publié le 04 juin 1997
Arrêt n° 18/97 du 25 mars 1997 Numéros du rôle : 1037, 1038 et 1040 En cause : les demandes de suspension de l'article 13 du décret de la Communauté flamande du 20 décembre 1996 contenant diverses mesures d'accompagnement du budget 1997. L composée des présidents L. De Grève et M. Melchior, et des juges P. Martens, G. De Baets, E. Cerexh(...)
COUR D'ARBITRAGE
Arrêt n° 18/97 du 25 mars 1997 Numéros du rôle : 1037, 1038 et 1040 En cause : les demandes de suspension de l'article 13 du décret de la Communauté flamande du 20 décembre 1996 contenant diverses mesures d'accompagnement du budget 1997.
La Cour d'arbitrage, composée des présidents L. De Grève et M. Melchior, et des juges P. Martens, G. De Baets, E. Cerexhe, H. Coremans et A. Arts, assistée du greffier L. Potoms, présidée par le président L. De Grève, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet des demandes a. Par requête adressée à la Cour par lettre recommandée à la poste le 22 janvier 1997 et parvenue au greffe le 23 janvier 1997, la s.a.
Belgian Amusement Company Ltd, dont le siège social est établi à 2018 Anvers, Lange Leemstraat 187, a introduit une demande de suspension de l'article 13 du décret de la Communauté flamande du 20 décembre 1996 contenant diverses mesures d'accompagnement du budget 1997, qui abroge l'article 81, 2°, du Code des taxes assimilées aux impôts sur les revenus en ce qui concerne la Région flamande.
Cette affaire est inscrite sous le numéro 1037 du rôle de la Cour. b. Par requêtes adressées à la Cour par lettres recommandées à la poste les 24 et 27 janvier 1997 et parvenues au greffe les 27 et 28 janvier 1997, la s.a. ETC Europa Technics et Cie, dont le siège social est établi à 8500 Courtrai, Rekolettenstraat 27 D, d'une part, et l'a.s.b.l. Automatische Machines Associatie, dont le siège social est établi à 2018 Anvers, Lange Leemstraat 187, la s.a. GBC Association, dont le siège social est établi à 9000 Gand, Oudenaardsesteenweg 35, la s.a. Belgian Amusement Cy, dont le siège social est établi à 2018 Anvers, Lange Leemstraat 187, L. Laget, demeurant à 8300 Knokke-Heist, Zandstraat 5A1, R. De Backer, demeurant à 8400 Ostende, Van Iseghemlaan 40, la s.a. Deba Square, dont le siège social est établi à 9300 Alost, Geraardsbergsestraat 177, Jonckheere, demeurant à 8430 Middelkerke, Leopoldlaan 75, et W. Baetens, demeurant à 9160 Lokeren, Waasmunsterbaan 19, d'autre part, ont introduit une demande de suspension de la même norme.
Ces affaires sont inscrites respectivement sous les numéros 1038 et 1040 du rôle de la Cour.
Les parties requérantes demandent également l'annulation de la même disposition décrétale.
II. La procédure Par ordonnances des 23, 27 et 28 janvier 1997, le président en exercice a désigné les juges du siège dans les affaires respectives conformément aux articles 58 et 59 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage.
Les juges-rapporteurs ont estimé n'y avoir lieu de faire application des articles 71 ou 72 de la loi organique.
Par ordonnance du 29 janvier 1997, la Cour réunie en séance plénière a joint les affaires.
Par ordonnance du 13 février 1997, la Cour a fixé l'audience au 27 février 1997.
Cette ordonnance a été notifiée aux autorités mentionnées à l'article 76 de la loi organique ainsi qu'aux parties requérantes et à leurs conseils, par lettres recommandées à la poste le 14 février 1997.
Par lettre recommandée à la poste le 13 février 1997, parvenue au greffe de la Cour le 14 février 1997, les parties requérantes s.a. GBC Association, L. Laget, R. De Backer, s.a. Deba Square, Jonckheere et W. Baetens déclarent se désister de leur recours en annulation et de leur demande de suspension.
A l'audience publique du 27 février 1997 : - ont comparu : . Me J. Speecke, avocat au barreau de Courtrai, pour les parties requérantes dans les affaires portant les numéros 1037 et 1038 du rôle; . Me J. Weyts, avocat au barreau de Bruges, pour les parties requérantes dans l'affaire portant le numéro 1040 du rôle; . Me P. Van Orshoven, avocat au barreau de Bruxelles, pour le Gouvernement flamand; - les juges-rapporteurs G. De Baets et P. Martens ont fait rapport; - les avocats précités ont été entendus; - les affaires ont été mises en délibéré.
La procédure s'est déroulée conformément aux articles 62 et suivants de la loi organique, relatifs à l'emploi des langues devant la Cour.
III. Objet de la disposition attaquée L'article 13 du décret de la Communauté flamande du 20 décembre 1996 contenant diverses mesures d'accompagnement du budget 1997 s'énonce comme suit : « L'article 81, 2°, du Code des taxes assimilées aux impôts sur les revenus est abrogé, en ce qui concerne la Région flamande. » La disposition abrogée par l'article 13, attaqué, du décret du 20 décembre 1996 fait partie du titre IV du Code précité, lequel prévoit que les appareils automatiques de divertissement sont frappés d'une taxe forfaitaire annuelle qui varie en fonction de la catégorie à laquelle appartient l'appareil.
En application de l'article 4, § 1er, de la loi spéciale du 16 janvier 1989 relative au financement des communautés et des régions, le taux de cette taxe a été fixé pour la Région flamande par l'article 62 du décret du 21 décembre 1990 contenant des dispositions budgétaires techniques ainsi que des dispositions accompagnant le budget 1991. Les montants suivants sont d'application : 144.000 francs pour un appareil de la catégorie A, 52.000 francs pour un appareil de la catégorie B, 14.000 francs pour un appareil de la catégorie C, 10.000 francs pour un appareil de la catégorie D et 6.000 francs pour un appareil de la catégorie E. Une réduction de cette taxe était accordée par l'article 81 du Code des taxes assimilées aux impôts sur les revenus pour les exploitations foraines et les exploitations saisonnières.
Cet article porte : « La taxe est réduite à : 1° 1/10 de son montant relatif à l'année entière pour les appareils appartenant à un industriel forain et installés sur le champ de foire et les endroits similaires.La taxe ainsi réduite ne peut être inférieure à 500 francs; 2° 1/2 de son montant relatif à l'année entière pour les appareils placés exclusivement dans une exploitation saisonnière.Est considérée comme telle, toute exploitation, à l'exception des débits de boisson, qui n'est accessible au public que six mois par an au maximum.
Cette période peut être prolongée de trente jours à condition que la déclaration en soit faite préalablement au contrôleur en chef des contributions directes dans le ressort duquel sont placés les appareils. » Sur la base de l'article 79, § 2, du Code des taxes assimilées aux impôts sur les revenus, le Roi est compétent pour fixer celle des cinq catégories, désignées respectivement par les symboles A, B, C, D et E, dans laquelle un type d'appareil doit être classé.
L'article 56, 1°, littera c, de l'arrêté royal du 8 juillet 1970 portant règlement général des taxes assimilées aux impôts sur les revenus (Moniteur belge du 15 septembre 1970), modifié par l'article 6 de l'arrêté royal du 10 novembre 1980 (Moniteur belge du 3 décembre 1980) compte parmi la catégorie A « les appareils automatiques de divertissement, y compris ceux visés sub 3° à 5° ci-après, lorsqu'ils permettent, même occasionnellement, au joueur ou à l'utilisateur de regagner, en espèces, ou sous la forme de jetons, au moins le montant de sa mise et/ou de gagner des prix, en nature ou sous la forme de bons-primes, d'une valeur commerciale d'au moins deux cent cinquante francs ». L'article 56, 2°, du même arrêté royal classe ces appareils automatiques de divertissement dans la catégorie B « lorsqu'ils sont soumis à la taxe réduite prévue par l'article 81 du même Code ».
IV. En droit - A - Requêtes Intérêt des parties requérantes A.1.1. La partie requérante dans l'affaire portant le numéro 1037 du rôle, la s.a. Belgian Amusement Company Ltd, est une exploitante saisonnière de 600 appareils automatiques de divertissement. La partie requérante dans l'affaire portant le numéro 1038 du rôle, la s.a. ETC Europa Technics et Cie, est une exploitante saisonnière de quelque 250 appareils automatiques de divertissement. A l'exception de la première partie requérante, tous les autres requérants dans l'affaire portant le numéro 1040 du rôle sont également des exploitants d'appareils automatiques de divertissement.
Ces parties sont donc affectées directement et défavorablement par la mesure attaquée, qui supprime la réduction de taxe pour les exploitations saisonnières.
A.1.2. La première partie requérante dans l'affaire portant le numéro 1040 du rôle est l'a.s.b.l. Automatische Machines Associatie, dont l'objet social est défini comme suit à l'article 3 de ses statuts (annexes au Moniteur belge du 7 février 1985) : « L'association a pour objet : de s'associer en vue de défendre les intérêts des exploitants de jeux automatiques, de jeux de hasard et/ou de jeux d'adresse, comme, par exemple, les tenanciers de luna-parks, les forains, etc.; elle pourra poser tout acte qui serait nécessaire, voire même utile, à la défense de ces intérêts, qui aiderait ou faciliterait la réalisation de l'objet social et qui se rapporterait directement ou indirectement à celui-ci; l'association pourra intervenir en particulier, mais pas de manière limitative, contre des pratiques qui compromettraient la concurrence loyale, qui pourraient nuire à la réputation et à la renommée du secteur, qui pourraient gêner la création et l'exploitation d'entreprises du secteur en question, etc.;
L'association revêt un caractère durable et son objet social est axé en particulier sur la protection des exploitants d'appareils automatiques de divertissement. Cet intérêt se distingue non seulement de l'intérêt général mais également de l'intérêt des membres individuels : en effet, la protection des intérêts bénéficie d'une portée plus efficace et plus large par le fait de l'action commune. Il appert des actions entreprises dans le passé par l'association que cet objet social est, en outre, réellement poursuivi.
En tant que représentante d'exploitants d'appareils automatiques de divertissement dont plus des sept dixièmes des vignettes saisonnières ont été acquises pour des « pushers », l'association justifie de l'intérêt requis en droit.
A.1.3. La disposition entreprise dont la suspension est demandée présente de graves conséquences financières pour les exploitations saisonnières. Tout d'abord, la réduction de taxe est supprimée, ce qui a pour effet de doubler la taxe pour cette catégorie d'exploitations par rapport au passé. Ensuite, la suppression du statut saisonnier a pour conséquence que les appareils automatiques de divertissement de ces exploitations ne peuvent plus être considérés comme des appareils de la catégorie B, mais bien comme des appareils de la catégorie A, lesquels sont soumis à un taux d'imposition plus élevé. Pour les appareils les plus utilisés, les « pushers », qui étaient classés avant la modification décrétale dans la catégorie B (et pour lesquels la taxe s'élevait à 26.000 francs par an à la suite de la réduction de taxe), mais qui font désormais partie de la catégorie A (pour laquelle la taxe s'élève à 144.000 francs), cela représente une augmentation d'impôt de 453,85 p.c. Les exploitations saisonnières n'ont pas été consultées lors de cette modification, bien que l'article 79, § 2, du Code des taxes assimilées aux impôts sur les revenus dispose que le Roi fixe les catégories d'appareils « après consultation des unions professionnelles intéressées », laquelle n'a pas eu lieu en l'espèce.
Pour les exploitations saisonnières, la mesure attaquée entraîne une dépense supplémentaire insupportable, ainsi qu'en témoigne la description du préjudice grave difficilement réparable.
Moyens des parties requérantes dans les affaires portant les numéros 1037 et 1038 du rôle A.2. Les parties requérantes dans les affaires portant les numéros 1037 et 1038 du rôle invoquent deux moyens, pris respectivement de la violation des règles répartitrices de compétences et des articles 10, 11 et 172 de la Constitution.
A.3.1. Le premier moyen est inféré de la violation de la répartition constitutionnelle des compétences entre l'Etat et les régions, en ce que la disposition contestée ne poursuit pas vraiment un objectif budgétaire mais vise seulement à contrer l'extension du secteur des appareils automatiques de divertissement et l'asservissement au jeu qui en résulte en supprimant la réduction fiscale et en instaurant ainsi une taxe qui s'aproche du montant de la sanction pénale applicable en cas de placement de jeux de hasard non autorisés. Or, le législateur décrétal n'est pas compétent pour réprimer des comportements dans le domaine du jeu.
A.3.2. Les parties requérantes reconnaissent que l'augmentation d'une taxe régionale est susceptible de modifier le comportement des sujets de droit. En l'espèce, le législateur décrétal n'est cependant pas compétent pour poursuivre principalement, si pas exclusivement, cet effet de répression pénale d'un comportement déterminé, car il règle ainsi une matière non attribuée plutôt qu'une matière purement fiscale.
A.4.1. La première branche du second moyen est prise de la violation des articles 10, 11 et 172 de la Constitution, en ce que par suite de la suppression de la réduction fiscale, une inégalité de traitement est instaurée entre, d'une part, les exploitants qui placent des appareils automatiques de divertissement pendant toute l'année et, d'autre part, les exploitations saisonnières. La violation des dispositions précitées consiste en ce que des situations objectivement différentes sont traitées de manière égale sans qu'existe pour ce faire une justification raisonnable et objective.
A.4.2. Bien que les exploitations saisonnières n'existent plus juridiquement dans la loi, elles survivent en fait principalement au littoral belge, où elles ne peuvent fonctionner de manière rentable que durant quelques mois par an. Même si le but de la mesure attaquée, à savoir combattre (les conséquences sociales de) l'asservissement au jeu, est légitime, seule une partie des exploitants de tels appareils est affectée, à savoir les exploitations saisonnières. Il n'existe aucune justification objective et raisonnable pour ce traitement différent.
A.4.3. L'affirmation selon laquelle ce seraient les exploitations saisonnières qui favoriseraient l'asservissement au jeu, en ce que par suite de la réduction fiscale, elles pourraient plus facilement s'étendre, ne saurait fournir une telle justification. En effet, il n'est pas démontré que de telles exploitations peuvent s'étendre plus facilement que les exploitations annuelles. En outre, le prétendu avantage fiscal ne saurait aucunement être considéré comme une véritable réduction de taxe puisque les entreprises saisonnières ne peuvent être exploitées de manière rentable que pendant quelques mois par an et que leurs frais fixes sur une base annuelle n'étaient pas proportionnés aux recettes de leur exploitation durant la saison. Bien que la saison soit désormais étalée sur l'ensemble de l'année, la règle de la période de rentabilité limitée subsiste intégralement. La raison d'être de l'article 81, 2°, abrogé par la mesure attaquée, du Code des taxes assimilées aux impôts sur les revenus était la situation concrète particulière de ces exploitations : l'ouverture limitée dans le temps, les loyers élevés pour les locaux, les besoins spécifiques, entre autres la nécessité de placer davantage d'appareils (eux aussi taxables) pour être rentable. La plupart de ces éléments justifient encore toujours le traitement fiscal distinct des appareils automatiques de divertissement de ces exploitations. Il ne saurait en aucun cas être démontré que de telles exploitations encourageraient l'asservissement au jeu davantage que les exploitations annuelles : en effet, elles ne peuvent en aucune façon acquérir une clientèle fixe, en sorte qu'elles ne sont pas responsables de l'asservissement. De surcroît, les appareils les plus utilisés et actuellement les plus lourdement taxés, les « pushers », ne représentent aucun danger social et n'encouragent certainement pas l'asservissement aux jeux de hasard.
Par conséquent, l'affirmation selon laquelle les exploitations saisonnières encourageraient davantage l'asservissement au jeu que les exploitations annuelles en raison du régime existant de réduction fiscale est inexacte et ne saurait constituer la justification objective et raisonnable de la mesure législative.
A.4.4. En revanche, l'asservissement aux jeux de hasard est davantage favorisé par les forains, qui bénéficient de surcroît d'une réduction fiscale inchangée, laquelle a pour effet qu'ils ne doivent payer qu'un dixième de la taxe annuelle. Le législateur décrétal peut dès lors difficilement soutenir que l'inégalité de traitement fiscal entre les exploitations annuelles et les exploitations saisonnières ne se justifie plus, tout en laissant subsister le traitement inégal au bénéfice des forains.
A.4.5. Enfin, les parties requérantes rappellent que dans son arrêt n° 31/92 du 23 avril 1992, la Cour a défendu la thèse selon laquelle le traitement fiscal inégal d'appareils pourtant identiques selon qu'ils sont classés dans la catégorie A, c (exploitation annuelle) ou dans la catégorie B (exploitation saisonnière) se fonde sur une distinction objective et raisonnable, en ce que le législateur décrétal a pu estimer que la taxe ne devait pas être majorée dans la même mesure pour les appareils qui ne sont pas placés de façon permanente que pour les appareils qui sont accessibles durant toute l'année, d'autant que le degré de dangerosité des premiers a pu lui apparaître comme moins important (considérant 6.B.7). Il serait dès lors contraire à cette jurisprudence de décider à présent que le traitement fiscal différent des exploitations saisonnières par rapport aux exploitations annuelles ne se fonde pas sur une distinction objective et raisonnable.
A.4.6. Les effets de la mesure ne sont pas davantage proportionnés au but poursuivi en ce qu'il est vraisemblable qu'aucune banque ou aucune autre institution financière ne voudra encore préfinancer l'augmentation « démentielle » des charges par un crédit de caisse ou un financement bancaire. L'inévitable fermeture des exploitations saisonnières aura également des conséquences sociales et économiques importantes, notamment sur le plan de l'emploi (principalement du personnel peu qualifié et des étudiants jobistes).
A.5.1. La deuxième branche du deuxième moyen est prise de la violation des articles 10, 11 et 172 de la Constitution, en ce que par suite de la suppression de la réduction fiscale pour les exploitations saisonnières, une inégalité de traitement est instaurée entre les exploitants qui placent des appareils automatiques de divertissement durant toute l'année ou pendant une période saisonnière limitée et qui paient le même tarif, d'une part, et les forains, qui continuent de bénéficier d'une réduction fiscale inchangée, d'autre part.
A.5.2. Les parties requérantes ne voient pas pourquoi le statut fiscalement plus attrayant est maintenu pour les forains, puisqu'ils obtiennent pour des appareils identiques une réduction de taxe de 9/10èmes, alors que les exploitations saisonnières qui bénéficiaient précédemment d'une réduction fiscale de 50 p.c. doivent désormais payer le taux plein. Cette contradiction est illustrée par le phénomène des « pushers », qui sont fréquemment présents tant sur les champs de foires que dans les exploitations saisonnières et qui font apparaître que ces appareils ne seront plus rentables à la suite du nouveau taux d'imposition appliqué aux exploitations saisonnières.
De deux choses l'une : soit le traitement inégal ne se justifie plus et dans ce cas il est discriminatoire puisqu'il continue d'exister au bénéfice des forains, soit le législateur décrétal estime que le traitement inégal au bénéfice des forains doit subsister, mais dans ce cas il n'existe à cet égard aucune justification raisonnable et objective en fonction du but et des effets de la mesure attaquée, à savoir combattre l'asservissement aux jeux de hasard.
Moyens des parties requérantes dans l'affaire portant le numéro 1040 du rôle A.6.1. Le moyen des parties requérantes dans l'affaire portant le numéro 1040 du rôle est inféré de la violation des articles 10 et 11 de la Constitution.
A.6.2. Dans la première branche du moyen, la violation de ces dispositions constitutionnelles est invoquée sur la base du constat que la disposition entreprise crée une inégalité de traitement inconstitutionnelle entre les forains, qui continuent de bénéficier de la réduction fiscale, et les exploitations saisonnières, pour lesquelles la réduction fiscale a été supprimée. Les deux catégories sont confrontées aux mêmes problèmes (entre autres, droits d'emplacement élevés pour les uns et loyers plus élevés dans des endroits touristiques pour les autres; offre identique, principalement des « pushers »).
La mesure, qui a été prise au premier chef en vue de contrer une extension du secteur des appareils automatiques de divertissement, n'est pas adéquate puisque dans ce secteur le nombre d'exploitations saisonnières s'est à peine accru au cours des dernières années alors que des exploitations annuelles, qui ne sont toutefois pas soumises à une augmentation de la taxe, ont été créées à l'intérieur du pays. En aucun cas les entreprises saisonnières ne sauraient être considérées comme un moyen d'évasion fiscale puisque leur statut particulier répondait à une réalité économique.
La mesure n'est pas davantage adéquate pour atteindre son deuxième objectif, contrer l'asservissement au jeu, puisque les appareils principalement visés, les « pushers », ne représentent aucun danger social. Il s'agit en effet d'un jeu familial, qui n'incite pas à passer à d'autres jeux de hasard. Il est vraisemblable que ces appareils ne pourront être exploités de façon rentable que par des luna-parks forains qui acquièrent ainsi un monopole et qui s'efforceront sans doute d'accroître le nombre d'appareils de ce type.
Si l'intention recherchée était de bannir ces appareils des luna-parks, la mesure manquerait aussi totalement son objectif en l'occurrence.
La mesure est également disproportionnée, car l'extension de la période d'ouverture à l'ensemble de l'année n'est pas de nature, pour les luna-parks saisonniers, à compenser le coût supplémentaire en taxes par des recettes supplémentaires restreintes. C'est d'autant plus évident que pour les exploitations saisonnières, la réduction fiscale de 50 p.c. est supprimée et que la réduction fiscale de 90 p.c. est maintenue pour les champs de foires. Calculée par « pusher », cette différence atteint 2.769,23 p.c., puisque pour un tel appareil, un industriel forain paie 31.200 francs de taxes contre 864.000 francs pour un luna-park saisonnier.
A.6.3. Dans la seconde branche, la violation des dispositions mentionnées au moyen est invoquée sur la base du constat que la disposition attaquée crée une inégalité de traitement inconstitutionnelle entre les exploitations annuelles et les exploitations saisonnières. Les arguments avancés à cet égard correspondent dans une large mesure aux arguments développés par les parties requérantes dans les affaires portant les numéros 1037 et 1038 du rôle. Eu égard au constat que les deux types d'exploitations ne sauraient être comparés ni au niveau de l'offre des jeux ni au niveau de la clientèle, ils méritent un traitement différent.
Quant au préjudice grave difficilement réparable A.7.1. La mesure attaquée, dont la suspension est demandée, entraîne pour les exploitations saisonnières une dépense supplémentaire insupportable.
Pour l'exploitation de ses appareils automatiques de divertissement, la partie requérante dans l'affaire portant le numéro 1037 du rôle, qui possède également un certain nombre d'appareils en exploitation annuelle, doit supporter, par suite de la mesure dont la suspension est demandée, une majoration de taxe de 26.213.000 francs par rapport à 1996, rien que pour les appareils placés dans les anciennes exploitations saisonnières, ce qui donne une augmentation fiscale de 365 p.c. pour les exploitations saisonnières et une augmentation fiscale de 303 p.c. si l'on tient compte de l'ensemble de ses exploitations. Eu égard aux résultats d'exploitation obtenus sous le régime de la réduction de taxe (162.681 francs en 1990, 763.961 francs en 1991, une perte de 1.840.538 francs en 1992, 1.180.586 francs en 1993, 137.157 francs en 1994 et 754.325 francs en 1995), la mesure litigieuse compromet sérieusement la rentabilité de la partie requérante.
Pour l'exploitation de ses appareils automatiques de divertissement, la partie requérante dans l'affaire portant le numéro 1038 du rôle doit payer, par suite de la mesure dont la suspension est demandée, 15.459.000 francs de plus (en taxes) qu'en 1996, soit une augmentation fiscale de 400 p.c. Compte tenu des résultats d'exploitation obtenus sous le régime de la réduction de taxe (95.353 francs en 1992; 37.642 francs en 1993, une perte de 6.199.035 francs en 1994 et 5.771.146 francs en 1995), la mesure attaquée compromet sérieusement aussi la rentabilité de la seconde partie requérante.
En outre, les parties requérantes dans l'affaire portant le numéro 1040 du rôle attirent particulièrement l'attention sur la lourde imposition des « pushers », dont le prix de revient s'élève à 600.000 francs, à majorer de la T.V.A. non déductible (+ 21 p.c.). Etant donné que ces appareils ne peuvent plus être exploités de façon rentable et qu'ils représentent néanmoins un investissement fort important, la survie des entreprises est en péril. L'incertitude au niveau de la situation entraînera la résiliation d'un grand nombre de contrats de travail et d'autres conventions.
A.7.2. Etant donné qu'en vertu de l'article 83 du Code des taxes assimilées aux impôts sur les revenus, la taxe doit être payée avant le 1er janvier de l'année d'imposition, c'est-à -dire avant le 1er janvier 1997 pour chaque appareil placé en 1997, ce préjudice grave difficilement réparable découle de l'application immédiate de la disposition contestée : si les taxes annuelles ne sont pas (ou ne peuvent pas être) payées - et les taxes saisonnières n'ont presque pas été délivrées dans l'optique de la modification législative envisagée -, les entreprises seront contraintes de mettre fin à leur exploitation à partir du 1er janvier 1997. Dès lors que des taxes saisonnières ont encore été perçues en certains endroits, les exploitations qui ont déjà payé ces taxes, comme la seconde partie requérante, devront également fermer leurs portes puisqu'à leur tour, elles ne disposeront plus d'un signe distinctif fiscal régulier pour leurs appareils. La rentabilité d'une entreprise dotée d'un parc d'appareils réduit est douteuse, et la fermeture des entreprises doit être considérée comme inévitable.
Position du Gouvernement flamand Quant à la recevabilité A.8. Le Gouvernement flamand conteste la recevabilité de la demande de suspension et du recours en annulation de l'a.s.b.l. Automatische Machines Associatie. En effet, aucun élément produit au sujet de cette association ne fait apparaître le caractère durable de ses activités, requis en vertu de la jurisprudence de la Cour. Le fait que les organes de l'association sans but lucratif se réunissent une fois par an ne démontre pas le caractère durable de ses activités. Pour démontrer son intérêt, l'association invoque en outre le préjudice subi par ses membres. Etant donné que l'intérêt ainsi défini n'est pas différent de l'intérêt des membres individuels, le recours de l'association sans but lucratif et, partant, la demande de suspension sont irrecevables.
Quant au risque d'un préjudice grave difficilement réparable A.9.1. Le seul préjudice que le Gouvernement flamand reconnaisse dans le chef des parties requérantes est le préjudice d'une pression purement financière et la nécessité d'un changement de comportement dans l'exploitation, mais il ne peut être considéré comme un préjudice grave difficilement réparable.
A.9.2. Il est inexact d'affirmer que les exploitations saisonnières ne peuvent pas ouvrir leurs portes si elles n'ont pas préalablement payé les taxes saisonnières pour les « pushers ». En effet, les exploitants peuvent ouvrir leurs entreprises avec les autres appareils automatiques de divertissement encore présents qui ne sont pas concernés par la mesure, à la différence des « pushers ». De surcroît, l'augmentation de la taxe peut être répercutée sur l'utilisateur, soit par des mises plus élevées, soit par l'octroi de prix de valeur plus modeste. Le préjudice financier allégué n'est dès lors pas suffisamment sérieux.
A.9.3. L'affirmation selon laquelle la mesure litigieuse conduira à une faillite est, suivant le Gouvernement flamand, purement spéculative. Il va de soi que d'autres appareils devront être placés et que le mode d'exploitation changera, mais il n'en résultera pas nécessairement la faillite des entreprises.
A.9.4. Le Gouvernement flamand souligne enfin que les parties requérantes qui ont contesté en 1991 la forte augmentation de la taxe sur les « bingos » dans une demande de suspension ont employé les mêmes arguments s'agissant du préjudice grave difficilement réparable et que la Cour ne les a pas suivies.
Quant au caractère sérieux des moyens A.10.1. Aucun des moyens invoqués par les parties requérantes ne peut être considéré comme « à première vue fondé ».
A.10.2. Le moyen inféré de la violation des règles répartitrices de compétences soulève l'incompétence du législateur décrétal. Etant donné qu'il s'agit d'une mesure fiscale pour laquelle le législateur décrétal est compétent en vertu de la loi spéciale de financement, le moyen manque en fait. En effet, l'objectif principal de la mesure est la suppression de l'exonération jugée disproportionnée par rapport au manque à gagner subi par les exploitants : de fait, leurs entreprises sont ouvertes sept mois par an et bénéficient d'une réduction fiscale de 82 p.c. Ce constat est d'autant plus étonnant que les cas d'exonération étaient principalement postérieurs au quadruplement de la taxe sur les appareils automatiques de divertissement de la catégorie A, c, placés dans les exploitations annuelles. Il faut savoir que les entreprises concernées éludaient la taxe en plaçant de nombreux appareils de ce type dans les exploitations saisonnières, où elles bénéficiaient du régime fiscal plus avantageux de l'article 81 du Code des taxes assimilées aux impôts sur les revenus.
L'objectif social - lutter contre l'asservissement - n'est qu'un objectif subordonné de la mesure, qui peut d'ailleurs trouver un fondement dans la compétence matérielle au niveau de la protection de la jeunesse.
Le Gouvernement flamand renvoie à cet égard à la jurisprudence de la Cour concernant l'augmentation du taux (quadruplé) pour les « bingos ». La modification d'une telle taxe ou la suppression de l'exonération relèvent en effet de la compétence des régions. A cette occasion, il n'est pas exercé une compétence fédérale permettant de régler les « jeux et paris ». Le fondement de la réalisation de l'objectif non fiscal a été trouvé dans la compétence non fiscale en matière de protection de la jeunesse.
Il ne se déduit ni de l'augmentation (concrète) de la taxe concernée ni des travaux préparatoires du décret que le législateur décrétal aurait été incompétent pour édicter la mesure entreprise.
A.10.3. Il n'est pas davantage question d'une violation du principe d'égalité.
En premier lieu, la distinction entre les exploitations saisonnières et les forains ne saurait être considérée comme discriminatoire. Il a déjà été exposé plus haut que, dans le but d'éluder la taxe, les appareils automatiques de divertissement de la catégorie A, c, n'étaient plus exploités dans des entreprises ouvertes toute l'année (ce qui leur permettait d'échapper au lourd tarif de la catégorie A), mais placés dans des exploitations saisonnières, de manière à bénéficier de l'exonération fiscale. Le principe d'égalité n'est donc pas violé, car une telle tendance ne s'est pas manifestée chez les forains, qui - vu les possibilités plus réduites - ne pouvaient pas procéder à une même extension. Tant la nature de l'exploitation - ambulante - que l'atmosphère sociale différente dans laquelle les deux types d'entreprises sont actives justifient le traitement distinct.
Par conséquent, les objectifs poursuivis par le législateur décrétal de 1991 au travers du taux plus élevé de la taxe - l'objectif principal purement fiscal et l'objectif social accessoire - avaient été annihilés dans une large mesure par l'évasion fiscale résultant du déplacement de ces appareils vers les exploitations saisonnières, en sorte que l'exploitation saisonnière ressemble plus à une exploitation annuelle qu'à une exploitation foraine.
De surcroît, l'inégalité de traitement entre les exploitations annuelles et les exploitations saisonnières, que l'arrêt n° 31/92 - avant la pratique de l'évasion fiscale - pouvait encore considérer comme justifiée, est actuellement dépassée. Une limitation de l'exploitation pendant cinq douzièmes de l'année était compensée par une réduction fiscale de 82 p.c., qui ne pouvait plus se justifier vu le chiffre d'affaires croissant des exploitations saisonnières. Le traitement égal instauré par la disposition litigieuse se justifie entièrement par le fait que les nouvelles situations sont hautement comparables ensuite de l'évasion fiscale, si bien que le moyen ne peut pas davantage être considéré comme sérieux en cette branche. - B - La disposition en cause B.1.1. Les parties requérantes demandent la suspension de l'article 13 du décret de la Communauté flamande du 20 décembre 1996 contenant diverses mesures d'accompagnement du budget 1997.
La disposition entreprise énonce : « L'article 81, 2°, du Code des taxes assimilées aux impôts sur les revenus est abrogé, en ce qui concerne la Région flamande. » B.1.2. Par décret du Conseil flamand du 21 décembre 1990 « contenant des dispositions budgétaires techniques ainsi que des dispositions accompagnant le budget 1991 », la taxe sur les appareils automatiques de divertissement appartenant à la catégorie A avait été portée de 36.000 à 144.000 francs. Lorsque ces appareils automatiques de divertissement étaient placés dans une exploitation saisonnière, ils étaient considérés comme des appareils automatiques de divertissement appartenant à la catégorie B, pour laquelle le montant de la taxe fut porté par le susdit décret de 26.000 à 52.000 francs, mais avec une réduction de 50 p.c. au bénéfice des exploitants.
Lors des travaux préparatoires de la disposition dont la suspension est demandée, il a été souligné que, depuis l'entrée en vigueur du décret précité, la grande majorité des appareils automatiques de divertissement appartenant à la catégorie A ont été exploités dans des entreprises saisonnières, si bien que ce n'était plus la taxe de base de 144.000 francs qui était applicable à de tels appareils, mais bien la taxe réduite de 26.000 francs, « ce qui constitue un abaissement de 118.000 francs, soit 81,9 %. Cette réduction est donc accordée à des exploitations qui se limitent à 8/12èmes (14 jours de congé inclus) du temps d'ouverture normal maximum. En outre, il convient de souligner que toute activité connaît une haute et une basse saison. La réduction proportionnelle de cette taxe forfaitaire est à tort mise en relation avec la durée d'ouverture et non avec les revenus. Les secteurs dépendant du tourisme font par définition les meilleures affaires au cours des périodes de vacances. [...] Ce sont des périodes qui doivent leur permettre de réaliser un revenu annuel normal. D'un point de vue économique, c'est d'ailleurs la logique même. En effet, les frais fixes sont égaux pour chaque mois de l'année. C'est du reste cette réglementation illogique qui est source de maints abus et de nombreuses discussions » (Doc., Parlement flamand, 1996-1997, n° 428/1, pp. 4-5). Lors de l'examen en commission, il a été souligné que la disposition attaquée visait à « contrecarrer l'évasion fiscale dans le secteur des appareils automatiques de divertissement et d'éviter ainsi que ce secteur puisse continuer à s'étendre d'une manière fiscalement intéressante en ne faisant que peu de cas de l'asservissement au jeu que ces appareils entraînent », raison pour laquelle le ministre proposa de rendre impossible toute évasion fiscale via les exploitations saisonnières, ce qui conduirait en outre à une légère hausse des recettes (Doc., Parlement flamand, 1996-1997, n° 428/17, p.7).
Quant à la demande de désistement B.2.1. Par lettre du 13 février 1997, la s.a. GBC Association, L. Laget, R. De Backer, la s.a. Deba Square, Jonckheere et W. Baetens, six des parties requérantes dans l'affaire portant le numéro 1040 du rôle, ont fait savoir à la Cour qu'ils se désistent du recours en annulation et de la demande de suspension qu'ils ont introduits le 27 janvier 1997.
B.2.2. Rien ne s'oppose, en l'espèce, à ce que la Cour décrète le désistement du recours en annulation et de la demande de suspension à l'égard des parties requérantes susdites dans l'affaire portant le numéro 1040 du rôle, mentionnées au B.2.1.
Quant à la recevabilité B.3.1. Le Gouvernement flamand conteste la recevabilité du recours en annulation, et donc de la demande de suspension, introduit par l'a.s.b.l. Automatische Machines Associatie, affirmant que cette association ne fournit pas la preuve d'une activité concrète et durable et que l'intérêt qu'elle poursuit ne diffère pas essentiellement de l'intérêt individuel poursuivi par ses membres.
B.3.2. La Constitution et la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage imposent à toute personne physique ou morale qui introduit un recours en annulation de justifier d'un intérêt. Ne justifient de l'intérêt requis que les personnes dont la situation pourrait être affectée directement et défavorablement par la norme entreprise.
Lorsqu'une association sans but lucratif se prévaut d'un intérêt collectif, il est requis que son objet social soit d'une nature particulière et, dès lors, distinct de l'intérêt général; que cet intérêt ne soit pas limité aux intérêts individuels des membres; que la norme entreprise soit susceptible d'affecter l'objet social; que celui-ci soit réellement poursuivi, ce qui doit ressortir d'activités concrètes et durables de l'association, aussi bien dans le passé que dans le présent.
B.3.3. L'a.s.b.l. Automatische Machines Associatie a notamment pour objet : « intervenir en particulier, mais pas de manière limitative, contre des pratiques qui compromettraient la concurrence loyale, qui pourraient nuire à la réputation et à la renommée du secteur, qui pourraient gêner la création et l'exploitation d'entreprises du secteur en question, etc. ». Ainsi défini, l'objet particulier poursuivi par l'association est non seulement distinct de l'intérêt général, mais également non limité aux intérêts individuels des membres.
Les documents annexés à la requête semblent démontrer une activité concrète et durable.
L'exception d'irrecevabilité de la demande de suspension, soulevée par le Gouvernement flamand, est rejetée.
Quant à la demande de suspension B.4. Aux termes de l'article 20, 1°, de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage, deux conditions de fond doivent être remplies pour que la suspension puisse être décidée : - des moyens sérieux doivent être invoqués; - l'exécution immédiate de la règle attaquée doit risquer de causer un préjudice grave difficilement réparable.
Les deux conditions étant cumulatives, la constatation que l'une de ces deux conditions n'est pas remplie entraîne le rejet de la demande de suspension.
Quant au caractère sérieux des moyens invoqués B.5. La terminologie utilisée dans la loi spéciale conduit à considérer que, pour qu'un moyen soit regardé comme sérieux au sens de celle-ci, il ne suffit pas qu'il ne soit pas manifestement non fondé au sens de l'article 72, mais il faut aussi qu'il revête une apparence de fondement au terme d'un premier examen des éléments dont la Cour dispose à ce stade de la procédure.
B.6.1. Selon les parties requérantes, les règles de compétence sont violées en ce que la disposition attaquée ne poursuit pas vraiment un but fiscal ou budgétaire, mais vise uniquement à freiner le développement du secteur des appareils automatiques de divertissement et à lutter contre l'asservissement croissant au jeu en supprimant une réduction fiscale existante. Par le biais d'une mesure fiscale qui apparaît comme une sanction pénale frappant le placement d'appareils de jeux de hasard non autorisés, le législateur décrétal exercerait en réalité la compétence réservée au législateur fédéral de réprimer pénalement des comportements dans le domaine du jeu.
B.6.2. Aux termes de l'article 3, alinéa 1er, 2°, de la loi spéciale du 16 janvier 1989 relative au financement des communautés et des régions, la taxe sur les appareils automatiques de divertissement est un impôt régional.
L'article 4, § 1er, de la loi spéciale précitée dispose que « les Régions peuvent modifier le taux d'imposition, la base d'imposition et les exonérations des impôts visés à l'article 3, alinéa 1er, 1° à 3° inclus ».
Le législateur décrétal exerce la compétence fiscale qui lui est attribuée par les dispositions précitées lorsqu'il adopte une mesure visant à contrecarrer une forme d'évasion fiscale qui est apparue dans le secteur des appareils automatiques de divertissement après l'entrée en vigueur d'une mesure décrétale précédente - que la Cour n'a pas jugée contraire aux règles de compétence - consistant à relever la taxe pour une catégorie d'appareils automatiques de divertissement qui, en substance, est identique à la catégorie d'appareils pour laquelle la réduction fiscale existante est désormais supprimée par la mesure attaquée.
B.6.3. Toutefois, il y a lieu d'examiner si, en exerçant sa compétence fiscale, le législateur décrétal n'a pas empiété sur la compétence de l'autorité fédérale.
Le fait que la suppression de la réduction de taxes régionales puisse avoir pour conséquence qu'une modification se produise dans le type de comportement d'un contribuable est un effet secondaire possible de toute taxe, de toute augmentation de taxe ou de toute suppression d'une réduction fiscale.
En l'espèce, ni la suppression critiquée de la réduction fiscale, ni les travaux préparatoires ne permettent, dans l'état actuel de la procédure, d'affirmer qu'en adoptant la disposition attaquée, le législateur décrétal ait visé principalement un effet non fiscal que les compétences qui lui ont été attribuées ne lui permettent pas de poursuivre.
B.7.1. Le deuxième moyen est pris de la violation des articles 10 et 11 de la Constitution, lus séparément ou en combinaison avec l'article 172 de la Constitution.
Dans la première branche, les parties requérantes dénoncent la violation de ces dispositions en ce que, par suite de la suppression, par la disposition décrétale entreprise, de la réduction fiscale accordée aux exploitations saisonnières, il est instauré, entre les exploitants qui placent des appareils automatiques de divertissement durant toute l'année et les entreprises saisonnières qui n'exploitent ces mêmes appareils que pendant une période limitée de l'année, un traitement inégal consistant dans le fait que des situations objectivement différentes sont traitées de manière égale sur le plan fiscal sans qu'existe pour ce faire une justification objective et raisonnable.
Dans la seconde branche, les parties requérantes dénoncent la violation des mêmes dispositions en ce que, par suite de la suppression, par la disposition décrétale litigieuse, de la réduction fiscale pour les exploitations saisonnières, il est instauré, entre les exploitants d'entreprises saisonnières et les forains, un traitement inégal consistant dans le fait que seule cette dernière catégorie de personnes continue de bénéficier pleinement de la réduction fiscale antérieure, sans qu'existe pour ce faire une justification objective et raisonnable.
B.7.2. Les règles constitutionnelles de l'égalité et de la non-discrimination n'excluent pas qu'une différence de traitement soit établie entre des catégories de personnes, pour autant qu'elle repose sur un critère objectif et qu'elle soit raisonnablement justifiée. Les mêmes règles s'opposent, par ailleurs, à ce que soient traitées de manière identique, sans qu'apparaisse une justification raisonnable, des catégories de personnes se trouvant dans des situations qui, au regard de la mesure considérée, sont essentiellement différentes.
L'existence d'une telle justification doit s'apprécier en tenant compte du but et des effets de la mesure critiquée ainsi que de la nature des principes en cause; le principe d'égalité est violé lorsqu'il est établi qu'il n'existe pas de rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et le but visé.
B.7.3. Dans son arrêt n° 31/92, la Cour a considéré que le traitement fiscal différent des exploitations permanentes et des exploitations saisonnières était justifié au regard de la Constitution en ce que le législateur décrétal « a pu estimer que la taxe ne devait pas être majorée dans la même mesure pour les appareils qui ne sont pas placés de façon permanente - c'est le cas dans les foires et dans les exploitations saisonnières - que pour les appareils qui sont accessibles durant toute l'année ». Il ressort toutefois des travaux préparatoires mentionnés en B.1.2 ainsi que des précisions fournies à l'audience par le Gouvernement flamand - qu'aucune des parties n'a contredits formellement - que les appareils automatiques de divertissement qui, avant la modification décrétale de 1990, étaient exploités tout au long de l'année se retrouvent actuellement surtout dans des exploitations saisonnières.
Il appert de l'examen auquel la Cour a pu procéder dans l'état actuel de la procédure que le législateur décrétal a mis fin à un traitement fiscal distinct de plusieurs catégories de personnes par la suppression d'une réduction fiscale existante parce qu'il était d'avis que l'évasion fiscale qui résultait de ce traitement inégal porte atteinte à l'objectif de la mesure fiscale originaire. L'objectif de la mesure présentement attaquée ainsi que les considérations fiscales et économiques qui la fondent paraissent pouvoir conduire à la conclusion qu'il n'est pas manifestement injustifié de soumettre à un traitement fiscal égal les exploitations saisonnières et les exploitations permanentes.
Le moyen, en sa première branche, ne saurait être considéré comme sérieux au sens de l'article 20, 1°, de la loi spéciale du 6 janvier 1989.
B.7.4. Il ressort des mêmes travaux préparatoires que le traitement inégal des exploitations permanentes et des exploitations foraines n'a pas entraîné d'évasion fiscale et qu'il n'y avait dès lors pas lieu de modifier le décret. Etant donné que les conditions matérielles d'exploitation dans le secteur des appareils automatiques de divertissement placés par des forains ne permettaient pas d'organiser une évasion fiscale analogue, il peut être admis, au stade actuel de l'examen, que le législateur décrétal a pu considérer que le régime de réduction fiscale pouvait être maintenu pour les forains.
Le deuxième moyen ne peut être considéré comme sérieux au sens de l'article 20, 1°, de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage.
B.8. Les parties requérantes ne satisfont pas à la première condition visée à l'article 20, 1°, de la loi spéciale du 6 janvier 1989.
Il n'y a donc pas lieu d'examiner si l'exécution immédiate de la mesure attaquée risque de causer un préjudice grave difficilement réparable.
Par ces motifs, la Cour - décrète le désistement du recours en annulation et de la demande de suspension des parties requérantes mentionnées en B.2.1 dans l'affaire portant le numéro 1040 du rôle; - rejette les demandes de suspension.
Ainsi prononcé en langue néerlandaise et en langue française, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage, à l'audience publique du 25 mars 1997.
Le greffier, L. Potoms.
Le président, L. De Grève.