéa 1er, 1°), et, enfin, les permis de lotir délivrés entre le 1er janvier 1966 et le 15 février 1971 - date d'entrée en vigueur de la loi du 22 décembre 1970 - qui sont périmés ' lorsque la vente ou la location pour plus de neuf ans d'au moins un tiers des parcelles n'a pas été soumise à la formalité de l'enregistrement dans un délai de cinq ans à partir de la date du permis ' (article 74, § 3, alinéa 1er, 2°).
S'agissant des deux premières catégories, la péremption est intervenue d'office si, au 1er octobre 1970, la condition prescrite par la loi n'était pas remplie (Doc. parl., Sénat, 1969-1970, n° 525, p. 80, et Doc. parl., Chambre, 1970-1971, n° 773/2, p. 44).
En ce qui concerne la troisième catégorie, l'article 74, § 3, alinéa 1er, 2°, de la loi organique de l'urbanisme applique la règle inscrite à l'article 57, § 4, alinéa 1er, première phrase, de cette loi aux permis de lotir délivrés entre le 1er janvier 1966 et le 15 février 1971. Lors de l'entrée en vigueur de la loi du 22 décembre 1970, les permis délivrés entre le 1er janvier 1966 et le 15 février 1966 étaient ainsi périmés, pour autant qu'à ce moment, la vente ou la location pour plus de neuf ans d'au moins un tiers des parcelles n'était pas enregistrée, étant donné que, pour ces permis, le délai de cinq années était entièrement expiré.Pour les autres permis de lotir de cette catégorie, le titulaire du permis disposait, pour procéder à la vente et à l'enregistrement, du reste du délai de cinq ans, à compter de la date de délivrance du permis de lotir.
B.7. En adoptant la loi du 22 décembre 1970, le législateur a entendu mettre fin aux permis de lotir à durée indéterminée, afin d'éviter que ces permis puissent être demandés pour des motifs purement spéculatifs (Doc. parl., Sénat, 1968-1969, n° 559, p. 14). L'article 74 vise, quant à lui, à réaliser l'égalité de traitement entre, d'une part, les permis de lotir postérieurs à l'entrée en vigueur de la loi du 22 décembre 1970 et, d'autre part, les accords de lotissement et les permis de lotir antérieurs à cette loi. Selon le législateur, ' on ne concevrait pas qu'existassent deux sortes de permis : les uns périmés au bout de cinq ans, les autres d'une validité perpétuelle ' (ibid., p. 15) ». Dans son arrêt n° 94/2005 du 25 mai 2005 (B.6.2), la Cour a jugé, de manière comparable, en ce qui concerne la limitation, par la loi du 22 décembre 1970, de la durée de validité du permis de lotir.
B.2.3. L'article 74 précité n'a pas été repris dans le décret relatif à l'aménagement du territoire, coordonné le 22 octobre 1996, mais figure bien au point 12 de l'annexe 2 de l'arrêté du Gouvernement flamand du 22 octobre 1996 modifiant l'arrêté du Gouvernement flamand du 24 septembre 1996 portant coordination de la loi du 29 mars 1962 organique de l'aménagement du territoire et de l'urbanisme. Il est donc resté pleinement en vigueur.
B.2.4. Le décret du 18 mai 1999 portant organisation de l'aménagement du territoire (ci-après : le décret du 18 mai 1999), qui remplace la loi organique de l'urbanisme, contenait, à l'article 192, un régime transitoire pour la péremption des permis de lotir datant d'avant le 22 décembre 1970, qui instaurait une présomption de péremption de ces permis, à moins que le propriétaire d'une parcelle non bâtie dans un tel lotissement se signale auprès du collège des bourgmestre et échevins.
L'article 203 du décret du 18 mai 1999 prévoyait un régime transitoire pour les permis de lotir qui avaient été délivrés avant l'entrée en vigueur du décret du 18 mai 1999, à savoir le 1er mai 2000.
B.2.5. Sur la base de l'article 74 de la loi organique de l'urbanisme et des articles 129, 130, 192 et 203 du décret du 18 mai 1999, la péremption d'un permis de lotir était interrompue par la vente, dans un délai déterminé, d'au moins un tiers ou deux tiers des lots.
La doctrine et la jurisprudence étaient partagées sur le point de savoir si la vente globale d'un lotissement pouvait interrompre la péremption du permis de lotir.
Les travaux préparatoires du décret du 27 mars 2009 « adaptant et complétant la politique d'aménagement du territoire, des autorisations et du maintien » (ci-après : le décret du 27 mars 2009), et plus précisément la justification d'un amendement adopté par le législateur décrétal, mentionnent à ce sujet : « Le débat reste ouvert sur le point de savoir si la vente globale d'un lotissement interrompt la péremption du permis de lotir dans le cadre des régimes cités.
Une certaine doctrine répond à cette question par la négative, en se basant sur la ratio legis du régime de péremption (à savoir empêcher la spéculation). [...] Cette thèse a également été soutenue dans un arrêt de suspension du Conseil d'Etat (n° 153.172, 12 janvier 2006, www.raadvst-consetat.be).
D'autres auteurs estiment que la péremption est effectivement interrompue par la vente globale du lotissement, en se basant sur l'argument textuel qu'une telle vente dépasse les conditions fixées, à savoir la vente d'1/3 ou de 2/3 des lots. Si le législateur décrétal avait voulu la péremption en pareil cas, il aurait dû le prévoir expressément, dans un souci de sécurité juridique [...]. Cette thèse a notamment été suivie par la Cour d'appel de Bruxelles (en ce qui concerne l'application de l'article 74, § 3, de la loi organique de l'aménagement du territoire et de l'urbanisme, qui est similaire au régime actuel contenu dans le décret du 18 mai 1999), dans l'arrêt du 13 octobre 2003 [...]. Cet arrêt jugeait entre autres qu'une autre thèse ' reviendrait à ajouter une condition qui n'est pas inscrite dans la loi '.
Le nouvel article 133/25, § 1er, alinéa 2, 2°, du décret du 18 mai 1999 prévu par le projet de décret tranche clairement la controverse; il est clairement indiqué que la vente du lotissement dans sa globalité n'entre pas en ligne de compte pour empêcher la péremption, le tout dans le droit fil de l'intention initiale qui est de rendre la spéculation sur les permis de lotir impossible [...].
Toutefois, il ne convient pas de rendre ce régime futur également applicable aux ventes qui ont acquis date certaine avant l'entrée en vigueur du projet de décret, en raison justement des imprécisions dans la jurisprudence et dans la doctrine.
Pour cette raison, l'amendement précise, à titre de mesure transitoire, que les ' anciennes ' ventes (antérieures à l'entrée en vigueur du projet de décret) pouvaient faire commencer la péremption du permis de lotir. Bien entendu, (l'entrée en vigueur de) cette précision ne peut pas mettre à néant des jugements ou arrêts en sens contraire ayant été coulés en force de chose jugée » (Doc. parl., Parlement flamand, 2008-2009, n° 2011/3, pp. 69-70; voir également ibid., n° 2011/6, p. 76).
L'article 36 du décret du 27 mars 2009 a ensuite inséré notamment un nouvel article 133/25 dans le décret du 18 mai 1999, en vertu duquel la vente globale d'un lotissement n'interrompt pas la péremption du permis de lotir (article 133/25, § 1er, alinéa 2, 2°, du décret du 18 mai 1999).
L'article 94 du décret du 27 mars 2009 a en outre modifié l'article 203 du 18 mai 1999. Le régime transitoire prévu par cet article 203 a été complété par une exception en ce qui concerne l'incidence qu'a la vente globale d'un lotissement sur la péremption du permis de lotir : les ventes globales de lotissements qui ont acquis date certaine avant le 1er septembre 2009, date d'entrée en vigueur du décret du 27 mars 2009, pouvaient bien empêcher la péremption d'un permis de lotir.
B.2.6. Les dispositions précitées du décret du 18 mai 1999, qui ont été modifiées à plusieurs reprises, ont fait l'objet d'une coordination dans le Code flamand de l'Aménagement du Territoire.
L'article 4.6.4 du Code flamand de l'Aménagement du Territoire résulte de la coordination de l'article 133/25 du décret du 18 mai 1999.
L'article 7.5.4 du Code flamand de l'Aménagement du Territoire résulte de la coordination de l'article 192, § 2, du décret du 18 mai 1999.
L'article 7.5.6 du Code flamand de l'Aménagement du Territoire résulte de la coordination de l'article 203 du décret du 18 mai 1999.
B.2.7. Les articles 56, 57 et 58, attaqués, du décret du 16 juillet 2010 ont une fois de plus modifié les articles 7.5.4 et 7.5.6 du Code flamand de l'aménagement du territoire.
Quant à l'intérêt des parties requérantes B.3.1. Les parties requérantes sont, d'une part, les propriétaires-vendeurs et, d'autre part, les acheteurs d'un lotissement pour lequel un permis de lotir a été délivré le 16 novembre 1966. Elles relèvent que le collège des bourgmestre et échevins de la commune concernée a constaté le 24 avril 2005 et confirmé le 21 septembre 2009 que ce permis de lotir n'était pas périmé. Le 4 décembre 2009, le fonctionnaire urbaniste régional a abondé dans ce sens.
Selon les parties requérantes, les dispositions attaquées excluraient en principe l'effet interruptif des « anciennes » ventes globales et ces dispositions ajouteraient en outre des conditions supplémentaires à la non-péremption d'« anciens » permis de lotir dûment déclarés. Les parties requérantes disposeraient donc de l'intérêt requis au recours, étant donné que la non-péremption du permis de lotir en question est expressément fondée sur des règles que les dispositions attaquées modifient profondément. Dès lors, elles pourraient être affectées directement dans leurs intérêts patrimoniaux, en ce que le développement du lotissement à des fins résidentielles serait rendu impossible.
B.3.2. Le Gouvernement flamand estime que les parties requérantes ne justifient pas de l'intérêt requis, de sorte que le recours ne serait pas recevable. Le permis de lotir en question serait, selon lui, irrévocablement périmé, plus précisément depuis le 16 novembre 1971, et ce par application de l'article 74, § 3, 2, de la loi organique de l'urbanisme. Aucune modification ultérieure du cadre législatif pertinent n'altérerait, selon le Gouvernement flamand, ce constat péremptoire. Les décisions des autorités communales et régionales auxquelles les parties requérantes se réfèrent ne conduiraient pas à une autre conclusion.
B.3.3. La Constitution et la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle imposent à toute personne physique ou morale qui introduit un recours en annulation de justifier d'un intérêt. Ne justifient de l'intérêt requis que les personnes dont la situation pourrait être affectée directement et défavorablement par la norme attaquée.
A l'appui de leur intérêt, les parties requérantes soulignent qu'un permis de lotir pour deux lots a été délivré le 16 novembre 1966, au nom de Jean-Baptiste Van Meerbeeck, pour un terrain inscrit ultérieurement comme terrain agricole au plan de secteur de Louvain, fixé par l'arrêté royal du 7 avril 1977.
Ce permis, qui a été octroyé pour une durée indéterminée au moment de sa délivrance, est visé par l'article 74, § 3, 2, de la loi organique de l'urbanisme, inséré par l'article 27 de la loi du 22 décembre 1970 modifiant la loi du 29 mars 1962 organique de l'aménagement du territoire et de l'urbanisme. Selon cette disposition, sont périmés « les permis de lotir délivrés à partir du 1er janvier 1966, qui concernent les lotissements à réaliser le long d'une voirie existante suffisamment équipée, lorsque la vente ou la location pour plus de neuf ans d'au moins un tiers des parcelles n'a pas été soumise à la formalité de l'enregistrement dans un délai de cinq ans à partir de la date du permis ».
Dès lors que la condition précitée n'était pas remplie au 16 novembre 1971, puisque la première vente globale n'a eu lieu que le 6 mars 1980, le permis de lotir en question a expiré à cette date. Des modifications ultérieures apportées au cadre législatif concernant les permis non périmés, y compris les dispositions actuellement attaquées, n'ont aucune influence sur cette expiration.
Les dispositions attaquées ne pouvant affecter la situation des parties requérantes, ces dernières ne justifient pas de l'intérêt requis.
La perspective d'une action en indemnité est sans pertinence à cet égard.
L'exception est fondée.
Par ces motifs, la Cour rejette le recours.
Ainsi prononcé en langue néerlandaise, en langue française et en langue allemande, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, à l'audience publique du 18 janvier 2012.
Le greffier, P.-Y. Dutilleux.
Le président, M. Bossuyt.