publié le 28 mai 2004
Extrait de l'arrêt n° 69/2004 du 5 mai 2004 Numéros du rôle : 2671 et 2673 En cause : les recours en annulation de l'article 47, § 2, 38°, du décret de la Région flamande du 2 juillet 1981 relatif à la prévention et à la gestion des d La Cour d'arbitrage, composée des présidents A. Arts et M. Melchior, et des juges R. Henneuse, (...)
COUR D'ARBITRAGE
Extrait de l'arrêt n° 69/2004 du 5 mai 2004 Numéros du rôle : 2671 et 2673 En cause : les recours en annulation de l'article 47, § 2, 38°, du décret de la Région flamande du 2 juillet 1981 relatif à la prévention et à la gestion des déchets, tel qu'il a été inséré par l'article 22 du décret du 5 juillet 2002 contenant diverses mesures d'accompagnement du budget 2002, introduits par la s.a. André Celis, la s.a. André Celis Containers et la s.a. Van Pelt Bouwmaterialen.
La Cour d'arbitrage, composée des présidents A. Arts et M. Melchior, et des juges R. Henneuse, E. De Groot, L. Lavrysen, J.-P. Snappe et E. Derycke, assistée du greffier L. Potoms, présidée par le président A. Arts, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet des recours et procédure Par requêtes adressées à la Cour par lettres recommandées à la poste les 18 et 19 mars 2003 et parvenues au greffe les 19 et 20 mars 2003, un recours en annulation de l'article 47, § 2, 38°, du décret de la Région flamande du 2 juillet 1981 relatif à la prévention et à la gestion des déchets, tel qu'il a été inséré par le décret du 5 juillet 2002 contenant diverses mesures d'accompagnement du budget 2002 (publié au Moniteur belge du 19 septembre 2002) a été introduit par : - la s.a. André Celis et la s.a. André Celis Containers, ayant chacune leur siège social à 3210 Lubbeek, Staatsbaan 119; - la s.a. Van Pelt Bouwmaterialen, dont le siège social est établi à 2980 Zoersel, Kapellei 157.
Ces affaires, inscrites sous les numéros 2671 et 2673 du rôle de la Cour, ont été jointes. (...) II. En droit (...) Objet et étendue des recours B.1. Les recours en annulation portent sur l'article 47, § 2, 38°, du décret de la Région flamande du 2 juillet 1981 relatif à la prévention et à la gestion des déchets, tel qu'il a été inséré par l'article 22 du décret du 5 juillet 2002 contenant diverses mesures d'accompagnement du budget 2002.
La disposition entreprise, qui figure au chapitre IX - « Redevances » du décret précité du 2 juillet 1981 énonce : « 38° 6,2 euros/tonne pour la mise en décharge dans un établissement autorisé à cet effet et 1,24 euro/tonne pour l'incinération dans un établissement autorisé à cet effet, de résidus de recyclage provenant d'entreprises qui utilisent ou trient des déchets collectés sélectivement, mentionnés ci-dessous, comme matière première pour la production de nouveaux produits.
La fraction résiduaire à mettre en décharge ou à incinérer doit, après prétraitement, être inférieure aux pourcentages ci-dessous lesquels doivent se rapporter à l'acheminement total des déchets en question, sur base annuelle, vers l'établissement autorisé : - 5 pour cent en poids pour déchets de papier et de carton; - 15 pour cent en poids pour déchets de verre; - 13 pour cent en poids pour déchets de chiffons; - 25 pour cent en poids pour déchets plastiques, valable pour les entreprises utilisant des déchets plastiques pour la production de nouveaux produits; - 5 pour cent en poids pour déchets plastiques, valables pour les entreprises qui trient les déchets plastiques; - 10 pour cent en poids pour déchets de ferraille électronique et électrique; - 10 pour cent en poids pour déchets de ferraille; - 20 pour cent en poids pour déchets de bois; - 5 pour cent en poids pour déchets verts; - 5 pour cent en poids pour déchets de polystyrène expansé; - 10 pour cent en poids pour déchets de légumes, de fruits et de jardin (GFT); - 11 pour cent en poids pour le mélange de déchets de légumes, de fruits et de jardin et de couches usées; - 5 pour cent en poids pour déchets de construction et de démolition; - 10 pour cent en poids pour déchets de caoutchouc, autres que déchets de pneus; - 5 pour cent en poids pour déchets de pneus; - 20 pour cent en poids pour déchets plastiques, emballages métalliques et briques pour boissons (PMD); - 25 pour cent en poids pour déchets de compactage/flottation issus de la transformation de ferraille; - 5 pour cent en poids pour déchets alimentaires; - 25 pour cent en poids pour solvants usés.
Les pourcentages en poids mentionnés valent pour l'incinération et la mise en décharge ensemble.
La mise en décharge dans un établissement autorisé à cet effet, ou l'incinération dans un établissement autorisé à cet effet, de déchets provenant de la collecte sélective de déchets de papier ou de carton ou du prétraitement comme matière première par l'établissement autorisé pour la production de nouveau papier ou carton, est soumis à un tarif de 1,24 euro par tonne.
La mise en décharge dans un établissement autorisé à cet effet, ou l'incinération dans un établissement autorisé à cet effet, de résidus de recyclage provenant d'établissements qui utilisent ou trient les déchets de verre collectés sélectivement comme matière première pour la production de verre, est soumis à un tarif de 0 euro par tonne.
Il y a lieu de considérer comme base annuelle les quatre derniers trimestres connus qui précèdent le trimestre de la mise en décharge ou de l'incinération des déchets. » B.2. La Cour doit déterminer l'étendue des recours en annulation sur la base du contenu des requêtes et en particulier sur la base de l'exposé des moyens.
Les recours sont dirigés contre l'ensemble du 38° de l'article 47, § 2, du décret du 2 juillet 1981, tel qu'il a été inséré par l'article 22 du décret du 5 juillet 2002. Les moyens ne critiquent cependant que l'alinéa 2, 13ème tiret, dudit 38°, en tant qu'il prévoit « 5 pour cent en poids pour déchets de construction et de démolition ». La Cour limite son examen à cette disposition. En outre, les parties requérantes qui sont actives dans le secteur du recyclage des déchets de construction et de démolition ne justifient d'un intérêt qu'à cette partie du 38° précité.
Exceptions du Gouvernement flamand et du Gouvernement wallon B.3. Les parties requérantes articulent cinq moyens, tous fondés sur la violation des articles 10 et 11 de la Constitution, lus ou non en combinaison avec la liberté de commerce et d'industrie ou avec des dispositions de droit européen. Le second moyen dénonce également la violation des règles répartitrices de compétences.
Le Gouvernement flamand et le Gouvernement wallon soulèvent une série d'exceptions qui tiennent, d'une part, à l'incompétence de la Cour pour connaître de certains moyens ou de certaines branches et, d'autre part, à l'irrecevabilité de certains moyens ou de certaines branches.
B.4.1. En tant que les premier, troisième et quatrième moyens invoquent directement la violation de la liberté de commerce et d'industrie, le Gouvernement flamand estime que la Cour ne saurait en connaître.
B.4.2. Ni l'article 142 de la Constitution, ni la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage n'ont habilité la Cour à contrôler directement des normes législatives au regard du principe de la liberté de commerce et d'industrie.
Les premier, troisième et quatrième moyens sont irrecevables en tant qu'ils invitent à exercer un contrôle direct au regard de la liberté de commerce et d'industrie.
B.5.1. Le Gouvernement flamand estime que la Cour n'est pas compétente pour connaître du cinquième moyen, en tant qu'il est fondé sur la violation directe des articles 1er, 8 et 9 de la directive 98/34/CE du 22 juin 1998 concernant la procédure d'information dans le domaine des normes et réglementations techniques.
B.5.2. En tant que le cinquième moyen invite à exercer un contrôle direct au regard des dispositions de droit européen précitées, la Cour est sans compétence pour en connaître, de sorte que ce moyen est irrecevable dans cette mesure.
B.6.1. Le Gouvernement flamand et le Gouvernement wallon soutiennent que les troisième, quatrième et cinquième moyens sont irrecevables du fait qu'ils critiquent, non la disposition entreprise, mais l'arrêté du Gouvernement flamand du 17 décembre 1997 fixant le règlement flamand relatif à la prévention et à la gestion des déchets (le VLAREA) ou éventuellement les articles du décret du 2 juillet 1981 relatif aux déchets qui constituent le fondement du VLAREA. B.6.2. En tant que les griefs qui sont exposés aux troisième, quatrième et cinquième moyens ne peuvent être imputés à la disposition entreprise, mais au VLAREA, en particulier à une série de dispositions figurant au chapitre 4 - « De l'utilisation des déchets en tant que matériaux secondaires » et à l'annexe 4.1, ces moyens sont irrecevables dans cette mesure. Par ailleurs, la Cour n'est pas compétente pour contrôler la disposition litigieuse au regard d'un arrêté du Gouvernement flamand, en l'espèce le VLAREA. En tant que les griefs qui sont formulés dans les troisième, quatrième et cinquième moyens doivent, le cas échéant, être imputés aux dispositions du décret du 2 juillet 1981 relatif aux déchets qui constituent le fondement juridique du VLAREA et que les recours seraient réputés dirigés contre ces dispositions, ces recours sont irrecevables, dès lors que le délai d'introduction d'un recours en annulation contre ces dispositions du décret relatif aux déchets est expiré. La circonstance que les parties requérantes affirment n'avoir intérêt à l'annulation des dispositions précitées du décret du 2 juillet 1981 que depuis l'entrée en vigueur de la disposition entreprise, n'y change rien.
Quant au fond Quant au premier moyen B.7.1. Selon les parties requérantes, la disposition entreprise viole les articles 10 et 11 de la Constitution en ce que les déchets de chiffons et les déchets plastiques se voient appliquer un pourcentage en poids supérieur, pour la fraction résiduaire à mettre en décharge ou à incinérer - respectivement 13 p.c. et 25 p.c. -, à celui applicable aux déchets de construction et de démolition, fixé à 5 p.c.
B.7.2. Selon le Gouvernement flamand, le secteur des déchets de construction et de démolition n'est pas comparable au secteur des déchets textiles et des déchets plastiques.
B.7.3. Les déchets de construction et de démolition diffèrent certes des déchets textiles et des déchets plastiques, mais il ne s'ensuit pas que ces secteurs ne seraient pas comparables au regard d'une mesure qui prévoit des pourcentages en poids maximaux de ces différents déchets pour pouvoir bénéficier d'une « redevance » d'environnement réduite.
L'exception du Gouvernement flamand est rejetée.
B.8. Au cours des travaux préparatoires, l'objectif poursuivi par l'article 22 entrepris et les moyens utilisés pour l'atteindre ont été présentés comme suit : « Il convient de continuer à stimuler la réutilisation et le recyclage de déchets.
En effet, ce sont les secteurs du recyclage mentionnés dans le décret dont la viabilité serait compromise s'ils ne pouvaient plus bénéficier du taux réduit.
Pour continuer de stimuler la réutilisation et le recyclage de déchets, l'article 47, § 2, du décret relatif aux déchets a subi plusieurs modifications en 1996. Plusieurs dispositions y ont été ajoutées.
Il s'agissait de manière générale de l'application d'un taux réduit pour les ' résidus de recyclage d'entreprises qui utilisent ou qui trient principalement, comme matières premières pour la fabrication de nouveaux produits, des déchets provenant de collectes sélectives '.
Simplification de la législation Dans un souci de simplification de la législation, l'on a souhaité regrouper les diverses dispositions et maintenir un seul taux réduit pour la mise en décharge et un seul taux réduit pour l'incinération.
En outre, auparavant, la quantité de résidus qu'une entreprise pouvait mettre en décharge ou incinérer au taux réduit était illimitée. Le terme ' principalement ' était utilisé dans la législation pour mettre en décharge ou incinérer comme résidus de recyclage une grande quantité de déchets non triés.
Dans la pratique, il était donc parfois fait un usage impropre des ' redevances ' réduites et des quantités substantielles de déchets multiflux (donc non issus de collectes sélectives) étaient mises en décharge et incinérées au taux réduit.
Cette pratique est contraire au stimulant que l'on entend donner au triage à la source. Le but est de collecter de façon sélective le plus de déchets possible avant que ces déchets aboutissent auprès de l'entreprise de tri ou du producteur de nouveaux produits pour transformation.
Pourcentages en poids Cela n'est possible que si l'on veille à ce que la fraction résiduaire que l'on obtient pour ce type de déchets soit la plus petite possible et si l'on définit explicitement les flux de déchets sélectifs.
En instaurant des pourcentages en poids par flux de déchets pour les résidus de recyclage (décret-programme juin 2001, entré en vigueur le 1er janvier 2002), ce but peut être réalisé. Tout ce qui dépasse le pourcentage en poids mentionné est taxé au taux ordinaire. Pour les déchets de papier et de carton et pour les déchets de verre, un régime plus souple est prévu, étant donné la situation spécifique du marché.
Les pourcentages en poids sont établis en concertation avec les divers secteurs.
Ils visent à promouvoir davantage la collecte par flux de déchets, les ' monoflux '. En outre, ils ont été conçus de manière à ce que certaines entreprises puissent rester viables. De nombreuses entreprises ont entamé leur activité (de tri) et étaient concurrentielles, précisément du fait qu'elles pouvaient bénéficier du taux réduit pour la mise en décharge ou l'incinération de leurs résidus de recyclage.
Adaptations Bien que les pourcentages en poids aient d'abord été établis en concertation avec les secteurs, une série de modifications se sont imposées. De cette manière, les pourcentages ont été adaptés à la réalité. Par le biais du présent décret-programme, ces pourcentages sont fixés avec effet rétroactif au 1er janvier 2002.
Il s'agit de : * 13 p.c. en poids pour les déchets de chiffons auparavant 10 p.c. en poids. Dans le secteur du textile, l'on constate actuellement un problème de débouchés et un haut niveau de pollution; * 25 p.c. en poids pour les déchets plastiques, applicables aux entreprises qui utilisent des déchets plastiques comme matières premières pour la confection de nouveaux produits il s'agissait auparavant de 5 p.c. en poids tant pour le trieur que pour le producteur de nouveaux produits. Le pourcentage en poids pour le trieur (5 p.c.) peut être maintenu, le producteur de nouveaux produits étant dans l'impossibilité d'adapter son processus de production; 25 p.c. en poids est ici vraiment le minimum. L'adaptation est nécessaire pour garantir les chances de survie de ces entreprises qui transforment des flux plastiques mixtes; * 5 p.c. en poids pour les déchets de construction et de démolition auparavant 20 p.c. en poids. Dans ce secteur, il est souvent fait un usage impropre de la ' redevance ' réduite. Pour éviter des abus à l'avenir, l'on devient plus sévère et l'on réduit donc les pourcentages en poids. » (Doc., Parlement flamand, 2001-2002, n° 1177/1, pp. 10-11) Le ministre de l'Environnement compétent a déclaré en Commission de l'environnement du Parlement flamand : « A l'occasion du contrôle budgétaire 2001, le régime relatif aux résidus de recyclage a été adapté afin de stimuler davantage la réutilisation et le recyclage de déchets. L'adaptation s'est faite en instaurant des pourcentages en poids par flux de déchets pour les résidus de recyclage (décret du 6 juillet 2001 contenant diverses mesures d'accompagnement de l'ajustement du budget 2001).
L'application du taux réduit pour les résidus de recyclage est encore affinée dans le décret-programme qui vous est soumis. Bien que les pourcentages en poids aient d'abord été établis en concertation avec les secteurs, plusieurs modifications s'imposent néanmoins. De cette manière, les pourcentages sont mieux adaptés à la réalité ». (Doc., Parlement flamand, 2001-2002, n° 1177/9, pp. 4-5) B.9.1. Il appartient au législateur décrétal, dans l'exercice de ses attributions en matière d'environnement, de prendre des mesures visant à stimuler la réutilisation et le recyclage de déchets. Pour atteindre cet objectif, il peut fixer, pour les résidus de recyclage, des pourcentages en poids, par flux de déchets, qui ont pour conséquence que le montant de la taxe d'environnement due pour la mise en décharge ou l'incinération de ces résidus diffère.
Le législateur décrétal dispose en la matière d'une marge d'appréciation large. La Cour ne peut déclarer une différence de traitement inconstitutionnelle que s'il n'existe pour ce faire aucune justification raisonnable.
B.9.2. La rigueur qui découle inévitablement de l'utilisation de pourcentages en poids, par flux de déchets, pour les résidus de recyclage peut se justifier par le fait que le législateur décrétal entend plutôt légiférer par catégorie au lieu de tenir compte de caractéristiques particulières propres à chaque cas individuel, de sorte qu'il convient d'admettre que, sauf erreur manifeste, ces catégories n'appréhendent nécessairement la diversité des situations qu'avec un certain degré d'approximation.
B.10. Le recours au procédé des critères généraux n'est pas déraisonnable en soi; il convient néanmoins d'examiner si les critères employés peuvent raisonnablement se justifier à la lumière des articles 10 et 11 de la Constitution.
B.11.1. En vue de fixer le pourcentage en poids, par flux de déchets, pour les résidus de recyclage, le législateur décrétal a cherché un équilibre entre des considérations environnementales et des considérations économiques : un pourcentage trop élevé n'est pas de nature à promouvoir la réutilisation et le recyclage des déchets et pourrait favoriser un usage impropre du taux réduit; un pourcentage trop bas peut, compte tenu des résultats qui peuvent être atteints à l'aide de la meilleure technologie disponible sur le plan du recyclage des flux de déchets en question, compromettre la viabilité économique de certains secteurs de recyclage.
B.11.2. Les travaux préparatoires précités font apparaître que l'augmentation du pourcentage en poids pour les déchets de chiffons (de 10 à 13 p.c.) et pour les déchets plastiques (le cas échéant, de 5 à 25 p.c.) était dictée par le souci de ne pas compromettre la viabilité économique de ces secteurs, compte tenu de la meilleure technologie disponible.
L'abaissement du pourcentage en poids pour les déchets de construction et de démolition (de 20 à 5 p.c.) a été justifié par l'usage impropre qui a été fait dans ce secteur du taux réduit de la taxe d'environnement. Afin d'empêcher à l'avenir ce genre d'abus, le pourcentage en poids pour les déchets de construction et de démolition a été abaissé (Doc., Parlement flamand, 2001-2002, n° 1177/1, p. 11; ibid., n° 1177/9, pp. 5 et 11). Par ailleurs, les pourcentages en poids ont été « adaptés à la réalité » (Doc., Parlement flamand, 2001-2002, n° 1177/1, p. 11; ibid., n° 1177/9, p. 5).
B.11.3. Ces précisions font apparaître que la différence entre les pourcentages en poids pour, d'une part, les déchets de chiffons et les déchets plastiques et, d'autre part, les déchets de construction et de démolition n'est pas dénuée de justification raisonnable.
B.12. Le premier moyen ne peut être accueilli.
Quant au second moyen B.13. Les parties requérantes font valoir que la disposition entreprise viole l'article 9, § 1er, alinéa 3, de la loi spéciale du 16 janvier 1989 relative au financement des communautés et des régions, l'article 6, § 1er, VI, alinéa 3, de la loi spéciale du 8 août 1980 et les articles 10 et 11 de la Constitution.
B.14. L'article 9, § 1er, alinéa 3, de la loi spéciale précitée du 16 janvier 1989 énonce : « Un pourcentage global maximal est appliqué au total des réductions et des augmentations générales d'impôt, des centimes additionnels et des réductions d'impôt visés à l'alinéa 1. A partir du 1er janvier 2001, ce pourcentage maximal s'élève à 3,25 p.c. et à 6,75 p.c. à partir du 1er janvier 2004, du produit de l'impôt des personnes physiques visé à l'article 7, § 2, qui est localisé dans chaque région. Sans dépasser ce pourcentage maximal, les régions peuvent : 1° instaurer des centimes additionnels proportionnels généraux et des réductions d'impôt générales, forfaitaires ou proportionnelles, différenciés ou non par tranches de l'impôt;2° accorder des réductions et des augmentations générales d'impôts comme il est prévu à l'article 6, § 2, alinéa 1er, 4°.» Cet article n'est pas violé par la disposition attaquée. En effet, l'alinéa 3 précité renvoie à l'alinéa 1er de l'article 9, § 1er, dans lequel il est question « de réductions ou d'augmentations générales d'impôt, de centimes additionnels ou de réductions d'impôt, visés à l'article 6, § 2, alinéa 1er, 3° et 4° », lesquels portent exclusivement sur l'« impôt conjoint » qu'est l'impôt des personnes physiques, et donc pas sur la « redevance » d'environnement attaquée en l'espèce.
B.15.1. Les parties requérantes estiment que la disposition entreprise viole également l'article 6, § 1er, VI, alinéa 3, de la loi spéciale précitée du 8 août 1980 et les articles 10 et 11 de la Constitution, en ce que les critères pour pouvoir mettre en décharge ou incinérer les déchets de construction et de démolition au taux réduit ne sont sévères qu'en Région flamande. Selon elles, la libre circulation des biens depuis la Région flamande et vers elle serait compromise et le régime entrepris serait incompatible avec le cadre normatif général de l'union économique et monétaire.
B.15.2. L'article 6, § 1er, VI, alinéa 3, précité énonce : « En matière économique, les Régions exercent leurs compétences dans le respect des principes de la libre circulation des personnes, biens, services et capitaux et de la liberté de commerce et d'industrie, ainsi que dans le respect du cadre normatif général de l'union économique et de l'unité monétaire, tel qu'il est établi par ou en vertu de la loi, et par ou en vertu des traités internationaux. » Bien que l'article 6, § 1er, VI, alinéa 3, de la loi spéciale du 8 août 1980 s'inscrive dans l'attribution de compétences aux régions en ce qui concerne l'économie, cette disposition traduit la volonté du législateur spécial de maintenir une réglementation de base uniforme de l'organisation de l'économie dans un marché intégré.
L'existence d'une union économique implique au premier chef la libre circulation des marchandises et des facteurs de production entre les composantes de l'Etat. Sont incompatibles avec une union économique, s'agissant des échanges de biens, les mesures établies de façon autonome par les composantes de l'union - en l'espèce, les régions - qui entravent la libre circulation; il en va nécessairement ainsi pour tous droits de douane intérieurs et toutes taxes d'effet équivalent.
En l'espèce, le traitement neutre, d'un point de vue fiscal, n'entrave pas la libre circulation des déchets puisqu'un même tarif de taxation est applicable quelle que soit l'origine ou la destination de ces déchets. Pour pouvoir bénéficier de la « redevance » d'environnement réduite, la fraction résiduaire à mettre en décharge ou à incinérer de tous les déchets de construction et de démolition doit en effet être inférieure à 5 p.c. par rapport à l'apport total de ce type de déchets sur une base annuelle.
B.15.3. La circonstance qu'il n'existe pas, dans d'autres régions que la Région flamande, une réglementation pareille à celle prévue par la disposition litigieuse ne peut, en l'espèce, être utilement invoquée pour étayer une violation du principe d'égalité et de non-discrimination.
En effet, une différence de traitement dans des matières où les communautés et les régions disposent de compétences propres est la conséquence possible de politiques distinctes permises par l'autonomie qui leur est accordée par la Constitution ou en vertu de celle-ci. Une telle différence ne peut en soi être jugée contraire aux articles 10 et 11 de la Constitution. Cette autonomie sera dépourvue de signification si le seul fait qu'il existe des différences de traitement entre les destinataires de règles s'appliquant à une même matière dans les diverses communautés et régions était jugé contraire aux articles 10 et 11 de la Constitution.
B.15.4. En outre, l'article 47, § 1er, 43°, du décret relatif aux déchets - 38° avant d'être renuméroté par le décret du 5 juillet 2002 - vise à mettre fin à tout traitement inégal. Selon cette disposition, le montant de la « redevance » est fixé conformément aux « montants indiqués sous les points 1° à 42° inclus, suivant le procédé de traitement appliqué » et le montant de la « redevance » due en vertu du décret flamand est réduit lorsqu'une taxe d'environnement analogue est levée dans la région ou le pays où les déchets sont traités.
B.16. Le deuxième moyen ne peut être accueilli.
Quant aux troisième, quatrième et cinquième moyens B.17. Eu égard aux considérants B.4.1 à B.6.2, les troisième, quatrième et cinquième moyens ne sont examinés qu'en tant qu'ils invoquent une violation des articles 10 et 11 de la Constitution en ce que la disposition entreprise soumet au même pourcentage en poids les centres de tri pour les déchets de construction et de démolition, d'une part, et les entreprises qui exploitent une installation de concassage pour les déchets de construction et de démolition, d'autre part.
En outre, le cinquième moyen doit encore être examiné en tant qu'il invoque une violation des articles 10 et 11 de la Constitution, lus en combinaison avec les dispositions du Traité CE mentionnées au moyen.
B.18.1. Les règles constitutionnelles de l'égalité et de la non-discrimination n'excluent pas qu'une différence de traitement soit établie entre des catégories de personnes, pour autant qu'elle repose sur un critère objectif et qu'elle soit raisonnablement justifiée. Les mêmes règles s'opposent, par ailleurs, à ce que soient traitées de manière identique, sans qu'apparaisse une justification raisonnable, des catégories de personnes se trouvant dans des situations qui, au regard de la mesure considérée, sont essentiellement différentes.
L'existence d'une telle justification doit s'apprécier en tenant compte du but et des effets de la mesure critiquée ainsi que de la nature des principes en cause; le principe d'égalité est violé lorsqu'il est établi qu'il n'existe pas de rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et le but visé.
B.18.2. Le fait que la disposition entreprise ne fasse aucune distinction selon le procédé qui est utilisé pour recycler (trier ou concasser) les déchets de construction et de démolition, mais prenne uniquement comme critère le résultat à atteindre (une fraction résiduaire d'au maximum 5 p.c. en poids) est conforme, sans préjudice de ce qui a déjà été observé au B.9.2, avec l'objectif poursuivi par le législateur décrétal, consistant à stimuler davantage la réutilisation et le recyclage de déchets jusqu'au niveau qui peut être atteint en utilisant les meilleures techniques disponibles, et n'est pas disproportionné par rapport à cet objectif, même si cela peut avoir pour conséquence que les centres de tri sont encouragés à améliorer leurs méthodes de travail et sont obligés de consentir des investissements complémentaires ou doivent faire traiter ensuite certaines fractions de déchets par d'autres établissements spécialisés.
B.19. En tant qu'il dénonce la violation des articles 10 et 11 de la Constitution, lus en combinaison avec les dispositions du Traité C.E. invoquées au moyen, le cinquième moyen n'est pas fondé, pour les mêmes raisons, mutatis mutandis, que celles exposées au B.15.2 : la circulation internationale des déchets en question n'est pas entravée, dès lors que ceux-ci sont traités de la même manière et ce, quelle que soit l'origine ou la destination de ces déchets.
B.20. Les troisième, quatrième et cinquième moyens ne peuvent être accueillis.
Par ces motifs, la Cour rejette les recours.
Ainsi prononcé en langue néerlandaise, en langue française et en langue allemande, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage, à l'audience publique du 5 mai 2004.
Le greffier, L. Potoms Le président, A. Arts