publié le 13 février 2009
Extrait de l'arrêt n° 188/2008 du 18 décembre 2008 Numéro du rôle : 4410 En cause : les questions préjudicielles relatives aux articles 146, alinéa 4, et 198bis du décret de la Région flamande du 18 mai 1999 portant organisation de l'aména La Cour constitutionnelle, composée des présidents M. Bossuyt et M. Melchior, et des juges A. Al(...)
COUR CONSTITUTIONNELLE
Extrait de l'arrêt n° 188/2008 du 18 décembre 2008 Numéro du rôle : 4410 En cause : les questions préjudicielles relatives aux articles 146, alinéa 4, et 198bis du décret de la Région flamande du 18 mai 1999 portant organisation de l'aménagement du territoire, posées par le Tribunal correctionnel de Termonde.
La Cour constitutionnelle, composée des présidents M. Bossuyt et M. Melchior, et des juges A. Alen, J.-P. Snappe, J.-P. Moerman, J. Spreutels et T. Merckx-Van Goey, assistée du greffier P.-Y. Dutilleux, présidée par le président M. Bossuyt, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet des questions préjudicielles et procédure Par jugement du 26 novembre 2007 en cause du ministère public contre A. V.N. et la SA « STR », dont l'expédition est parvenue au greffe de la Cour le 8 janvier 2008, le Tribunal correctionnel de Termonde a posé les questions préjudicielles suivantes : 1. « L'article 146, alinéa 4, du décret du 18 mai 1999 portant organisation de l'aménagement du territoire, tel qu'il a été modifié par l'article 7 du décret du 4 juin 2003 et par l'article 46 du décret du 21 novembre 2003, s'il est interprété en ce sens que les ' zones agricoles d'intérêt paysager ' relèvent des ' zones agricoles à valeur particulière ', viole-t-il les articles 10 et 11 de la Constitution et/ou les articles 12, alinéa 2, et 14 de la Constitution, combinés ou non avec les articles 10 et 11 de la Constitution ainsi qu'avec l'article 7 de la Convention européenne des droits de l'homme et avec l'article 15 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, en ce que, lorsqu'il est combiné avec l'article 145bis du décret du 18 mai 1999, tel qu'il a été inséré par le décret du 13 juillet 2001 et tel qu'il a été modifié par le décret du 22 avril 2005, les opérations, travaux ou modifications dans une même zone sous toutes leurs facettes (octroi de permis, dispense de permis, sanction et réparation) ne sont pas appréciés de manière uniforme étant donné qu'une même zone est considérée respectivement comme zone vulnérable du point de vue spatial et comme zone non vulnérable du point de vue spatial selon qu'il est fait application de l'article 146, alinéa 4, ou de l'article 145bis du décret du 18 mai 1999 ? »;2. « Interprété comme [indiqué dans le jugement de renvoi], l'article 198bis du décret du 18 mai 1999 portant organisation de l'aménagement du territoire, inséré par l'article 11 du décret du 4 juin 2003 et combiné avec l'article 149, § 1er, de ce même décret, viole-t-il les articles 10 et 11 de la Constitution, en ce qu'il en résulte que pour les demandes de réparation qui ont été introduites avant l'entrée en vigueur des dispositions relatives à l'avis conforme du Conseil supérieur de la politique de réparation mais au sujet desquelles le juge ne statue qu'après l'entrée en vigueur des dispositions relatives à l'avis conforme, l'obligation d'avis conforme préalable du Conseil supérieur de la politique de réparation n'est pas d'application, alors que cette obligation s'applique aux demandes de réparation qui ont été introduites après l'entrée en vigueur des dispositions relatives à l'avis conforme du Conseil supérieur de la politique de réparation et que cette obligation a, en vertu de l'article 149, § 1er, de ce même décret, une portée générale ? ». (...) III. En droit (...) En ce qui concerne la première question préjudicielle B.1.1. Le juge a quo demande si l'article 146, alinéa 4, du décret de la Région flamande du 18 mai 1999 portant organisation de l'aménagement du territoire (ci-après : décret relatif à l'aménagement du territoire 1999), interprété en ce sens que les « zones agricoles d'intérêt paysager » sont comprises dans les « zones agricoles à valeur particulière », viole les articles 10 et 11 ou les articles 12, alinéa 2, et 14 de la Constitution, combinés ou non avec l'article 7 de la Convention européenne des droits de l'homme et avec l'article 15 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, en ce que, lorsqu'il est lu en combinaison avec l'article 145bis du même décret, certains travaux, actes ou modifications effectués dans une même zone ne sont pas appréciés de manière uniforme, parce que - selon la réglementation applicable - une même zone est considérée tantôt comme vulnérable, tantôt comme non vulnérable du point de vue spatial.
B.1.2. La question préjudicielle est fondée en particulier sur le constat que les énumérations des zones vulnérables du point de vue spatial figurant à l'article 145bis, § 1er, alinéa 4, d'une part, et à l'article 146, alinéa 4, d'autre part, ne sont plus identiques, à la suite de la suppression par l'article 3 du décret du 22 avril 2005 - dans la première disposition uniquement - des mots « zones agricoles à valeur particulière ».
B.2. Dans son arrêt n° 81/2006 du 17 mai 2006, la Cour a répondu comme suit à une question préjudicielle relative à l'article 146, alinéas 3 et 4, du décret relatif à l'aménagement du territoire 1999 : « B.1. L'article 146, alinéas 3 et 4, du décret de la Région flamande du 18 mai 1999 ' portant organisation de l'aménagement du territoire ', tel qu'il a été inséré par l'article 7 du décret du 4 juin 2003 ' modifiant le décret du 18 mai 1999 portant organisation de l'aménagement du territoire en ce qui concerne la politique de maintien ', modifié par l'article 46, 3°, du décret du 21 novembre 2003, et tel qu'il a été partiellement annulé par l'arrêt de la Cour n° 14/2005 du 19 janvier 2005, énonce : ' La sanction pour la [persistance] d'infractions visées à l'alinéa premier, 1°, 2°, 3°, 6° et 7°, ne s'applique pas pour autant que les opérations, travaux, modifications ou l'utilisation contraire ne sont pas situés dans les zones vulnérables du point vue spatial. Par zones vulnérables du point vue spatial, il faut entendre les zones vertes, les zones naturelles, les zones naturelles à valeur scientifique, les réserves naturelles, les zones de développement naturelles, les zones de parc, les zones forestières, les zones de vallées et de sources, les zones agricoles à valeur ou intérêt écologique, les zones agricoles à valeur particulière, les grandes entités naturelles, les grandes entités naturelles en développement et les zones y comparables, désignées sur les plans d'exécution spatiaux ou les plans d'aménagement, ainsi que les zones dunaires protégées et les zones dunaires à intérêt agricole, désignées en vertu du décret du 14 juillet 1993 portant les mesures de protection des dunes côtières '.
B.2. Le juge a quo demande si cette disposition est compatible avec les articles 12, alinéa 2, et 14 de la Constitution, si elle est interprétée ' en ce sens qu' [elle] ne trouve pas à s'appliquer aux zones que les plans d'exécution spatiaux ou les plans d'aménagement désignent comme " zones agricoles d'intérêt paysager ", parce que ces zones doivent être réputées " zones agricoles à valeur particulière " et, dès lors, " zones vulnérables " '. [...] B.5.1. L'article 146, alinéa 3, du décret du 18 mai 1999 prévoit dans quel cas la persistance d'une infraction en matière d'urbanisme est punissable.
B.5.2. Pour les motifs exprimés par la Cour dans ses arrêts nos 136/2004 et 14/2005, le caractère punissable de la persistance d'une infraction en matière d'urbanisme, lorsque l'infraction est commise dans une zone vulnérable du point de vue spatial, satisfait aux exigences de précision, de clarté et de prévisibilité auxquelles doivent répondre les lois pénales.
B.5.3. Toutefois, en l'espèce, le juge a quo s'interroge, non pas sur la constitutionnalité du caractère punissable d'une infraction en matière d'urbanisme dans une zone vulnérable d'un point de vue spatial, mais bien sur la compatibilité de l'article 146, alinéas 3 et 4, avec les articles 12, alinéa 2, et 14, de la Constitution s'il est interprété, conformément à la jurisprudence (Cass. 22 février 2005, R.G. n° P.04.1346.N, www.cass.be; Cass. 13 septembre 2005, R.G. n° P.05.0479.N, www.cass.be), comme s'appliquant aux ' zones agricoles d'intérêt paysager ' en tant que ' zones agricoles à valeur particulière '.
B.6.1. Les travaux préparatoires du décret du 4 juin 2003, qui a inséré l'alinéa 4 litigieux dans le décret du 18 mai 1999, font apparaître que le législateur décrétal n'entendait pas supprimer la persistance d'une infraction en matière d'urbanisme comme délit continu lorsque l'infraction était commise dans une zone vulnérable du point de vue spatial (Doc. parl., Parlement flamand, 2002-2003, n° 1566/1, p. 9). Selon l'auteur de la proposition de décret, la prescription de l'action publique n'est pas applicable dans les zones prioritaires. ' Ces zones vulnérables sont entre-temps suffisamment connues, car ce n'est pas la première fois que cette notion est utilisée '. En outre, l'auteur de la proposition conclut que ' dans la majorité des cas, la règle de la prescription des infractions en matière d'urbanisme est applicable ' (Doc. parl., Parlement flamand, 2002-2003, n° 1566/7, p. 19).
B.6.2. Les ' zones d'intérêt paysager ' sont des zones rurales désignées dans les plans de secteur qui ont reçu, en surimpression, l'indication supplémentaire ' zones d'intérêt paysager ' (article 2 de l'arrêté royal du 28 décembre 1972 relatif à la présentation et à la mise en oeuvre des projets de plans et des plans de secteur).
Les zones agricoles sont destinées à l'agriculture au sens général du terme (article 11.4.1 de l'arrêté royal précité). Les zones agricoles d'intérêt paysager sont des zones agricoles soumises à certaines restrictions en vue de la sauvegarde ou de la formation du paysage.
Dans ces zones peuvent être accomplis tous les actes et travaux correspondant à la destination donnée par ' la teinte de fond ' pour autant qu'ils ne mettent pas en péril la valeur esthétique du paysage (article 15.4.6.1 de l'arrêté royal précité).
La jurisprudence a dès lors pu conclure que ces zones, qui sont désignées avec précision dans les plans de secteur, doivent être considérées comme des ' zones agricoles à valeur particulière ' qui sont ' désignées sur les plans d'exécution spatiaux ou les plans d'aménagement ', au sens de l'article 146, alinéa 4, litigieux du décret portant organisation de l'aménagement du territoire.
B.6.3. En tant qu'il est interprété en ce sens que les ' zones agricoles d'intérêt paysager ' relèvent des ' zones agricoles à valeur particulière ', l'article 146, alinéa 4, litigieux satisfait aux exigences du principe de légalité en matière pénale.
B.7. La question préjudicielle appelle une réponse négative ».
B.3. Le juge a quo demande à présent si l'article 146, alinéa 4, en cause, est compatible avec le principe de légalité en matière pénale et avec le principe d'égalité et de non-discrimination si cette disposition est combinée avec l'article 145bis du même décret.
B.4.1. L'article 145bis, § 1er, du décret relatif à l'aménagement du territoire 1999 a été inséré par le décret du 13 juillet 2001 « modifiant le décret du 18 mai 1999 portant l'organisation de l'aménagement du territoire et [le] décret relatif à l'aménagement du territoire, coordonné le 22 octobre 1996 » (Moniteur belge du 3 août 2001) et énonçait à l'origine : « Pour autant qu'il ait été répondu aux conditions fixées dans le présent paragraphe, les prescriptions d'affectation en vigueur des plans de secteur et des plans généraux d'aménagement ne constituent en soi aucune base de refus lors de l'évaluation, par l'autorité délivrant les autorisations, des demandes d'obtention d'une autorisation urbanistique relative à des bâtiments existants.Cette disposition exceptionnelle ne vaut que lorsque la demande a trait : [...] Les possibilités, mentionnées au premier alinéa, 1° à 6°, ne valent pas pour les zones de récréation et pour les zones vulnérables du point de vue spatial, sauf les zones de parc. Par zones vulnérables du point de vue spatial, il faut entendre les zones vertes, les zones naturelles, les zones naturelles à valeur scientifique, les réserves naturelles, les zones de développement naturelles, les zones de parc, les zones forestières, les zones de vallées et de sources, les zones agricoles à valeur ou intérêt écologique, les zones agricoles à valeur particulière, les grandes entités naturelles, les grandes entités naturelles en développement et les zones y comparables, désignées sur les plans d'aménagement, ainsi que les zones dunaires protégées et les zones dunaires à intérêt agricole, désignées en vertu du décret du 14 juillet 1993 portant les mesures de protection des dunes côtières. Par zones de récréation, il faut entendre, les zones de récréation d'un jour, les zones de récréation résidentielle et les zones y comparables, désignées sur les plans d'aménagement ».
B.4.2. L'article 3 du décret du 22 avril 2005 « modifiant le décret du 18 mai 1999 portant organisation de l'aménagement du territoire et [le] décret relatif à l'aménagement du territoire coordonné le 22 octobre 1996 » (Moniteur belge du 29 avril 2005) a modifié l'énumération des « zones vulnérables du point de vue spatial » : les mots « zones agricoles à valeur particulière » ont été supprimés.
Dans les travaux préparatoires, cette modification a été commentée comme suit : « Dans plusieurs arrêts récents de diverses cours d'appel, les zones agricoles d'intérêt paysager sont considérées comme ' zones agricoles à valeur particulière ' et par conséquent comme ' zones vulnérables du point de vue spatial '. Si cette vision est maintenue, cela implique que, dans ces zones agricoles d'intérêt paysager, les bâtiments, habitations et constructions non conformes à la destination de la zone ne peuvent être transformés que s'ils respectent le volume de construction existant. La reconstruction est alors impossible et l'extension d'habitations non conformes à la destination de la zone devient également impossible. Telle n'a toutefois jamais été l'intention du Parlement flamand lorsqu'il a adapté, en 2001 et 2002, la règlementation relative à ces habitations et constructions.
L'administration elle non plus n'a jamais interprété la réglementation de manière aussi stricte. La modification décrétale proposée entend dès lors préciser que la zone agricole d'intérêt paysager n'est pas une zone vulnérable du point de vue spatial pour l'application des régimes d'exception en matière de constructions non conformes à la destination de la zone. Cet éclaircissement s'opère en supprimant le terme ' zones agricoles à valeur particulière ' dans la liste (voy. en la matière également l'avis du Conseil d'Etat). Il en résulte une liste limitative de zones d'affectation qui figurent toutes effectivement dans l'arrêté royal du 28 décembre 1972 relatif aux plans de secteur, ou comme prescription particulière dans les plans de secteur spécifiques (il convient d'observer à cet égard que, depuis 2002, il n'est plus procédé à des modifications de plan de secteur, ce qui signifie que l'on n'ajoute plus de nouvelles catégories d'affectation au plan de secteur et qu'il n'y a aucun problème d'interprétation » (Doc. parl., Parlement flamand, 2004-2005, n° 233/1, p. 6).
Par suite de la suppression - à l'article 145bis, § 1er, alinéa 4 - des mots « zones agricoles à valeur particulière », l'énumération des zones vulnérables du point de vue spatial figurant à l'article 145bis, § 1er, alinéa 4, d'une part, et celle figurant à l'article 146, alinéa 4, d'autre part, ne sont plus identiques.
B.4.3. La Cour doit examiner si cette différence de rédaction entre les deux dispositions précitées viole le principe de légalité en matière pénale, d'une part, et le principe d'égalité et de non-discrimination, d'autre part.
B.4.4. La lecture combinée des deux dispositions précitées n'a pas pour effet de priver l'article 146, alinéa 4, du caractère précis, clair et prévisible que doivent présenter les lois pénales.
Par conséquent, le dispositif de l'arrêt précité n° 81/2006 du 17 mai 2006, selon lequel l'article 146, alinéa 4, du décret relatif à l'aménagement du territoire 1999, inséré par l'article 7 du décret du 4 juin 2003 « modifiant le décret du 18 mai 1999 portant organisation de l'aménagement du territoire en ce qui concerne la politique de maintien », ne viole pas les articles 12, alinéa 2, et 14 de la Constitution, est également valable en l'espèce.
B.4.5. Dans l'exposé des motifs du projet devenu le décret du 22 avril 2005, il est précisé : « L'on peut se demander quelles sont les conséquences de cette modification décrétale [à savoir la suppression des mots ' zones agricoles à valeur particulière '] sur les arrêts précités des cours d'appel qui ont déjà été rendus. Elles semblent inexistantes et ne requièrent aucun régime transitoire. En effet, ces arrêts ont été rendus dans le cadre de la poursuite d'infractions en matière d'urbanisme (article 146) et non dans le cadre de l'application du régime dérogatoire relatif aux bâtiments non conformes à la destination de la zone (article 145bis ). A l'article 146, il n'est actuellement proposé aucune modification parce que, pour l'article 146, une solution plus fondamentale doit être élaborée, par suite de la décision de la Cour d'arbitrage à ce sujet.
De manière plus générale, il convient de souligner que l'actuelle modification interprétative de l'article 145bis (régime des habitations non conformes à la zone) n'est pas liée à la liste des zones vulnérables de l'article 146 (maintien). Il convient d'examiner séparément quelles zones doivent être considérées comme zones vulnérables dans le cadre du maintien » (Doc. parl., Parlement flamand, 2004-2005, n° 266/1, pp. 6-7).
B.4.6. Il ressort de ce commentaire que le législateur décrétal, en modifiant l'énumération de l'article 145bis, était conscient qu'il établissait une distinction entre les champs d'application respectifs de l'article 146, alinéa 4, et de l'article 145bis.
B.4.7. L'article 145bis figure au chapitre IV - « Sécurité juridique en matière d'habitations et bâtiments autorisés situés en dehors de la zone d'affectation appropriée » du titre IV - « Dispositions diverses », du décret relatif à l'aménagement du territoire 1999.
En adoptant les articles 145 à 145quater, le législateur décrétal vise à « offrir une sécurité juridique pour les entreprises étrangères à la zone » (Doc. parl., Parlement flamand, 2001-2002, n° 1203/1, p. 2).
Ces dispositions concernent l'obtention d'un permis d'urbanisme en ce qui concerne les bâtiments ou constructions existants et les conditions de délivrance du permis.
B.4.8. L'article 146, alinéa 4, figure au chapitre I - « Dispositions pénales » du titre V - « Mesures conservatoires » du décret relatif à l'aménagement du territoire 1999.
Cette disposition sanctionne notamment la poursuite ou le maintien d'opérations, de travaux ou de modifications, soit sans permis préalable, soit en contradiction, notamment, avec le permis, avec un plan d'exécution spatial ou avec les permis de bâtir et de lotir.
B.4.9. Il résulte de ce qui précède que la différence de traitement précitée n'est pas dépourvue de justification raisonnable.
B.5. La première question préjudicielle appelle une réponse négative.
En ce qui concerne la seconde question préjudicielle B.6. La seconde question préjudicielle porte sur la compatibilité de l'article 198bis du décret relatif à l'aménagement du territoire 1999, combiné avec l'article 149, § 1er, du même décret, avec les articles 10 et 11 de la Constitution, en ce qu'il résulte de cette disposition que, pour les actions en réparation intentées avant l'entrée en vigueur des dispositions relatives à l'avis conforme du Conseil supérieur de la politique de réparation le 16 décembre 2005 mais sur lesquelles le juge ne statue qu'à partir du 16 décembre 2005, l'obligation de demander l'avis du Conseil supérieur de la politique de réparation n'est pas d'application, alors que cette obligation existe pour les actions en réparation intentées à partir du 16 décembre 2005.
B.7. L'article 198bis en cause du décret relatif à l'aménagement du territoire 1999 est une disposition transitoire.
Conformément à l'alinéa 1er de cette disposition, l'article 149, § 1er, alinéa 1er, du décret relatif à l'aménagement du territoire 1999 entre en vigueur après la création du Conseil supérieur de la politique de réparation et après l'approbation du règlement d'ordre intérieur de cet organe. A partir de cette date, l'avis du Conseil supérieur est requis pour les actions en réparation intentées par un inspecteur urbaniste ou par le collège des bourgmestre et échevins.
L'alinéa 2 de cette disposition porte sur les actions en réparation qui avaient déjà été intentées au moment où l'article 149, § 1er, alinéa 1er, précité est entré en vigueur et qui n'avaient dès lors pas encore été soumises pour avis au Conseil supérieur de la politique de réparation. Dans l'interprétation du juge a quo, le juge peut encore soumettre ces actions au Conseil supérieur de la politique de réparation, quelle que soit la date à laquelle elles ont été intentées.
B.8. Au cours des travaux préparatoires, la disposition en cause a été justifiée comme suit : « Quelques dispositions transitoires avaient été oubliées.
Le nouvel article 198bis prévoit deux mesures transitoires : - en premier lieu, le Conseil supérieur ne peut évidemment émettre un avis conforme tant qu'il n'a pas été créé et que son règlement d'ordre intérieur n'a pas été approuvé; - pour les actions pendantes, qui n'ont pas encore fait l'objet d'un jugement ou d'un arrêt, le juge peut décider souverainement de demander ou non l'avis du Conseil supérieur de la politique de réparation » (Doc. parl., Parlement flamand, 2002-2003, n° 1566/5, p. 6).
B.9. La disposition en cause permet dès lors au Conseil supérieur de la politique de réparation de se prononcer, lorsque le juge l'y invite, sur des actions en réparation qui avaient déjà été intentées au moment où l'article 149, § 1er, alinéa 1er, du décret relatif à l'aménagement du territoire 1999 est entré en vigueur.
B.10. L'article 149, § 1er, alinéa 1er, du décret relatif à l'aménagement du territoire 1999, tel qu'il a été partiellement annulé par l'arrêt n° 14/2005 du 19 janvier 2005, énonce : « Outre la peine, le tribunal peut ordonner de remettre le lieu en son état initial ou de cesser l'utilisation contraire, et/ou d'exécuter des travaux de construction ou d'adaptation et/ou de payer une amende égale à la plus-value acquise par le bien suite à l'infraction. Ceci se fait sur requête de l'inspecteur urbaniste, ou du Collège des bourgmestre et échevins de la commune sur le territoire de laquelle les travaux, opérations ou modifications visés à l'article 146 ont été exécutés. Lorsque ces infractions datent d' [...], un avis conforme préalable du Conseil supérieur de la Politique de Réparation est requis ».
B.11.1. La possibilité offerte au juge par la disposition en cause de demander encore l'avis du Conseil supérieur de la politique de réparation est dictée par les mêmes motifs que ceux qui ont été à la base de l'article 149, § 1er, alinéa 1er, du décret relatif à l'aménagement du territoire 1999, notamment la cohérence de la politique de réparation.
Il relève du pouvoir d'appréciation du législateur décrétal, en matière d'aménagement du territoire, de confier le choix de la mesure de réparation à l'autorité qu'il estime la plus appropriée. Il doit toutefois, ce faisant, respecter les articles 10 et 11 de la Constitution.
B.11.2. Même si l'on peut admettre que le législateur décrétal ait jugé qu'il était nécessaire, dans le cadre d'une politique de réparation cohérente, de faire précéder l'action en réparation d'un avis du Conseil supérieur de la politique de réparation, il va de soi que le juge ne pourra demander cet avis qu'à partir du moment où le Conseil supérieur aura effectivement été organisé. La nouvelle réglementation relative à l'avis préalable ne peut entrer en vigueur qu'au moment où le Conseil supérieur a été créé et où le règlement d'ordre intérieur de cet organe a été approuvé.
B.11.3. Si le législateur décrétal estime qu'un changement de politique s'impose, il peut en outre décider de lui donner un effet immédiat et, en principe, il n'est pas tenu de prévoir un régime transitoire. Les articles 10 et 11 de la Constitution ne sont violés que si la règle transitoire entraîne une différence de traitement insusceptible de justification raisonnable.
B.11.4. Ainsi, le législateur décrétal, en conformité avec ses objectifs originaires, à savoir la sauvegarde d'un bon aménagement du territoire, pouvait choisir de laisser intact le droit d'action de l'inspecteur urbaniste ou du collège des bourgmestre et échevins.
Il participe de la nature de la modification décrétale qu'aucun avis préalable ne peut être demandé pour les actions intentées avant le 16 décembre 2005. Lorsque, pour les actions en réparation introduites avant le 16 décembre 2005 mais traitées quant au fond par le juge pénal après le 16 décembre 2005, le juge pénal a encore la possibilité de demander un avis au Conseil supérieur, il est raisonnablement justifié que cet avis ne soit ni préalable ni obligatoire. D'abord, cet avis ne peut être délivré au préalable et, ensuite, une décision quant à l'opportunité d'une action n'a plus de raison d'être puisque l'action est déjà pendante et qu'en outre, cet examen est réputé avoir été effectué par l'administration requérante.
B.11.5. Il convient d'observer, par ailleurs, que l'article 198bis du décret relatif à l'aménagement du territoire 1999 poursuit également un objectif procédural. Le juge devra mettre en balance la possibilité de demander l'avis et la nécessité de recueillir cet avis afin de pouvoir trancher le litige concret.
B.12. La seconde question préjudicielle appelle une réponse négative.
Par ces motifs, la Cour dit pour droit : - L'article 146, alinéa 4, du décret de la Région flamande du 18 mai 1999 portant organisation de l'aménagement du territoire, combiné avec l'article 145bis du même décret, ne viole ni les articles 10 et 11 ni les articles 12 et 14 de la Constitution, combinés ou non avec l'article 7 de la Convention européenne des droits de l'homme et avec l'article 15 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques. - L'article 198bis du décret de la Région flamande du 18 mai 1999 portant organisation de l'aménagement du territoire, tel qu'il a été inséré par l'article 11 du décret du 4 juin 2003, ne viole pas les articles 10 et 11 de la Constitution.
Ainsi prononcé en langue néerlandaise et en langue française, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989, à l'audience publique du 18 décembre 2008.
Le greffier, P.-Y. Dutilleux.
Le président, M. Bossuyt.