publié le 15 mai 1998
Arrêt n° 23/98 du 10 mars 1998 Numéros du rôle : 1057, 1093, 1099 et 1102 En cause : les questions préjudicielles concernant : - l'article 317 du décret de la Communauté flamande du 13 juillet 1994 relatif aux instituts supérieurs en Commu - les articles 133 et 148, 5°, du décret de la Communauté flamande du 8 juillet 1996 précité; -(...)
COUR D'ARBITRAGE
Arrêt n° 23/98 du 10 mars 1998 Numéros du rôle : 1057, 1093, 1099 et 1102 En cause : les questions préjudicielles concernant : - l'article 317 du décret de la Communauté flamande du 13 juillet 1994 relatif aux instituts supérieurs en Communauté flamande, complété par l'article 133 du décret de la Communauté flamande du 8 juillet 1996 relatif à l'enseignement VII; - les articles 133 et 148, 5°, du décret de la Communauté flamande du 8 juillet 1996 précité; - l'article 323, § 2, du décret de la Communauté flamande du 13 juillet 1994 précité, posées par le Conseil d'Etat.
La Cour d'arbitrage, composée des présidents L. De Grève et M. Melchior, et des juges P. Martens, G. De Baets, E. Cerexhe, H. Coremans et A. Arts, assistée du greffier L. Potoms, présidée par le président L. De Grève, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet des questions préjudicielles a. Par arrêt n° 64.380 du 5 février 1997 en cause de A. Van Waeyenberghe et autres contre la « Vlaamse Autonome Hogeschool Gent » et la Communauté flamande, dont l'expédition est parvenue au greffe de la Cour le 24 février 1997, le Conseil d'Etat a posé les questions préjudicielles suivantes : 1. « L'article 317 du décret du 13 juillet 1994 relatif aux instituts supérieurs en Communauté flamande, tel qu'il a été complété par l'article 133 du décret du 8 juillet 1996 relatif à l'enseignement VII, viole-t-il l'article 24, § 5, de la Constitution en ce qu'il attribue au Gouvernement flamand et aux directions des instituts supérieurs des compétences normatives concernant l'organisation de l'enseignement ? » Pour le cas où la réponse à la première question serait négative, une deuxième question est posée : 2.« Les articles 133 et 148, 5°, du décret précité du 8 juillet 1996 violent-ils les articles 10 et 11 de la Constitution ou les articles 146 et 160 de la Constitution en tant qu'ils complètent, avec effet au 1er janvier 1996, l'article 317 du décret précité du 13 juillet 1994 alors que par son arrêt n° 59.901, Van Waeyenberghe et crts, du 5 juin 1996, le Conseil d'Etat a accueilli des demandes de suspension fondées notamment sur l'article 317 non encore complété et que les procédures au fond concernées sont en instance devant le Conseil d'Etat ? » Pour le cas où la réponse à la première et à la deuxième question serait négative, une troisième question est posée : 3. « L'article 323, § 2, du décret précité du 13 juillet 1994 viole-t-il les articles 10 et 11 de la Constitution en ce qu'il dispose que les membres du personnel chargés d'activités d'enseignement artistiques conservent leur ancienne échelle de traitement, alors que pour les autres membres du personnel, le maintien de l'ancienne rémunération est garanti et que pour les enseignants, l'article 326bis, § 3, du décret dispose également qu'ils obtiennent la garantie du maintien de leur rémunération au 30 juin 1995 et alors que l'article 323, § 2, précité fait partie des dispositions transitoires qui, en vertu du principe de confiance, devraient prévoir le maintien des droits acquis de tous les membres du personnel sans distinction ? » Cette affaire est inscrite sous le numéro 1057 du rôle de la Cour. b. Par arrêt n° 66.081 du 25 avril 1997 en cause de Y. Gauthier et autres contre la « Vlaamse Autonome Hogeschool Antwerpen » et la Communauté flamande, dont l'expédition est parvenue au greffe de la Cour le 21 mai 1997, le Conseil d'Etat a posé les questions préjudicielles suivantes : 1. « L'article 317 du décret du 13 juillet 1994 relatif aux instituts supérieurs en Communauté flamande, tel qu'il a été complété par l'article 133 du décret du 8 juillet 1996 relatif à l'enseignement VII, viole-t-il l'article 24, § 5, de la Constitution, en ce qu'il accorde au Gouvernement flamand ainsi qu'aux directions des instituts supérieurs des pouvoirs normatifs en matière d'organisation de l'enseignement ? » Pour le cas où la réponse à la première question serait négative, une deuxième question est posée : 2.« Les articles 133 et 148, 5°, du décret susvisé du 8 juillet 1996 violent-ils les articles 10 et 11 de la Constitution ou les articles 146 et 160 de la Constitution, dans la mesure où ils complètent, avec effet au 1er janvier 1996, l'article 317 du décret du 13 juillet 1994, précité, alors que le Conseil d'Etat a accueilli, par ses arrêts n° 60.321, Gauthier et crts, du 19 juin 1996 et n° 60.979, Lenaerts et crts, du 15 juillet 1996, des demandes de suspension fondées notamment sur l'article 317 non encore complété, et alors que les litiges sur le fond sont en instance devant le Conseil d'Etat ? » Une troisième question préjudicielle est encore posée à la Cour : 3. « L'article 323, § 2, du décret précité du 13 juillet 1994 viole-t-il les articles 10, 11 et 24 de la Constitution ' dans la mesure où cette disposition, uniquement en ce qui concerne les membres du personnel chargés d'activités d'enseignement de nature artistique..., ne prévoit pas le maintien des droits acquis en ce qui concerne le traitement, dès lors que l'article 329, § 2, du décret HOBU ne prévoit que le maintien d'une échelle de traitement antérieure, alors que pour les autres membres du personnel des instituts supérieurs [non universitaires], l'article 326, § 1er, prévoit effectivement le maintien de l'ancien traitement et que l'article 326bis garantit également, pour les chargés de cours aux conservatoires, le maintien de leur rémunération au 30 juin 1995 ' ? » Cette affaire est inscrite sous le numéro 1093 du rôle de la Cour. c. Par arrêt n° 66.425 du 28 mai 1997 en cause de D. Verelst contre la « Vlaamse Autonome Hogeschool Antwerpen » et la Communauté flamande, dont l'expédition est parvenue au greffe de la Cour le 9 juin 1997, le Conseil d'Etat a posé les questions préjudicielles suivantes : 1. « L'article 317 du décret du 13 juillet 1994 relatif aux instituts supérieurs en Communauté flamande, tel qu'il a été complété par l'article 133 du décret du 8 juillet 1996 relatif à l'enseignement VII, viole-t-il l'article 24, § 5, de la Constitution, en ce qu'il accorde au Gouvernement flamand ainsi qu'aux directions des instituts supérieurs des pouvoirs normatifs en matière d'organisation de l'enseignement ? » Pour le cas où la réponse à la première question serait négative, une deuxième question est posée : 2.« Les articles 133 et 148, 5°, du décret susvisé du 8 juillet 1996 violent-ils les articles 10 et 11 de la Constitution ou les articles 146 et 160 de la Constitution, dans la mesure où ils complètent, avec effet au 1er janvier 1996, l'article 317 du décret du 13 juillet 1994, précité, alors que le Conseil d'Etat a accueilli, par son arrêt n° 60.977, Verelst, du 15 juillet 1996, une demande de suspension fondée notamment sur l'article 317 non encore complété, et alors que le litige sur le fond est en instance devant le Conseil d'Etat ? » Pour le cas où la réponse à la première et à la deuxième question serait négative, une troisième question est posée : 3. « L'article 323, § 2, du décret précité du 13 juillet 1994 viole-t-il les articles 10 et 11 de la Constitution, en ce que, pour les membres du personnel chargés d'activités professionnelles d'ordre artistique, il dispose qu'ils conservent leur ancienne échelle de traitement, alors que pour les autres membres du personnel le maintien de l'ancienne rémunération est garanti et qu'en ce qui concerne les enseignants, l'article 326bis, § 3, du décret dispose également que le maintien de leur rémunération au 30 juin 1995 est garanti, et alors que l'article 323, § 2, précité, fait partie des dispositions transitoires qui, en vertu du principe de confiance, devraient prévoir le maintien des droits acquis de tous les membres du personnel sans distinction ? » Cette affaire est inscrite sous le numéro 1099 du rôle de la Cour. d. Par arrêt n° 66.563 du 4 juin 1997 en cause de M. Joye et L. Gees contre l'a.s.b.l. Hogeschool Sint-Lukas Brussel et la Communauté flamande, dont l'expédition est parvenue au greffe de la Cour le 18 juin 1997, le Conseil d'Etat a posé les questions préjudicielles suivantes : 1. « L'article 317 du décret du 13 juillet 1994 relatif aux instituts supérieurs en Communauté flamande, tel qu'il a été complété par l'article 133 du décret du 8 juillet 1996 relatif à l'enseignement VII, viole-t-il l'article 24, § 5, de la Constitution en ce qu'il attribue au Gouvernement flamand ainsi qu'aux directions des instituts supérieurs des compétences normatives concernant l'organisation de l'enseignement ? » Pour le cas où la réponse à la première question serait négative, une deuxième question est posée : 2.« Les articles 133 et 148, 5°, du décret précité du 8 juillet 1996 violent-ils les articles 10 et 11 de la Constitution ou les articles 146 et 160 de la Constitution en tant qu'ils complètent, avec effet au 1er janvier 1996, l'article 317 du décret précité du 13 juillet 1994, alors que par son arrêt n° 59.902, Joye et Gees, du 5 juin 1996, le Conseil d'Etat a accueilli des demandes de suspension fondées notamment sur l'article 317 non encore complété et que les procédures au fond concernées sont en instance devant le Conseil d'Etat ? » Cette affaire est inscrite sous le numéro 1102 du rôle de la Cour.
II. Les faits et les procédures antérieures a. Affaire portant le numéro 1057 du rôle Les requérants Adrien Van Waeyenberghe, Luc Van Acker, Carine Verhenneman et Sylvia Traey ont introduit auprès du Conseil d'Etat un recours en annulation de la décision du 18 décembre 1995 du collège administratif de la « Vlaamse Autonome Hogeschool Gent » qui leur refuse l'attribution de « la réputation artistique » conformément aux dispositions du décret du 13 juillet 1994 relatif aux instituts supérieurs.Par son arrêt n° 59.901 du 5 juin 1996, le Conseil d'Etat a accueilli la demande de suspension, formulée par la même occasion, de la décision précitée. La suspension a été ordonnée sur la base du moyen reconnu sérieux par le Conseil d'Etat, selon lequel le Gouvernement flamand n'était pas habilité à remplacer la fonction de professeur de cours artistiques par deux fonctions, celle de chargé de cours et celle d'assistant, puisque le Conseil d'Etat ne percevait pas pareille habilitation à l'article 317 du décret précité relatif aux instituts supérieurs.
L'article 133 du décret du 8 juillet 1996 relatif à l'enseignement VII a toutefois complété l'article 317 précité. La modification décrétale a ainsi instauré l'habilitation du Gouvernement flamand, jugée nécessaire par le Conseil d'Etat. Selon la publication du décret relatif à l'enseignement VII au Moniteur belge du 5 septembre 1996, la modification décrétale précitée produisait ses effets le 1er septembre 1996. Suite à un errata paru au Moniteur belge du 22 novembre 1996, la disposition précitée produisait ses effets le 1er janvier 1996.Avant de trancher le litige, le Conseil d'Etat a posé les trois questions préjudicielles précitées, dont la seconde et la troisième appellent une réponse pour autant seulement qu'il soit répondu négativement à la première. b. Affaire portant le numéro 1093 du rôle Par requêtes du 19 février 1996, Yvonne Gauthier, Gilbert De Greeve, Ernest Lenaerts, Roger Vanhaeren, Carlo Willems, Freddy Vanattenhoven, Maria Borms, Alfred Casier, Marc Lamoen et Marcel Valgaeren ont introduit un recours en annulation des décisions du 21 décembre 1995 de la « Vlaamse Autonome Hogeschool Antwerpen » les désignant en qualité d'assistant et des décisions du 30 octobre 1995 du conseil d'administration ne leur reconnaissant aucune réputation artistique. Par arrêts n° 60.321, du 19 juin 1996, et n° 60.979, du 15 juillet 1996, le Conseil d'Etat a ordonné la suspension de l'exécution de ces décisions, sur la base des mêmes motifs que ceux mentionnés dans l'affaire portant le numéro 1057 du rôle. Avant de se prononcer au fond, le Conseil d'Etat a posé les questions préjudicielles précitées. c. Affaire portant le numéro 1099 du rôle Par requête du 21 février 1996, Dirk Verelst a demandé l'annulation d'une décision prise à une date inconnue de lui, par le conseil d'administration de la « Hogeschool Antwerpen », qui communique au requérant qu'il lui est accordé la concordance de sa fonction non exclusive de professeur de violon et de musique de chambre avec la fonction d'assistant, avec une charge de 100 p.c., et de la décision prise le 30 octobre 1995 par le même conseil d'administration portant que le requérant ne bénéficie pas d'une « ample réputation artistique ». Par ailleurs, selon le requérant, la première décision emporte le refus implicite mais certain de mettre la fonction du requérant en concordance avec celle de chargé de cours. Le requérant poursuivait également l'annulation du règlement édicté par le conseil d'administration, par lequel il avait été décidé de porter sa charge d'enseignement de 12 heures à 18 heures par semaine sans rémunération supplémentaire. L'arrêt n° 60.977 du 15 juillet 1996 a ordonné la suspension de l'exécution de la décision ne reconnaissant pas « l'ample réputation artistique » au requérant et de celle lui attribuant la fonction d'assistant, sur la base des mêmes considérations que celles invoquées dans les affaires portant les numéros 1057 et 1093 du rôle. Avant de se prononcer au fond, le Conseil d'Etat a posé les questions préjudicielles précitées. d. Affaire portant le numéro 1102 du rôle Par requête du 19 février 1996, Marc Joye et Luc Gees ont demandé l'annulation de la décision du 20 décembre 1995 du conseil d'administration de l'a.s.b.l. Hogeschool Sint-Lukas Brussel estimant qu'ils ne bénéficient pas de la réputation artistique requise pour faire l'objet d'une concordance en tant que chargé de cours et les désignant dans l'emploi d'assistant. Par arrêt n° 59.902 du 5 juin 1996, la suspension de l'exécution des décisions précitées a été ordonnée, sur la base du même motif que celui invoqué dans les affaires portant les numéros 1057, 1093 et 1099 du rôle. Avant de se prononcer au fond, le Conseil d'Etat a posé les questions préjudicielles précitées.
III. La procédure devant la Cour Par ordonnances datées respectivement des 24 février 1997, 21 mai 1997, 9 juin 1997 et 18 juin 1997, le président en exercice a désigné les juges des sièges respectifs conformément aux articles 58 et 59 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage.
Les juges-rapporteurs ont estimé n'y avoir lieu de faire application dans les affaires respectives des articles 71 ou 72 de la loi organique.
Les quatre décisions de renvoi ont été notifiées conformément à l'article 77 de la loi organique, par lettres recommandées à la poste respectivement les 12 mars 1997, 9 juin 1997, 26 juin 1997 et 26 juin 1997.
L'avis prescrit par l'article 74 de la loi organique a été publié au Moniteur belge respectivement les 21 mars 1997, 13 juin 1997, 10 juillet 1997 et 9 août 1997.
Par ordonnances des 28 mai 1997, 12 juin 1997 et 25 juin 1997, la Cour a joint les affaires.
Des mémoires ont été introduits par : - A. Van Waeyenberghe, Brusselsesteenweg 77, 9090 Melle, L. Van Acker, Koningin Astridlaan 7, 9820 Merelbeke, C. Verhenneman, Marcus Laurenstraat 18, 8310 Sint-Kruis-Brugge, et S. Traey, Lentelei 32, 2650 Edegem, par lettre recommandée à la poste le 24 avril 1997; - le Gouvernement flamand, place des Martyrs 19, 1000 Bruxelles, par lettres recommandées à la poste le 28 avril 1997, le 25 juillet 1997 et le 6 août 1997; - M. Joye et L. Gees, par lettre recommandée à la poste le 15 juillet 1997; - M. Bollen et autres, par lettre recommandée à la poste le 18 juillet 1997; - l'a.s.b.l. Hogeschool Sint-Lukas Brussel, par lettre recommandée à la poste le 8 août 1997.
Par ordonnance du 15 septembre 1997, le président L. De Grève a constaté que le mémoire de « M. Bollen et autres » a été introduit après l'expiration du délai prévu par l'article 85 de la loi organique et déclaré que « M. Bollen et autres » disposent d'un délai de huit jours pour introduire éventuellement leurs observations écrites à ce sujet.
Cette ordonnance a été notifiée à « M. Bollen et autres », par lettre recommandée à la poste le 17 septembre 1997.
Y. Gauthier et autres ont introduit un mémoire justificatif par lettre recommandée à la poste le 23 septembre 1997.
Par ordonnance du 16 octobre 1997, la Cour a déclaré recevable le mémoire introduit par Y. Gauthier et autres.
Cette ordonnance a été notifiée à Y. Gauthier et autres, par lettre recommandée à la poste le 20 octobre 1997.
Les mémoires susdits ont été notifiés conformément à l'article 89 de la loi organique, par lettres recommandées à la poste respectivement le 7 mai 1997 et le 10 octobre 1997.
Des mémoires en réponse ont été introduits par : - A. Van Waeyenberghe et autres, par lettre recommandée à la poste le 5 juin 1997. - l'a.s.b.l. Hogeschool Sint-Lukas Brussel, par lettre recommandée à la poste le 18 novembre 1997; - Y. Gauthier et autres, par lettre recommandée à la poste le 19 novembre 1997.
Par ordonnances du 25 juin 1997 et du 22 janvier 1998, la Cour a prorogé respectivement jusqu'aux 24 février 1998 et 24 août 1998 le délai dans lequel l'arrêt doit être rendu.
Par ordonnance du 17 décembre 1997, la Cour a déclaré les affaires en état et fixé l'audience au 14 janvier 1998.
Cette ordonnance a été notifiée aux parties ainsi qu'à leurs avocats, par lettres recommandées à la poste le 18 décembre 1997.
A l'audience publique du 14 janvier 1998 : - ont comparu : . Me D. Matthys, avocat au barreau de Gand, pour A. Van Waeyenberghe et autres; . Me L. Lenaerts et Me K. Jespers loco Me W. Rauws, avocats au barreau d'Anvers, pour Y. Gauthier et autres; . Me A. Navasartian loco Me E. Brewaeys, avocats au barreau de Bruxelles, pour M. Joye et L. Gees; . Me P. Peeters, avocat au barreau de Bruxelles, pour l'a.s.b.l.
Hogeschool Sint-Lukas Brussel; . Me P. Devers, avocat au barreau de Gand, pour le Gouvernement flamand; - les juges-rapporteurs G. De Baets et P. Martens ont fait rapport; - les avocats précités ont été entendus; - les affaires ont été mises en délibéré.
La procédure s'est déroulée conformément aux articles 62 et suivants de la loi organique, relatifs à l'emploi des langues devant la Cour.
IV. En droit - A - Quant à la procédure Mémoire de Y. Gauthier et autres A.1. Dans l'affaire portant le numéro 1093 du rôle, un mémoire a été introduit par M. Bollen le 18 juillet 1997. Etant donné que ce mémoire émanait d'une personne qui n'était pas partie à l'instance principale, la Cour a, par ordonnance du 15 septembre 1997, constaté la tardiveté de ce mémoire en intervention. Il appert toutefois de la réponse des avocats, du 23 septembre 1997, que ce mémoire du 18 juillet 1997 n'était pas un mémoire en intervention mais un mémoire - comportant une erreur matérielle de nom - introduit, en application de l'article 85 de la loi spéciale sur la Cour d'arbitrage, par une partie qui est à la cause dans l'instance principale.
Mémoire de l'a.s.b.l. Hogeschool Sint-Lukas Brussel A.2. L'a.s.b.l. Hogeschool Sint-Lukas Brussel objecte, dans l'affaire portant le numéro 1102 du rôle, que le Conseil d'Etat n'était pas compétent pour se prononcer sur le litige formant l'instance principale et communique à la Cour d'arbitrage qu'elle a introduit un pourvoi en cassation contre l'arrêt du Conseil d'Etat. Elle demande, pour ce motif, que la procédure actuelle devant la Cour d'arbitrage soit suspendue jusqu'à ce que la Cour de cassation se soit prononcée sur la compétence du Conseil d'Etat. Si la Cour de cassation considérait que le Conseil d'Etat est incompétent, la réponse de la Cour d'arbitrage aux questions préjudicielles posées serait sans objet.
Quant au fond Quant à la première question préjudicielle Mémoire du Gouvernement flamand A.3.1. L'article 24, § 5, de la Constitution n'interdit pas toute délégation faite par le législateur décrétal au gouvernement; simplement, la délégation ne peut être à ce point étendue qu'elle laisserait au gouvernement le soin de fixer des règles essentielles à l'organisation de l'enseignement (Cour d'arbitrage, nos 43/96 et 80/96). En outre, l'article 24, § 5, de la Constitution n'interdit pas davantage que de telles missions soient confiées à d'autres autorités (telles que les instituts supérieurs en Communauté flamande) : celles-ci peuvent également être chargées de tâches d'exécution et se voir attribuer des pouvoirs de décision (Cour d'arbitrage, n° 30/96).
A.3.2. Semblables compétences peuvent être attribuées aux instituts supérieurs lorsque le législateur décrétal a voulu, comme en l'espèce, accorder à ces écoles une large autonomie en matière de gestion, d'enseignement, de formations offertes et de personnel enseignant, matières pour lesquelles les instituts supérieurs disposent de compétences étendues, notamment en matière de nomination et d'établissement du cadre du personnel.
Dans ces circonstances, il apparaît logique et admissible en droit - certainement en ce qui concerne les dispositions transitoires relatives au personnel enseignant, dont l'exécution a pour conséquence que le cadre du personnel est fixé pour la première fois - que ce soient les directions des instituts supérieurs qui détiennent le pouvoir de décision concernant la détention par les anciens professeurs de branches artistiques (c'est-à -dire les professeurs en poste avant l'opération de concordance), qui sont actuellement chargés d'activités d'enseignement artistique, de la « réputation artistique exigée » pour pouvoir être nommés chargés de cours par concordance, dans le cadre de l'arrêté pris ou à prendre par le Gouvernement flamand.
A.3.3. Dans le cadre de l'application des dispositions transitoires et de son caractère unique et compte tenu de l'autonomie des instituts supérieurs, il peut également être admis que les directions des instituts supérieurs déterminent préalablement - en application du principe de la sécurité juridique - les critères qu'elles utiliseront elles-mêmes pour apprécier l'existence ou l'absence de cette « réputation artistique ». Il n'est pas possible de déterminer in abstracto sur quelle réputation artistique portera l'appréciation des instituts supérieurs, c'est-à -dire concernant quelle « subdivision d'art » - qui en effet ne correspond pas nécessairement à une discipline visée à l'article 5 du décret relatif aux instituts supérieurs ou à une formation visée aux articles 8 et suivants du même décret, mais bien aux branches à enseigner dans ces disciplines ou formations. Ceci dépendra en premier lieu de la composition du personnel de chacun des instituts supérieurs pour l'enseignement duquel s'applique l'article 318 du décret relatif aux instituts supérieurs.
Il est dès lors impossible d'adopter des critères d'appréciation généraux, identiques pour tous les instituts supérieurs, à l'égard des différents arts visés ici et de leurs composantes les plus diverses; ces critères peuvent seulement être déterminés sur le terrain. Pour les mêmes motifs, les critères d'appréciation de la « réputation artistique » peuvent varier d'une école à l'autre pour certaines subdivisions d'art, en fonction des normes choisies, tant du point de vue du contenu que pour ce qui est de la qualité, par chaque institut supérieur.
A.3.4. Dans ces circonstances particulières et compte tenu du fait qu'il s'agit de dispositions transitoires qui ne s'appliquent qu'au personnel enseignant qui était en fonction au 31 décembre 1995, en vue de permettre la concordance avec la fonction de chargé de cours, la délégation inscrite à l'article décrétal apparaît comme constitutionnellement acceptable. En effet, il ne s'agit pas d'une délégation essentielle concernant l'organisation de l'enseignement par les instituts supérieurs dans la Communauté flamande.
Mémoire de A. Van Waeyenberghe et autres A.4.1. L'article 24, § 5, de la Constitution implique que l'organisation, la reconnaissance et le subventionnement de l'enseignement par la communauté doivent être réglées par la loi ou le décret et que le Gouvernement flamand ne peut donc s'approprier ces compétences. Par là , le Constituant n'a pas entendu, selon la Cour d'arbitrage, interdire toute délégation de compétences (Cour d'arbitrage, n° 30/96).
Pour respecter la disposition constitutionnelle précitée, il est requis que les éléments essentiels de cette matière soient repris au décret lui-même et que, dans la formulation du pouvoir réglementaire qui est accordé au gouvernement de communauté, l'on indique les critères tenant lieu de directives pour l'établissement de la réglementation dont il s'agit (Cour d'arbitrage, n° 45/94). Une telle délégation ne peut donc être à ce point étendue qu'elle laisserait au gouvernement le soin de régler des aspects essentiels de l'organisation de l'enseignement. Ainsi, le Conseil d'Etat indique clairement dans ses arrêts de suspension « que les compétences que le législateur décrétal attribue au gouvernement doivent s'interpréter de manière particulièrement stricte ».
Toujours selon la Cour d'arbitrage, c'est au législateur fédéral ou décrétal qu'il appartient de fixer les principes quant aux critères essentiels précités. A travers ces délégations, un gouvernement de communauté ou une autre autorité ne saurait combler l'imprécision de ces principes ni affiner les options insuffisamment détaillées (Cour d'arbitrage, nos 45/94 et 30/96). L'article 24, § 5, de la Constitution empêche donc que le Gouvernement flamand puisse lier des conditions supplémentaires aux transferts vers des emplois déterminés.
A.4.2. L'arrêté du Gouvernement flamand du 12 juin 1995 relatif à la concordance ne se limite pas à attribuer une nouvelle dénomination à la fonction de professeur de branches artistiques mais répartit les titulaires de ces emplois en deux groupes, celui des assistants et celui des chargés de cours, dont l'un doit assister l'autre et dont l'un est dirigé par l'autre. Une telle mesure constitue indubitablement une disposition essentielle au sens des arrêts précités de la Cour d'arbitrage et ne peut pas être déléguée, pas même lorsque l'on prétend que le législateur décrétal entendait conférer aux instituts supérieurs une large autonomie.
Il en est d'autant plus ainsi que la réglementation de la concordance, c'est-à -dire son élaboration intégrale sans aucune définition décrétale de la notion de « réputation artistique » qui est par définition excessivement subjective et vague, constitue une règle transitoire régie par le principe de l'article 317, alinéa 1er, du décret relatif aux instituts supérieurs, selon lequel la concordance doit être réalisée des anciennes fonctions vers les nouvelles dénominations de fonctions.
Il convient de souligner qu'auparavant tous les professeurs de branches artistiques des anciens Conservatoires royaux occupaient concrètement la même fonction, avec le même degré d'indépendance et de responsabilité, alors que la concordance que le législateur décrétal voudrait laisser au Gouvernement flamand et aux instituts supérieurs, sur la base de la notion tout de même excessivement vague et subjective de « réputation artistique » (qui, selon le Gouvernement flamand lui-même, est indéfinissable et qui donne lieu à l'arbitraire comme il apparaît dans le cas de Sylvia Traey), aurait pour effet que ce groupe de professeurs jusqu'alors « égaux » soit tout à coup scindé en « inégaux » avec des profils statutaires différant fondamentalement par leur contenu, alors qu'ils ont été nommés autrefois professeur de branches artistiques notamment à cause de leur notoriété et de leur savoir-faire artistique. Des dispositions transitoires donnent droit, sur la base du principe de la confiance légitime, au maintien de la situation antérieure qui n'était caractérisée par aucune distinction hiérarchique. Il s'agit donc ici d'un aspect essentiel de l'enseignement.
Mémoire des parties Y. Gauthier et autres A.5.1. Quant au fond, les parties requérantes dans l'instance principale reprennent les arguments invoqués dans l'affaire portant le numéro 1057 du rôle, avec les compléments suivants.
On ne saurait soutenir que la délégation de compétence porterait sur des matières qui ne sont pas essentielles, référence étant faite ici à l'arrêt n° 76/96 relatif aux objectifs finaux. Les notions visées dans le décret sur lequel il était statué à cette occasion étaient plus claires que la notion d' » ample réputation artistique », et malgré cela le législateur décrétal a prévu de régler celles-ci par décret afin de demeurer en conformité avec l'article 24, § 5, de la Constitution.
A.5.2. Dans le même sens, le Conseil d'Etat a considéré que les critères matériels doivent être fixés par le législateur décrétal pour être conformes au principe de légalité. L'attribution de la réputation artistique est par excellence une matière de fond. En d'autres termes, au moins les principes doivent être fixés par le législateur décrétal.
A.5.3. La disposition constitutionnelle figurant à l'article 24, § 5, de la Constitution ne saurait être vidée de son sens par la prétendue autonomie des instituts supérieurs. Cette autonomie, qui est du reste fort limitée ainsi qu'il apparaît des restrictions concernant l'organisation de formations, n'empêche nullement que des délégations aux instituts supérieurs autonomes puissent être contraires au principe de légalité contenu à l'article 24, § 5, de la Constitution.
Il faut souligner le caractère vague et l'absence de tout critère dans la délégation décrétale de compétence, concernant la fixation et l'attribution de « l'ample réputation artistique », qui est faite au Gouvernement flamand (article 317, alinéa 1er, du décret relatif aux instituts supérieurs, tel qu'il a été modifié par l'article 133 du décret relatif à l'enseignement VII) et aux directions des instituts supérieurs (article 317, alinéa 2, modifié, du décret relatif aux instituts supérieurs).
A.5.4. C'est à tort que le Gouvernement flamand prétend qu'il est impossible d'inscrire dans le décret des critères d'appréciation généraux pour tous les instituts supérieurs, ainsi qu'il ressort de l'article 100 du décret relatif aux instituts supérieurs et comme il est proposé à l'article 51 du projet de décret relatif à l'enseignement IX. Il ressort également de l'exposé des motifs de ce texte que les dispositions transitoires de l'article 317 du décret relatif aux instituts supérieurs ne constituent pas un cas unique.
Mémoire de l'a.s.b.l. Hogeschool Sint-Lukas Brussel A.6.1. L'article 24, § 5, de la Constitution n'interdit pas toute délégation : une telle délégation n'est interdite que pour les matières qui sont essentielles pour l'organisation de l'enseignement (Cour d'arbitrage, nos 11/96, 45/94 et 33/92). En raison de la nécessaire complexité de la législation relative à l'enseignement et de la dynamique propre à l'enseignement, il est en effet impossible de fixer par décret chaque détail concernant l'organisation, la reconnaissance ou le subventionnement de l'enseignement.
A.6.2. La compétence normative conférée aux instituts supérieurs est conforme à l'article 24 de la Constitution.
En premier lieu, il n'y a pas de délégation au Gouvernement flamand.
Le législateur décrétal a en effet disposé lui-même explicitement, même s'il l'a fait de façon rétroactive, que la nomination par concordance à la fonction de chargé de cours pour les activités d'enseignement artistique ne peut avoir lieu que pour autant que le membre du personnel concerné dispose d'une grande réputation artistique et que les directions des instituts supérieurs doivent apprécier les critères de cette notoriété artistique. Il existe par conséquent une disposition décrétale. L'article 3, 2°, de l'arrêté du Gouvernement flamand du 12 juin 1995 « portant concordance des fonctions des membres du personnel directeur et du personnel enseignant des instituts supérieurs » n'en constitue qu'une simple confirmation. Même si l'on admettait qu'il y a en l'espèce une délégation de la compétence normative par le législateur décrétal au Gouvernement flamand, quod non, on peut difficilement considérer que cette prétendue « compétence normative » serait essentielle pour l'organisation de l'enseignement. Il s'agit du reste d'un ajout à une disposition transitoire figurant dans le décret relatif aux instituts supérieurs.
S'agissant des instituts supérieurs, on ne saurait contester que le législateur décrétal les a expressément habilités à fixer les critères de la notoriété artistique de leur personnel enseignant chargé d'activités d'enseignement artistique. Le législateur décrétal n'a donc pas fixé lui-même les critères de la notoriété artistique. Il lui est en effet impossible de régler par décret chaque détail relatif à l'organisation de l'enseignement. En outre, il n'est pas non plus souhaitable que le législateur décrétal fixe lui-même les critères de notoriété artistique. Il s'agit en effet d'une notion dynamique et relative. Son contenu concret évoluera donc rapidement et il faudra pouvoir agir avec la souplesse nécessaire. Dans le cadre de la grande autonomie accordée aux instituts supérieurs par le décret relatif à ces instituts, l'institut supérieur lui-même était le lieu le plus indiqué pour une prise de décision en la matière.
A.6.3. Même si l'on pouvait admettre que l'instauration d'un critère réglant l'accès à certaines fonctions de l'enseignement supérieur artistique est essentielle pour l'organisation de cet enseignement, il doit en tout cas être observé que le législateur décrétal a instauré en l'espèce lui-même un tel critère, à savoir la condition de la « notoriété artistique ». Le fait que le législateur décrétal ait fait cela de façon rétroactive n'y change rien.
Mémoire de M. Joye et L. Gees A.7.1. Selon les parties Joye et Gees, il y a lieu de répondre affirmativement à la première question préjudicielle. L'article 24, § 5, de la Constitution contient une condition de légalité qui a volontairement été renforcée par le Constituant afin de réserver au pouvoir législatif la compétence de régler les aspects essentiels de l'enseignement en ce qui concerne son organisation, sa reconnaissance et son subventionnement (Cour d'arbitrage, n° 33/92). Des délégations peuvent certes être confiées à l'organe exécutif, mais ces délégations ne peuvent porter que sur la mise en oeuvre des principes arrêtés par le législateur lui-même et l'organe exécutif ne saurait, à travers ces délégations, combler l'imprécision de ces principes ou affiner des options insuffisamment détaillées.
A.7.2. L'instauration et l'attribution de la notion de « notoriété artistique » ont pour effet que la direction de l'institut supérieur attribue cette notoriété artistique, laquelle n'est pas davantage précisée ou définie dans le décret, et fixe à cette fin les critères d'appréciation. Cette réglementation a chargé d'autres autorités que le législateur décrétal, et ceci sans leur imposer aucune restriction, de fixer les conditions d'attribution et d'appréciation d'une notion que le législateur décrétal n'a précisé ni défini en aucune manière.
L'octroi aux instituts supérieurs du pouvoir d'attribuer et de fixer les critères d'appréciation de la notion de réputation artistique ne concerne nullement la mise en oeuvre de principes arrêtés par le législateur. En effet, l'attribution de la notoriété artistique est par excellence le critère donnant accès aux fonctions de chargé de cours, de chargé de cours principal, de professeur et de professeur ordinaire pour les disciplines d'arts audiovisuel et plastique, de musique et d'art dramatique, de conception de produits et d'architecture. Il s'agit donc d'éléments essentiels du statut juridique de ces fonctions, qui sont réservés aux pouvoirs législatifs.
Quant à la seconde question préjudicielle Mémoire du Gouvernement flamand A.8.1. Le Gouvernement flamand souligne que les requérants dans l'instance principale ont attaqué seulement les actes individuels pris à leur égard et qu'aucun d'eux ne s'est élevé contre l'arrêté du Gouvernement flamand du 12 juin 1995 « portant concordance des fonctions des membres du personnel directeur et enseignant des instituts supérieurs ». Les dispositions en cause peuvent seulement avoir une influence indirecte sur les recours en annulation, mais il n'est nullement établi que le contenu de ces dispositions déterminera le déroulement de ces recours. En effet, ces décisions individuelles n'ont pas été validées en tant que telles par la disposition décrétale visée. Dans l'arrêt n° 30/97, la Cour d'arbitrage a elle-même observé que les dispositions décrétales n'empêchent nullement le Conseil d'Etat de se prononcer dans les recours en annulation pendants. En effet, il n'existe pas d'identité entre les décisions attaquées devant le Conseil d'Etat et les dispositions attaquées devant la Cour et qui sont également ici en cause.
En outre, toutes les décisions contestées sont antérieures à l'entrée en vigueur de la disposition décrétale en cause, de sorte que cette disposition laisse totalement intact le déroulement des recours en annulation et que ce n'est que par le biais de nouvelles décisions des directions des instituts supérieurs qu'elle peut entraîner des suites juridiques susceptibles d'avoir un effet à une date postérieure à celle des effets juridiques liés à d'éventuels arrêts d'annulation qui interviendraient.
A.8.2. La disposition en cause ne constitue nullement la confirmation décrétale de l'arrêté du Gouvernement flamand du 12 juin 1995. Le Gouvernement flamand allègue aussi que l'article du décret en cause instaure une disposition de concordance qui diffère de celle prévue par l'arrêté du Gouvernement flamand du 12 juin 1995, tant du point de vue du contenu que du point de vue du champ d'application : une condition supplémentaire d'une grande plutôt que d'une simple notoriété artistique est instaurée avec effet rétroactif en ce qui concerne les membres du personnel enseignant chargé d'activités d'enseignement artistique dans les disciplines concernées, pour autant qu'il s'agisse de formations comportant deux cycles.
A.8.3. Même s'il était question de confirmation décrétale, il s'agirait d'une technique de validation acceptable qui peut être justifiée selon les principes établis dans les arrêts nos 67/92 et 33/93, c'est-à -dire à la condition que le seul objectif n'était pas d'empêcher le Conseil d'Etat de se prononcer sur les questions de droit pendantes devant lui. En outre, dans la même hypothèse, l'existence de recours en annulation devant le Conseil d'Etat n'empêche pas qu'un législateur ne porte remède aux irrégularités qui entachent l'acte non attaqué ici mais qui est en cause devant le Conseil d'Etat, préalablement au prononcé, spécialement lorsqu'il s'agit d'un vice de forme (arrêt n° 46/93). Le législateur est autorisé à régler une affaire pendante devant le Conseil d'Etat lorsque l'irrégularité éventuelle consiste précisément en ce que le pouvoir de prendre pareille disposition n'appartient pas à l'autorité administrative mais au législateur lui-même.
A.8.4. Le véritable objectif est la fixation de conditions supplémentaires qui auraient été nécessaires pour le transfert vers certaines fonctions. Le but était en effet d'instaurer une réglementation conforme au principe d'égalité, à l'exercice constitutionnel de compétences en matière d'enseignement et à la politique de l'enseignement, en ce qui concerne la concordance des emplois du personnel enseignant dans l'enseignement supérieur artistique, dans lequel, vu par rapport aux autres disciplines visées par le décret du 13 juillet 1994 relatif aux instituts supérieurs, par suite de la profonde réforme dans l'enseignement supérieur non universitaire, se présentaient certaines particularités, à savoir le passage de l'enseignement artistique, dans le système général de l'enseignement supérieur non universitaire, vers le régime de deux cycles, avec la possibilité de délivrer des diplômes de l'enseignement supérieur artistique du troisième degré et la spécificité des anciennes modalités de recrutement des enseignants, de sorte qu'une concordance sur la base de la détention du diplôme ne pouvait pas valoir seule comme critère de concordance et que beaucoup de membres du personnel, indépendamment de l'obtention de l'attestation de notoriété artistique, ne pouvaient prétendre dans le régime organique ni à un emploi de chargé de cours ni à un emploi d'assistant.
La distinction obtenue par l'instauration de la condition de la notoriété artistique se trouve dès lors justifiée d'une part par le caractère particulier des activités d'enseignement artistique ici visées et d'autre part par les conditions dans lesquelles la catégorie de personnel ici visée pouvait satisfaire, dans l'ancienne réglementation, aux conditions en matière de certificats d'aptitudes, et enfin par la circonstance que l'enseignement supérieur artistique a maintenant été associé à l'enseignement supérieur non universitaire et qu'il peut donc -du moins pour les formations comportant deux cycles, les seules auxquelles s'applique l'article 133 du décret du 8 juillet 1996 - délivrer des diplômes du troisième degré, de sorte qu'un critère supplémentaire - la notoriété artistique - devait être instauré par décret.
Sans cette distinction, la concordance aurait dû être fondée exclusivement sur la détention du diplôme, comme pour les autres membres du personnel enseignant des instituts supérieurs, ce qui aurait entraîné une nomination uniforme, par le jeu de la concordance, à la nouvelle fonction d'assistant, excepté pour les porteurs d'un diplôme de docteur avec thèse, voire à l'impossibilité de transférer par concordance à quelque nouvelle fonction que ce soit (en l'absence de diplôme équivalent ou tout simplement de diplôme).
C'est seulement grâce à l'introduction de la distinction visée ici et donc à l'appréciation de la « notoriété artistique » en tant que fondement, à côté de la nomination dans l'ancien système, pour la preuve des aptitudes, qu'a été rendue possible la nomination par concordance à la fonction de chargé de cours pour ceux qui remplissaient cette condition, et à la fonction d'assistant pour tous les autres. Si l'article contesté du décret devait avoir une incidence sur le règlement des recours en annulation, quod non, il convient de constater que son but unique ou principal n'avait rien à voir avec cela.
A.8.5. La rétroactivité au 1er janvier 1996 est justifiée, dans le cadre de la réforme globale de l'enseignement, ici visée, en ce qui concerne l'enseignement supérieur non universitaire et à titre de disposition transitoire, puisqu'elle était nécessaire pour le bon fonctionnement de la dispensation de l'enseignement et pour la continuité du service public, c'est-à -dire en vue d'éviter que les membres du personnel concernés de l'enseignement supérieur artistique ne viennent à se trouver dans un vide juridique ou du moins dans une situation juridique incertaine, alors que la situation juridique de leurs collègues dans les autres disciplines - qui ont souvent le même institut supérieur pour employeur - était déjà définitivement réglée à partir de la même date.
A.8.6. Le Gouvernement flamand s'explique enfin également à propos de l'errata du 22 novembre 1996 relatif à l'entrée en vigueur au 1er janvier 1996 qui semble être la conséquence d'une renumérotation des articles du décret suite à l'insertion, par amendement, d'un nouvel article. L'errata visait à corriger cette erreur matérielle afin de rendre le décret conforme aux votes parlementaires.
Mémoire de A. Van Waeyenberghe et autres A.9.1. Selon la jurisprudence de la Cour d'arbitrage, un législateur ou le législateur décrétal ne peut faire disparaître, au moyen de la validation, l'irrégularité qui entache un arrêté, après qu'une décision du Conseil d'Etat a constaté cette irrégularité, ni ne peut empêcher le Conseil d'Etat de se prononcer sur la régularité d'un arrêté.
A.9.2. La genèse des dispositions modificatives du décret relatif à l'enseignement VII et de l'errata publié concernant la date d'entrée en vigueur fait apparaître qu'il s'agit d'une validation après suspension et que le législateur décrétal a voulu exercer son influence sur des litiges pendants, même si (par hypothèse) ce n'était pas son unique objectif.
Tout d'abord, l'article 133 du décret relatif à l'enseignement VII n'a pas d'autre but que d'empêcher que le Conseil d'Etat se prononce dans un sens favorable aux requérants sur des questions de droit pendantes.
Tous les professeurs de branches artistiques devaient en effet être nommés par concordance; seuls ceux qui n'ont pas été nommés chargés de cours et qui se sont opposés à leur nomination par concordance à la fonction d'assistant ont encore pu être affectés par la mesure modifiée de l'article 317 du décret relatif aux instituts supérieurs, qui contient une disposition transitoire pour ceux qui ont été nommés ou désignés sous l'ancien régime.
La réalisation d'une base décrétale a évidemment une influence sur les procédures pendantes, puisqu'une annulation fondée sur l'incompétence de l'autorité qui a pris la décision en l'absence d'une base décrétale aura bien des conséquences étendues et que la décision attaquée est affectée dans ses fondements les plus essentiels. Il ressort du reste clairement des questions préjudicielles du Conseil d'Etat que la réponse de la Cour d'arbitrage sur ce point est pertinente pour la solution de l'instance principale.
En outre, comme l'indiquent les parties requérantes, le législateur décrétal pouvait, sur la base de la chronologie des faits, savoir ce qui se passait dans les procédures engagées devant le Conseil d'Etat et ce qu'il fallait faire pour éviter un désastre. Ainsi le Gouvernement flamand était-il parfaitement au courant des procédures en cause devant le Conseil d'Etat, d'une part via l'institut supérieur, qui en tant que partie adverse des requérants dans l'instance principale était assisté par le bureau d'avocats du ministre flamand de l'Enseignement, et d'autre part par le service des rémunérations du département de l'enseignement du ministère de la Communauté flamande.
A.9.3. Enfin, il est souligné que pour ce qui concerne l'errata, le législateur décrétal devait réparer lui-même l'erreur de numérotation par la voie d'un nouveau décret et non par le biais d'un errata.
Mémoire des parties Y. Gauthier et autres A.10. Contrairement à ce qu'affirme le Gouvernement flamand dans un mémoire antérieur, il ne ressort pas de la jurisprudence de la Cour d'arbitrage que la technique de la validation décrétale ou législative serait en principe justifiée ni que la validation législative serait seulement illégitime lorsque le législateur décrétal ou fédéral avait pour objectif unique d'empêcher le Conseil d'Etat de se prononcer sur des questions de droit dont il était saisi. La Cour a certes décidé que lorsqu'un tel objectif constitue le but unique, la validation législative est illicite, mais cela n'exclut nullement que la validation législative soit également inacceptable lorsqu'elle n'a pas uniquement cet objectif (Cour d'arbitrage, nos 67/92 et 33/93).
Mémoire de l'a.s.b.l. Hogeschool Sint-Lukas Brussel A.11. Selon l'a.s.b.l. Hogeschool Sint-Lukas Brussel, la deuxième question préjudicielle contient deux sous-questions distinctes qui méritent une réponse séparée, à savoir un contrôle au regard des articles 10 et 11 de la Constitution et aux articles 146 et 160 de la Constitution, pris comme des dispositions répartitrices de compétences.
I. Quant à la violation prétendue du principe d'égalité et de non-discrimination A.12.1. L'a.s.b.l. Hogeschool Sint-Lukas Brussel fait référence à la jurisprudence dans laquelle la Cour a considéré que, bien qu'elle soit de nature à affecter la sécurité juridique, une disposition législative rétroactive peut se justifier par des circonstances exceptionnelles, notamment lorsqu'elle est indispensable au bon fonctionnement ou à la continuité du service public. La Cour ajoutait que le simple fait que l'effet rétroactif d'une disposition législative ait une incidence sur le recours en annulation devant le Conseil d'Etat ne signifie pas que le principe constitutionnel d'égalité serait violé en ce qu'il serait porté atteinte aux garanties juridictionnelles offertes à tous les citoyens. Il ne le serait que « dans l'hypothèse où la rétroactivité aurait pour objectif unique ou principal d'influencer dans un sens déterminé l'issue d'une ou de plusieurs procédures judiciaires ou d'empêcher les juridictions de se prononcer sur une question de droit déterminée, sans que des circonstances exceptionnelles puissent raisonnablement justifier cette intervention » (Cour d'arbitrage, n° 30/95).
A.12.2. L'effet rétroactif de l'article 317 du décret relatif aux instituts supérieurs, tel qu'il a été complété par l'article 133 du décret du 8 juillet 1996 relatif à l'enseignement VII, est justifié et n'a certainement pas pour objectif unique ou principal d'influencer dans un sens déterminé l'issue des procédures pendantes devant le Conseil d'Etat.
Lors de la concordance des fonctions remplacées avec les nouvelles dénominations de fonctions correspondantes dans le cadre de l'enseignement supérieur artistique, il fallait tenir compte des qualités artistiques du personnel enseignant, ce que le Gouvernement flamand a fait par l'arrêté du 12 juin 1995 : la nomination par concordance à la fonction de chargé de cours était seulement possible pour le personnel enseignant justifiant d'une grande notoriété artistique. Bien que cette condition ne figurât pas explicitement dans l'article 317 originaire du décret relatif aux instituts supérieurs, elle ressortait tout de même des travaux préparatoires et elle fut, afin d'éviter toute contestation quant à la légalité (ou à la constitutionnalité), fixée par décret dans l'article 133 du décret du 8 juillet 1996.
L'effet rétroactif de l'ajout à l'article 317 du décret relatif aux instituts supérieurs fournissait par conséquent, d'une part, le fondement décrétal nécessaire à l'article 3 de l'arrêté susdit du 12 juin 1995 du Gouvernement flamand et, d'autre part, l'habilitation décrétale nécessaire aux directions des instituts supérieurs pour fixer les critères de cette notoriété artistique. Etant donné que l'article 317 originaire du décret relatif aux instituts supérieurs ainsi que l'article 3 de l'arrêté du Gouvernement flamand du 12 juin 1995 « portant concordance des fonctions des membres du personnel directeur et enseignant des instituts supérieurs » entraient en vigueur le 1er janvier 1996, l'article 133 du décret du 8 juillet 1996 relatif à l'enseignement VII devait lui aussi nécessairement produire ses effets à cette date. De surcroît, il convient d'observer que tout membre du personnel enseignant de l'enseignement supérieur artistique, et donc pas seulement M. Joye et L. Gees, ne pouvait être nommé par concordance à la fonction de chargé de cours au 1er janvier 1996 que s'il disposait d'une grande notoriété artistique. Il ne saurait donc être question d'une violation du principe d'égalité.
A.12.3. Le simple fait que l'effet rétroactif d'une disposition législative ait une incidence sur le recours en annulation devant le Conseil d'Etat ne signifie pas que le principe constitutionnel d'égalité serait violé en ce qu'il serait porté atteinte aux garanties juridictionnelles offertes à tous les citoyens. Il ne le serait que « dans l'hypothèse où la rétroactivité aurait pour objectif unique ou principal d'influencer dans un sens déterminé l'issue d'une ou de plusieurs procédures judiciaires ou d'empêcher les juridictions de se prononcer sur une question de droit déterminée, sans que des circonstances exceptionnelles puissent raisonnablement justifier cette intervention » (Cour d'arbitrage, n° 30/95). Il résulte clairement de ce qui précède que l'effet rétroactif de l'article 317 du décret relatif aux instituts supérieurs, tel qu'il a été complété par l'article 133 du décret du 8 juillet 1996 relatif à l'enseignement VII, est plus que justifié et n'a certainement pas pour objectif unique ou principal d'influencer dans un sens déterminé l'issue des procédures pendantes devant le Conseil d'Etat. Le principe d'égalité n'est donc pas violé.
II. Quant à la violation prétendue des règles établies par la Constitution ou en vertu de celle-ci pour déterminer les compétences respectives de l'Etat et des communautés.
A.13.1. Il n'est pas contesté que seul le législateur fédéral est compétent, conformément aux articles 146 et 160 de la Constitution, pour déterminer les attributions du Conseil d'Etat. On ne saurait toutefois davantage contester que les communautés sont compétentes pour régler le statut juridique des membres du personnel de l'enseignement. Par conséquent, le Conseil flamand n'a pas outrepassé sa compétence en prenant une mesure en cette matière.
Par cette mesure, les décisions contestées prises par l'a.s.b.l.
Hogeschool Sint-Lukas Brussel ne sont pas soustraites à la juridiction du Conseil d'Etat. Le Conseil d'Etat conserve la possibilité d'apprécier la légalité de ces décisions. Il devra évidemment tenir compte de la disposition décrétale rétroactive dans les procédures en annulation dont il est actuellement saisi. Ceci ne l'empêche toutefois pas d'annuler les décisions contestées sur la base d'autres moyens éventuels qui, en l'espèce, ont été soulevés devant lui. Il ne saurait donc être question en l'espèce d'une violation des articles 146 et 160 de la Constitution.
A.13.2. L'a.s.b.l. Hogeschool Sint-Lukas Brussel rappelle que la Cour a du reste décidé, également dans une affaire d'enseignement, qu'un décret abrogatoire avec effet rétroactif d'une disposition réglementaire dont la violation a été soulevée, dans un moyen unique, devant le Conseil d'Etat avait sans doute pour conséquence que le Conseil d'Etat ne puisse plus se prononcer sur le moyen unique invoqué devant lui mais que ceci n'implique en aucun cas que l'article 146 de la Constitution serait violé. Ce ne serait le cas que s'il fallait considérer que « cette disposition abrogatoire [a] eu pour objectif unique ou principal de mettre à néant ou d'influencer la compétence du Conseil d'Etat » (Cour d'arbitrage, n° 30/95).
Etant donné que l'effet rétroactif de l'article 317 du décret relatif aux instituts supérieurs, tel qu'il a été complété par l'article 133 du décret du 8 juillet 1996 relatif à l'enseignement VII, n'a certainement pas comme objectif unique ou principal d'influencer dans un sens déterminé l'issue des procédures pendantes devant le Conseil d'Etat, les articles 146 et 160 de la Constitution ne sont nullement violés.
Mémoire de M. Joye et L. Gees A.14. L'ajout opéré par l'article 133 du décret du 8 juillet 1996 à l'article 317 du décret relatif aux instituts supérieurs avait pour objectif d'empêcher le Conseil d'Etat de se prononcer sur une éventuelle irrégularité de l'arrêté dont il avait suspendu l'exécution.
La disposition législative qui a pour seul objet d'empêcher le Conseil d'Etat de se prononcer sur l'irrégularité éventuelle d'un arrêté viole les articles 10 et 11 de la Constitution en ce qu'elle prive la catégorie des citoyens à laquelle cet arrêté s'applique d'une garantie juridictionnelle donnée à tous les citoyens sans que cette différence de traitement soit justifiée (Cour d'arbitrage, n° 39/93). Sur ce point, les parties renvoient également à l'arrêt n° 16/91, dans lequel la Cour a déclaré qu'une loi qui a pour objet de relever de son irrégularité un arrêté royal après que celle-ci a été établie par une décision du Conseil d'Etat, d'une part, et, d'autre part, d'empêcher le Conseil d'Etat de se prononcer sur l'irrégularité éventuelle d'un arrêté royal dont il a suspendu l'exécution, viole le principe d'égalité en ce qu'elle prive toute une catégorie de citoyens auxquels s'appliquaient les dispositions annulées et suspendues de l'arrêté royal d'une garantie juridictionnelle essentielle s'appliquant à tous les citoyens sans que ce traitement inégal soit objectivement justifié.
Quant à la troisième question préjudicielle Mémoire du Gouvernement flamand A.15. Faisant référence au rapport de l'auditorat, le Gouvernement flamand déclare que la troisième question préjudicielle relative au statut pécuniaire du personnel enseignant instauré par la disposition transitoire n'a rien à voir avec les décisions attaquées par le biais des recours en annulation et est certainement dénuée de toute pertinence à l'égard de l'instance principale. Dans ces circonstances spécifiques et établies, il apparaît au Gouvernement flamand que la Cour peut constater, praeter legem, que la troisième question ne devait pas être posée et qu'elle n'est pas recevable ratione materiae.
Le Gouvernement flamand se réserve le droit de répondre de façon plus approfondie à la troisième question préjudicielle après avoir pris connaissance des mémoires des requérants dans l'instance principale.
Mémoire de A. Van Waeyenberghe et autres A.16.1. La troisième question préjudicielle porte sur la réglementation salariale applicable aux parties requérantes et constitue également une réglementation transitoire. Il est fait référence, à ce propos, à l'article 323 du décret relatif aux instituts supérieurs, qui établit une distinction entre les personnes qui bénéficient du système transitoire prévu à l'article 318 selon qu'elles sont ou non chargées d'activités d'enseignement artistique dans les disciplines d'arts audiovisuel et plastique, de musique et d'art dramatique, à l'exception des formations de base comportant un seul cycle. Pour la première catégorie, on maintient au minimum l'échelle barémique antérieure; pour la seconde catégorie, l'échelle barémique antérieure et le traitement antérieur. Cette question est également pertinente pour la solution du litige au fond, ainsi qu'il ressort de l'arrêt du Conseil d'Etat.
A.16.2. Selon les parties Van Waeyenberghe et autres, l'article 323, § 2, du décret relatif aux instituts supérieurs créerait une distinction radicale en ce qui concerne la rémunération pour une catégorie bien déterminée de membres du personnel, sans que soit ou puisse être avancée une base de différenciation valable, raisonnable et se justifiant du point de vue des objectifs du décret relatif à l'enseignement supérieur non universitaire. En outre, ceci entraînerait directement une contradiction avec l'article 320, § 1er, in fine, du même décret relatif aux instituts supérieurs, dans lequel il est dit que les membres du personnel nommés par le biais de la concordance (sans distinction) « sont censés se trouver, dans leur fonction, dans la même position statutaire qu'au moment de la transformation de la fonction remplacée ». On peut en effet difficilement soutenir que la situation pécuniaire ne serait pas une composante de la situation statutaire. Il ne suffit pas de démontrer que la distinction « objectivable » peut être cherchée dans le fait qu'elle touche une des catégories de personnel spécifiques; il doit encore être démontré que cette distinction est juste et raisonnablement justifiée, ce qui n'est pas le cas.
A.16.3. Le dernier alinéa du paragraphe 2 de l'article 323 du décret relatif aux instituts supérieurs énonce, il est vrai, que les dispositions du paragraphe 1er s'appliquent aux personnes visées par cet alinéa « si elles obtiennent à leur demande et avec l'accord de la direction de l'institut supérieur l'application de l'article 142, § 2, », c'est-à -dire, lorsqu'elles renoncent à la règle de cumul, plus favorable, de l'article 150 du décret relatif aux instituts supérieurs. Selon le Gouvernement flamand, elles obtiennent alors, avec l'accord explicite de la direction de l'institut supérieur, l'échelle de traitement normalement liée à la fonction qu'elles occupent. Les critères en fonction desquels la direction de l'institut supérieur accorde cette autorisation ne sont pas fixés, et la réalité actuelle se résume à ce que cette autorisation n'est jamais accordée, de sorte que de nombreux membres du personnel ont déjà été confrontés à un refus radical après qu'ils eurent pris des engagements irréversibles dans l'optique de l'obtention de cette échelle de traitement « normale », en renonçant au régime de cumul de l'article 150 (appelé le « cumul artistique »). - B - Les dispositions en cause B.1.1. L'article 317 du décret du 13 juillet 1994 relatif aux instituts supérieurs en Communauté flamande, dont les alinéas 2 et 3 ont été ajoutés par l'article 133 du décret du 8 juillet 1996 relatif à l'enseignement VII, dispose : « Le Gouvernement flamand établit la concordance des fonctions remplacées avec les nouvelles dénominations des fonctions correspondantes, telles qu'elles sont prévues à l'article 101.
En ce qui concerne les membres du personnel enseignant, chargés d'activités d'enseignement artistique dans une formation initiale de deux cycles ou dans une formation complémentaire de professeur, appartenant aux disciplines d'art audiovisuel et plastique, de musique et d'art dramatique, de conception de produits et d'architecture, de formation d'architecte d'intérieur, le Gouvernement flamand doit réserver la concordance d'enseignant aux membres du personnel qui bénéficient d'une ample réputation artistique.
La direction de l'institut supérieur attribue la réputation artistique et en fixe les critères d'évaluation. » B.1.2. L'article 323 du même décret est libellé comme suit : « § 1er. Les membres du personnel visés à l'article 318 continuent à bénéficier de l'échelle de traitement qui pouvait leur être accordée en vertu des dispositions légales et réglementaires qui étaient en vigueur avant l'entrée en vigueur du présent décret, à moins que le titre que détiennent les membres du personnel donne droit à une échelle de traitement supérieure dans la nouvelle fonction. Les membres du personnel ne peuvent en aucun cas recevoir, dans leur nouvelle fonction ou au cas d'une promotion, un traitement inférieur ou un barème inférieur à celui dont ils bénéficiaient dans leur fonction précédente. § 2. Les membres du personnel visés à l'article 318 et chargés d'activités d'enseignement artistiques appartenant aux disciplines arts audiovisuels et arts plastiques et musique et art dramatique, à l'exception des formations initiales d'un seul cycle, obtiennent dans leur nouvelle fonction l'échelle de traitement spéciale pour le titulaire du titre requis, sauf si l'échelle de traitement supérieure pouvait leur être accordée en vertu des dispositions légales et réglementaires applicables avant l'entrée en vigueur du présent décret. Dans ce cas, ils conservent leur ancienne échelle de traitement.
Cependant, s'ils obtiennent, à leur demande et avec l'accord de la direction de l'institut supérieur, l'application de l'article 142, § 2, les dispositions du § 1er du présent article restent applicables. § 3. Les membres du personnel visés à l'article 318 qui, au 30 juin 1995, sont chargés de la fonction de chef de travaux, conservent l'échelle de traitement qui leur avait été accordée en vertu des dispositions légales et réglementaires applicables avant l'entrée en vigueur du présent décret, au maximum pour le volume de leur charge de chef de travaux au 30 juin 1995. § 4. Par dérogation aux dispositions de la présente section, les membres du personnel temporaires qui, au 30 juin 1995, sont en service comme professeur de cours spéciaux dans l'enseignement supérieur de type court de plein exercice, dans un des établissements ayant participé à la création de l'institut supérieur, qui n'ont pas le titre requis pour la fonction de maître de conférences et ne peuvent pas bénéficier des mesures transitoires accordées aux membres du personnel visés à l'article 318, 2°, peuvent être maintenus en service par l'institut supérieur dans la fonction de maître de conférences.
Ils continuent à bénéficier de l'échelle de traitement qui pouvait leur être accordée en vertu des dispositions légales et réglementaires applicables avant l'entrée en vigueur du présent décret.
Ils sont censés être en possession du diplôme nécessaire à l'exercice de la fonction de maître de conférences. Ils ne peuvent cependant être nommés dans cette fonction. » Affaire portant le numéro 1102 du rôle B.2. Par arrêt n° 66.563, en cause de M. Joye et L. Gees contre l'a.s.b.l. Hogeschool Sint-Lukas Brussel et la Communauté flamande, le Conseil d'Etat s'est déclaré compétent pour connaître des recours introduits et a posé deux questions préjudicielles.
Par arrêt du 18 décembre 1997, la Cour de cassation, chambres réunies, a annulé l'arrêt précité du Conseil d'Etat.
Compte tenu de cette annulation, l'affaire doit être rayée du rôle de la Cour.
Quant à la première question préjudicielle posée dans les affaires portant les numéros 1057, 1093 et 1099 du rôle B.3. La question concerne l'article 317 et est libellée comme suit : « L'article 317 du décret du 13 juillet 1994 relatif aux instituts supérieurs en Communauté flamande, tel qu'il a été complété par l'article 133 du décret du 8 juillet 1996 relatif à l'enseignement VII, viole-t-il l'article 24, § 5, de la Constitution en ce qu'il attribue au Gouvernement flamand et aux directions des instituts supérieurs des compétences normatives concernant l'organisation de l'enseignement ? » B.4. La question fait référence à l'article 317 du décret du 13 juillet 1994, « tel qu'il a été complété par l'article 133 du décret du 8 juillet 1996 relatif à l'enseignement VII ». De cet énoncé ainsi que du considérant lié à cette question, aux termes duquel « l'ajout, reproduit ci-dessus, à l'article 317 du décret du 13 juillet 1994 conduit le Conseil d'Etat à poser deux questions préjudicielles à la Cour d'arbitrage, dont l'une est subsidiaire par rapport à l'autre », il y a lieu de conclure que la question porte seulement sur les alinéas 2 et 3 de l'article 317 du décret du 13 juillet 1994.
B.5. Par arrêt n° 80/97 du 17 décembre 1997 (Moniteur belge du 3 février 1998), la Cour d'arbitrage a annulé l'article 133 du décret de la Communauté flamande du 8 juillet 1996, ainsi que l'article 148, 8°, du même décret, en tant qu'il règle l'entrée en vigueur de l'article 133 annulé.
La question posée est dès lors devenue sans objet.
Quant à la seconde question préjudicielle posée dans les affaires portant les numéros 1057, 1093 et 1099 du rôle et quant à la troisième question préjudicielle dans les affaires portant les numéros 1057 et 1099 du rôle B.6. Ces questions ont été posées par le Conseil d'Etat en ordre subsidiaire, pour le cas où la Cour considérerait, dans sa réponse à la première question, que l'article 317 du décret du 13 juillet 1994 relatif aux instituts supérieurs en Communauté flamande, tel qu'il a été complété par l'article 133 du décret du 8 juillet 1996, ne viole pas la Constitution.
Etant donné que la Cour, par son arrêt n° 80/97 du 17 décembre 1997, a annulé les articles 133 et 148, 8°, du décret du 8 juillet 1996, les questions n'appellent pas de réponse.
Quant à la troisième question préjudicielle dans l'affaire portant le numéro 1093 du rôle B.7. La question préjudicielle est libellée comme suit : « L'article 323, § 2, du décret précité du 13 juillet 1994 viole-t-il les articles 10, 11 et 24 de la Constitution ' dans la mesure où cette disposition, uniquement en ce qui concerne les membres du personnel chargés d'activités d'enseignement de nature artistique..., ne prévoit pas le maintien des droits acquis en ce qui concerne le traitement, dès lors que l'article 329, § 2, du décret HOBU ne prévoit que le maintien d'une échelle de traitement antérieure, alors que pour les autres membres du personnel des instituts supérieurs [non universitaires], l'article 326, § 1er, prévoit effectivement le maintien de l'ancien traitement et que l'article 326bis garantit également, pour les chargés de cours aux conservatoires, le maintien de leur rémunération au 30 juin 1995 ' ? » Cette troisième question préjudicielle n'a pas été posée en ordre subsidiaire, comme c'était le cas dans les affaires portant les numéros 1057 et 1099 du rôle.
B.8.1. Le Gouvernement flamand soulève une exception d'irrecevabilité, considérant que la question préjudicielle est dénuée de pertinence.
B.8.2. Il appartient au juge a quo de statuer sur l'applicabilité d'une norme invoquée devant lui et de décider, le cas échéant, s'il y a lieu d'interroger la Cour au sujet de cette norme.
L'exception soulevée par le Gouvernement flamand est rejetée.
B.9. La question, qui a été posée à l'initiative des requérants devant le Conseil d'Etat, invite la Cour à examiner si l'article 323, § 2, du décret du 13 juillet 1994 viole les articles 10, 11 et 24 de la Constitution en ce qu'il dispose, pour les membres du personnel chargés d'activités d'enseignement artistique, qu'ils conservent leur ancienne échelle de traitement, « alors que pour les autres membres du personnel des instituts supérieurs [non universitaires], l'article 326, § 1er, prévoit effectivement le maintien de l'ancien traitement et que l'article 326bis garantit également, pour les chargés de cours aux conservatoires, le maintien de leur rémunération au 30 juin 1995 ».
L'article 326 du décret du 13 juillet 1994, tel qu'il a été modifié par l'article 53 du décret du 19 avril 1995, dispose : « Sans préjudice de l'application de l'article 93, la direction de l'institut supérieur est tenue de donner un emploi à ses membres du personnel visés à l'article 318, 1°, au prorata du volume de la charge dont ces membres du personnel étaient titulaires au 30 juin 1995.
Aux mêmes conditions, la direction de l'institut supérieur est également tenue de donner un emploi à ses membres du personnel temporaires, visés à l'article 318, 2°, si ces membres du personnel exerçaient au 30 juin 1995 comme fonction principale, la fonction pour laquelle ils bénéficient de dispositions transitoires. » L'article 326bis du décret du 13 juillet 1994, inséré par l'article 54 du décret du 19 avril 1995, dispose : « § 1er. Les membres du personnel qui, au 30 juin 1995, sont en service comme enseignant à [lire : dans] un conservatoire, gardent leur fonction à titre personnel jusqu'à la cessation des fonctions, à condition : a) qu'au 15 janvier 1994, ils fussent en service comme enseignant à [lire : dans] un conservatoire et que, depuis lors, ils y soient restés sans interruption;b) qu'au 15 janvier 1994, ils comptaient une ancienneté de service de 6 ans, acquise dans l'enseignement supérieur;c) qu'au 30 juin 1995, ils soient investis d'une charge comme enseignant d'un volume de 13/18e au moins. La direction de l'institut supérieur est tenue de leur donner, à partir de l'année académique 1995-1996, un emploi au prorata du volume de la charge dont ils sont investis au 30 juin 1995. § 2. Les membres du personnel qui, au 30 juin 1995, sont en service comme enseignant à [lire : dans] un conservatoire et qui ne satisfont pas aux conditions fixées au § 1er, peuvent être gardés en service par l'institut supérieur comme enseignant pour le volume de la charge dont ils sont investis au 30 juin 1995. § 3. Les membres du personnel visés au §§ 1er et 2 ne peuvent pas être nommés enseignants. Par dérogation à l'article 324, § 3, ils continuent à être rémunérés au montant unique qui leur avait été octroyé en vertu de la réglementation en vigueur au 30 juin 1995. En ce qui concerne le cumul, ces membres du personnel sont soumis, dans leur qualité d'enseignant, aux prescriptions de l'article 150. » L'article 324, § 3, auquel l'article 326bis du décret du 13 juillet 1994, inséré par l'article 54 du décret du 19 avril 1995, fait référence, est libellé comme suit : « Les membres du personnel qui, au 31 décembre 1995, bénéficient d'une échelle de traitement comportant un montant unique, obtiennent un barème avec une ancienneté pécuniaire calculée à partir de l'âge de 24 ans, conformément au statut pécuniaire en vigueur au 31 décembre 1995. » B.10. Ainsi que les parties l'indiquent dans leur mémoire devant la Cour, le traitement différent des membres du personnel chargés d'activités d'enseignement artistique, en ce qui concerne le statut pécuniaire, trouve son fondement dans l'article 323, § 2, qui garantit seulement à des membres du personnel leur ancienne échelle de traitement, cependant qu'il est garanti aux membres du personnel visés à l'article 323, § 1er, qu'ils ne pourront en aucun cas recevoir, dans leur nouvelle fonction, un traitement inférieur ou un barème inférieur à celui auquel ils avaient droit dans leur fonction précédente.
B.11. L'article 323 du décret du 13 juillet 1994, qui correspond à l'article 282 du texte originaire du projet de décret, a été adopté sur la base d'un amendement du Gouvernement flamand justifié comme suit par le ministre flamand de l'Enseignement et de la Fonction publique : « Correction technique. Cet amendement garantit que les membres du personnel en question ne gagneront pas moins que sous la réglementation actuelle » (Doc., Conseil flamand, 1993-1994, n° 546/8, p. 4). La justification précitée fait apparaître que la garantie que sera maintenu, au moins, le traitement qui était alloué au moment de l'entrée en vigueur de la nouvelle réglementation s'applique de manière générale aux personnes visées à l'article 318, qu'elles soient ou non chargées d'activités d'enseignement artistique.
B.12. Il résulte de ce qui précède que le grief formulé par les parties requérantes dans l'instance principale, pris de la violation des articles 10, 11 et 24, § 4, de la Constitution, manque en droit, en tant qu'il considère que la règle de protection de l'article 323, concernant le traitement, ne s'applique pas aux personnes chargées d'activités d'enseignement artistique.
La question préjudicielle appelle une réponse négative.
Par ces motifs, la Cour - décide de rayer du rôle de la Cour l'affaire inscrite sous le numéro 1102; - constate que la première question préjudicielle posée dans les affaires portant les numéros 1057, 1093 et 1099 du rôle est sans objet; - déclare que la deuxième question préjudicielle posée dans les affaires portant les numéros 1057, 1093 et 1099 du rôle et la troisième question préjudicielle posée dans les affaires portant les numéros 1057 et 1099 du rôle n'appellent pas de réponse; - dit pour droit : L'article 323, § 2, du décret du 13 juillet 1994 relatif aux instituts supérieurs en Communauté flamande ne viole pas les articles 10, 11 et 24 de la Constitution.
Ainsi prononcé en langue néerlandaise et en langue française, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage, à l'audience publique du 10 mars 1998.
Le greffier, L. Potoms.
Le président, L. De Grève.