publié le 18 avril 2001
Extrait de l'arrêt n° 16/2001 du 14 février 2001 Numéros du rôle : 1840, 1844, 1847, 1848, 1854, 1856, 1874, 1882, 1884, 1890, 1896, 1909 et 1912 En cause : les questions préjudicielles concernant les articles 189, 193, 194, 195, 196, 197, 22 La Cour d'arbitrage, composée des présidents G. De Baets et M. Melchior, et des juges P. Martens(...)
Extrait de l'arrêt n° 16/2001 du 14 février 2001 Numéros du rôle : 1840, 1844, 1847, 1848, 1854, 1856, 1874, 1882, 1884, 1890, 1896, 1909 et 1912 En cause : les questions préjudicielles concernant les articles 189, 193, 194, 195, 196, 197, 220, 222 et 267 et suivants de l'arrêté royal du 18 juillet 1977 portant coordination des dispositions générales relatives aux douanes et accises et concernant l'article 6, § 5, de la loi du 31 décembre 1947 relative au régime fiscal du tabac, posées par diverses juridictions.
La Cour d'arbitrage, composée des présidents G. De Baets et M. Melchior, et des juges P. Martens, J. Delruelle, R. Henneuse, M. Bossuyt et E. De Groot, assistée du greffier P.-Y. Dutilleux, présidée par le président G. De Baets, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet des questions préjudicielles a. Par arrêt du 8 décembre 1999 en cause du ministère public, du ministère des Finances, de la société de droit néerlandais Mobil Oil BV et d'autres contre la s.a. Etn. Rosseel et autres, dont l'expédition est parvenue au greffe de la Cour d'arbitrage le 10 décembre 1999, la Cour d'appel d'Anvers a posé la question préjudicielle visant à savoir : « si les articles 267 et suivants, soit le chapitre XXV de la loi générale (coordonnée par arrêté royal) du 18 juillet 1977 relative aux douanes et accises, violent les articles 10 et 11 de la Constitution au motif que, contrairement à l'action publique et à la procédure pénale en général, l'action publique et la procédure en matière de douanes et accises ne garantissent pas d'indépendance à l'inculpé-administré puisque l'Administration des douanes et accises fait à la fois office : - d'enquêteur qui - conformément aux réglementations en vigueur en matière d'importations, d'exportations et de transit communautaire - mène et dirige une information et est le seul à détenir chez lui des pièces à conviction essentielles, dont la production en cours de procédure conditionne le caractère fondé ou non de la prévention, - de partie poursuivante, qui détermine de manière autonome qui sera poursuivi et pour quels faits et à qui une transaction est proposée et - surabondamment d'intéressée, bénéficiaire des droits à acquitter par la partie poursuivie ».
Cette affaire est inscrite sous le numéro 1840 du rôle de la Cour. b. Par jugement du 13 décembre 1999 en cause du ministre des Finances et du ministère public contre W.Overmeire et autres, dont l'expédition est parvenue au greffe de la Cour d'arbitrage le 15 décembre 1999, le Tribunal correctionnel de Bruges a posé la question préjudicielle visant à savoir : « si les articles 267 et suivants, soit le chapitre XXV de la loi générale du 18 juillet 1977 relative aux douanes et accises, violent les articles 10 et 11 de la Constitution en ce que, contrairement à l'action publique et à la procédure pénale en général, ils ne garantissent pas d'indépendance à l'inculpé-administré puisque l'Administration des douanes et accises fait à la fois office : - d'enquêteur qui décide de manière exclusive quelles pièces à conviction essentielles il utilise, détient ou n'utilise pas et dont la production en cours de procédure conditionne le caractère fondé ou non de la prévention; - également de partie poursuivante; - surabondamment d'intéressée, bénéficiaire des droits qu'elle réclame aux parties citées, à acquitter, en cas de condamnation, par les prévenus; - et, en outre, conformément à l'arrêté du gouvernement du 17 août 1948, les agents de recherche perçoivent des rétributions pour la détection de la fraude, ce qui est en contradiction avec l'exigence d'impartialité ».
Cette affaire est inscrite sous le numéro 1844 du rôle de la Cour. c. Par jugement du 9 décembre 1999 en cause du ministère public, du ministère des Finances et de K.Verbiest contre A. Van Gils et autres, dont l'expédition est parvenue au greffe de la Cour d'arbitrage le 20 décembre 1999, le Tribunal correctionnel d'Anvers a posé la question préjudicielle suivante : « Les articles 193, 194, 195, 196, 197, 189 et 222, le chapitre XXV et les articles 267 à 272 et 279 à 284 qui y sont contenus de l'arrêté royal du 18 juillet 1977 portant coordination des dispositions générales en matière de douanes et accises, confirmé par l'article 1er de la loi du 6 juillet 1978, lus en combinaison avec l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme, violent-ils les articles 10 et 11 de la Constitution belge en ce que, contrairement à l'action publique et à la procédure pénale en général, l'action publique et la procédure pénale en matière de douanes et accises ne garantissent pas d'indépendance à l'inculpé, puisque, s'agissant des infractions en matière de douanes et accises, l'Administration des douanes et accises fait à la fois office : - d'enquêteur, - de partie poursuivante, - et enfin de partie intéressée, bénéficiaire des droits et accises, à acquitter, en cas de condamnation, par la partie poursuivie ? » Cette affaire est inscrite sous le numéro 1847 du rôle de la Cour. d. Par jugement du 6 décembre 1999 en cause du ministère des Finances et du ministère public contre F.Vanlerberghe et F. Du Tré, dont l'expédition est parvenue au greffe de la Cour d'arbitrage le 21 décembre 1999, le Tribunal correctionnel d'Anvers a posé la question préjudicielle visant à savoir : « si les articles 267 et suivants, soit le chapitre XXV de la loi générale du 18 juillet 1977 relative aux douanes et accises, violent les articles 10 et 11 de la Constitution au motif que, contrairement à l'action publique et à la procédure pénale en général, l'action publique et la procédure en matière de douanes et accises ne garantissent pas d'indépendance à l'inculpé-administré, puisque l'Administration des douanes et accises fait office : - d'enquêteur qui, conformément à la réglementation en vigueur en matière d'exportation vers d'autres pays que la Communauté européenne, est le seul à détenir chez lui des pièces à conviction essentielles, dont la production en cours de procédure conditionne le caractère fondé ou non de la prévention; - également de partie poursuivante; - et surabondamment d'intéressée, bénéficiaire de droits à acquitter, en cas de condamnation, par la partie poursuivie; - en outre, conformément à l'arrêté du gouvernement du 17 août 1948, les agents de recherche perçoivent des rétributions pour la détection de fraudes, ce qui est en contradiction avec l'exigence d'impartialité ».
Cette affaire est inscrite sous le numéro 1848 du rôle de la Cour. e. Par arrêt du 16 décembre 1999 en cause du ministère public et du ministre des Finances contre L.Vermeire et autres, dont l'expédition est parvenue au greffe de la Cour d'arbitrage le 24 décembre 1999, la Cour d'appel de Gand a posé la question préjudicielle visant à savoir : « si les articles 267 et suivants, soit le chapitre XXV de la loi générale du 18 juillet 1977 relative aux douanes et accises, viole les articles 10 et 11 de la Constitution au motif que, contrairement à l'action publique et à la procédure pénale en général, l'action publique et la procédure pénale en matière de douanes et accises ne garantissent pas d'indépendance à l'inculpé-administré, puisque l'Administration des douanes et accises fait office : - d'enquêteur; - également de partie poursuivante; - et surabondamment d'intéressée, bénéficiaire de droits, à acquitter, en cas de condamnation, par la partie poursuivante [lire : poursuivie] ».
Cette affaire est inscrite sous le numéro 1854 du rôle de la Cour. f. Par arrêt du 22 décembre 1999 en cause du ministère public et du ministre des Finances contre A.Mizrahi et autres, dont l'expédition est parvenue au greffe de la Cour d'arbitrage le 27 décembre 1999, la Cour d'appel d'Anvers a posé la question préjudicielle visant à savoir : « si les articles 267 et suivants, soit le chapitre XXV de la loi générale (coordonnée par arrêté royal) du 18 juillet 1977 relative aux douanes et accises, violent les articles 10 et 11 de la Constitution au motif que, contrairement à l'action publique et à la procédure pénale en général, l'action publique et la procédure en matière de douanes et accises ne garantissent pas d'indépendance à l'inculpé-administré puisque l'Administration des douanes et accises fait à la fois office : - d'enquêteur qui - conformément aux réglementations en vigueur en matière d'importations, d'exportations et de transit communautaire - mène et dirige une information et est le seul à détenir chez lui des pièces à conviction essentielles, dont la production en cours de procédure conditionne le caractère fondé ou non de la prévention, - de partie poursuivante, qui détermine de manière autonome qui sera poursuivi et pour quels faits et à qui une transaction est proposée et - surabondamment d'intéressée, bénéficiaire des droits à acquitter par la partie poursuivie ».
Cette affaire est inscrite sous le numéro 1856 du rôle de la Cour. g. Par arrêt du 6 janvier 2000 en cause du ministère public et du ministre des Finances contre P.Serry et autres, dont l'expédition est parvenue au greffe de la Cour d'arbitrage le 27 janvier 2000, la Cour d'appel de Gand a posé la question préjudicielle visant à savoir : « si les articles 267 et suivants, soit le chapitre XXV de la loi générale du 18 juillet 1977 relative aux douanes et accises, violent les articles 10 et 11 de la Constitution au motif que, contrairement à l'action publique et à la procédure pénale en général, l'action publique et la procédure pénale en matière de douanes et accises ne garantissent pas d'indépendance à l'inculpé-administré puisque l'Administration des douanes et accises fait à la fois office : - d'enquêteur, - également de partie poursuivante, - et surabondamment d'intéressée, bénéficiaire de droits à acquitter, en cas de condamnation, par la partie poursuivante [lire : poursuivie] ».
Cette affaire est inscrite sous le numéro 1874 du rôle de la Cour. h. Par jugement du 20 janvier 2000 en cause du ministère public contre A.Uyttebrouck et autres, dont l'expédition est parvenue au greffe de la Cour d'arbitrage le 15 février 2000, le Tribunal correctionnel d'Anvers a posé les questions préjudicielles suivantes : « 1. L'article 6, § 5, de la loi du 31 décembre 1947 relative au régime fiscal du tabac, juncto l'article 220 de la loi générale relative aux douanes et accises, viole-t-il les articles 10 et 11 de la Constitution, en ce qu'il ne permet pas au juge d'infliger une peine légère ou sévère appropriée au cas concret, alors que cette possibilité existe pour le juge qui doit se prononcer sur la base des dispositions pénales de droit commun ? 2. Les articles 193, 194, 195, 196 et 197, les articles 189 et 222, le chapitre XXV ainsi que les articles 267 à 272 et 279 à 184 [lire : 284] qui y sont notamment contenus de l'arrêté royal du 18 juin 1977 portant coordination des dispositions générales relatives aux douanes et accises, confirmé par l'article 1er de la loi du 6 juin 1978, lus en combinaison avec l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme, violent-ils les articles 10 et 11 de la Constitution belge, en ce que, contrairement à l'action publique et à la procédure pénale en général, l'action publique et la procédure pénale en matière de douanes et accises ne garantissent pas d'indépendance à l'inculpé puisque l'Administration des douanes et accises fait office, en matière d'infractions relatives aux douanes et accises, tout à la fois d'enquêteur, de partie poursuivante et de partie intéressée, bénéficiaire des droits et accises à acquitter, en cas de condamnation, par la partie poursuivie ? » Cette affaire est inscrite sous le numéro 1882 du rôle de la Cour.i. Par jugement du 7 janvier 2000 en cause du ministère public et de l'Etat belge contre A.Ravelli et la s.p.r.l. De Jaegher, dont l'expédition est parvenue au greffe de la Cour d'arbitrage le 15 février 2000, le Tribunal correctionnel de Louvain a posé la question préjudicielle suivante : « Les articles 267 et suivants, soit le chapitre XXV de la loi générale du 18 juillet 1977 relative aux douanes et accises, violent-ils les articles 10 et 11 de la Constitution en tant que les prévenus qui sont poursuivis et jugés sur la base de ces dispositions - comme en l'espèce - sont confrontés à une partie, l'Administration des douanes et accises, qui fait à la fois office d'enquêteur, de partie poursuivante, d'intéressée et de bénéficiaire de droits, ce qui ne serait pas le cas s'ils étaient poursuivis et jugés sur la base des règles ordinaires en matière d'action publique et de procédure pénale où ils ne sont pas confrontés à une telle partie privilégiée, et en tant qu'ils sont ou seraient de la sorte traités de manière inégale et discriminatoire ? » Cette affaire est inscrite sous le numéro 1884 du rôle de la Cour. j. Par jugement du 27 janvier 2000 en cause du ministère des Finances et du ministère public contre R.Devroe et autres, dont l'expédition est parvenue au greffe de la Cour d'arbitrage le 21 février 2000, le Tribunal correctionnel d'Anvers a posé la question préjudicielle visant à savoir : « si les articles 267 et suivants, soit le chapitre XXV de la loi générale du 18 juillet 1977 relative aux douanes et accises, ainsi que l'article 263 de la L.G.D.A. violent les articles 10 et 11 de la Constitution au motif que, contrairement à l'action publique et à la procédure pénale en général, l'action publique et la procédure pénale en matière de douanes et accises ne garantissent pas d'indépendance à l'inculpé-administré puisque l'Administration des douanes et accises fait à la fois office : - d'enquêteur qui - conformément aux réglementations en vigueur en matière d'importations, d'exportations et de transit communautaire etc. et conformément aux règles de procédure applicables - mène et dirige de façon autonome une information à caractère pénal et qui est le seul à détenir chez lui et/ou à recueillir des pièces à conviction essentielles, dont la production en cours de procédure conditionne ou peut conditionner le caractère fondé ou non de la prévention; - de partie poursuivante qui, en méconnaissance de la loi du 11 avril 1994 relative à la publicité de l'administration, détermine de manière inquisitoire et autonome qui sera poursuivi et pour quels faits et qui détermine aussi de manière discrétionnaire à quel inculpé-administré une transaction est proposée; - et de partie intéressée, bénéficiaire des droits à l'importation ainsi que des amendes et confiscations à acquitter, en cas de transaction ou de condamnation, par l'inculpé-administré ».
Cette affaire est inscrite sous le numéro 1890 du rôle de la Cour. k. Par jugement du 27 janvier 2000 en cause du ministère des Finances et du ministère public contre G.De Gres et autres, dont l'expédition est parvenue au greffe de la Cour d'arbitrage le 28 février 2000, le Tribunal correctionnel d'Anvers a posé la question préjudicielle visant à savoir : « si les articles 267 et suivants de la L.G.D.A., soit le chapitre XXV de la loi générale du 18 juillet 1977 relative aux douanes et accises, ainsi que l'article 263 de la L.G.D.A. violent les articles 10 et 11 de la Constitution au motif que, contrairement à l'action publique et à la procédure pénale en général, l'action publique et la procédure pénale en matière de douanes et accises ne garantissent pas d'indépendance à l'inculpé-administré puisque l'Administration des douanes et accises fait à la fois office : - d'enquêteur qui - conformément aux réglementations en vigueur en matière d'importations, d'exportations, de transit communautaire, etc. et conformément aux règles de procédure en vigueur - mène et dirige de manière autonome une information de nature pénale et est le seul à détenir chez lui et/ou à recueillir des pièces à conviction essentielles, dont la production en cours de procédure conditionne ou peut conditionner le caractère fondé ou non de la prévention; - de partie poursuivante, qui détermine de manière inquisitoire et autonome qui sera poursuivi et pour quels faits et qui détermine également de manière discrétionnaire à quel inculpé-administré une transaction est proposée; - et d'intéressée, bénéficiaire des droits à l'importation ainsi que des amendes et confiscations à acquitter, en cas de transaction ou de condamnation, par l'inculpé-administré ».
Cette affaire est inscrite sous le numéro 1896 du rôle de la Cour. l. Par jugement du 14 décembre 1999 en cause du ministre des Finances et du ministère public contre J.Mouton et autres, dont l'expédition est parvenue au greffe de la Cour d'arbitrage le 15 mars 2000, le Tribunal correctionnel de Furnes a posé la question préjudicielle visant à savoir : « si les articles 267 et suivants, soit le chapitre XXV de la loi générale du 18 juillet 1977 relative aux douanes et accises, [violent les articles 10 et 11 de la Constitution en ce que,] contrairement à l'action publique et à la procédure pénale en général, ils ne garantissent pas d'indépendance à l'inculpé-administré puisque l'Administration des douanes et accises fait à la fois office : - d'enquêteur qui - conformément à la réglementation en matière d'exportations vers d'autres pays que ceux de la Communauté européenne - est le seul à détenir chez lui des pièces à conviction essentielles, dont la production en cours de procédure conditionne le caractère fondé ou non de la prévention; - également de partie poursuivante; - et surabondamment d'intéressée, bénéficiaire des droits à acquitter, en cas de condamnation, par la partie poursuivante [lire : poursuivie] ».
Cette affaire est inscrite sous le numéro 1909 du rôle de la Cour. m. Par jugement du 28 février 2000 en cause du ministre des Finances et du ministère public contre H.Van Den Bossche et la s.a. Desbo Brandstoffen, dont l'expédition est parvenue au greffe de la Cour d'arbitrage le 16 mars 2000, le Tribunal correctionnel de Termonde a posé la question préjudicielle visant à savoir : « si les articles 267 et suivants, soit le chapitre XXV de la loi générale du 18 juillet 1977 relative aux douanes et accises, violent les articles 10 et 11 de la Constitution au motif que, contrairement à l'action publique et à la procédure pénale en général, l'action publique et la procédure pénale en matière de douanes et accises ne garantissent pas d'indépendance à l'inculpé-administré puisque l'Administration des douanes et accises fait à la fois office : - d'enquêteur qui - conformément à la réglementation en matière d'exportations vers d'autres pays que ceux de la Communauté européenne - est le seul à détenir chez lui des pièces à conviction essentielles, dont la production en cours de procédure conditionne le caractère fondé ou non de la prévention; - également de partie poursuivante; - et surabondamment d'intéressée, bénéficiaire de droits à acquitter, en cas de condamnation, par la partie poursuivante [lire : poursuivie] ».
Cette affaire est inscrite sous le numéro 1912 du rôle de la Cour. (...) IV. En droit (...) Quant aux questions préjudicielles relatives aux articles 189, 193 à 197, 222, 263 et 267 et suivants de la L.G.D.A. B.1. Les juridictions a quo demandent à la Cour si les articles 189, 193 à 197, 222, 263 et 267 et suivants de la loi générale sur les douanes et accises (ci-après : L.G.D.A.) violent les articles 10 et 11 de la Constitution, en ce que, par comparaison avec l'action publique et la procédure pénale en général, l'action publique et la procédure pénale en matière de douanes et accises n'offrent pas les mêmes garanties à l'inculpé.
B.2. Les dispositions en cause sont libellées comme suit : «
Art. 189.Les agents qui, en exécution des dispositions légales sur la recherche de la fraude en matière de douane et d'accise, pratiquent une visite dans une usine, un magasin ou un tout autre endroit, y compris le domicile privé d'un particulier, peuvent, s'ils ont le grade de vérificateur adjoint des douanes et accises ou un grade plus élevé, y saisir et emporter les livres, correspondances et documents quelconques de nature à établir la culpabilité des délinquants ou à mettre sur la trace de leurs complices. [Y]
Art. 193.Sont assujetties à la visite, entre cinq heures du matin et neuf heures du soir, les fabriques, les usines, vignobles, enclos, bâtis ou non bâtis, et terrains servant d'usines ou d'ateliers, boutiques ou tous autres lieux clos, dont la possession ou l'usage est assujetti à la formalité d'une admission de la part de l'administration, ou d'une déclaration à faire à ladite administration, ainsi que ceux où l'on exerce une industrie dont les produits sont soumis à l'accise, ou sont assujettis à quelque vérification en vertu des lois.
Art. 194.Les visites pourront aussi se faire la nuit dans les bâtiments, fabriques et autres lieux désignés à l'article 193, si l'on y travaille pendant ce temps.
Relativement aux fabriques pour lesquelles on doit déclarer l'époque à laquelle les travaux commenceront et finiront, et celles pour lesquelles la déclaration se fait à terme limité, telles que les brasseries, distilleries, on entendra par l'époque de leur activité celle mentionnée dans la déclaration, quand bien même les travaux seraient suspendus.
Art. 195.Lorsque les usines ne sont pas en activité, les visites ne pourront se faire avant cinq heures du matin ou après neuf heures du soir, que pour autant que les agents soient accompagnés d'un agent de l'administration communale ou d'un agent de l'autorité publique commis par le bourgmestre.
Art. 196.Les fabriques, usines et bâtiments devront toujours être accessibles pour les agents, pendant qu'on y travaillera, et il devra s'y trouver quelqu'un de la part des intéressés à même de donner les indications nécessaires lors de la visite.
Art. 197.A l'exception du rayon des douanes, et du cas prévu par l'article 174, on ne pourra faire aucune visite dans les bâtiments ou enclos des particuliers qu'entre cinq heures du matin et neuf heures du soir, et sur l'autorisation du juge au tribunal de police du canton dans lequel les bâtiments ou enclos à visiter sont situés. Ce magistrat accompagnera lui-même ou chargera son greffier ou autre agent de l'autorité publique, d'accompagner les agents dans leur visite. [...]
Art. 222.§ 1er. Seront également saisis et confisqués les navires ou embarcations, ainsi que les voitures, chariots ou autres moyens de transport, et leurs attelages ordinaires, employés à la fraude ou mis en usage à cet effet, quand les marchandises non déclarées y auront été placées dans des cachettes, ou bien encore quand aucune partie du chargement n'aura été déclarée. § 2. Si le chargement a été déclaré en partie, les moyens de transport ne seront saisissables que pour autant que la somme des droits dus sur les espèces de marchandises non déclarées, et qui ne seront pas placées dans des cachettes, excédera le quart du montant des droits à acquitter pour la partie de marchandises dont la déclaration aura été faite; si les marchandises non déclarées sont prohibées, les droits seront supposés être de 20 p.c. de leur valeur. § 3. Les marchandises dûment déclarées ou circulant librement, qui serviront évidemment à cacher des objets fraudés, seront confisquées. [...]
Art. 263.Il pourra être transigé par l'administration ou d'après son autorisation, en ce qui concerne l'amende, la confiscation, la fermeture des fabriques, usines ou ateliers, sur toutes infractions à la présente loi, et aux lois spéciales sur la perception des accises, toutes et autant de fois que l'affaire sera accompagnée de circonstances atténuantes, et qu'on pourra raisonnablement supposer que l'infraction doit être attribuée plutôt à une négligence ou erreur qu'à l'intention de fraude préméditée. [...]
Art. 267.Lorsque les délits, fraudes ou contraventions à la loi sont constatés au moyen de procès-verbaux, ces actes seront dressés sur-le-champ ou le plus tôt que faire se pourra, par au moins deux personnes qualifiées à cet effet, dont l'une doit être nommée ou munie de commission de la part de l'administration des douanes et accises.
Art. 268.Le procès-verbal devra contenir un narré succinct et exact de ce que l'on a reconnu, comme aussi de la cause de la déclaration en contravention, avec désignation des personnes, qualités, jour et lieu, et en observant les dispositions de l'article 176, pour les cas particuliers y mentionnés.
Art. 269.Les procès-verbaux pourront être rédigés et les infractions constatées tous les jours de l'année, et par conséquent aussi les dimanches et jours fériés légaux.
Art. 270.Dans les cinq jours de la rédaction d'un procès-verbal visé à l'article 267, l'original est soumis au visa ne varietur d'un chef hiérarchique des verbalisants, et copie en est remise aux contrevenants. Si les contrevenants refusent cette communication ou sont inconnus, la notification est faite au bourgmestre de la commune où l'infraction a été constatée, ou à son délégué.
Art. 271.Le prévenu, étant présent à la saisie, sera invité à assister aussi à la rédaction du procès-verbal et à le signer s'il le désire, et en recevoir immédiatement une copie; en cas d'absence, une copie du procès-verbal est envoyée au prévenu par lettre recommandée à la poste.
Art. 272.Les procès-verbaux des agents, relatifs à leurs opérations et à l'exercice de leurs fonctions, font foi en justice, jusqu'à ce que la fausseté en soit prouvée; les inexactitudes qui se seraient glissées dans un procès-verbal et qui ne se rapportent point aux faits, mais uniquement à l'application de la loi, n'atténueront en rien la force de l'acte, mais devront être redressées dans l'exploit d'assignation; lorsque le procès-verbal sera rédigé par un seul agent, il ne fera pas preuve par lui-même.
Art. 273.§ 1er. Lors de la saisie de marchandises, les agents les transporteront au plus prochain bureau pour y être vérifiées, dûment inventoriées, pesées, mesurées, jaugées ou comptées en présence du receveur et de la partie intéressée, si elle s'y trouve et veut assister à cette opération, d'après l'invitation qui lui en sera faite et qui sera mentionnée au procès-verbal. § 2. L'administration a le droit de faire transporter ensuite les marchandises saisies au chef-lieu de la direction, dans laquelle la saisie a été pratiquée, et, en cas de vente, de la faire effectuer là où elle le jugera le plus avantageux.
Art. 274.On retiendra uniquement les marchandises, navires ou bateaux, voitures et attelages, ustensiles, instruments ou autres objets à l'égard desquels ou avec lesquels il a été prévariqué, et dont, en conformité de l'article 253, la saisie doit avoir pour effet l'application d'une peine, ou qui sont affectés au recouvrement d'un droit.
Art. 275.§ 1er. Si le saisi le réclame, il sera donné mainlevée des marchandises, navires, voitures et attelages, sous caution suffisante de leur valeur convenue entre le receveur et la partie intéressée ou du montant de l'amende encourue. § 2. Si cependant la saisie est motivée sur une prohibition à l'entrée, il ne pourra être accordé mainlevée pour les marchandises dont l'importation est prohibée. § 3. La mainlevée pourra également être refusée lorsque la saisie a lieu pour déclaration erronée relativement à l'espèce des marchandises, et qu'on ne pourrait pas, au moyen d'échantillons, maintenir l'affaire en entier jusqu'à décision de la contestation; comme aussi lorsque les marchandises sont saisies sur des personnes inconnues, par lesquelles on entend, en général, celles qui se mettent dans le cas de ne pouvoir être désignées dans le procès-verbal de saisie. § 4. Lorsqu'il n'aura pas été donné mainlevée sous caution, les marchandises resteront sous la surveillance et direction de l'administration jusqu'à ce qu'on puisse en disposer soit provisoirement, soit définitivement, suivant la loi. § 5. En cas de mainlevée sous caution de marchandises imposées d'après la valeur, l'estimation convenue servira en même temps de base pour la fixation de l'amende encourue.
Art. 276.§ 1er. Les marchandises saisies ne pourront être vendues avant que la confiscation n'ait été prononcée en justice. Cependant le receveur procédera à la vente immédiate de toutes les marchandises saisies, susceptibles de dépérir par un dépôt prolongé. § 2. La vente de chevaux, ou de toute espèce de bétail, pourra être faite immédiatement par ordre du receveur du lieu où ces animaux auront été conduits, lorsqu'ils ont été saisis sur des inconnus, ou lorsque la partie saisie refuse de fournir caution pour frais de nourriture et d'entretien, jusqu'à ce qu'il soit définitivement prononcé sur la saisie; ce refus devra être constaté par un procès-verbal en due forme. § 3. Le receveur qui aura procédé à la vente, sans se conformer aux dispositions ci-dessus mentionnées, sera personnellement responsable des suites. § 4. Toute vente d'effets saisis doit se faire publiquement et au plus offrant. § 5. Si, après la vente d'effets dont la confiscation n'était pas encore prononcée, la saisie est annulée en justice et que la vente ait été effectuée, en observant les dispositions prérappelées, le saisi devra considérer le produit de la vente comme représentant la valeur entière que les marchandises avaient au moment [où] cette vente a eu lieu.
Art. 277.§ 1er. Toute saisie de marchandises à charge d'inconnus sera valable sans jugement si, dans un délai de trente jours à partir de la clôture du procès-verbal, le propriétaire des marchandises ne les a pas revendiquées par lettre recommandée adressée au directeur régional des douanes et accises dans le ressort duquel la saisie a eu lieu. § 2. Seront de même valables sans jugement, les saisies régulièrement faites à charge de personnes connues pourvu que la valeur de la marchandise ne dépasse pas dix mille francs et que l'administration ne réclame pas contre le propriétaire de la marchandise l'application d'une peine d'emprisonnement ou d'une amende.
Art. 278.Les dommages-intérêts occasionnés par des saisies illégales et qui pourraient être réclamés par le propriétaire des marchandises ou des personnes y intéressées ne seront, en aucun cas, alloués par les juges à un montant plus élevé que celui de 1% par mois de la valeur des objets saisis, à compter du jour de la saisie jusqu'à celui de la mainlevée.
Art. 279.On observera, pour ce qui concerne la poursuite et l'instruction des affaires relatives aux douanes et accises, les dispositions contenues dans les articles 280 Ã 285.
Art. 280.Les causes purement civiles qui ne sont accompagnées d'aucune action en application d'emprisonnement, d'amende ou de confiscation, sont jugées suivant les règles prévues par le Code judiciaire en matière de compétence et de procédure.
Art. 281.§ 1er. Toutes actions du chef de contraventions, fraudes ou délits, contre lesquels les lois en matière de douanes et accises prononcent des peines seront portées en première instance devant les tribunaux correctionnels, et, en cas d'appel, devant la cour d'appel du ressort, pour y être instruites et jugées conformément au Code d'instruction criminelle. § 2. Toutes celles des actions susmentionnées qui tendent à l'application d'amendes, de confiscations, ou à la fermeture de fabriques ou usines, seront intentées et poursuivies par l'administration ou en son nom devant lesdits tribunaux, lesquels, en tout cas, ne prononceront sur ces affaires qu'après avoir entendu les conclusions du ministère public. Toutefois, sur la demande écrite qui lui en est faite par un fonctionnaire de l'administration des douanes et accises ayant au moins le grade de directeur, le ministère public peut requérir le juge d'instruction d'informer, l'exercice de l'action publique restant pour le surplus réservé à l'administration. § 3. Dans les cas [où] un même fait de transgression aux lois précitées donne lieu à deux actions différentes, dont l'une doit être intentée par le ministère public et l'autre par l'administration ou en son nom, ces actions seront instruites simultanément, et il y sera statué par un seul et même jugement; mais, dans ces cas, le ministère public n'agira pas avant que l'administration ait, de son côté, porté plainte ou intenté l'action.
Art. 282.Tous délits ou crimes, prévus et punis par le Code pénal, lesquels, quoique commis relativement aux douanes et accises, seront poursuivis et jugés de la manière ordinaire, conformément aux lois générales existantes en matière correctionnelle.
Art. 283.Lorsque les contraventions, fraudes, délits ou crimes dont il s'agit dans les articles 281 et 282 donnent lieu au paiement de droits ou accises, et par conséquent à une action civile, indépendamment de la poursuite d'une peine, le juge compétent soit criminel soit correctionnel, connaîtra de l'affaire sous ce double rapport et jugera l'une et l'autre cause.
Art. 284.Dans tous les cas où, d'après les lois en vigueur, le recours en cassation peut avoir lieu, on pourra, conformément à ces dispositions, faire usage de ce moyen dans les affaires en matière de douanes et accises.
Art. 285.Les amendes prononcées par les tribunaux et les cours en matière de police, en matière correctionnelle ou en matière criminelle sont sujettes à restitution lorsqu'il en est accordé remise après le paiement, pour autant que le condamné ait demandé sa grâce dans les deux mois du jugement ou de l'arrêt s'il est contradictoire, ou de sa signification s'il est par défaut. » Demande de reformulation B.3.1. Certaines parties demandent à la Cour de reformuler la question posée afin de l'étendre.
B.3.2. La loi spéciale du 6 janvier 1989 ne permet pas de modifier ni de faire modifier par la Cour le contenu de la question posée. La demande des parties ne peut être accueillie.
Quant au fond B.4.1. Les dispositions en cause tendent à fixer les conditions auxquelles les agents des douanes et accises peuvent pratiquer des visites (articles 189 et 193 à 197), à permettre la saisie et la confiscation des moyens de transport et marchandises ayant servi à cacher les objets fraudés (article 222), à accorder à l'Administration le droit de transiger sur l'action publique, en ce qui concerne l'amende, la confiscation et la fermeture des fabriques, usines ou ateliers (article 263), à déterminer la manière dont sont constatées les infractions à la législation sur les douanes et accises et la façon dont il est procédé aux saisies (articles 267 à 278) et à établir le mode de poursuite et d'instruction de ces infractions, tant sur le plan civil que sur le plan pénal (articles 279 à 285).
B.4.2. Selon les décisions de renvoi, ces dispositions posent un problème de compatibilité avec les articles 10 et 11 de la Constitution, parce que l'action publique et la procédure pénale en matière de délits relatifs aux douanes et accises ne seraient pas entourées des mêmes garanties d'indépendance qu'en droit commun, étant donné que l'Administration des douanes et accises agit en qualité d'autorité chargée de l'enquête, d'autorité poursuivante et de partie intéressée.
B.5.1. Le législateur entendait établir au moyen des dispositions litigieuses, qui constituent une partie de la réglementation relative à la perception des droits de douane et d'accise, un système spécifique de recherche et de poursuites pénales, en vue de combattre l'ampleur et la fréquence des fraudes dans cette matière particulièrement technique et transfrontalière, qui est désormais régie en grande partie par une abondante réglementation européenne.
B.5.2. S'il est vrai que les mesures prises par le législateur ont pour objet de rendre plus efficaces la recherche et la poursuite des abus dans le secteur des douanes et accises, la circonstance que des abus similaires, punissables dans d'autres matières fiscales, font l'objet d'une approche différente, n'est pas de nature à priver à elle seule ces mesures de leur justification.
B.6. Il y a lieu toutefois d'examiner si les dispositions en cause n'instaurent pas une discrimination quant à l'indépendance des autorités chargées de l'enquête et des poursuites, entre les personnes inculpées de délits sanctionnés par la législation en matière de douanes et accises, d'une part, et les personnes inculpées de délits sanctionnés par le droit pénal commun, d'autre part.
B.7. A cette fin, la Cour examine chacune des trois qualités en lesquelles l'Administration des douanes et accises intervient, selon les décisions de renvoi, à savoir : autorité chargée de l'enquête, autorité poursuivante et partie intéressée.
L'Administration des douanes et accises agissant en qualité d'autorité chargée de l'enquête (articles 189, 193 à 197, 222 et 267 à 278 de la L.G.D.A.) B.8. Il est soutenu que la recherche et l'enquête concernant les délits relatifs aux douanes et accises sont réalisées par des agents de l'Administration des douanes et accises disposant de pouvoirs d'enquête qui, lorsqu'il s'agit de délits de droit commun, ne peuvent être accordés qu'après qu'une instruction judiciaire a été ordonnée et que l'enquête a été placée sous la conduite d'un juge d'instruction.
Les garanties du droit commun, qui exigent que l'instruction judiciaire soit effectuée tant à charge qu'à décharge et que le juge d'instruction veille à la légalité des moyens de preuve et à la manière dont ceux-ci sont collectés, feraient défaut dans l'enquête sur les délits en matière de douanes et accises.
B.9.1. Les agents de l'Administration des douanes et accises disposent de pouvoirs étendus pour rechercher les infractions à la législation relative aux douanes et accises et enquêter à leur sujet.
B.9.2. Les pouvoirs dont disposent ces agents ne sont toutefois pas tous institués par les dispositions qui sont soumises au contrôle de la Cour. Ainsi, ne sont pas soumises à ce contrôle les dispositions des chapitres XVIII (« Garde et scellement ») et XXII (« Mesures de contrôle »).
B.9.3. La Cour, qui, dans une procédure préjudicielle, ne peut se prononcer que sur les normes que le juge a quo soumet à son contrôle, limite son examen aux articles 189, 193 à 197, 222 et 267 à 278 de la L.G.D.A. B.10. Ces dispositions contiennent des prescriptions relatives aux procès-verbaux (articles 267 à 272), aux visites (articles 189 et 193 à 197) et aux saisies (articles 189, 222 et 273 à 278).
B.11.1. En ce qui concerne les procès-verbaux, il est précisé qu'ils doivent être dressés par au moins deux personnes qualifiées à cet effet (article 267), quelles mentions ils doivent contenir (article 268), quand ils peuvent être rédigés (article 269) et qui en reçoit communication, notamment les contrevenants (article 270). Ensuite, l'article 271 dispose que le prévenu, étant présent à la saisie, sera invité à assister aussi à la rédaction du procès-verbal et à le signer s'il le désire, et qu'il en recevra immédiatement une copie. En cas d'absence, une copie du procès-verbal est envoyée au prévenu par lettre recommandée à la poste.
Ces articles tendent principalement à indiquer les modalités selon lesquelles les procès-verbaux en matière d'infraction à la législation sur les douanes et accises doivent être dressés et à régler la manière dont ils doivent être communiqués, spécialement aux prévenus.
B.11.2. Les parties ne démontrent pas - et la Cour n'aperçoit pas - en quoi cette manière de procéder pourrait être discriminatoire pour ceux à charge desquels un procès-verbal est dressé pour un délit relatif aux douanes et accises. Ces dispositions au contraire leur accordent certaines garanties : les procès-verbaux sont dressés par au moins deux personnes qualifiées à cet effet et les prévenus reçoivent les notifications nécessaires.
B.12.1. L'article 272 de la L.G.D.A. attribue aux procès-verbaux une force probante particulière, faisant exception à la règle générale selon laquelle un procès-verbal vaut en tant que simple renseignement.
Il constitue une exception au régime de la libre administration de la preuve en matière répressive, selon lequel le juge apprécie, en fonction de sa propre conviction, la valeur probante d'un élément déterminé. La Cour doit examiner si la différence de traitement qui résulte de cette exception est raisonnablement justifiée et si les droits du prévenu ne sont pas restreints de manière disproportionnée.
B.12.2. La constatation des infractions à la législation relative aux douanes et accises est souvent rendue difficile par la mobilité des marchandises sur lesquelles les droits de douane et d'accise sont dus.
Il peut être remédié dans une large mesure à la difficulté qui en résulte d'administrer la preuve en attachant une foi particulière aux constatations des faits établies par des personnes qualifiées, désignées à cette fin (article 267).
B.12.3. Compte tenu de la ratio legis de l'article 272 de la L.G.D.A., il convient de souligner que la valeur probante légale particulière ne concerne que les éléments matériels de l'infraction et non les autres éléments constitutifs de celle-ci; elle est attachée seulement aux constatations faites personnellement par le verbalisant.
De surcroît, en ce qui concerne ces procès-verbaux ayant une valeur probante légale particulière, il est permis, conformément à la jurisprudence de la Cour de cassation, d'apporter la preuve contraire par tous les moyens de preuve que le juge appréciera.
B.12.4. En conséquence, la valeur probante reconnue par l'article 272 aux procès-verbaux n'est pas disproportionnée par rapport aux objectifs mentionnés en B.5.1.
B.13.1. Les articles 189 et 193 à 197 de la L.G.D.A. concernent les visites. A cet égard, il est précisé quelles pièces peuvent être saisies et emportées lors d'une visite (article 189), quels locaux professionnels peuvent être visités (article 193), à quels moments les visites sont autorisées (articles 193 et 194) et qui doit être présent lors de celles-ci (articles 195 et 196). L'article 197 a trait à la visite des habitations privées.
Il résulte en particulier de ces dispositions qu'aucune autorisation judiciaire n'est nécessaire pour la visite des fabriques, usines, vignobles, enclos, ateliers, boutiques, magasins et autres immeubles « dont la possession ou l'usage est assujetti à la formalité d'une admission de la part de l'administration ou d'une déclaration à faire à ladite administration, ainsi que ceux où l'on exerce une industrie dont les produits sont soumis à l'accise, ou sont assujettis à quelque vérification en vertu des lois ». Dans certains cas, une autorisation judiciaire n'est pas non plus nécessaire pour la visite des habitations privées.
B.13.2. Ces dispositions dérogent à la règle de droit commun qui soumet la perquisition à une autorisation judiciaire. Dans certaines matières particulières, le législateur a cependant dérogé à cette règle. De telles dérogations ne peuvent être qu'exceptionnelles et elles doivent être justifiées par des raisons propres aux infractions qu'elles concernent.
B.13.3. La Cour a déjà indiqué que la constatation des infractions à la législation relative aux douanes et accises est souvent rendue difficile par la mobilité des marchandises sur lesquelles les droits de douane et d'accise sont dus. Cette mobilité peut contraindre les agents des douanes et accises à des contrôles subits qui pourraient perdre une grande part de leur efficacité s'ils devaient être soumis à une autorisation judiciaire.
La différence de traitement qui en résulte pour les inculpés d'un délit douanier, comparés aux inculpés d'un délit de droit commun, repose sur un critère objectif en rapport avec le but poursuivi, consistant à combattre la fraude de manière efficace.
B.13.4. En privant les intéressés de la garantie que constitue l'intervention d'un juge, les dispositions en cause portent atteinte à deux droits fondamentaux. D'une part, elles restreignent l'exercice des droits de défense en ce qu'elles privent les intéressés du contrôle d'un juge indépendant qui instruit à charge et à décharge.
D'autre part, elles portent atteinte à la règle de l'inviolabilité du domicile.
Cette règle est garantie par l'article 15 de la Constitution, selon lequel : « Le domicile est inviolable; aucune visite domiciliaire ne peut avoir lieu que dans les cas prévus par la loi et dans la forme qu'elle prescrit. » De même, l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme dispose : « 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui.» Il convient d'examiner si la disposition litigieuse ne porte pas une atteinte disproportionnée aux droits précités.
B.13.5. S'agissant de la visite des locaux professionnels, un certain nombre de restrictions et de garanties sont prévues : seuls sont assujettis à la visite les fabriques, usines, vignobles, enclos, ateliers, boutiques, magasins et autres immeubles « dont la possession ou l'usage est assujetti à la formalité d'une admission de la part de l'administration, ou d'une déclaration à faire à ladite administration, ainsi que ceux où l'on exerce une industrie dont les produits sont soumis à l'accise, ou sont assujettis à quelque vérification en vertu des lois » (article 193).
Les visites doivent en principe avoir lieu entre cinq heures du matin et neuf heures du soir (article 193). Elles ne sont possibles la nuit que dans les bâtiments où l'on travaille pendant ce temps (article 194). L'intéressé ou un de ses représentants doit être présent lors des visites durant la période d'activité des bâtiments (article 196).
Enfin, lorsque les usines ne sont pas en activité, les visites avant cinq heures du matin ou après neuf heures du soir ne peuvent se faire que pour autant que les agents soient accompagnés d'une personne désignée à cette fin par la loi (article 195).
B.13.6. S'agissant de la visite des habitations, enclos ou bâtiments des particuliers, une autorisation du juge au tribunal de police du canton dans lequel les bâtiments ou enclos à visiter sont situés est nécessaire, exception faite pour le « rayon des douanes et du cas prévu par l'article 174 » (article 197).
Le rayon des douanes occupe : 1) le long des frontières de terre, une zone qui s'étend vers l'intérieur du pays sur une profondeur de dix kilomètres à partir de la frontière belgo-allemande et de la frontière belgo-française; 2) le long de la côte maritime, une zone qui s'étend vers l'intérieur du pays sur une profondeur de cinq kilomètres à partir de la ligne de marée basse; 3) le territoire des ports maritimes et des aérodromes ainsi qu'une zone qui s'étend en dehors de ce territoire sur une profondeur de vingt-cinq mètres à partir des limites de ce territoire (article 167, alinéa 1er).
Dans le rayon des douanes, des recherches peuvent se faire sans intervention judiciaire dans les maisons et enclos où l'existence de magasins et de dépôts interdits est soupçonnée, à la condition qu'elles soient effectuées entre cinq heures du matin et neuf heures du soir, en présence ou sur autorisation du receveur ou d'un autre agent supérieur et en présence d'un agent de l'administration communale ou d'un agent de l'autorité publique commis à cet effet par le bourgmestre. Les agents sont responsables des pertes et dommages qu'ils pourraient occasionner aux habitants (article 173).
L'assistance et l'autorisation ne sont pas exigées pour la visite immédiate des maisons, granges ou autres enclos situés dans le rayon des douanes dans lesquels auront été introduites ou recelées des marchandises soustraites à la visite des agents alors qu'ils étaient à leur poursuite (article 174).
B.13.7. Il ressort de ce qui précède que le champ d'application de la dérogation à la règle de droit commun en matière de perquisition est limité à ce qui est strictement nécessaire pour atteindre l'objectif décrit au B.5.1, cependant que l'exercice du droit de visite est entouré lui aussi de garanties suffisantes pour prévenir les abus. Le législateur a ainsi créé un juste équilibre entre, d'une part, les droits des personnes concernées et, d'autre part, la nécessité de pouvoir constater de manière efficace les infractions à la législation douanière.
B.14.1. Les articles 222 et 273 à 278 de la L.G.D.A. ont trait aux saisies. A cet égard, ils prévoient où les marchandises saisies doivent être transportées (article 273), quelles marchandises peuvent être saisies, à savoir seulement celles « avec [lesquelles] il a été prévariqué » (article 274), et notamment les moyens de transport et les marchandises qui ont servi à cacher des objets fraudés (article 222), comment il peut être donné mainlevée, sous caution suffisante, des marchandises saisies et dans quels cas la mainlevée est refusée (article 275). L'article 276 règle la manière dont s'opère la vente des marchandises saisies : elle ne pourront être vendues avant que la confiscation n'ait été prononcée en justice, à moins que les marchandises ne soient susceptibles de dépérir (§ 1er) ou lorsqu'il s'agit d'animaux saisis « sur des inconnus », ou encore, lorsque la partie saisie refuse de fournir caution pour frais de nourriture et d'entretien (§ 2); le receveur qui aura procédé à la vente sans se conformer aux dispositions ci-dessus mentionnées, sera personnellement « responsable des suites » (§ 3); toute vente d'effets saisis doit se faire publiquement et au plus offrant (§ 4). L'article 277 concerne deux cas dans lesquels « toute saisie de marchandises [...] sera valable sans jugement », à savoir lorsqu'il s'agit de saisies à charge d'inconnus (§ 1er) et de saisies de marchandises de faible valeur (§ 2). Enfin, l'article 278 prévoit un règlement pour « les dommages-intérêts occasionnés par des saisies illégales ».
B.14.2. La saisie de marchandises est en règle générale une mesure purement conservatoire.
En tant qu'elles fixent des règles selon lesquelles les agents de l'Administration des douanes et accises peuvent opérer les saisies, les dispositions précitées ne dérogent pas, pour l'essentiel, aux principes contenus dans le Code pénal et dans le Code d'instruction criminelle, de sorte que rien ne permet d'apercevoir en quoi elles seraient discriminatoires.
Ces règles contiennent du reste un certain nombre de garanties pour le saisi : elles limitent les marchandises qui peuvent être saisies, elles prévoient la possibilité d'obtenir, le cas échéant, la mainlevée sous caution, elles subordonnent en principe à une décision judiciaire de confiscation la vente des marchandises saisies et entourent cette vente de certaines garanties.
B.14.3. L'article 277 de la L.G.D.A. prévoit cependant la possibilité d'une « saisie de marchandises [...] sans jugement ».
En tant qu'elle entraîne une confiscation sans décision judiciaire, cette mesure est en principe injustifiée.
Toutefois, le champ d'application de cette mesure est limité à la saisie à charge d'inconnus, d'une part, et à la saisie faite à charge de personnes connues, pourvu que la valeur des marchandises n'atteigne qu'un montant peu important, actuellement fixé à dix mille francs au maximum, d'autre part. Compte tenu des limites du champ d'application de la mesure, il peut être admis que les saisies visées à l'article 277 de la L.G.D.A. ne sont pas disproportionnées à l'objectif poursuivi, mentionné au B.5.1.
B.15. Il ressort de ce qui précède que les missions dont sont chargés les agents de l'Administration des douanes et accises dans le cadre de la recherche des délits en matière de douanes et accises, en vertu des articles examinés de la L.G.D.A., s'apparentent davantage aux tâches accomplies dans le cadre d'une information de droit commun (menée sous la direction du procureur du Roi) qu'aux tâches accomplies au cours d'une instruction judiciaire (menée sous la conduite d'un juge d'instruction).
Il s'ensuit que les dispositions de la loi qui dérogent au droit commun ne sont pas disproportionnées par rapport au but mentionné au B.5.1.
B.16. En ce qu'elles concernent les articles 189, 193 à 197, 222 et 267 à 278 de la L.G.D.A., les questions préjudicielles appellent une réponse négative.
L'Administration des douanes et accises en tant qu'autorité poursuivante (articles 279 à 285 et article 263 de la L.G.D.A.) B.17. Il est allégué que les poursuites pénales en matière de délits relatifs aux douanes et accises sont exercées par des agents de l'Administration des douanes et accises, qui relèvent du pouvoir exécutif, alors que pour les délits de droit commun (et pour d'autres délits fiscaux) l'action publique est exercée par le ministère public, qui relève du pouvoir judiciaire. Dès lors, pour les premiers délits cités, la protection juridique de l'inculpé ne serait pas garantie lors de l'exercice de l'action publique, étant donné que des fonctionnaires n'offrent pas les mêmes garanties d'indépendance que les magistrats du parquet. En outre, des transactions arbitraires en matière de délits relatifs aux douanes et accises deviendraient possibles au moment où un juge pénal indépendant serait déjà chargé de traiter l'affaire pénale.
B.18.1. La poursuite et l'instruction des affaires relatives aux douanes et accises sont réglées par les articles 280 à 285 de la L.G.D.A. (article 279).
B.18.2. Les causes purement civiles sont jugées suivant les règles prévues par le Code judiciaire en matière de compétence et de procédure (article 280).
B.18.3. Les délits et les actions civiles intentées simultanément sont poursuivis devant les juridictions pénales compétentes selon les règles ordinaires et traités conformément au Code d'instruction criminelle (articles 282 et 283).
Le juge pénal saisi de l'action publique doit connaître aussi de l'action civile (article 283).
B.18.4. Concernant l'exercice de l'action publique, le droit d'initiative pour poursuivre les délits en matière de douanes et accises n'appartient pas au ministère public mais à l'Administration des douanes et accises (article 281).
A cet égard, la distinction suivante doit être faite : - l'Administration exerce seule toute action publique du chef d'infractions douanières qui ne tend qu'à l'application de peines patrimoniales (amendes, confiscations, fermetures de fabriques ou usines); le ministère public doit toutefois être entendu (article 281, § 2); - en ce qui concerne les infractions douanières qui, à côté des peines patrimoniales, sont punissables d'emprisonnement principal, l'action publique est exercée simultanément par l'Administration et par le ministère public, le ministère public seul pouvant requérir la peine d'emprisonnement principal; le ministère public ne peut toutefois agir que lorsque l'Administration a pris l'initiative d'intenter l'action (article 281, § 3).
L'article 263 accorde à l'Administration le droit de transiger sur l'action publique en ce qui concerne l'amende, la confiscation et la fermeture des fabriques, usines et ateliers. La transaction éteint cette action publique.
B.19. Il ressort de ces dispositions que l'Administration des douanes et accises a des pouvoirs étendus concernant, notamment, l'exercice de l'action publique. Elle a le droit d'initiative en la matière, étant entendu que, le cas échéant, le ministère public doit être associé à l'exercice de l'action publique, soit par la remise d'un avis, soit pour requérir l'emprisonnement principal.
B.20. Pour apprécier si un tel régime est discriminatoire pour les inculpés d'un délit de douanes par rapport au régime applicable dans le droit pénal commun, il convient d'examiner comment des garanties d'indépendance sont assurées en ce qui concerne les magistrats des parquets, d'une part, et les agents de l'Administration, d'autre part.
B.21. A la différence des magistrats du siège, ceux du ministère public ne sont pas titulaires d'un pouvoir juridictionnel : ils remplissent les devoirs de leur office auprès des cours et tribunaux pour requérir une exacte application de la loi ainsi que pour défendre les exigences de l'ordre public et d'une bonne administration de la justice. La Constitution elle-même, en ses articles 40 et 153, contient les bases d'un statut et d'une organisation du ministère public. Ce statut et cette organisation sont notamment caractérisés par des relations de nature hiérarchique entre les magistrats du parquet.
B.22.1. En ce qui concerne les agents fédéraux, dont font partie les agents de l'Administration des douanes et accises, l'article 107, alinéa 2, de la Constitution dispose : « [Le Roi] nomme aux emplois d'administration générale et de relation extérieure, sauf les exceptions établies par les lois. » B.22.2. L'arrêté royal du 2 octobre 1937 portant le statut des agents de l'Etat traite dans sa partie II « des droits et des devoirs ».
Toute contravention à certaines de ces dispositions est punie d'une peine disciplinaire, sans préjudice de l'application des lois pénales.
B.23.1. L'article 151, § 1er, deuxième phrase, de la Constitution dispose : « Le ministère public est indépendant dans l'exercice des recherches et poursuites individuelles, sans préjudice du droit du ministre compétent d'ordonner des poursuites et d'arrêter des directives contraignantes de politique criminelle, y compris en matière de politique de recherche et de poursuite. » En vertu de cette disposition, le ministère public bénéficie, en matière de poursuites individuelles, d'une indépendance qu'aucune disposition comparable ne garantit aux agents de l'administration. Il existe donc une différence entre les deux catégories d'agents chargés de poursuites pénales.
B.23.2. Cette différence de statut entre les parties poursuivantes n'établit cependant pas, entre les personnes poursuivies, une différence de traitement injustifiée. Compte tenu de ce que les litiges sont tranchés par le juge pénal, qui offre toutes les garanties d'indépendance et d'impartialité, il n'est pas manifestement disproportionné aux objectifs poursuivis, en raison de la spécificité de la matière, mentionnée en B.7.1, de confier les poursuites à une administration spécialisée, même si celle-ci n'a pas la même indépendance que le ministère public.
B.24. Enfin, la circonstance que les transactions en matière de délits de douane et d'accise peuvent, le cas échéant, faire échec à l'action publique, ne viole pas davantage les articles 10 et 11 de la Constitution. Outre le fait que la transaction peut bénéficier à l'inculpé, il suffit en effet de constater qu'une transaction ne peut avoir lieu qu'avec le consentement explicite de celui-ci. Par ailleurs, des transactions sont également possibles, sous certaines conditions, dans la procédure pénale de droit commun.
B.25. De ce qui précède, il résulte que les questions préjudicielles appellent une réponse négative en ce qui concerne les articles 279 à 285 et l'article 263 de la L.G.D.A. L'Administration des douanes et accises en tant que « partie intéressée » B.26. Les décisions de renvoi posent la question de savoir si les dispositions en cause offrent suffisamment de garanties d'indépendance, dès lors que l'Administration des douanes et accises a également la qualité « d'intéressée, bénéficiaire des droits à acquitter par la partie poursuivie ».
Certaines parties ajoutent que les agents individuels concernés de cette Administration ont aussi un intérêt personnel direct de nature pécuniaire, compte tenu de l'arrêté du Régent du 17 août 1948.
B.27. Aucune des dispositions soumises au contrôle de la Cour ne concerne l'Administration des douanes et accises en sa qualité d'autorité à laquelle les droits exigibles doivent être versés.
Ces dispositions ne font pas apparaître non plus en quoi consisterait l'intérêt financier propre que cette Administration retirerait de son intervention. La seule circonstance que l'Administration poursuit la perception des droits et accises et, le cas échéant, des amendes qui les accompagnent, - non pour son propre compte, mais au profit du Trésor et, le cas échéant, au profit de l'Union européenne - ne suffit pas pour la qualifier de « partie intéressée et bénéficiaire ».
B.28. Quant à l'arrêté du Régent précité, il tend à motiver les agents en leur accordant certaines indemnités, mais ces avantages ne sont pas de nature, par eux-mêmes, à compromettre leur impartialité.
B.29. Les questions préjudicielles portant sur les articles 189, 193 à 197, 222, 263 et 267 et suivants de la L.G.D.A. appellent une réponse négative.
Quant à la question préjudicielle portant sur l'article 6, § 5, de la loi du 31 décembre 1947 relative au régime fiscal du tabac, combiné avec l'article 220 de la L.G.D.A. B.30. La juridiction a quo dans l'affaire n° 1882 demande si l'article 6, § 5, de la loi du 31 décembre 1947 relative au régime fiscal du tabac, combiné avec l'article 220 de la L.G.D.A., viole les articles 10 et 11 de la Constitution, en ce qu'il ne permet pas au juge d'infliger une peine légère ou sévère appropriée au cas concret, alors que cette possibilité existe pour le juge qui doit se prononcer sur la base des dispositions pénales de droit commun.
B.31. Avant son abrogation par l'article 19 de la loi du 3 avril 1997Documents pertinents retrouvés type loi prom. 03/04/1997 pub. 14/11/1997 numac 1997015109 source ministere des affaires etrangeres, du commerce exterieur et de la cooperation au developpement Loi portant assentiment à l'Accord de partenariat et de coopération entre les Communautés européennes et leurs Etats membres, d'une part, et l'Ukraine, d'autre part, et Annexes I à V, Protocole, Acte final et Déclarations, faits à Luxembourg le 14 juin 1994 type loi prom. 03/04/1997 pub. 24/04/1998 numac 1998015003 source ministere des affaires etrangeres, du commerce exterieur et de la cooperation au developpement Loi portant assentiment à l'Accord de partenariat et de coopération entre les Communautés européennes et leurs Etats membres, d'une part, et République Moldova, d'autre part, Annexes I, II, III, IV et V, et Protocole et Acte final, faits à Bruxelles le 28 novembre 1994 (2) fermer, l'article 6, § 5, de la loi du 31 décembre 1947 relative au régime fiscal du tabac disposait : « Tout transport ou toute détention de tabacs non fabriqués ou fabriqués qui n'est pas couvert par le document prescrit par le Ministre des finances, en vertu de l'article 5, 4°, entraîne l'application des dispositions des articles 19, 20, 22 à 25 et 28 de la loi du 6 avril 1843 sur la répression de la fraude. En outre, les droits en jeu sont exigibles. » L'article 220 de la L.G.D.A. dispose : « § 1er. Tout capitaine de navire, tout batelier ou patron d'une embarcation quelconque, tout voiturier, conducteur, porteur et tous autres individus, qui, à l'entrée ou à la sortie, tenteraient d'éviter de faire, soit au premier, soit à tout autre bureau où cela devrait avoir lieu, les déclarations requises, et chercheraient ainsi à frauder les droits du trésor, tout individu chez lequel on aura trouvé un dépôt prohibé par les lois en vigueur, seront punis d'un emprisonnement de quatre mois au moins et d'un an au plus. § 2. En cas de récidive, l'emprisonnement sera de huit mois au moins et de deux ans au plus; et pour toute récidive ultérieure, de deux ans au moins et de cinq ans au plus. » B.32. Le Conseil des ministres objecte que la loi du 31 décembre 1947 relative au régime fiscal du tabac a été abrogée par l'article 19 de la loi du 3 avril 1997Documents pertinents retrouvés type loi prom. 03/04/1997 pub. 14/11/1997 numac 1997015109 source ministere des affaires etrangeres, du commerce exterieur et de la cooperation au developpement Loi portant assentiment à l'Accord de partenariat et de coopération entre les Communautés européennes et leurs Etats membres, d'une part, et l'Ukraine, d'autre part, et Annexes I à V, Protocole, Acte final et Déclarations, faits à Luxembourg le 14 juin 1994 type loi prom. 03/04/1997 pub. 24/04/1998 numac 1998015003 source ministere des affaires etrangeres, du commerce exterieur et de la cooperation au developpement Loi portant assentiment à l'Accord de partenariat et de coopération entre les Communautés européennes et leurs Etats membres, d'une part, et République Moldova, d'autre part, Annexes I, II, III, IV et V, et Protocole et Acte final, faits à Bruxelles le 28 novembre 1994 (2) fermer, entrée en vigueur le 26 mai 1997. Etant donné que les faits punissables n'ont été constatés que le 12 juillet 1997, le Conseil des ministres considère que l'article 6, § 5, de la loi du 31 décembre 1947 n'était plus applicable et que la question n'appelle donc pas de réponse. Le Conseil des ministres conteste en outre l'interprétation selon laquelle cet article ne laisserait au juge pénal aucune marge d'appréciation.
B.33. C'est au juge a quo qu'il appartient de déterminer la règle de droit applicable à une affaire dont il est saisi et de décider le cas échéant si une question doit être posée à la Cour à propos de cette norme.
Le juge a quo interprète les dispositions en cause en ce sens qu'elles ne permettent pas au juge d'infliger une peine légère ou sévère appropriée au cas concret. C'est sur la base de cette interprétation donnée par le juge a quo que la Cour examine si ces dispositions violent les articles 10 et 11 de la Constitution.
L'exception du Conseil des ministres est rejetée.
B.34. La Cour observe tout d'abord que l'article 220 de la L.G.D.A. laisse au juge le choix d'infliger une peine d'emprisonnement qui varie de quatre mois à un an ou, en cas de récidive, de huit mois à deux ans et, pour toute récidive ultérieure, de deux ans à cinq ans.
Le fait que le juge ne puisse pas adoucir la peine en dessous des limites fixées provient de ce qu'en l'absence d'une disposition expresse dans la loi pénale particulière, les dispositions du Code pénal relatives aux circonstances atténuantes ne peuvent être appliquées (article 100 du Code pénal).
B.35. Il appartient au législateur d'apprécier s'il y a lieu de contraindre le juge à la sévérité quand une infraction nuit particulièrement à l'intérêt général, spécialement dans une matière qui, comme le transport ou la détention de tabac non fabriqué ou fabriqué qui n'est pas couvert par les documents prescrits, donne lieu à une fraude importante. Cette sévérité peut ne pas affecter seulement le niveau de la peine pécuniaire, mais aussi la faculté offerte au juge d'adoucir la peine en dessous des limites fixées lorsque des circonstances atténuantes peuvent être retenues.
B.36. La question préjudicielle portant sur l'article 6, § 5, de la loi du 31 décembre 1947 relative au régime fiscal du tabac, combiné avec l'article 220 de la L.G.D.A., appelle une réponse négative.
Par ces motifs, la Cour dit pour droit : 1) Les articles 189, 193 à 197, 222, 263 et 267 à 285 de l'arrêté royal du 18 juillet 1977 portant coordination des dispositions générales relatives aux douanes et accises ne violent pas les articles 10 et 11 de la Constitution en tant qu'ils prévoient, en matière de douanes et accises, un régime de l'action publique et de la procédure pénale qui diffère de celui de l'action publique et de la procédure pénale en général, en ce que l'Administration des douanes et accises agit à la fois en qualité d'autorité chargée de l'enquête et en qualité d'autorité poursuivante. 2) L'article 6, § 5, de la loi du 31 décembre 1947 relative au régime fiscal du tabac, combiné avec l'article 220 de la L.G.D.A., ne viole pas les articles 10 et 11 de la Constitution en ce qu'il ne permet pas au juge d'infliger une peine légère ou sévère appropriée au cas concret.
Ainsi prononcé en langue néerlandaise et en langue française, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage, à l'audience publique du 14 février 2001.
Le greffier, Le président, P.-Y. Dutilleux G. De Baets