publié le 10 janvier 2006
Extrait de l'arrêt n° 162/2005 du 9 novembre 2005 Numéros du rôle : 3482 En cause : la question préjudicielle relative à l'article 161bis, §§ 1 er et 2, de la Nouvelle loi communale, posée par le Tribunal de première in La Cour d'arbitrage, composée des présidents A. Arts et M. Melchior, et des juges R. Henneuse, E(...)
Extrait de l'arrêt n° 162/2005 du 9 novembre 2005 Numéros du rôle : 3482 En cause : la question préjudicielle relative à l'article 161bis, §§ 1er et 2, de la Nouvelle loi communale, posée par le Tribunal de première instance de Bruxelles.
La Cour d'arbitrage, composée des présidents A. Arts et M. Melchior, et des juges R. Henneuse, E. De Groot, L. Lavrysen, J.-P. Snappe et E. Derycke, assistée du greffier P.-Y. Dutilleux, présidée par le président A. Arts, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet de la question préjudicielle et procédure Par jugement du 4 février 2005 en cause de la s.c.r.l. « Provinciale Brabantse Energiemaatschappij » contre l'Office national de sécurité sociale des administrations provinciales et locales, dont l'expédition est parvenue au greffe de la Cour d'arbitrage le 15 février 2005, le Tribunal de première instance de Bruxelles a posé la question préjudicielle suivante : « L'article 161bis, §§ 1er et 2, de la Nouvelle loi communale viole-t-il les articles 10 et 11 de la Constitution coordonnée en ce que les administrations qui ne sont pas affiliées à l'Office national de sécurité sociale des administrations provinciales et locales en matière de pension et vers lesquelles est transféré du personnel d'une administration restructurée ou supprimée qui est, elle, affiliée à l'Office national de sécurité sociale des administrations provinciales et locales se voient imposer les obligations suivantes : a) à l'article 161 [lire : 161bis ], § 1er, de la Nouvelle loi communale : contribuer à la charge des pensions de retraite et de survie du personnel de l'administration cédante qui a déjà été pensionné avant la restructuration/suppression de l'administration restructurée/supprimée, et ce pour un montant égal à la totalité des pensions de retraite et de survie payées l'année précédente, rapporté à la part que représente la masse salariale du personnel transféré dans la masse salariale globale de l'administration supprimée ou restructurée au moment de sa suppression ou de sa restructuration;b) à l'article 161 [lire : 161bis ], § 2, de la Nouvelle loi communale : (1) dans l'interprétation selon laquelle les dispositions de la ' loi du 14 juillet [lire : avril] 1965 établissant certaines relations entre les divers régimes de pension du secteur public ' n'ont pas d'application pour ce qui concerne le remboursement des quote-parts de pension par l'Office national de sécurité sociale des administrations provinciales et locales : lors de la mise à la pension des membres du personnel actifs transférés, prendre en charge les quotes-parts de pension, conformément à la loi du 14 juillet [lire : avril] 1965, en ce qui concerne la période pendant laquelle le membre du personnel a accompli des services pour l'administration cédante qui était affiliée à l'Office national de sécurité sociale des administrations provinciales et locales;(2) dans l'interprétation selon laquelle les dispositions de la ' loi du 14 juillet [lire : avril] 1965 établissant certaines relations entre les divers régimes de pension du secteur public ' conservent leur plein effet pour ce qui concerne le remboursement des quotes-parts de pension par l'Office national de sécurité sociale des administrations provinciales et locales : lors de la mise à la pension des membres du personnel actifs transférés, prendre en charge les quotes-parts de pension, conformément à la loi du 14 juillet [lire : avril] 1965, pour ce qui concerne la période pendant laquelle le membre du personnel a accompli des services pour l'administration cédante qui était affiliée à l'Office national de sécurité sociale des administrations provinciales et locales, mais avec la possibilité de réclamer le remboursement de ces quotes-parts à l'Office national de sécurité sociale des administrations provinciales et locales, conformément aux articles 13 et 14 de la loi du 14 juillet 1965 [lire : avril]; et ce par dérogation à la réglementation générale prévue par ' la loi du 14 juillet [lire : avril] 1965 établissant certaines relations entre les divers régimes de pension du secteur public ', qui demeure applicable aux : - administrations non affiliées à l'Office national de sécurité sociale des administrations provinciales et locales qui reprennent du personnel d'une administration restructurée ou supprimée, non affiliée à l'Office national de sécurité sociale des administrations provinciales et locales; - administrations non affiliées à l'Office national de sécurité sociale des administrations provinciales et locales qui reprennent du personnel d'une administration qui est affiliée à l'Office national de sécurité sociale des administrations provinciales et locales mais qui n'est pas restructurée ou supprimée; - administrations affiliées à l'Office national de sécurité sociale des administrations provinciales et locales qui reprennent du personnel d'une administration également affiliée qui est restructurée ou supprimée, lesquelles ne doivent pas contribuer au paiement des personnes déjà pensionnées au moment de la reprise et n'ont pas d'obligations complémentaires pour ce qui concerne le paiement des futures pensions des membres du personnel transférés ? ». (...) III. En droit (...) En ce qui concerne la disposition litigieuse B.1.l. La loi du 14 avril 1965Documents pertinents retrouvés type loi prom. 14/04/1965 pub. 18/07/2012 numac 2012000418 source service public federal interieur Loi établissant certaines relations entre les divers régimes de pensions du secteur public. - Coordination officieuse en langue allemande fermer « établissant certaines relations entre les divers régimes de pension du secteur public » règle le paiement de la pension et la répartition de la charge de pension d'une personne qui a travaillé pour plusieurs services publics et a été soumise à leurs régimes de pension respectifs.
L'article 3 de cette loi énonce : « La pension de retraite unique est accordée et payée par le pouvoir ou l'organisme qui gère le régime de pension de retraite auquel l'agent a été soumis en dernier lieu. Les dispositions régissant l'octroi et le calcul des pensions de retraite liquidées par ce pouvoir ou organisme sont applicables à cette pension. Toutefois, les services du chef desquels l'agent a été soumis à un régime géré par d'autres pouvoirs ou organismes sont pris en considération à raison d'un soixantième, par année de service, du montant qui sert de base au calcul de la pension. » S'agissant des obligations des divers organismes et services publics, les articles 13 et 14 de cette même loi énoncent : «
Art. 13.§ 1er. Le montant brut de la pension de retraite unique prévue par l'article 2, compte tenu des services militaires, des services coloniaux et des bonifications de toute nature, ou le montant brut de la pension de survie unique prévue par l'article 7 est réparti entre les différents pouvoirs et organismes intéressés proportionnellement au produit des éléments ci-après, propres aux fonctions exercées de part et d'autre : 1° la durée des services et périodes admissibles sans qu'il y ait lieu à l'application de la réduction de temps prévue à l'article 4, alinéas 2 et 4, ou à l'article 9, alinéa 2;2° le dernier traitement d'activité dûment transposé dans les barèmes en vigueur à la date de prise de cours de la pension ou à la date à laquelle la révision produit ses effets;3° en ce qui concerne les pensions de retraite seulement, les tantièmes utilisés pour le calcul de la pension. Si pour la fixation du montant de la pension unique, il a été fait application de la réduction de temps prévue par l'article 2 de l'arrêté royal n° 206 du 29 août 1983 précité, la durée des services et périodes visée à l'alinéa 1er, 1°, est établie conformément aux dispositions de l'article 2 de cet arrêté tandis que le dernier traitement d'activité visé à l'alinéa 1er, 2°, est, pour chaque fonction, celui prévu à l'article 3 de ce même arrêté. [...]
Art. 14.Chaque pouvoir ou organisme rembourse annuellement la quote-part mise à sa charge au pouvoir ou à l'organisme qui paie la pension. Pour les pensions de retraite uniques à charge du Trésor public, ce remboursement est opéré au profit du Fonds des pensions de survie.
Les quantums des quotes-parts respectives ne sont pas sujets à modification ultérieure, sauf en cas de révision de la pension unique découlant de modifications apportées aux éléments qui interviennent dans la répartition conformément aux 1° et 3° de l'article 13 ».
B.1.2. En vertu du régime précité, le dernier organisme pour lequel le membre du personnel a travaillé paie donc la pension, mais il peut demander le remboursement d'une partie de ce montant aux diverses instances concernées en proportion de la durée de la période pendant laquelle le membre du personnel a travaillé pour elles.
B.1.3. L'article 161bis de la Nouvelle loi communale déroge cependant à cette réglementation.
Inséré par l'article 75 de la loi du 30 décembre 1992Documents pertinents retrouvés type loi prom. 30/12/1992 pub. 18/06/2012 numac 2012000355 source service public federal interieur Loi portant des dispositions sociales et diverses. - Coordination officieuse en langue allemande d'extraits fermer « portant des dispositions sociales et diverses », cet article dispose : « § 1er. Lorsque, à la suite de la restructuration ou de la suppression d'une administration locale qui, en matière de pension, est affiliée à l'Office national de sécurité sociale des administrations provinciales et locales, du personnel de cette administration est transféré vers une ou plusieurs autres administrations locales qui ne participent pas au régime de pension commun des pouvoirs locaux, ces autres administrations sont, à partir de la date de la restructuration ou de la suppression, tenues de contribuer à la charge des pensions de retraite des membres du personnel de l'administration locale restructurée ou supprimée qui ont été pensionnés en cette qualité avant sa restructuration ou sa suppression. Il en est de même en ce qui concerne la charge des pensions de survie des ayants droit des membres du personnel précités ou des membres du personnel de ces organismes qui sont décédés avant la restructuration ou la suppression de ceux-ci.
La contribution de cette ou de chacune de ces autres administrations est fixée chaque année par l'administration des pensions. Cette contribution est égale au montant obtenu en multipliant la charge des pensions de retraite et de survie visées à l'alinéa 1er et payées au cours de l'année précédente, par un coefficient qui est égal à la proportion que la masse salariale du personnel transféré à l'autre administration représente par rapport à la masse salariale globale de l'administration locale au moment de sa restructuration ou de sa suppression. Pour l'application du présent alinéa, seuls les traitements du personnel bénéficiant d'une nomination définitive sont pris en compte. Le coefficient précité est fixé par l'Office national de sécurité sociale des administrations provinciales et locales compte tenu des masses salariales respectives à la date du transfert de personnel. § 2. Si des services accomplis auprès d'une administration locale qui a fait l'objet d'une restructuration ou a été supprimée, sont pris en considération dans une pension de retraite ou de survie ou dans une quote-part de pension de retraite ou de survie à charge du Trésor public ou payée par celui-ci, la pension ou quote-part de pension de l'agent transféré et afférente à ces services est, à partir de la date de prise de cours de la pension, à charge de l'administration vers laquelle cet agent a été transféré. En cas de quote-part de pension, celle-ci est calculée conformément aux dispositions de la loi du 14 avril 1965Documents pertinents retrouvés type loi prom. 14/04/1965 pub. 18/07/2012 numac 2012000418 source service public federal interieur Loi établissant certaines relations entre les divers régimes de pensions du secteur public. - Coordination officieuse en langue allemande fermer établissant certaines relations entre les divers régimes de pension du secteur public. § 3. Afin de permettre l'application des dispositions contenues dans le § 1er, les administrations locales qui succèdent aux droits et obligations de l'administration locale restructurée ou supprimée, sont tenues de communiquer à l'Office national de sécurité sociale des administrations provinciales et locales une liste nominative des agents transférés. Cette communication doit intervenir au plus tard dans les deux mois qui suivent la date de transfert du personnel. § 4. Les dispositions du § 1er s'appliquent uniquement aux administrations locales qui ont fait l'objet d'une restructuration ou d'une suppression à partir du 1er janvier 1993 ».
B.1.4. Les associations de communes se trouvent dans la même situation que les communes s'agissant de l'éventuelle affiliation à l'Office national de sécurité sociale des administrations provinciales et locales (ci-après O.N.S.S.A.P.L.) et de la récupération des sommes dues à cette institution (article 11, alinéa 4, de la loi du 25 avril 1933 « relative à la pension du personnel communal »).
Conformément à l'article 58 de la loi-programme du 24 décembre 1993, l'article 161bis, § 2, de la Nouvelle loi communale est applicable, à partir du 1er janvier 1994, aux intercommunales qui, au 31 décembre 1986, étaient affiliées à la Caisse de répartition des pensions communales et qui, au 31 décembre 1993, n'étaient pas, en matière de pensions, affiliées à l'O.N.S.S.A.P.L. B.1.5. Enfin, l'article 14 de la loi du 6 août 1993Documents pertinents retrouvés type loi prom. 06/08/1993 pub. 18/12/1998 numac 1998015163 source ministere des affaires etrangeres, du commerce exterieur et de la cooperation au developpement Loi portant assentiment à la Convention n° 148 concernant la protection des travailleurs contre les risques professionnels dus à la pollution de l'air, au bruit et aux vibrations sur les lieux de travail, adoptée à Genève le 20 juin 1977 par la Conférence internationale du travail lors de sa soixante-troisième session type loi prom. 06/08/1993 pub. 04/06/2015 numac 2015000253 source service public federal interieur Loi portant approbation et exécution de la Convention internationale portant création d'un fonds international d'indemnisation pour les dommages dus à la pollution par les hydrocarbures, faite à Bruxelles le 18 décembre 1971, et portant exécution des Protocoles à cette Convention, faits à Londres le 27 novembre 1992 et le 16 mai 2003. - Coordination officieuse en langue allemande fermer « relative aux pensions du personnel nommé des administrations locales » prévoit un régime comparable à celui de la disposition litigieuse lorsque le personnel d'une administration locale affiliée à l'O.N.S.S.A.P.L. est transféré vers un ou plusieurs employeurs privés ou publics qui ne peuvent pas participer au régime commun de pension des pouvoirs locaux.
En ce qui concerne la recevabilité de l'intervention B.2.1. Selon le Conseil des Ministres, le mémoire de la « West-Vlaamse Energie- en Teledistributiemaatschappij » (ci-après la W.V.E.M.) est irrecevable au motif que cette partie ne justifierait pas de l'intérêt requis.
B.2.2. La W.V.E.M., qui n'est pas affiliée à l'O.N.S.S.A.P.L., a repris la branche télévision câblée - ainsi que les membres du personnel nommés à titre définitif relevant de ce secteur économique - de l'intercommunale HAVI-TV, qui est quant à elle affiliée, pour ses obligations en matière de pension, au régime commun de pension des pouvoirs locaux. L'O.N.S.S.A.P.L. demande, en vertu de la disposition litigieuse, que la W.V.E.M. contribue annuellement aux charges des pensions de retraite des membres du personnel de l'intercommunale HAVI-TV qui étaient pensionnés avant la reprise, et que la W.V.E.M. reprenne la pension ou la part de pension du personnel transféré. La W.V.E.M. conteste cette action. Bien que la W.V.E.M. ne soit pas partie devant le juge a quo, il apparaît que cette société justifie d'un intérêt suffisant pour intervenir dans une affaire qui porte sur la constitutionnalité d'une disposition en vertu de laquelle l'O.N.S.S.A.P.L. intente une action contre elle.
La W.V.E.M. a par ailleurs fait parvenir au greffe de la Cour un extrait de la décision de son organe compétent dont il apparaît qu'il a été décidé dans les délais d'intervenir dans la procédure et par laquelle un conseiller a été désigné pour la représenter. Le mémoire en intervention et le mémoire en réponse de la W.V.E.M. sont dès lors recevables.
Quant au fond B.3.1. Le juge a quo demande si l'article 161bis, §§ 1er et 2, de la Nouvelle loi communale est compatible avec le principe constitutionnel d'égalité et de non-discrimination.
La question préjudicielle invite à comparer, d'une part, des administrations qui ne sont pas affiliées à l'O.N.S.S.A.P.L. et qui reprennent du personnel d'une administration affiliée à l'O.N.S.S.A.P.L. qui est restructurée ou supprimée et, d'autre part, (1) des administrations qui ne sont pas affiliées à l'O.N.S.S.A.P.L. et qui reprennent du personnel d'une autre administration non affiliée à l'O.N.S.S.A.P.L., (2) des administrations qui ne sont pas affiliées à l'O.N.S.S.A.P.L. et qui reprennent du personnel d'une administration affiliée à l'O.N.S.S.A.P.L. mais qui n'est pas restructurée ou supprimée et (3) des administrations affiliées à l'O.N.S.S.A.P.L. qui reprennent du personnel d'une administration également affiliée à l'O.N.S.S.A.P.L. qui est restructurée ou supprimée. Dans les trois dernières hypothèses précitées, les administrations ne doivent pas contribuer au paiement de la pension des membres du personnel déjà pensionnés et n'ont pas d'obligations supplémentaires s'agissant des futures pensions des membres du personnel transférés, alors que les administrations locales qui ne sont pas affiliées à l'O.N.S.S.A.P.L. et qui, dans le cadre d'une restructuration ou d'une suppression, reprennent du personnel d'une administration locale affiliée à l'O.N.S.S.A.P.L. assument la totalité de la charge de pension en proportion de la part de la masse salariale reprise (article 161bis, § 1er, de la Nouvelle loi communale), et, pour les futures pensions du personnel transféré, doivent reprendre la part de pension qui, conformément à la loi du 14 avril 1965Documents pertinents retrouvés type loi prom. 14/04/1965 pub. 18/07/2012 numac 2012000418 source service public federal interieur Loi établissant certaines relations entre les divers régimes de pensions du secteur public. - Coordination officieuse en langue allemande fermer, serait à charge de l'O.N.S.S.A.P.L. (article 161bis, § 2, de la Nouvelle loi communale).
B.3.2. S'agissant de l'article 161bis, § 2, de la Nouvelle loi communale, le juge a quo demande si cette disposition viole les articles 10 et 11 de la Constitution, d'une part, interprétée comme excluant l'application des articles 13 et 14 précités de la loi du 14 avril 1965Documents pertinents retrouvés type loi prom. 14/04/1965 pub. 18/07/2012 numac 2012000418 source service public federal interieur Loi établissant certaines relations entre les divers régimes de pensions du secteur public. - Coordination officieuse en langue allemande fermer et, d'autre part, interprétée comme n'excluant pas l'application de ces articles, de sorte que l'administration concernée peut encore réclamer à l'O.N.S.S.A.P.L. la part de pension à reprendre.
B.4.1. Selon le Conseil des Ministres, les deux catégories mentionnées au B.3.1. seraient incomparables. La disposition litigieuse réglerait des situations menaçant l'équilibre financier et la viabilité du régime de pension des pouvoirs locaux, par suite du retrait d'administrations qui étaient précédemment affiliées, alors qu'aucune autre situation mentionnée dans la question préjudicielle n'aurait un impact sur l'équilibre financier de l'O.N.S.S.A.P.L. B.4.2. L'allégation selon laquelle des situations ne sont pas suffisamment comparables ne peut tendre à ce que les articles 10 et 11 de la Constitution ne soient pas appliqués. Elle ne peut avoir pour effet que d'abréger la démonstration d'une compatibilité avec ces dispositions lorsque les situations sont à ce point éloignées qu'il est immédiatement évident qu'un constat de discrimination ne saurait résulter de leur comparaison minutieuse.
B.4.3. En l'occurrence, la Cour est invitée à comparer des services publics qui reprennent du personnel d'un autre service public, certains étant tenus de contribuer à la charge de pension et d'autres pas. Ces services publics se trouvent dans des situations qui ne sont pas à ce point différentes qu'elles ne pourraient être comparées entre elles.
B.5.1. Le régime commun de pension des pouvoirs locaux est un régime dit de répartition, dans lequel le produit de la cotisation de pension sur la masse salariale des affiliés pour une année déterminée est utilisé pour payer les pensions de la même année. La contribution de chaque administration affiliée est fixée annuellement en un pourcentage de la masse salariale que cette administration verse cette année à son personnel nommé. L'O.N.S.S.A.P.L. fixe annuellement ce pourcentage en fonction des prévisions de dépenses en matière de pensions pour l'année suivante. L'article 161, alinéa 6, de la Nouvelle loi communale dispose à cet égard : « L'Office national de sécurité sociale des administrations provinciales et locales fixe, chaque année pour l'année suivante, le taux de cotisation nécessaire au financement des pensions des anciens membres du personnel des pouvoirs locaux affiliés à l'Office, en application des alinéas 1er et 2, ainsi que des pensions des ayants droit de ceux-ci. Le taux est appliqué sur les traitements que chaque administration locale paie aux agents nommés et affiliés durant l'année en cours. Ce taux de cotisation est fixé sur la base du rapport entre, d'une part, les dépenses présumées pour les pensions de ces personnes et, d'autre part, la masse salariale présumée du personnel affilié à ce régime. [...] ».
B.5.2. L'équilibre financier du régime commun de pension des pouvoirs locaux implique que la masse salariale du personnel affilié à ce régime reste raisonnablement proportionnée aux dépenses de pension supportées par le système.
B.5.3. Pour garantir que ce régime reste proportionné, l'affiliation à l'O.N.S.S.A.P.L., qui gère le système, est irrévocable. Mettre fin à l'affiliation aurait en effet pour conséquence que la charge de pension des anciens membres du personnel soit dorénavant supportée par les administrations qui continuent de participer au régime commun, ce qui entraînerait une augmentation des cotisations qui sont dues. Les travaux préparatoires de la disposition litigieuse précisent ce qui suit à ce sujet : « Un régime de pure répartition comme celui du régime de pension commun des pouvoirs locaux est basé sur la solidarité entre tous les affiliés. En effet, dans un tel régime, la charge des pensions des anciens agents d'une administration affiliée n'est pas supportée par cette administration elle-même, mais bien répartie chaque année entre l'ensemble des administrations affiliées de sorte qu'une désaffiliation a pour effet de transférer la charge des pensions des anciens agents de l'administration qui se désaffilie vers les administrations qui, elles, continuent à participer au régime commun, ce qui n'est ni souhaitable, ni équitable » (Doc. parl., Sénat, 1992-1993, n° 526-1, p. 24).
B.6.1. La disposition litigieuse a été adoptée parce qu'il avait été constaté que plusieurs administrations locales transféraient du personnel vers un service public qui n'était pas affilié au régime commun de pension des pouvoirs locaux, et ce, sans se désaffilier. Au cours des travaux préparatoires, la disposition litigieuse a été justifiée comme suit : « Sans recourir à une désaffiliation officielle, certains pouvoirs locaux utilisent actuellement des techniques permettant de faire échec à la solidarité résultant du fait que le régime de pension commun des pouvoirs locaux est un régime de répartition, en transférant une partie ou la totalité de leur personnel vers une autre administration qui n'est pas affiliée, diminuant ainsi la masse salariale soumise à la retenue 'pension' au profit de l'O.N.S.S.A.P.L. [...] De tels procédés constituent en réalité des désaffiliations déguisées, il convient dès lors de prévoir dès à présent certaines mesures destinées à décourager l'utilisation de ces pratiques qui mettent en péril l'équilibre financier du régime de pension commun des pouvoirs locaux » (Doc. parl., Sénat, 1992-1993, n° 526-1, pp. 24-25).
Selon les travaux préparatoires, afin de ne pas alourdir la charge financière qui pèse sur les administrations affiliées au régime commun, « la solution retenue consiste, lorsque l'administration locale vers laquelle le personnel est transféré ne participe pas au régime commun, à faire supporter par cette administration la charge des pensions accordées par le régime commun » (ibid.).
B.6.2. En tant que le législateur entend assurer la viabilité du régime commun de pension des pouvoirs locaux et empêcher d'éventuels abus, la disposition litigieuse poursuit un but légitime. La Cour doit cependant vérifier si cette disposition n'a pas d'effets qui vont au-delà de ce qui est nécessaire par rapport à ce but légitime.
Quant à l'article 161bis, § 1er, de la Nouvelle loi communale B.7. L'article 161bis, § 1er, de la Nouvelle loi communale oblige une administration locale qui n'est pas affiliée à l'O.N.S.S.A.P.L. et qui reprend du personnel dans le cadre d'une restructuration ou d'une suppression d'une administration locale affiliée à l'O.N.S.S.A.P.L., à contribuer aux charges des pensions de retraite des membres du personnel de l'administration locale restructurée ou supprimée qui étaient pensionnés avant sa restructuration ou suppression, ainsi qu'à participer aux charges des pensions de survie des ayants droit des membres du personnel précités ou des membres du personnel de ces organismes qui sont décédés avant la restructuration ou la suppression.
B.8. Le législateur a pris une mesure pertinente en obligeant une administration locale non affiliée à l'O.N.S.S.A.P.L. à contribuer, dans les circonstances précitées, à la charge de pension des membres du personnel déjà pensionnés et des ayants droit de ces membres du personnel. Cette mesure a pour effet qu'une diminution de la masse salariale du personnel affilié au régime commun des pouvoirs locaux est compensée par une diminution de la charge de pension que l'O.N.S.S.A.P.L. doit financer. Etant donné que le taux de cotisation est fixé sur la base du rapport entre, d'une part, les dépenses présumées pour les pensions et, d'autre part, la masse salariale présumée du personnel affilié à ce régime (article 161, alinéa 6, de la Nouvelle loi communale), la disposition litigieuse fait qu'une diminution de la masse salariale n'entraîne pas d'augmentation du taux de cotisation.
B.9.l. De même, il n'est pas sans importance que la disposition litigieuse vise le transfert de personnel, par suite d'une restructuration ou d'une suppression, d'une administration locale affiliée à l'O.N.S.S.A.P.L. vers une administration locale non affiliée à l'O.N.S.S.A.P.L. B.9.2. L'affiliation d'administrations locales au régime commun de pension des pouvoirs locaux porte en effet sur les membres du personnel nommés à titre définitif. Les mots « le personnel transféré » contenus dans la disposition litigieuse concernent dès lors les membres du personnel nommés à titre définitif.
B.9.3. Ce n'est que moyennant le respect des dispositions statutaires applicables en la matière qu'il peut être mis fin à la relation statutaire qui découle de la nomination définitive ou que cette relation peut être modifiée. Dans des conditions normales, ces membres du personnel nommés à titre définitif ne quitteront donc pas massivement l'administration affiliée à l'O.N.S.S.A.P.L. B.9.4. En cas de restructuration ou de suppression, du personnel nommé à titre définitif peut cependant être transféré vers un autre pouvoir local. Si la restructuration ou la suppression s'accompagne de la dissolution d'une association, le personnel doit, par définition, être repris, soit par les participants, soit par les repreneurs de l'activité.
Dans la mesure où, dans ces hypothèses, les administrations vers lesquelles le personnel est transféré ne sont pas affiliées à l'O.N.S.S.A.P.L., la masse salariale disponible sur la base de laquelle est calculée la contribution à l'O.N.S.S.A.P.L. diminue, tandis que l'administration locale non affiliée bénéficie des cotisations de pension des membres du personnel transférés.
B.9.5. Le législateur a dès lors raisonnablement pu estimer que les cas de transfert de personnel d'une administration affiliée à l'O.N.S.S.A.P.L. vers une administration non affiliée à l'O.N.S.S.A.P.L., dans le cadre d'une restructuration ou d'une suppression, eu égard au nombre de membres du personnel concernés, peuvent compromettre l'équilibre financier du régime commun de pension des pouvoirs locaux.
B.10.1. De surcroît, la contribution que doit payer l'administration qui n'est pas affiliée à l'O.N.S.S.A.P.L. n'est pas manifestement déraisonnable. Cette contribution est égale au montant obtenu en multipliant les pensions de retraite et de survie auxquelles l'administration non affiliée à l'O.N.S.S.A.P.L. doit contribuer, par « un coefficient qui est égal à la proportion que la masse salariale du personnel transféré à l'autre administration représente par rapport à la masse salariale globale de l'administration locale au moment de sa restructuration ou de sa suppression » (article 161bis, § 1er, alinéa 2, de la Nouvelle loi communale). Par conséquent, l'administration vers laquelle le personnel est transféré ne doit pas supporter la totalité de la charge de pension des membres du personnel déjà pensionnés de l'administration locale restructurée ou supprimée, sauf si elle reprend tous les membres du personnel de ce service.
Cette contribution est proportionnée au nombre de membres du personnel transférés. L'avantage financier que la disposition litigieuse procure à l'O.N.S.S.A.P.L. se limite à compenser la réduction de la masse salariale sur la base de laquelle est calculée la contribution en vue du financement de la charge de pension de membres du personnel déjà pensionnés.
B.10.2. Par ailleurs, il appartient à l'administration locale de déterminer le nombre de membres du personnel qu'elle reprend dans le cadre d'une restructuration ou d'une suppression d'une autre administration. Cette administration détermine par conséquent elle-même l'étendue de sa contribution. En vue de fixer le nombre de membres du personnel à reprendre, elle peut dès lors prendre en compte ses propres possibilités financières.
B.10.3. La circonstance qu'il ne soit pas tenu compte de l'activité des membres du personnel transférés dans l'administration restructurée ou supprimée n'est pas de nature à modifier ce constat. Il suffit d'observer en l'espèce que tout transfert, dans le cadre d'une restructuration ou d'une suppression, d'un membre du personnel d'une administration affiliée à l'O.N.S.S.A.P.L. vers une administration non affiliée à l'O.N.S.S.A.P.L. entraîne une réduction de la masse salariale sur la base de laquelle le taux de contribution est calculé en vue du financement des pensions des anciens membres du personnel des administrations affiliées à l'O.N.S.S.A.P.L., et ce, quelle que soit l'activité du membre du personnel en question.
B.10.4. Enfin, il convient de constater que, comme l'a estimé la Cour dans son arrêt n° 54/93, la disposition litigieuse ne va pas jusqu'à imposer la réaffiliation irrévocable à l'O.N.S.S.A.P.L. B.11. S'agissant de l'article 161bis, § 1er, de la Nouvelle loi communale, la question préjudicielle appelle une réponse négative.
Quant à l'article 161bis, § 2, de la Nouvelle loi communale B.12.1. L'article 161bis, § 2, de la Nouvelle loi communale impose à l'administration qui n'est pas affiliée à l'O.N.S.S.A.P.L. vers laquelle, dans le cadre d'une restructuration ou d'une suppression, un membre du personnel d'une administration affiliée à l'O.N.S.S.A.P.L. est transféré, avec effet à partir de la pension, de prendre à sa charge la pension ou part de pension du membre du personnel transféré, portant sur ce service.
B.12.2. Le juge a quo demande si cette disposition est contraire aux articles 10 et 11 de la Constitution, d'une part, dans l'interprétation où elle exclut l'application des articles 13 et 14 de la loi du 14 avril 1965Documents pertinents retrouvés type loi prom. 14/04/1965 pub. 18/07/2012 numac 2012000418 source service public federal interieur Loi établissant certaines relations entre les divers régimes de pensions du secteur public. - Coordination officieuse en langue allemande fermer et, d'autre part, dans l'interprétation où elle n'exclut pas l'application de ces articles, de sorte que l'administration concernée peut encore réclamer la part de pension à reprendre à l'O.N.S.S.A.P.L. B.12.3. Dans l'interprétation où l'article 161bis, § 2, de la Nouvelle loi communale n'exclut pas l'application des articles 13 et 14 de la loi du 14 avril 1965Documents pertinents retrouvés type loi prom. 14/04/1965 pub. 18/07/2012 numac 2012000418 source service public federal interieur Loi établissant certaines relations entre les divers régimes de pensions du secteur public. - Coordination officieuse en langue allemande fermer, la différence de traitement entre, d'une part, une administration locale qui n'est pas affiliée à l'O.N.S.S.A.P.L. et qui reprend, dans le cadre d'une restructuration ou d'une suppression, du personnel d'une administration affiliée à l'O.N.S.S.A.P.L. et, d'autre part, d'autres administrations qui reprennent du personnel d'un service public n'existe toutefois pas. Dans les deux hypothèses, la pension de retraite doit être allouée par l'autorité ou l'organisme qui gère la pension de retraite lors de la mise à la retraite des membres du personnel en question. Conformément aux articles 13 et 14 de la loi du 14 avril 1965Documents pertinents retrouvés type loi prom. 14/04/1965 pub. 18/07/2012 numac 2012000418 source service public federal interieur Loi établissant certaines relations entre les divers régimes de pensions du secteur public. - Coordination officieuse en langue allemande fermer, la part de pension qui correspond à la période au cours de laquelle le membre du personnel en question a travaillé auprès de l'administration cédante pourrait être réclamée par cette autorité ou cet organisme à ladite administration.
Ainsi interprétée, la disposition en cause n'est pas incompatible avec les articles 10 et 11 de la Constitution.
B.12.4. Dans l'interprétation où l'article 161bis, § 2, de la Nouvelle loi communale exclut l'application des articles 13 et 14 de la loi du 14 avril 1965Documents pertinents retrouvés type loi prom. 14/04/1965 pub. 18/07/2012 numac 2012000418 source service public federal interieur Loi établissant certaines relations entre les divers régimes de pensions du secteur public. - Coordination officieuse en langue allemande fermer, l'administration qui n'est pas affiliée à l'O.N.S.S.A.P.L. ne peut réclamer à cet office la part de pension du personnel transféré d'une administration affiliée à l'O.N.S.S.A.P.L. Les autres organismes publics qui reprennent du personnel d'un autre service public peuvent en revanche réclamer la part de pension des membres du personnel transférés au service ou à l'organisme qui gère les pensions des membres du personnel concernés.
Dans cette interprétation, la Cour doit vérifier si la différence de traitement qui est ainsi établie est compatible avec les articles 10 et 11 de la Constitution.
B.13.1. En vue d'assurer l'équilibre financier du régime de pension commun des pouvoirs locaux, le législateur peut prendre des mesures qui entendent éviter que les charges de pension continuent d'incomber à l'O.N.S.S.A.P.L., sans que celui-ci reçoive de nouvelles cotisations.
B.13.2. Le législateur a dès lors pris une mesure pertinente en prévoyant, dans l'interprétation précitée de l'article 161bis, § 2, de la Nouvelle loi communale, que la pension ou la part de pension des membres du personnel transférés reste à charge de l'administration non affiliée à l'O.N.S.S.A.P.L. vers laquelle ces membres du personnel sont transférés. Si cette administration qui n'est pas affiliée à l'O.N.S.S.A.P.L. pouvait réclamer cette pension ou part de pension, il conviendrait de prendre en compte cette circonstance dans le cadre du calcul des dépenses présumées pour les pensions des anciens membres du personnel des administrations locales affiliées à l'O.N.S.S.A.P.L. Cette dépense de pension s'accompagne cependant d'une diminution de la masse salariale des administrations affiliées à l'O.N.S.S.A.P.L. Afin d'éviter une augmentation du taux de contribution des administrations qui restent affiliées à l'O.N.S.S.A.P.L., le législateur peut prendre une mesure qui diminue la charge de pension de manière égale.
B.13.3. Cette mesure n'est pas déraisonnable, dès lors que l'administration qui n'est pas affiliée à l'O.N.S.S.A.P.L. et qui reprend, dans le cadre d'une restructuration ou d'une suppression, du personnel d'une administration affiliée à l'O.N.S.S.A.P.L. ne doit prendre à sa charge la pension ou la part de pension que pour la période où des services ont été prestés auprès de l'administration restructurée ou supprimée.
B.14. Contrairement à ce que soutient la partie demanderesse devant le juge a quo, l'autorité cédante et les membres du personnel transférés n'ont pas payé de cotisations à l'O.N.S.S.A.P.L. qui ne seraient contrebalancées par aucune prestation. En effet, ces contributions ne servent pas à constituer des réserves grâce auxquelles la pension des membres du personnel concernés sera payée, mais elles servent à financer les dépenses de pension des membres du personnel déjà pensionnés.
B.15. Dans l'interprétation où l'article 161bis, § 2, de la Nouvelle loi communale exclut l'application des articles 13 et 14 de la loi du 14 avril 1965Documents pertinents retrouvés type loi prom. 14/04/1965 pub. 18/07/2012 numac 2012000418 source service public federal interieur Loi établissant certaines relations entre les divers régimes de pensions du secteur public. - Coordination officieuse en langue allemande fermer, la question préjudicielle appelle une réponse négative.
Par ces motifs, la Cour dit pour droit : L'article 161bis, §§ 1er et 2, de la Nouvelle loi communale ne viole pas les articles 10 et 11 de la Constitution.
Ainsi prononcé en langue néerlandaise et en langue française, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage, à l'audience publique du 9 novembre 2005.
Le greffier, P.-Y. Dutilleux.
Le président, A. Arts.