publié le 01 septembre 1999
Arrêt n° 57/99 du 26 mai 1999 Numéro du rôle : 1373 En cause : la question préjudicielle relative aux articles 35, 36, 61, 89 et 135 du Code d'instruction criminelle, posée par la Cour d'appel de Bruxelles. La Cour d'arbitrage, composée après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet de la question préjudicielle Par ar(...)
Arrêt n° 57/99 du 26 mai 1999 Numéro du rôle : 1373 En cause : la question préjudicielle relative aux articles 35, 36, 61, 89 et 135 du Code d'instruction criminelle, posée par la Cour d'appel de Bruxelles.
La Cour d'arbitrage, composée des présidents M. Melchior et L. De Grève, et des juges L. François, P. Martens, J. Delruelle, H. Coremans et M. Bossuyt, assistée du greffier L. Potoms, présidée par le président M. Melchior, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet de la question préjudicielle Par arrêt du 30 juin 1998 en cause de la s.a. GSM dis' contre J.-C. Van Espen, et en présence de la s.p.r.l. M and D, dont l'expédition est parvenue au greffe de la Cour d'arbitrage le 7 juillet 1998, la Cour d'appel de Bruxelles a posé la question préjudicielle suivante : « Les règles légales applicables aux saisies en matière pénale, plus particulièrement les articles 35, 36 et 89 du Code d'instruction criminelle, et les articles 61 et 135 du même code, s'ils sont interprétés en ce sens qu'ils n'offrent pas de voie de recours à la partie civile, à l'inculpé voire à un particulier contre les décisions légalement prises par le juge d'instruction, alors que le procureur du Roi peut réclamer toute mesure d'instruction en adressant ses réquisitions au juge d'instruction, qui ne peut les refuser que par une ordonnance motivée susceptible d'appel, violent-ils les articles 10 et 11 de la Constitution, considérés isolément ou combinés avec l'article 6 de la Convention de sauvegarde des droits et l'homme et des libertés fondamentales ? » II. Les faits et la procédure antérieure Une saisie a été ordonnée par un juge d'instruction. Après lui en avoir, en vain, demandé la mainlevée, les deux sociétés parties devant le juge du fond ont cité le juge d'instruction en référé afin qu'il soit ordonné à ce dernier de libérer l'objet de la saisie. Le président du Tribunal de première instance, siégeant en référé, a jugé la demande irrecevable.
La Cour d'appel de Bruxelles, siégeant en référé, estime qu'elle ne peut statuer sur cette demande de mainlevée d'une saisie ordonnée par le juge d'instruction sans empiéter sur la compétence de celui-ci : cette mainlevée constitue en effet un acte juridictionnel relevant de la compétence du juge d'instruction dès lors qu'il s'agit d'une décision, de nature à exercer une emprise sur un droit subjectif, qu'il prend après avoir examiné les éléments de la cause; or, la compétence du juge des référés en matière pénale est limitée par la compétence des juridictions pénales (article 584 du Code judiciaire), en ce compris le juge d'instruction. La Cour considère que pareille immixtion se justifie d'autant moins qu'elle risquerait de porter atteinte à l'exercice de l'action publique, alors qu'elle n'a qu'une connaissance fragmentaire du dossier répressif, en raison du caractère secret de l'instruction. Elle juge encore que la décision de se déclarer incompétente ne viole ni l'article 13 de la Convention européenne des droits de l'homme (puisque les parties disposent, en l'espèce, du recours garanti par cette disposition, à savoir la requête en mainlevée qu'elles ont adressée au juge d'instruction), ni l'article 6 de cette Convention. Quant à la loi du 12 mars 1998Documents pertinents retrouvés type loi prom. 12/03/1998 pub. 02/04/1998 numac 1998009267 source ministere de la justice Loi relative à l'amélioration de la procédure pénale au stade de l'information et de l'instruction fermer relative à l'amélioration de la procédure pénale au stade de l'information et de l'instruction, elle n'est pas encore entrée en vigueur; aucun argument ne peut donc en être tiré.
Se fondant sur l'arrêt n° 54/97 de la Cour d'arbitrage, la partie demanderesse en mainlevée a demandé que soit adressée à cette Cour la question préjudicielle énoncée plus haut.
La Cour d'appel a considéré que le système légal actuellement en vigueur est critiqué en ce qu'il ne prévoit aucun recours contre la décision légalement prise par le juge d'instruction au sujet d'une telle demande de mainlevée et a constaté que la question de savoir dans quelle mesure l'inculpé, la partie civile et même les particuliers disposent d'un recours devant la chambre des mises en accusation contre les ordonnances du juge d'instruction n'a jamais reçu de réponse nette en doctrine et en jurisprudence.
Elle a dès lors fait droit à la demande qui lui était adressée, estimant qu'il ne pouvait être décidé que les dispositions en cause ne violaient manifestement pas les articles 10 et 11 de la Constitution ni l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme.
III. La procédure devant la Cour Par ordonnance du 7 juillet 1998, le président en exercice a désigné les juges du siège conformément aux articles 58 et 59 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage.
Les juges-rapporteurs ont estimé n'y avoir lieu de faire application des articles 71 ou 72 de la loi organique.
Par ordonnance du 7 août 1998, le président en exercice a prorogé jusqu'au 30 septembre 1998 le délai pour introduire un mémoire.
La décision de renvoi a été notifiée conformément à l'article 77 de la loi organique, par lettres recommandées à la poste le 7 août 1998; l'ordonnance du 7 août 1998 a été notifiée par les mêmes lettres.
L'avis prescrit par l'article 74 de la loi organique a été publié au Moniteur belge du 25 août 1998.
Des mémoires ont été introduits par : - J.-C. Van Espen, juge d'instruction avec cabinet à 1000 Bruxelles, rue des Quatre-Bras 13, par lettre recommandée à la poste le 29 septembre 1998; - le Conseil des ministres, rue de la Loi 16, 1000 Bruxelles, par lettre recommandée à la poste le 29 septembre 1998; - la s.a. GSM dis', dont le siège social est établi à 1932 Zaventem, Lozenberg 12, par lettre recommandée à la poste le 30 septembre 1998.
Ces mémoires ont été notifiés conformément à l'article 89 de la loi organique, par lettres recommandées à la poste le 16 octobre 1998.
Des mémoires en réponse ont été introduits par : - la s.a. GSM dis', par lettre recommandée à la poste le 13 novembre 1998; - le Conseil des ministres, par lettre recommandée à la poste le 13 novembre 1998.
Par ordonnance du 16 décembre 1998, la Cour a prorogé jusqu'au 7 juillet 1999 le délai dans lequel l'arrêt doit être rendu.
Par ordonnance du 10 février 1999, la Cour a déclaré l'affaire en état et fixé l'audience au 3 mars 1999.
Cette ordonnance a été notifiée aux parties ainsi qu'à leurs avocats par lettres recommandées à la poste le 11 février 1999.
A l'audience publique du 3 mars 1999 : - ont comparu : . Me M. Snoeck loco Me S. Silber, avocats au barreau de Bruxelles, pour la s.a. GSM dis'; . Me P. Peeters et Me R. Ergec, avocats au barreau de Bruxelles, pour le Conseil des ministres; . Me B. Renson, avocat au barreau de Bruxelles, pour J.-C. Van Espen; - les juges-rapporteurs L. François et H. Coremans ont fait rapport; - les avocats précités ont été entendus; - l'affaire a été mise en délibéré.
La procédure s'est déroulée conformément aux articles 62 et suivants de la loi organique, relatifs à l'emploi des langues devant la Cour.
IV. En droit - A - Quant à l'incidence de la loi du 12 mars 1998Documents pertinents retrouvés type loi prom. 12/03/1998 pub. 02/04/1998 numac 1998009267 source ministere de la justice Loi relative à l'amélioration de la procédure pénale au stade de l'information et de l'instruction fermer relative à l'amélioration de la procédure pénale au stade de l'information et de l'instruction A.1.1. Selon la s.a. GSM dis', aucun argument ne peut être tiré des dispositions de la loi du 12 mars 1998Documents pertinents retrouvés type loi prom. 12/03/1998 pub. 02/04/1998 numac 1998009267 source ministere de la justice Loi relative à l'amélioration de la procédure pénale au stade de l'information et de l'instruction fermer, celle-ci n'étant pas entrée en vigueur. Pour la période postérieure au 2 octobre 1998, il demeure pertinent de rechercher si la s.a. GSM dis' a été, injustement ou non, privée d'un droit de recours contre la décision prise par le juge d'instruction de refuser la mainlevée de la saisie qu'il avait précédemment ordonnée.
A.1.2. J.-C. Van Espen et le Conseil des ministres considèrent que, dès lors que la loi du 12 mars 1998Documents pertinents retrouvés type loi prom. 12/03/1998 pub. 02/04/1998 numac 1998009267 source ministere de la justice Loi relative à l'amélioration de la procédure pénale au stade de l'information et de l'instruction fermer insère dans le Code d'instruction criminelle un article 61quater, prévoyant un recours que la société GSM dis' pourra exercer dès le 2 octobre 1998, date d'entrée en vigueur de la loi, il s'indique que la Cour demande, au juge a quo, après avoir entendu les parties, si sa réponse est indispensable à la solution du litige.
J.-C. Van Espen ajoute que quand la Cour examinera la question préjudicielle, celle-ci n'aura plus d'objet : les dispositions en cause auront été abrogées de telle sorte qu'il n'y aura plus à se prononcer sur une éventuelle violation des articles 10 et 11 de la Constitution.
A.1.3. La s.a. GSM dis' réplique que l'argumentation du Conseil des ministres et de J.-C. Van Espen confirme la pertinence de la question posée, celle-ci reposant sur la dénégation de tout recours devant le juge des référés et sur le constat que les textes n'organisent pas non plus de recours devant la chambre des mises en accusation. Il y a lieu de vérifier si le préjudice résultant de cette absence de recours (qui ne sera pas réparé par la nouvelle norme) a été causé d'une manière justifiée ou non au regard des articles 10 et 11 de la Constitution.
Quant au fond A.2.1. Selon la s.a. GSM dis', les articles 35, 36 et 89 du Code d'instruction criminelle n'organisent pas de recours spécifique contre les décisions prises par le juge d'instruction en application de ces dispositions. L'article 61 du même Code permet pour sa part au ministère public de donner des injonctions au juge d'instruction.
Enfin, l'article 135 dudit Code organise les recours pouvant être introduits par le procureur du Roi et la partie civile, devant la chambre des mises en accusation, à l'encontre des ordonnances rendues en application des articles 128 à 130 de ce Code.
Le juge a quo ne s'est pas prononcé sur l'existence ou l'absence d'un recours contre la décision du juge d'instruction refusant la demande de mainlevée. Il a suggéré la possibilité de deux interprétations différentes des textes incriminés et admet indiscutablement le recours exercé devant le juge d'instruction lui-même, contre ses propres décisions.
A.2.2. La s.a. GSM dis' considère encore que la loi du 12 mars 1998Documents pertinents retrouvés type loi prom. 12/03/1998 pub. 02/04/1998 numac 1998009267 source ministere de la justice Loi relative à l'amélioration de la procédure pénale au stade de l'information et de l'instruction fermer procède de l'idée que, dans la législation antérieure, la seule possibilité pour une personne qui s'estimait préjudiciée par un acte d'information ou d'instruction relatif à ses biens était de s'adresser au magistrat ayant pris cette mesure afin d'obtenir la cessation totale ou partielle « à l'amiable ». En d'autres termes, selon l'analyse du législateur lui-même, les décisions du juge d'instruction en la matière n'étaient susceptibles d'aucun recours juridictionnel, devant une instance supérieure, en faveur de la personne lésée ou s'estimant lésée; un tel recours existe en revanche, selon l'interprétation majoritairement admise des textes en cause, en faveur du ministère public, en vertu de l'article 61 du Code d'instruction criminelle. S'il existe entre l'un et l'autre une différence objective, qui explique que l'un ait un pouvoir de réquisition et l'autre pas, il ne se justifie pas que le premier puisse saisir la chambre des mises en accusation alors que la seconde, devant attendre l'issue de l'instruction et le jugement de fond, est privée de recours juridictionnel devant une instance supérieure.
La s.a. GSM dis' n'aperçoit pas en quoi l'intérêt général ou le caractère secret de l'instruction pourrait être remis en cause par la reconnaissance d'un tel droit de recours; à supposer même qu'ils puissent être d'une quelconque manière concernés par l'exercice d'un droit de recours de la partie lésée par une mesure de saisie, force serait de constater que le droit de recours aurait été une mesure tout à fait proportionnelle au regard de l'intérêt général et du secret de l'instruction.
A.2.3. Selon J.-C. Van Espen, la question préjudicielle se fonde sur une prémisse inexacte en ce qu'elle considère que les dispositions en cause n'offrent pas de voie de recours à la partie civile, à l'inculpé, voire à un particulier contre les décisions légalement prises par le juge d'instruction, puisque la jurisprudence récente a souligné qu'il existait bien, en l'état actuel du droit positif belge, des recours contre les mesures de blocage prises par un juge d'instruction : la requête en mainlevée de la saisie adressée au juge d'instruction constitue le recours effectif prévu par notre droit, et la décision de refus constitue l'acte juridictionnel en réponse.
A.2.4. J.-C. Van Espen et le Conseil des ministres considèrent que, s'il n'existe certes pas de recours contre la décision négative du juge d'instruction, les parties ont toutefois la possibilité de reformuler leur demande, de s'adresser au procureur du Roi ou au procureur général (afin que celui-ci intervienne, par voie de réquisitions écrites, auprès du juge d'instruction) ou à la juridiction de fond. Pour leur part, la doctrine (de façon générale mais confuse) et la jurisprudence (de façon restrictive) reconnaissent aux intéressés un recours soit devant le juge des référés (tant que son intervention n'est pas incompatible avec les lois et les principes régissant la compétence des juridictions pénales ou l'exercice de l'action publique) soit devant les chambres des mises en accusation.
A.2.5. Pour le Conseil des ministres, la question préjudicielle exclut l'application des théories jurisprudentielles et doctrinales relatives à la possibilité de recours devant le juge des référés ou devant la chambre des mises en accusation.
A.2.6. J.-C. Van Espen et le Conseil des ministres considèrent que la question préjudicielle appelle une réponse négative : il doit être admis qu'il existe entre le ministère public, l'inculpé ou toute personne qui se prétend lésée par un acte d'instruction, une différence fondamentale reposant sur un critère objectif. Le ministère public accomplit, dans l'intérêt de la société, des missions de service public relatives à la recherche et à la poursuite des infractions et exerce l'action publique. En revanche, l'inculpé ou toute autre personne défend son seul intérêt privé. L'arrêt n° 49/97 n'interdit pas une telle différence de traitement.
Celle-ci est autorisée par le critère objectif supplémentaire de la phase préparatoire du procès, l'instruction, qui est de type inquisitorial; la règle du secret de l'enquête est établie dans un but d'intérêt général et n'est pas remise en cause par la loi du 12 mars 1998Documents pertinents retrouvés type loi prom. 12/03/1998 pub. 02/04/1998 numac 1998009267 source ministere de la justice Loi relative à l'amélioration de la procédure pénale au stade de l'information et de l'instruction fermer.
Enfin, il n'est pas pertinent de comparer la situation, résultant des articles incriminés du Code d'instruction criminelle, de personnes sollicitant du juge d'instruction la levée d'une mesure de saisie déjà pratiquée, avec la situation du parquet qui se verrait refuser par le juge d'instruction une demande de saisie.
A.2.7. La société GSM dis' réplique que le juge a quo ne conteste pas que la partie lésée par une saisie puisse s'adresser au juge d'instruction, au procureur du Roi ou au juge du fond, ni que la demande de mainlevée adressée au juge d'instruction soit un recours juridictionnel. Mais il interroge la Cour sur la conformité au prescrit constitutionnel de l'absence de recours spécifique contre les refus de mainlevée émanant du juge d'instruction.
A.2.8. Elle ajoute qu'il n'est démontré ni que cette absence de recours répond à la nécessité de reconnaître la différence de situation indéniable entre le ministère public et la partie lésée, ni que le caractère inquisitorial de la procédure justifierait la privation d'un recours devant la chambre des mises en accusation. La sauvegarde de la présomption d'innocence et le souci d'efficacité liés au caractère inquisitorial de l'instruction ne sont pas rencontrés par la privation de tout recours à l'encontre d'un refus de mainlevée : dès avant la réforme Franchimont, la chambre des mises en accusation pouvait, en présence des parties, connaître des actes d'instruction et le ministère public pouvait lui déférer les ordonnances du juge d'instruction prises sur réquisitions contraires du ministère public.
Enfin, la loi du 12 mars 1998Documents pertinents retrouvés type loi prom. 12/03/1998 pub. 02/04/1998 numac 1998009267 source ministere de la justice Loi relative à l'amélioration de la procédure pénale au stade de l'information et de l'instruction fermer ouvre un recours, alors qu'elle ne met pas en cause les principes du secret de la phase préparatoire du procès verbal. Il s'en déduit que ni la différence de situation entre le ministère public et les autres parties au procès, ni le secret de l'instruction et son caractère inquisitorial ne justifiaient dans le passé l'absence de recours organisé sous le régime ancien; ces éléments n'ont pas été modifiés par la nouvelle loi qui organise néanmoins à présent un recours. - B - B.1. Les articles 35, 36, 61, 89 et 135 du Code d'instruction criminelle énoncent : «
Art. 35.Le procureur du Roi se saisira des choses visées à l'article 42 du Code pénal, des armes et de tout ce qui paraîtra constituer un avantage patrimonial tiré de l'infraction; il interpellera l'inculpé de s'expliquer sur les choses saisies qui lui seront représentées; il dressera du tout procès-verbal, qui sera signé par le prévenu, ou mention sera faite de son refus. » «
Art. 36.Si la nature du crime ou du délit est telle, que la preuve puisse vraisemblablement être acquise par les papiers ou autres pièces et effets en la possession de l'inculpé, le procureur du Roi se transportera de suite dans le domicile de l'inculpé, pour y faire la perquisition des objets qu'il jugera utiles à la manifestation de la vérité. » «
Art. 61.Hors les cas de flagrant délit, le juge d'instruction ne fera aucun acte d'instruction et de poursuite qu'il n'ait donné communication de la procédure au procureur du Roi. Il la lui communiquera pareillement lorsqu'elle sera terminée; et le procureur du Roi fera les réquisitions qu'il jugera convenables, sans pouvoir retenir la procédure plus de trois jours.
Néanmoins le juge d'instruction délivrera, s'il y a lieu, le mandat d'amener, et même le mandat de dépôt, sans que ces mandats doivent être précédés des conclusions du procureur du Roi. » «
Art. 89.Les dispositions des articles 35, 35bis, 36, 37, 38 et 39 concernant la saisie des objets dont la perquisition peut être faite par le procureur du Roi, dans le cas de flagrant délit, sont communes au juge d'instruction. » «
Art. 135.Le procureur du Roi et la partie civile peuvent interjeter appel des ordonnances rendues conformément aux articles 128, 129 et 130, dans les vingt-quatre heures. Ce délai court contre le procureur du Roi à compter de l'ordonnance et contre la partie civile à compter du jour où l'ordonnance lui a été signifiée au domicile par elle élu dans le lieu où siège le tribunal. » B.2. Il apparaît de la motivation de la décision qui interroge la Cour que l'expression « les décisions légalement prises par le juge d'instruction » vise celles par lesquelles ce juge refuse d'accorder la mainlevée d'une saisie qu'il a ordonnée.
Les dispositions en cause sont soumises au contrôle de la Cour dans l'interprétation selon laquelle, établissant une différence de traitement entre le procureur du Roi, d'une part, et la partie civile, l'inculpé ou un particulier, d'autre part, elles permettent au premier de faire réformer la décision du juge d'instruction par la chambre des mises en accusation alors qu'une telle possibilité n'existe pas pour les seconds.
Il ne s'agit pas de la décision ordonnant la saisie elle-même : pour celle-ci, le recours est la requête en mainlevée adressée au juge d'instruction. Est en cause dans la présente affaire, le recours contre la décision (ainsi prise elle-même sur recours) par laquelle le juge d'instruction refuse de faire droit à la demande de mainlevée de la saisie qu'il a ordonnée.
B.3.1. L'article 61quater du Code d'instruction criminelle, inséré par la loi du 12 mars 1998Documents pertinents retrouvés type loi prom. 12/03/1998 pub. 02/04/1998 numac 1998009267 source ministere de la justice Loi relative à l'amélioration de la procédure pénale au stade de l'information et de l'instruction fermer, dispose : «
Art. 61quater.§ 1er. Toute personne lésée par un acte d'instruction relatif à ses biens peut en demander la levée au juge d'instruction. § 2. La requête est motivée et contient élection de domicile en Belgique si le requérant n'y a pas son domicile. Elle est déposée au greffe du tribunal de première instance et est inscrite dans un registre ouvert à cet effet. Le greffier en communique sans délai une copie au procureur du Roi. Celui-ci prend les réquisitions qu'il juge utiles.
Le juge d'instruction statue au plus tard dans les quinze jours du dépôt de la requête.
L'ordonnance est communiquée par le greffier au procureur du Roi et est notifiée au requérant et, le cas échéant, à son conseil par télécopie ou par lettre recommandée à la poste dans un délai de huit jours à dater de la décision. § 3. Le juge d'instruction peut rejeter la requête s'il estime que les nécessités de l'instruction le requièrent, lorsque la levée de l'acte compromet la sauvegarde des droits des parties ou des tiers, lorsque la levée de l'acte présente un danger pour les personnes ou les biens, ou dans les cas où la loi prévoit la restitution ou la confiscation desdits biens.
Il peut accorder une levée totale, partielle ou assortie de conditions. Toute personne qui ne respecte pas les conditions fixées est punie des peines prévues à l'article 507bis du Code pénal. § 4. En cas de décision favorable, le juge d'instruction peut prononcer l'exécution provisoire de la décision lorsque tout retard pourrait entraîner un préjudice irréparable. § 5. Le procureur du Roi et le requérant peuvent interjeter appel de l'ordonnance du juge d'instruction dans un délai de quinze jours. Ce délai court à l'égard du procureur du Roi à compter du jour où l'ordonnance est portée à sa connaissance et, à l'égard du requérant, du jour où elle lui est notifiée.
L'appel est interjeté par déclaration au greffe du tribunal de première instance et inscrite dans un registre ouvert à cet effet.
Le procureur du Roi transmet les pièces au procureur général qui les dépose au greffe.
La chambre des mises en accusation statue dans les quinze jours du dépôt de la déclaration. Ce délai est suspendu pendant le temps de la remise accordée à la demande du requérant ou de son conseil.
Le greffier donne avis au requérant et à son conseil, par télécopie ou par lettre recommandée à la poste, des lieu, jour et heure de l'audience, au plus tard quarante-huit heures à l'avance.
Le procureur général, le requérant et son conseil sont entendus.
Sauf lorsque l'exécution provisoire a été ordonnée, l'appel est suspensif.
Le requérant qui succombe peut être condamné aux frais. § 6. Si le juge d'instruction n'a pas statué dans le délai prévu au § 2, alinéa 2, le requérant peut saisir la chambre des mises en accusation. La requête motivée est déposée au greffe du tribunal de première instance et est inscrite dans un registre ouvert à cet effet.
La procédure se déroule conformément au § 5, alinéas 3 à 6. § 7. Le requérant ne peut déposer de requête ayant le même objet avant l'expiration d'un délai de trois mois à compter de la dernière décision portant sur le même objet. » B.3.2. Cette disposition, permettant à toute personne lésée par un acte d'instruction relatif à ses biens d'en demander la levée au juge d'instruction et permettant au procureur du Roi et au requérant d'interjeter appel de l'ordonnance du juge d'instruction devant la chambre des mises en accusation, met fin à la différence de traitement au sujet de laquelle la Cour est interrogée.
B.4. Il est observé dans la motivation de la décision de renvoi que les parties ne peuvent tirer argument des dispositions de la loi du 12 mars 1998Documents pertinents retrouvés type loi prom. 12/03/1998 pub. 02/04/1998 numac 1998009267 source ministere de la justice Loi relative à l'amélioration de la procédure pénale au stade de l'information et de l'instruction fermer, « dès lors que celle-ci n'est pas encore entrée en vigueur ». L'article 49 de cette loi dispose qu'elle entre en vigueur « à la date fixée par le Roi et au plus tard six mois après sa publication au Moniteur belge ». L'arrêté royal du 21 septembre 1998 a fixé cette date au 20 octobre 1998. Les lois de procédure étant d'application immédiate, la loi du 12 mars 1998Documents pertinents retrouvés type loi prom. 12/03/1998 pub. 02/04/1998 numac 1998009267 source ministere de la justice Loi relative à l'amélioration de la procédure pénale au stade de l'information et de l'instruction fermer s'applique à partir de cette date.
B.5. Compte tenu des dispositions de l'article 61quater nouveau du Code d'instruction criminelle et des faits de l'espèce tels qu'ils ressortent du dossier soumis à la Cour d'appel de Bruxelles, la Cour estime qu'il convient de renvoyer l'affaire au juge a quo afin que celui-ci apprécie s'il y a lieu de poser à nouveau une question préjudicielle.
Par ces motifs, la Cour renvoie la question préjudicielle à la Cour d'appel de Bruxelles.
Ainsi prononcé en langue française et en langue néerlandaise, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage, à l'audience publique du 26 mai 1999.
Le greffier, L. Potoms.
Le président, M. Melchior.