Etaamb.openjustice.be
Arrêt
publié le 06 janvier 2006

Extrait de l'arrêt n° 172/2005 du 23 novembre 2005 Numéro du rôle : 3481 En cause : la question préjudicielle relative aux articles 24, 25, 26 et 82 de la loi du 8 août 1997 sur les faillites, telle qu'elle a été modifiée par la loi du 4 se La Cour d'arbitrage, composée des présidents M. Melchior et A. Arts, et des juges P. Martens, E.(...)

source
cour d'arbitrage
numac
2005203415
pub.
06/01/2006
prom.
--
moniteur
https://www.ejustice.just.fgov.be/cgi/article_body(...)
Document Qrcode

COUR D'ARBITRAGE


Extrait de l'arrêt n° 172/2005 du 23 novembre 2005 Numéro du rôle : 3481 En cause : la question préjudicielle relative aux articles 24, 25, 26 et 82 de la loi du 8 août 1997Documents pertinents retrouvés type loi prom. 08/08/1997 pub. 28/10/1997 numac 1997009766 source ministere de la justice Loi sur les faillites type loi prom. 08/08/1997 pub. 24/08/2001 numac 2001009578 source ministere de la justice Loi relative au Casier judiciaire central type loi prom. 08/08/1997 pub. 04/06/1998 numac 1998015038 source ministere des affaires etrangeres, du commerce exterieur et de la cooperation au developpement Loi portant assentiment à la Convention relative au blanchiment, au dépistage, à la saisie et à la confiscation des produits du crime, faite à Strasbourg le 8 novembre 1990 fermer sur les faillites, telle qu'elle a été modifiée par la loi du 4 septembre 2002Documents pertinents retrouvés type loi prom. 04/09/2002 pub. 21/09/2002 numac 2002009854 source service public federal justice Loi modifiant la loi du 8 août 1997 sur les faillites, le Code judiciaire et le Code des sociétés fermer, posée par le Tribunal de première instance de Bruxelles.

La Cour d'arbitrage, composée des présidents M. Melchior et A. Arts, et des juges P. Martens, E. De Groot, L. Lavrysen, A. Alen et J.-P. Moerman, assistée du greffier P.-Y. Dutilleux, présidée par le président M. Melchior, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet de la question préjudicielle et procédure Par jugement du 8 février 2005 en cause de la s.a. KBC Lease Belgium contre M. Ledur, dont l'expédition est parvenue au greffe de la Cour d'arbitrage le 14 février 2005, le Tribunal de première instance de Bruxelles a posé la question préjudicielle suivante : « Les articles 24, 25, 26 et 82 de la loi du 8 août 1997Documents pertinents retrouvés type loi prom. 08/08/1997 pub. 28/10/1997 numac 1997009766 source ministere de la justice Loi sur les faillites type loi prom. 08/08/1997 pub. 24/08/2001 numac 2001009578 source ministere de la justice Loi relative au Casier judiciaire central type loi prom. 08/08/1997 pub. 04/06/1998 numac 1998015038 source ministere des affaires etrangeres, du commerce exterieur et de la cooperation au developpement Loi portant assentiment à la Convention relative au blanchiment, au dépistage, à la saisie et à la confiscation des produits du crime, faite à Strasbourg le 8 novembre 1990 fermer, telle que modifiée par la loi du 4 septembre 2002Documents pertinents retrouvés type loi prom. 04/09/2002 pub. 21/09/2002 numac 2002009854 source service public federal justice Loi modifiant la loi du 8 août 1997 sur les faillites, le Code judiciaire et le Code des sociétés fermer, sont-ils contraires aux articles 10 et 11 de la Constitution en ce que le failli est, dès le jugement déclaratif de faillite, à l'abri de toute procédure judiciaire et de toute procédure d'exécution jusqu'au jour du jugement qui statuera sur son excusabilité, alors que le conjoint de ce failli, qui s'est personnellement obligé à la dette de son époux et qui pourra en être libéré par l'effet de l'excusabilité qui serait accordée à son époux, n'est pas à l'abri de toute procédure judiciaire et de toute procédure d'exécution jusqu'au jour du jugement qui statuera sur l'excusabilité de l'époux ? ». (...) III. En droit (...) B.1.1. Le juge a quo interroge la Cour sur la compatibilité avec les articles 10 et 11 de la Constitution des articles 24, 25, 26 et 82 de la loi sur les faillites du 8 août 1997, telle qu'elle a été modifiée par la loi du 4 septembre 2002Documents pertinents retrouvés type loi prom. 04/09/2002 pub. 21/09/2002 numac 2002009854 source service public federal justice Loi modifiant la loi du 8 août 1997 sur les faillites, le Code judiciaire et le Code des sociétés fermer, en ce que le failli est, dès le jugement déclaratif de faillite, à l'abri de toute procédure judiciaire et de toute procédure d'exécution jusqu'au jour du jugement qui statuera sur son excusabilité, alors que le conjoint de ce failli, qui s'est personnellement obligé à la dette de son époux et qui pourra en être libéré par l'effet de l'excusabilité qui serait accordée à son époux, n'est pas à l'abri de toute procédure judiciaire et de toute procédure d'exécution jusqu'au jour du jugement qui statuera sur l'excusabilité de l'époux.

B.1.2. L'article 24 de la loi précitée dispose : « A partir du même jugement, toute action mobilière ou immobilière, toute voie d'exécution sur les meubles ou immeubles, ne peut être suivie, intentée ou exercée que contre les curateurs. Le tribunal peut néanmoins recevoir le failli partie intervenante.

Les décisions rendues sur les actions suivies ou intentées contre le failli personnellement ne sont pas opposables à la masse ».

B.1.3. L'article 25 de la loi précitée dispose : « Le jugement déclaratif de la faillite arrête toute saisie faite à la requête des créanciers chirographaires et des créanciers bénéficiant d'un privilège général.

Si, antérieurement à ce jugement, le jour de la vente forcée des meubles ou immeubles saisis a déjà été fixé et publié par les affiches, cette vente a lieu pour le compte de la masse.

Néanmoins, si l'intérêt de la masse l'exige, le juge-commissaire peut, sur la demande des curateurs, autoriser la remise ou l'abandon de la vente ».

B.1.4. L'article 26 de la même loi dispose : « Toutes voies d'exécution, pour parvenir au paiement des créances privilégiées sur les meubles dépendant de la faillite, seront suspendues jusqu'à la clôture du procès-verbal de vérification des créances, sans préjudice de toute mesure conservatoire et du droit qui serait acquis au propriétaire des lieux loués d'en reprendre possession.

Dans ce dernier cas, la suspension des voies d'exécution établie au présent article cesse de plein droit en faveur du propriétaire.

Néanmoins, si l'intérêt de la masse l'exige et à condition qu'une réalisation des meubles puisse être attendue qui ne désavantage pas les créanciers privilégiés, le tribunal peut, sur requête des curateurs et après avoir convoqué par pli judiciaire le créancier concerné bénéficiant d'un privilège spécial, ordonner la suspension d'exécution pour une période maximum d'un an à compter de la déclaration de faillite ».

B.1.5. Quant à l'article 82 de la loi, tel qu'il a été modifié par la loi du 4 septembre 2002Documents pertinents retrouvés type loi prom. 04/09/2002 pub. 21/09/2002 numac 2002009854 source service public federal justice Loi modifiant la loi du 8 août 1997 sur les faillites, le Code judiciaire et le Code des sociétés fermer, il prévoit que : « L'excusabilité éteint les dettes du failli et décharge les personnes physiques qui, à titre gratuit, se sont rendues caution de ses obligations.

Le conjoint du failli qui s'est personnellement obligé à la dette de son époux est libéré de cette obligation par l'effet de l'excusabilité.

L'excusabilité est sans effet sur les dettes alimentaires du failli et celles qui résultent de l'obligation de réparer le dommage lié au décès ou à l'atteinte à l'intégrité physique d'une personne qu'il a causé par sa faute ».

B.1.6. La loi du 2 février 2005Documents pertinents retrouvés type loi prom. 02/02/2005 pub. 21/02/2005 numac 2005009112 source service public federal justice Loi modifiant l'article 82, alinéa 2, de la loi du 8 août 1997 sur les faillites fermer a remplacé comme suit l'article 82, alinéa 2 : « Le conjoint du failli qui est personnellement obligé à la dette de son époux est libéré de cette obligation par l'effet de l'excusabilité ».

Cette modification n'a pas d'incidence sur les points de droit soumis à la Cour.

B.2.1. Par l'arrêt n° 114/2004 du 30 juin 2004, la Cour a annulé les articles 81, 1°, et 82, alinéa 1er, de la loi du 8 août 1997Documents pertinents retrouvés type loi prom. 08/08/1997 pub. 28/10/1997 numac 1997009766 source ministere de la justice Loi sur les faillites type loi prom. 08/08/1997 pub. 24/08/2001 numac 2001009578 source ministere de la justice Loi relative au Casier judiciaire central type loi prom. 08/08/1997 pub. 04/06/1998 numac 1998015038 source ministere des affaires etrangeres, du commerce exterieur et de la cooperation au developpement Loi portant assentiment à la Convention relative au blanchiment, au dépistage, à la saisie et à la confiscation des produits du crime, faite à Strasbourg le 8 novembre 1990 fermer sur les faillites, modifiés par la loi du 4 septembre 2002Documents pertinents retrouvés type loi prom. 04/09/2002 pub. 21/09/2002 numac 2002009854 source service public federal justice Loi modifiant la loi du 8 août 1997 sur les faillites, le Code judiciaire et le Code des sociétés fermer. Elle a cependant maintenu les effets des dispositions annulées jusqu'à l'entrée en vigueur de nouvelles dispositions, et au plus tard jusqu'au 31 juillet 2005. L'article 81 a été rétabli par l'article 8 de la loi du 20 juillet 2005Documents pertinents retrouvés type loi prom. 20/07/2005 pub. 28/07/2005 numac 2005021098 source service public federal chancellerie du premier ministre, service public federal justice et service public federal finances Loi modifiant la loi du 8 août 1997 sur les faillites, et portant des dispositions fiscales diverses fermer modifiant la « loi du 8 août 1997Documents pertinents retrouvés type loi prom. 08/08/1997 pub. 28/10/1997 numac 1997009766 source ministere de la justice Loi sur les faillites type loi prom. 08/08/1997 pub. 24/08/2001 numac 2001009578 source ministere de la justice Loi relative au Casier judiciaire central type loi prom. 08/08/1997 pub. 04/06/1998 numac 1998015038 source ministere des affaires etrangeres, du commerce exterieur et de la cooperation au developpement Loi portant assentiment à la Convention relative au blanchiment, au dépistage, à la saisie et à la confiscation des produits du crime, faite à Strasbourg le 8 novembre 1990 fermer sur les faillites et portant des dispositions fiscales diverses ».L'article 82, alinéa 1er, a été remplacé par l'article 9 de cette même loi. L'article 3 de cette loi insère, par ailleurs, dans la loi du 8 août 1997Documents pertinents retrouvés type loi prom. 08/08/1997 pub. 28/10/1997 numac 1997009766 source ministere de la justice Loi sur les faillites type loi prom. 08/08/1997 pub. 24/08/2001 numac 2001009578 source ministere de la justice Loi relative au Casier judiciaire central type loi prom. 08/08/1997 pub. 04/06/1998 numac 1998015038 source ministere des affaires etrangeres, du commerce exterieur et de la cooperation au developpement Loi portant assentiment à la Convention relative au blanchiment, au dépistage, à la saisie et à la confiscation des produits du crime, faite à Strasbourg le 8 novembre 1990 fermer un article 24bis qui dispose : « A compter du même jugement, sont suspendues jusqu'à la clôture de la faillite les voies d'exécution à charge de la personne physique qui, à titre gratuit, s'est constituée sûreté personnelle du failli ».

B.2.2. Vu le maintien des effets des dispositions en cause, le juge a quo est appelé à en faire application dans la solution du litige qui est pendant devant lui. La Cour se doit donc de répondre à la question telle qu'elle a été posée.

B.3. Par son arrêt n° 69/2002, la Cour avait jugé qu'il n'était pas justifié « de ne [pas] permettre [...] qu'un juge puisse apprécier s'il n'y a pas lieu de [décharger la caution également], en particulier en ayant égard au caractère désintéressé de son engagement ». Elle a tenu un raisonnement identique en ce qui concerne le conjoint du failli dans son arrêt n° 78/2004.

B.4. Le législateur a remédié à cette situation en déchargeant automatiquement la personne physique qui s'est portée caution à titre gratuit, et en libérant automatiquement le conjoint, lorsque le failli est excusé. Cet automatisme n'est pas de nature à corriger adéquatement la discrimination constatée dans les arrêts nos 69/2002 et 78/2004, ainsi que l'a constaté la Cour dans son arrêt n° 114/2004 par lequel elle a annulé l'article 82, alinéa 1er, tout en maintenant ses effets jusqu'au 31 juillet 2005 au plus tard.

Au cours des travaux préparatoires de la loi du 4 septembre 2002Documents pertinents retrouvés type loi prom. 04/09/2002 pub. 21/09/2002 numac 2002009854 source service public federal justice Loi modifiant la loi du 8 août 1997 sur les faillites, le Code judiciaire et le Code des sociétés fermer, il avait été suggéré « que la suspension des poursuites découlant du jugement déclaratif de faillite soit étendue au conjoint du failli » (Doc. parl., Sénat, 2001-2002, n° 2-877/8, p. 86). Cette préoccupation n'a pas été traduite dans le texte de la loi. De même, au cours des travaux préparatoires de la loi du 2 février 2005Documents pertinents retrouvés type loi prom. 02/02/2005 pub. 21/02/2005 numac 2005009112 source service public federal justice Loi modifiant l'article 82, alinéa 2, de la loi du 8 août 1997 sur les faillites fermer modifiant l'article 82, alinéa 2, de la loi du 8 août 1997Documents pertinents retrouvés type loi prom. 08/08/1997 pub. 28/10/1997 numac 1997009766 source ministere de la justice Loi sur les faillites type loi prom. 08/08/1997 pub. 24/08/2001 numac 2001009578 source ministere de la justice Loi relative au Casier judiciaire central type loi prom. 08/08/1997 pub. 04/06/1998 numac 1998015038 source ministere des affaires etrangeres, du commerce exterieur et de la cooperation au developpement Loi portant assentiment à la Convention relative au blanchiment, au dépistage, à la saisie et à la confiscation des produits du crime, faite à Strasbourg le 8 novembre 1990 fermer sur les faillites, la ministre de la Justice a observé qu'« on pourrait assister à une véritable course à la caution entre les créanciers pendant la procédure, ce qui viderait complètement de sa substance l'objet de la proposition » et qu'il convenait « dès lors de prévoir une telle possibilité de suspension en faveur de la caution ». Elle a proposé par conséquent de réexaminer cette question « à l'occasion de l'examen du projet de loi que le gouvernement présentera ultérieurement » (Doc. parl., Chambre, 2003-2004, DOC 51-1320/002, p. 9).

B.5. En s'abstenant de permettre qu'un juge puisse, alors que les articles 25 et 26 précités suspendent les poursuites dirigées contre le failli, apprécier si et à quelles conditions il y a lieu de suspendre les poursuites à l'égard du conjoint du failli, en attendant que soit clôturée la faillite et le cas échéant que soit prise la décision relative à l'excusabilité du failli, le législateur a privé d'une grande partie de leur effet les dispositions de l'article 82.

L'article 22 de la loi rend exigibles les dettes non échues du failli et, celui-ci étant en cessation de paiement, le créancier peut s'adresser immédiatement au co-obligé qui devra les acquitter dans les limites de son engagement. L'excusabilité qui serait ultérieurement accordée au failli ne pourra avoir pour effet de décharger le co-obligé si, entre-temps, le créancier a obtenu contre lui une décision passée en force de chose jugée, de telle sorte que ce co-obligé serait victime de la discrimination constatée par la Cour dans son arrêt n° 78/2004.

B.6. La question préjudicielle appelle une réponse positive.

Par ces motifs, la Cour dit pour droit : L'article 82, alinéas 1er et 2, de la loi du 8 août 1997Documents pertinents retrouvés type loi prom. 08/08/1997 pub. 28/10/1997 numac 1997009766 source ministere de la justice Loi sur les faillites type loi prom. 08/08/1997 pub. 24/08/2001 numac 2001009578 source ministere de la justice Loi relative au Casier judiciaire central type loi prom. 08/08/1997 pub. 04/06/1998 numac 1998015038 source ministere des affaires etrangeres, du commerce exterieur et de la cooperation au developpement Loi portant assentiment à la Convention relative au blanchiment, au dépistage, à la saisie et à la confiscation des produits du crime, faite à Strasbourg le 8 novembre 1990 fermer sur les faillites, telle qu'elle a été modifiée par la loi du 4 septembre 2002Documents pertinents retrouvés type loi prom. 04/09/2002 pub. 21/09/2002 numac 2002009854 source service public federal justice Loi modifiant la loi du 8 août 1997 sur les faillites, le Code judiciaire et le Code des sociétés fermer, viole les articles 10 et 11 de la Constitution.

Ainsi prononcé en langue française et en langue néerlandaise, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage, à l'audience publique du 23 novembre 2005.

Le greffier, P.-Y. Dutilleux.

Le président, M. Melchior.

^