publié le 27 août 2004
Conseil de la Concurrence Décision n° 2004-C/C-35 du 3 juin 2004 Affaire CONC-C/C-04/0026 : Kredietbank S.A. Luxembourgeoise / Puilaetco S.C.S. Vu la notification simplifiée de la concentration déposée le 30 avril 2004 au secrétariat du Vu le rapport du Corps des rapporteurs daté du 19 mai 2004 et reçu au Conseil le 24 mai 2004; Vu(...)
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Conseil de la Concurrence Décision n° 2004-C/C-35 du 3 juin 2004 Affaire CONC-C/C-04/0026 : Kredietbank S.A. Luxembourgeoise / Puilaetco S.C.S. Vu la notification simplifiée de la concentration déposée le 30 avril 2004 au secrétariat du Conseil de la concurrence et enregistrée sous le numéro CONC-C/C-04/0026;
Vu le rapport du Corps des rapporteurs daté du 19 mai 2004 et reçu au Conseil le 24 mai 2004;
Vu la lettre du 28 mai 2004 par laquelle le représentant commun des parties notifiantes renonce à son droit d'être entendu devant le Conseil de la concurrence. 1. Entreprises en cause 1.1. Vendeurs -Compagnie Financière Puilaetco (ci-après "CFP") est une société en commandite par actions dont le siège social est situé avenue Herrmann Debroux 46, à 1160 Bruxelles. Cette société a pour seul objectif d'exercer la qualité d'associé commanditaire de Puilaetco. Elle possède 9 328 parts ordinaires de Puilaetco. - Huit Associés détiennent chacun 100 parts privilégiées représentatives du capital de Puilaetco et sont chacun associé-commandité et gérant de Puilaetco : - Patrick de Bellefroid - Patrick Van Tomme - Dominique de Ville de Goyet - Jacques Peters - Pierre Willaert - Amaury de Laet Derache - Baron Olivier de Jamblinne de Meux - Peter Andrew Kearney 1.2. Acquéreurs Kredietbank S.A. Luxembourgeoise (ci-après "KBL") est une société anonyme dont le siège social est situé Boulevard Royal 43, à 2955 Luxembourg. KBL est une des principales banques actives sur le marché du Grand-Duché du Luxembourg. Ses activités se concentrent sur le private banking, c'est-à -dire des activités d'administration, de conseil et de gestion d'instruments financiers visant une clientèle composée essentiellement de particuliers. Actuellement, KBL est uniquement présente en Belgique à travers l'établissement de crédit belge Theodoor Gilissen Banque S.A. (Anvers), filiale de la banque privée hollandaise Theodoor Gilissen Bankiers N.V. (Amsterdam) reprise par KBL en 2003.
Au 1er avril 2004, 78,60 % du capital de KBL est détenu directement ou indirectement par Almanij S.A. Le solde est coté en bourse de Luxembourg. A la même date, Almanij S.A. détient également, directement ou indirectement, 68,95 % du capital de KBC Bancassurance Holding S.A. 1.3. Société cible Puilaetco S.C.S (ci-après "Puilaetco") est une société en commandite simple dont le siège social est situé avenue Herrmann Debroux, 46 à 1160 Bruxelles. Puilaetco est une banque privée indépendante dont les activités se concentrent sur le private banking, principalement pour des particuliers. Elle s'occupe également de manière très accessoire de la gestion de portefeuille pour des institutionnels. Puilaetco est membre d'Euronext et promoteur de deux organismes de placement collectif qu'elle commercialise.
Puilaetco contrôle directement ou indirectement trois filiales dont le private banking constitue la principale activité : Banque Puilaetco Luxembourg S.A., Puilaetco Suisse S.A. et DL Quality Asset Management S.A (cette filiale n'a plus d'activités). 2. Description et but de l'opération L'opération notifiée consiste en l'acquisition par KBL de 100 % des titres représentatifs du capital de Puilaetco détenus actuellement par CFP (9 328 parts ordinaires) et les huit Associés (8 X 100 parts privilégiées).3. Délais L'opération a été notifiée le 30 avril 2004.Le délai prévu à l'article 33, § 2, de la loi court à partir du 3 mai 2004 et la décision du Conseil de la concurrence doit être rendue pour le 21 juin 2004 au plus tard. 4. Champ d'application Les sociétés précitées sont des entreprises au sens de l'article 1er de la loi sur la protection de la concurrence économique coordonnée le 1er juillet 1999 et l'opération notifiée est une opération de concentration au sens de l'article 9 de cette loi. En vertu de l'article 46, § 3, a), de la loi, les chiffres d'affaires visés à l'article 11, § 1er, sont remplacés pour les banques, les établissements de crédit et autres établissements financiers, par le dixième du total des bilans.
Sur la base des indications fournies par les parties dans la notification, les seuils de chiffres d'affaires visés à l'article 11 de la loi sont atteints. 5. Recevabilité et application de la procédure simplifiée Pour pouvoir bénéficier de l'application de la procédure simplifiée, les entreprises doivent répondre aux conditions spécifiées dans la Communication conjointe du Conseil de la concurrence et du Corps des Rapporteurs relative à une procédure simplifiée de traitement de certaines opérations de concentration publiée au Moniteur belge de 11 décembre 2002. La procédure simplifiée s'applique notamment lorsque : [...] c) Deux ou plusieurs entreprises fusionnent, ou une ou plusieurs entreprises acquièrent le contrôle exclusif ou le contrôle en commun d'une autre entreprise, et : i) deux ou plusieurs des parties à la concentration exercent des activités commerciales sur le même marché de produits et géographique (relations horizontales);ou ii) une ou plusieurs des parties à la concentration exercent des activités commerciales sur un marché de produits qui se situe en amont ou en aval d'un marché de produits sur lequel une autre partie à la concentration exerce son activité (relations verticales), pour autant que leurs parts de marché cumulées n'atteignent pas respectivement 25 % en cas de relations horizontales et 25% en cas de relations verticales.
Il ressort des éléments du dossier et de l'instruction que la concentration notifiée répond aux conditions prévues dans la Communication conjointe précitée pour bénéficier d'une procédure simplifiée. 6. Marchés concernés 6.1. Secteur économique Le secteur économique concerné par l'opération de concentration est celui de l'intermédiation financière (code NACE 65), plus particulièrement celui des banques (code NACE 65.121). 6.2. Marchés de produits et services en cause Les parties déterminent deux marchés en cause : le marché du private banking et le marché de l'intermédiation financière en bourse. 6.2.1. Marché du private banking a) Définition du marché du private banking Les entreprises concernées considèrent que le marché du private banking constitue un marché distinct en soi. Selon elles, ce marché consiste en l'administration et la gestion d'instruments financiers pour compte de tiers, essentiellement de clients particuliers. Ce marché englobe des services d'ordre purement administratif (liés aux dépôts d'instruments financiers sur un compte titre), le conseil en placements et la gestion de fortune. Il porte sur une gamme étendue et diversifiée de produits : actions, obligations, produits dérivés, OPC ou autres produits « maison », comme les bons de caisse, et tous autres types d'instruments financiers. La gestion d'instruments financiers peut être discrétionnaire (les décisions sont prises par le private banker dans le respect des objectifs fixés par le client et de son profil de risque) ou non discrétionnaire (le client prend les décisions d'investissement et de désinvestissement).
Comme le soulignent la Commission bancaire, financière et des Assurances (ci-après « CBFA ») ainsi que l'Association Belge des Banques (ci-après « ABB »), la dénomination « private banking » n'est pas définie légalement ou réglementairement.
Il ressort de l'instruction que la position des parties est confirmée par certains acteurs du marché tandis que d'autres proposent une définition élargie des services prestés dans le cadre du private banking.
La définition donnée par les parties est confirmée par un concurrent, la CBFA ainsi que l'ABB. Toutefois, cette même définition est considérée comme incomplète par l'association Belge des Asset Managers (ci-après « BEAMA ») et par certains concurrents. Ils soutiennent l'idée que le private banking englobe la gestion du patrimoine dans tous ses aspects, que ce patrimoine soit privé, familial ou encore comprenant des sociétés patrimoniales. Ce qui comprend notamment les conseils juridiques et fiscaux, la structuration de patrimoine, les crédits patrimoniaux, les assurances et l'immobilier.
Malgré le fait qu'il y ait des divergences quant à l'étendue des prestations effectuées dans le cadre du private banking, l'instruction tend à confirmer du moins que le marché du private banking constitue un marché distinct. b) Segmentation du marché du private banking en fonction de la clientèle La clientèle de Puilaetco se compose essentiellement de particuliers et de manière accessoire d'institutions. En l'espèce, les parties n'opèrent pas de distinction entre la gestion de fortune au profit des particuliers et la gestion de fortune au profit d'institutions, telles que les compagnies d'assurances, les fonds de pension, les asbl disposant d'importants actifs, etc. Elles estiment que même si la clientèle est différente et les montants à gérer en moyenne plus élevés, les rapports entre l'intermédiaire et le client, les modes de rémunération, ainsi que les techniques et procédures en oeuvre sont substantiellement les mêmes.
Seul un concurrent suit l'avis des parties et considère qu'il n'y a pas lieu de faire de distinction au sein du marché du private banking en fonction de la clientèle.
Par contre, la plupart des autres concurrents et associations interrogés adhèrent à l'idée d'une segmentation au sein du marché du private banking en fonction des différents types de clients (particuliers, institutions, entreprises, clients professionnels, clients non professionnels, etc.).
Dans la mesure où, quelle que soit l'hypothèse retenue, la présente opération ne pose pas de problème concurrentiel, la question de la segmentation du marché du private banking est laissée ouverte. 6.2.2. Marché de l'intermédiation financière en bourse Les parties relèvent que l'intermédiation financière est limitée en Belgique aux marchés organisés par le groupe Euronext à travers sa filiale belge, Euronext Brussels.
Puilaetco et KBC Securities S.A. (ainsi que la société hollandaise KBC Clearing N.V.) sont membres-négociateurs d'Euronext, ce qui leur donne la possibilité de négocier des instruments financiers sur tous les marchés organisés au sein du groupe Euronext.
L'instruction ne contredit pas la position des parties. ABB et CBFA confirment que le marché de l'intermédiation financière en bourse doit être considéré comme un marché distinct. 7.3. Marché géographique 7.3.1. Marché du private banking Selon les parties, le marché géographique en cause est l'ensemble du territoire de la Belgique (1). Les concurrents et les associations interrogés ne contestent pas cette délimitation du marché. 7.3.2. Marché de l'intermédiation financière en bourse Les parties estiment que le marché géographique en cause comprend l'ensemble du territoire de la Belgique. 8. Analyse concurrentielle Tant pour le marché du private banking que pour le marché de l'intermédiation financière en bourse, l'instruction a révélé que, quelle que soit la segmentation du marché retenue, les parties détiendront en Belgique après l'opération une part de marché inférieure à 25 % et qu'il n'y a dès lors pas de marché concerné au sens de la loi. Par ces motifs, Le Conseil de la concurrence, Après en avoir délibéré, - Constate que la concentration en cause tombe dans le champ d'application de la loi; - Constate que l'opération notifiée n'aura pas pour effet l'acquisition ou le renforcement d'une position dominante qui entrave de manière significative une concurrence effective sur le marché belge en cause ou sur une partie substantielle de celui-ci; - La déclare admissible, conformément aux articles 33, § 1er, et 33, § 2, 1.a de la loi.
Ainsi décidé le 3 juin 2004 par la chambre du Conseil de la concurrence constituée de Monsieur Patrick De Wolf, président de chambre, de Madame Marie-Claude Grégoire, Messieurs Jacques Schaar et Pierre Battard, membres. _______ Note (1) Conseil de la concurrence, décision n° 2001-C/C-24 du 17 mai 2001; Conseil de la concurrence, décision n° 2001-C/C-66 du 20 décembre 2001 et Conseil de la concurrence, décision n° 2002-C/C-04 du 29 janvier 2002.