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Arrêt
publié le 20 juin 2005

Extrait de l'arrêt n° 96/2005 du 1 er juin 2005 Numéros du rôle : 2952, 2969 et 3021 En cause : les recours en annulation du décret de la Communauté française du 19 novembre 2003 « portant des dispositions particulières relatives La Cour d'arbitrage, composée du juge P. Martens, faisant fonction de président, du président A.(...)

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Extrait de l'arrêt n° 96/2005 du 1er juin 2005 Numéros du rôle : 2952, 2969 et 3021 En cause : les recours en annulation du décret de la Communauté française du 19 novembre 2003 « portant des dispositions particulières relatives à l'attribution des emplois aux fonctions définies par le titre V du décret du 4 mars 1991 relatif à l'aide à la Jeunesse », introduits par R. Brankart et autres.

La Cour d'arbitrage, composée du juge P. Martens, faisant fonction de président, du président A. Arts et des juges M. Bossuyt, A. Alen, J.-P. Snappe, J.-P. Moerman et J. Spreutels, assistée du greffier P.-Y. Dutilleux, présidée par le juge P. Martens, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet des recours et procédure a. Par requêtes adressées à la Cour par lettres recommandées à la poste les 18 et 31 mars 2004 et parvenues au greffe les 19 mars et 1er avril 2004, un recours en annulation du décret de la Communauté française du 19 novembre 2003 « portant des dispositions particulières relatives à l'attribution des emplois aux fonctions définies par le titre V du décret du 4 mars 1991 relatif à l'aide à la Jeunesse » (publié au Moniteur belge du 12 décembre 2003) a été introduit par R. Brankart, demeurant à 1210 Bruxelles, rue des Coteaux 24, et par F. Roose, demeurant à 3020 Winksele, Dalenstraat 34B. b. Par requête adressée à la Cour par lettre recommandée à la poste le 11 juin 2004 et parvenue au greffe le 14 juin 2004, R.Couturiaux, demeurant à 7370 Blaugies, rue Warechaix 4, a introduit un recours en annulation du même décret.

La demande de suspension du même décret, introduite par la même partie requérante, a été rejetée par l'arrêt n° 143/2004 du 22 juillet 2004, publié au Moniteur belge du 5 octobre 2004.

Ces affaires, inscrites sous les numéros 2952, 2969 et 3021 du rôle de la Cour, ont été jointes. (...) II. En droit (...) Quant aux dispositions attaquées B.1. Le décret attaqué établit une procédure de recrutement d'agents exerçant les fonctions de conseiller ou de directeur de l'aide à la jeunesse et de conseiller adjoint ou de directeur adjoint de l'aide à la jeunesse, prévues par le titre V du décret de la Communauté française du 4 mars 1991 relatif à l'aide à la jeunesse.

B.2.1. L'arrêté de l'Exécutif de la Communauté française du 29 novembre 1991 « portant certaines dispositions statutaires applicables aux agents exerçant les attributions de conseiller ou de directeur de l'aide à la jeunesse et de conseiller adjoint ou de directeur adjoint de l'aide à la jeunesse en exécution du Titre V du décret du 4 mars 1991 relatif à l'aide à la jeunesse » créait dans les services de l'Exécutif de la Communauté française, au rang 11, le grade de « premier attaché de l'aide à la jeunesse » et, au rang 10, celui d'« attaché de l'aide à la jeunesse » (article 2).

Le même arrêté précisait que les titulaires du premier grade exerçaient les attributions de conseiller ou de directeur de l'aide à la jeunesse, les titulaires de l'autre grade exerçant celles de conseiller adjoint ou de directeur adjoint de l'aide à la jeunesse (article 12).

Cet arrêté confiait au ministre la compétence d'admettre les candidats au stage, après avoir pris l'avis d'une commission - composée exclusivement de fonctionnaires de la Communauté française - chargée d'examiner les titres, les capacités et les aptitudes des candidats (article 7). La nomination à l'issue du stage - d'une durée, en principe, d'un an - était subordonnée à une proposition motivée du fonctionnaire général de l'administration compétente pour l'aide à la jeunesse et la protection de la jeunesse (articles 8 et 10).

B.2.2. Les arrêtés de l'Exécutif de la Communauté française du 30 avril 1993 admettant au stage vingt-six personnes pour le grade de premier attaché et six personnes pour le grade d'attaché ont été annulés le 23 novembre 1994 en raison de l'illégalité de l'arrêté précité du 29 novembre 1991 sur lequel ils étaient fondés (Conseil d'Etat, n° 50.338, 23 novembre 1994).

B.3.1. L'arrêté du Gouvernement de la Communauté française du 7 janvier 1999 « relatif aux agents des Services du Gouvernement chargés d'exercer les attributions de conseiller ou de directeur de l'aide à la jeunesse et de conseiller adjoint ou de directeur adjoint de l'aide à la jeunesse en exécution du Titre V du décret du 4 mars 1991 » abroge toutes les dispositions de l'arrêté précité du 29 novembre 1991 relatives au statut administratif de ces agents.

Il « poursuit l'objectif général du Gouvernement d'assurer que, quelles que soient leurs fonctions, les membres du personnel des Services du Gouvernement [...] sont soumis, dans la gestion de leur carrière, à des principes communs, notamment leur recrutement par le S.P.R. et leur nomination dans des grades créés par l'arrêté du Gouvernement du 22 juillet 1996 » (Rapport au Gouvernement de la Communauté française, Moniteur belge , 22 janvier 1999, p. 1843).

B.3.2. L'arrêté du Gouvernement de la Communauté française du 7 janvier 1999 - entré en vigueur le 1er février 1999 - dispose que les attributions de conseiller ou de directeur de l'aide à la jeunesse sont exercées par des agents titulaires du grade de « directeur ou directrice (catégorie : expert) »; et que celles de conseiller adjoint ou de directeur adjoint le sont par des agents titulaires du grade d'« attaché ou attaché principal ou attachée ou attachée principale (catégorie : expert) » (article 1er).

Les grades de « directeur ou directrice », d'« attaché principal ou attachée principale » et d'« attaché ou attachée » sont, selon l'annexe II de l'arrêté du Gouvernement de la Communauté française du 22 juillet 1996 « portant statut des agents des Services du Gouvernement de la Communauté française », respectivement des grades de rang 12, 11 et 10.

B.3.3. Selon l'arrêté précité du 7 janvier 1999, le grade de « directeur ou directrice » peut « être conféré aux lauréats d'un concours de recrutement organisé en vue d'assurer l'exercice des attributions » de conseiller ou de directeur de l'aide à la jeunesse (article 2, alinéa 1er).

Cet arrêté précise encore que le grade d'« attaché ou attachée » peut être conféré aux lauréats d'un tel concours « organisé en vue d'assurer l'exercice des attributions » de conseiller adjoint ou de directeur adjoint (article 2, alinéa 2).

Seuls les porteurs d'un des « diplômes de l'enseignement universitaire ou supérieur de type long » énumérés par cet arrêté peuvent participer à ces concours de recrutement (article 2, alinéa 3). Les candidats doivent, par ailleurs, « justifier d'une expérience utile en rapport avec la fonction à conférer » de douze années pour le grade de « directeur ou directrice » et de sept années pour celui d'« attaché ou d'attachée » (article 2, alinéas 4 et 5).

B.4. Il résulte des requêtes que seuls les articles 1er à 5 du décret attaqué font l'objet de griefs. Ils disposent : «

Article 1er.Les membres du personnel du ministère de la Communauté française qui, à la date d'entrée en vigueur du présent décret, exercent depuis le 31 janvier 1999 au moins les fonctions de conseiller ou de directeur de l'aide à la jeunesse et de conseiller adjoint ou de directeur adjoint de l'aide à la jeunesse en application du titre V du décret du 4 mars 1991 relatif à l'aide à la jeunesse et dont l'engagement initial dans une de ces fonctions se fonde, d'une part, sur des critères comportant au moins une condition de diplôme en rapport avec la fonction et, d'autre part, sur une procédure de sélection comportant en tout cas un appel aux candidats publié au Moniteur belge , peuvent, à leur demande, être nommés à titre définitif dans les emplois du cadre du ministère de la Communauté française qui correspondent, chacun pour ce qui le concerne, à celle de ces fonctions qu'il exerce à la date d'entrée en vigueur du présent décret.

Les membres du personnel nommés en application de l'alinéa précédent sont directement soumis aux dispositions des articles 1er et 3 à 6 de l'arrêté du Gouvernement de la Communauté française du 7 janvier 1999 relatif aux agents des services du Gouvernement chargés d'exercer les attributions de conseiller ou de directeur de l'aide à la jeunesse et de conseiller adjoint ou de directeur adjoint de l'aide à la jeunesse en exécution du titre V du décret du 4 mars 1991 relatif à l'aide à la jeunesse ainsi qu'aux statuts communs des agents des services du Gouvernement.

Art. 2.Dans un délai de six mois à dater de leur demande adressée au Gouvernement au plus tard dans les trois mois suivant la publication du présent décret au Moniteur belge , les membres du personnel visés à l'article 1er sont évalués par une commission composée et présidée par le fonctionnaire visé à l'article 35 du décret du 4 mars 1991 relatif à l'aide à la jeunesse, ci-après appelée la Commission.

Outre son président, la Commission est composée d'un ou plusieurs agents du ministère de la Communauté française désignés en raison de leur expérience en matière d'évaluation des membres du personnel exerçant leur fonction dans le secteur de l'aide à la jeunesse.

L'évaluation porte en tout cas sur la capacité des candidats à aborder et à rencontrer les situations pratiques qui participent de l'exercice de la fonction correspondant à l'emploi dont ils postulent la nomination à titre définitif.

Art. 3.Le SELOR adjoint à la Commission un fonctionnaire compétent en matière de sélection.

Le fonctionnaire ainsi désigné par le SELOR formule toute suggestion utile au bon déroulement et à l'efficience de l'évaluation.

Il a la faculté d'adjoindre son avis écrit au rapport d'évaluation.

Art. 4.Chaque évaluation fait l'objet d'un rapport motivé qui se conclut par une mention d'évaluation soit favorable soit défavorable.

Il est notifié au membre du personnel concerné qui vise et date le rapport qu'il restitue, accompagné s'il échet de ses observations, dans les quinze jours de sa réception.

La décision définitive d'évaluation est notifiée au membre du personnel dans le mois qui suit la restitution du rapport et le dossier complet de la procédure est transmis au Gouvernement.

Art. 5.Le Gouvernement nomme à titre définitif les membres du personnel bénéficiant d'une évaluation favorable en application de l'article 4, dernier alinéa ».

Quant à l'intérêt des parties requérantes B.5. La Constitution et la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage imposent à toute personne physique ou morale qui introduit un recours en annulation de justifier d'un intérêt. Ne justifient de l'intérêt requis que les personnes dont la situation pourrait être affectée directement et défavorablement par la norme entreprise.

B.6.1. Le Gouvernement de la Communauté française ne conteste pas que les requérants sont des agents de ses services qui, avant l'adoption du décret attaqué, étaient susceptibles de prétendre à la nomination dans l'un des grades concernés par ce décret, que ce soit via une procédure de recrutement ou une procédure de promotion.

B.6.2. La circonstance que le décret attaqué ne permet pas une nomination à titre définitif pour tous les emplois de conseiller, de directeur, de conseiller adjoint ou de directeur adjoint de l'aide à la jeunesse n'est pas de nature à remettre en cause l'intérêt des trois requérants à demander l'annulation des dispositions décrétales précitées.

Quant à l'ordre d'examen des moyens B.7. Même s'il allègue une violation des articles 10 et 11 de la Constitution, le deuxième moyen du premier requérant - comme son troisième moyen et le second moyen de la seconde partie requérante - invite la Cour à examiner si les articles 2 à 5 du décret sont conformes à l'article 87, § 2, alinéa 1er, deuxième phrase, de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles.

Les autres moyens des trois requérants dénoncent une violation du principe d'égalité et de non-discrimination.

B.8. L'examen de la conformité d'une disposition entreprise aux règles répartitrices de compétences doit précéder celui de sa compatibilité avec les articles 10 et 11 de la Constitution.

Quant aux moyens pris de la violation de l'article 87, § 2, alinéa 1er, deuxième phrase, de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles par les articles 2 à 5 du décret attaqué B.9. L'alinéa 1er de l'article 87, § 2, précité dispose : « Chaque Gouvernement fixe le cadre du personnel de son administration et procède aux nominations. Ce personnel est recruté par l'intermédiaire du Secrétariat permanent de recrutement du personnel de l'Etat ».

B.10. La seconde phrase de cet alinéa, qui limite l'autonomie des entités fédérées, impose à chaque gouvernement de recruter son personnel statutaire par l'intermédiaire du Secrétariat permanent de recrutement du personnel de l'Etat, aujourd'hui « SELOR ».

Cette disposition exige que le SELOR organise les épreuves de sélection des candidats les plus aptes à remplir les fonctions publiques dans les services des gouvernements des entités fédérées.

B.11. Les articles 2 à 5 du décret attaqué établissent un mode particulier de recrutement réservé aux personnes visées en B.2.2 qui exercent encore les attributions de conseiller (adjoint) ou de directeur (adjoint) de l'aide à la jeunesse.

Reposant sur le constat que le recrutement mené sur la base de l'arrêté de l'Exécutif de la Communauté française du 29 novembre 1991 cité en B.2.1 n'a pas eu lieu « par l'intermédiaire » du Secrétariat permanent de recrutement du personnel de l'Etat, le décret attaqué a pour objet essentiel de satisfaire à cette exigence qui découle de la seconde phrase de l'article 87, § 2, alinéa 1er (Doc. parl., Parlement de la Communauté française, 2002-2003, n° 437-2, p. 2).

B.12.1. La commission d'évaluation créée par le décret attaqué est présidée par le fonctionnaire dirigeant de l'Administration de l'aide à la jeunesse du ministère de la Communauté française. C'est à ce fonctionnaire qu'il appartient de composer cette commission en désignant « un ou plusieurs agents » de ce ministère « en raison de leur expérience en matière d'évaluation des membres du personnel exerçant leur fonction dans le secteur de l'aide à la jeunesse ».

Le décret prévoit aussi que c'est le Gouvernement qui reçoit les demandes de nomination, et précise le délai dans lequel elles doivent lui être adressées, sans prévoir d'appel aux candidats spécifique.

Le décret fixe par ailleurs le délai dans lequel la commission doit statuer sur les candidatures, détermine quelques éléments à prendre en compte lors de l'évaluation des candidats qui est « diligentée sous l'autorité du fonctionnaire » précité (Doc. parl., Parlement de la Communauté française, 2002-2003, n° 437-1, p. 3), organise la procédure d'évaluation et précise la forme de la communication du résultat intermédiaire et du résultat final qui lie le Gouvernement.

B.12.2. L'obligation faite au SELOR de désigner un fonctionnaire compétent en matière de sélection, chargé de « formule[r] toute suggestion utile au bon déroulement et à l'efficience de l'évaluation » et autorisé à « adjoindre son avis écrit au rapport d'évaluation » vise à « associe[r] le SELOR à la procédure d'évaluation conformément à l'article 87, § 2 » précité en lui « garanti[ssan]t pleinement son autonomie d'intervention » (Doc. parl., Parlement de la Communauté française, 2002-2003, n° 437-1, p. 3).

B.12.3. Cette association d'un fonctionnaire du SELOR n'ôte rien au fait que la procédure de recrutement instaurée par le décret attaqué, qui prive le SELOR de tout pouvoir d'organisation, ne respecte pas l'article 87, § 2, alinéa 1er, deuxième phrase, de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles.

B.12.4. Les moyens dénonçant la violation de cette disposition sont fondés.

Quant aux moyens pris de la violation des articles 10 et 11 de la Constitution par l'article 1er du décret attaqué B.13. Les deux premiers requérants allèguent le caractère discriminatoire de la différence de traitement que crée le décret attaqué entre, d'une part, les personnes visées à l'article 1er de ce décret et, d'autre part, celles qui, sans jamais avoir exercé les fonctions de conseiller (adjoint) ou de directeur (adjoint) de l'aide à la jeunesse, remplissent les conditions de participation aux concours de recrutement dont il est question à l'article 2 de l'arrêté précité du 7 janvier 1999.

Seules les premières peuvent participer à la procédure de recrutement instaurée par le décret attaqué qui déroge aux règles de cet arrêté.

B.14. La situation de personnes bénéficiaires d'une procédure particulière de recrutement à des emplois publics peut être comparée à celle des personnes qui remplissent les conditions de recrutement fixées antérieurement pour ces emplois.

B.15. Le décret attaqué a pour objet de permettre aux personnes qui sont, au moment de l'adoption de ce décret, titulaires des fonctions concernées et qui satisfont aux conditions générales de recrutement de l'arrêté royal du 22 décembre 2000 « fixant les principes généraux du statut administratif et pécuniaire des agents de l'Etat applicables au personnel des services des Gouvernements de Communauté et de Région et des Collèges de la Commission communautaire commune et de la Commission communautaire française ainsi qu'aux personnes morales de droit public qui en dépendent », d'être directement recrutées à titre statutaire dans les emplois correspondant à ces fonctions.

Le législateur décrétal souhaite, par l'adoption du décret attaqué, tenir compte des circonstances dans lesquelles les titulaires de ces fonctions alors en place ont été désignés, en ayant égard « à l'expérience et à la prise de responsabilité de celles et ceux qui se sont investis quotidiennement dans ces fonctions particulièrement astreignantes » (Doc. parl., Parlement de la Communauté française, 2002-2003, n° 437-1, p. 2).

L'objectif poursuivi est plus précisément la régularisation de la situation des personnes admises au stage en 1993 et qui exercent encore les fonctions de directeur (adjoint) ou de conseiller (adjoint) de l'aide à la jeunesse (Doc. parl., Parlement de la Communauté française, 2002-2003, n° 437-2, p. 2).

B.16. Le principe de l'égalité d'accès à la fonction publique et celui selon lequel les nominations s'effectuent conformément à des règles de droit fixées au préalable, de manière générale et objective, constituent un corollaire des articles 10 et 11 de la Constitution.

Une dérogation, fût-elle législative, à ces règles générales doit reposer sur des raisons d'intérêt général suffisantes pour justifier une atteinte à la cohérence du statut du personnel.

B.17. En l'espèce, de telles raisons n'apparaissent pas.

Les auteurs de l'arrêté précité du 7 janvier 1999 envisageaient l'organisation d'un concours de recrutement dans les cinq années suivant l'adoption de ce statut (Rapport au Gouvernement de la Communauté française, Moniteur belge , 22 janvier 1999, p. 1843).

Compte tenu de l'objectif évoqué en B.3.1 et des contestations suscitées pendant près de dix ans par le processus de recrutement aux emplois précités, la Cour n'aperçoit pas en quoi l'intérêt général commande de prévoir, pour des personnes dont le législateur décrétal souligne par ailleurs l'expérience et la qualité, une procédure de recrutement particulière à laquelle ne peuvent prendre part les personnes qui remplissent les conditions statutaires de recrutement arrêtées près de cinq ans auparavant, telles que la possession d'une expérience utile en rapport avec la fonction à conférer.

Les moyens qui, dans les affaires nos 2952 et 2969, sont pris de la violation des articles 10 et 11 de la Constitution, sont dès lors fondés.

B.18. La troisième partie requérante allègue le caractère discriminatoire du traitement différent que réserve le décret attaqué à deux catégories de personnes qui, au moment de son entrée en vigueur, exerçaient les fonctions de conseiller (adjoint) ou de directeur (adjoint) de l'aide à la jeunesse.

Seules celles qui ont été engagées sur la base d'un diplôme en rapport avec la fonction à exercer et à la suite d'un appel aux candidats publié au Moniteur belge peuvent participer à la procédure de recrutement instituée par le décret attaqué.

Il ressort des travaux préparatoires que seules les personnes visées en B.2.2 correspondent à ce profil. Celles qui, comme la requérante, ont été désignées en 1996 ou 1997 ne sont dès lors pas concernées par cette procédure.

B.19. Compte tenu du caractère fondé des autres moyens pris de la violation des articles 10 et 11 de la Constitution, la Cour ne doit pas examiner le moyen invoqué dans l'affaire n° 3021, puisqu'il ne pourrait aboutir à une annulation plus étendue.

Par ces motifs, la Cour annule les articles 1er à 5 du décret de la Communauté française du 19 novembre 2003 « portant des dispositions particulières relatives à l'attribution des emplois aux fonctions définies par le titre V du décret du 4 mars 1991 relatif à l'aide à la Jeunesse ».

Ainsi prononcé en langue française, en langue néerlandaise et en langue allemande, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage, à l'audience publique du 1er juin 2005.

Le greffier, P.-Y. Dutilleux.

Le président f.f., P. Martens.

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