publié le 07 mai 2012
Extrait de l'arrêt n° 7/2012 du 18 janvier 2012 Numéro du rôle : 5117 En cause : le recours en annulation de l'article VIII.11 du décret de la Communauté flamande du 9 juillet 2010 relatif à l'enseignement XX, introduit par le Gouvernement de La Cour constitutionnelle, composée des présidents R. Henneuse et M. Bossuyt, et des juges E. De(...)
Extrait de l'arrêt n° 7/2012 du 18 janvier 2012 Numéro du rôle : 5117 En cause : le recours en annulation de l'article VIII.11 du décret de la Communauté flamande du 9 juillet 2010 relatif à l'enseignement XX, introduit par le Gouvernement de la Communauté française.
La Cour constitutionnelle, composée des présidents R. Henneuse et M. Bossuyt, et des juges E. De Groot, L. Lavrysen, A. Alen, J.-P. Snappe, J.-P. Moerman, E. Derycke, J. Spreutels, T. Merckx-Van Goey, P. Nihoul et F. Daoût, assistée du greffier P.-Y. Dutilleux, présidée par le président R. Henneuse, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet du recours et procédure Par requête adressée à la Cour par lettre recommandée à la poste le 28 février 2011 et parvenue au greffe le 1er mars 2011, le Gouvernement de la Communauté française a introduit un recours en annulation de l'article VIII.11 du décret de la Communauté flamande du 9 juillet 2010 relatif à l'enseignement XX (publié au Moniteur belge du 31 août 2010). (...) II. En droit (...) Quant aux dispositions attaquées B.1. L'article VIII.11 du décret de la Communauté flamande du 9 juillet 2010 relatif à l'enseignement XX, qui fait l'objet du recours, remplace l'article III.3, § 1er, 1° et 2°, du décret du 28 juin 2002 « relatif à l'égalité des chances en éducation - I ». L'article III.3, ainsi modifié, du décret du 28 juin 2002 précité dispose : « Article III.3. § 1er. Sans préjudice de l'application de l'article III.2, les pouvoirs organisateurs peuvent accorder, pour une ou plusieurs de leurs écoles situées dans la région bilingue de Bruxelles-Capitale, dans l'enseignement fondamental ordinaire et dans le premier degré de l'enseignement secondaire ordinaire, une priorité aux élèves qui, en milieu familial, parlent le néerlandais avec au moins un des deux parents, à condition : 1° que l'usage du néerlandais comme langue familiale soit démontré d'une des façons suivantes : a) en produisant le diplôme néerlandophone de l'enseignement secondaire ou un titre néerlandophone équivalent du père ou de la mère;b) en produisant le certificat néerlandophone de la deuxième année du troisième degré de l'enseignement secondaire ou un titre néerlandophone équivalent du père ou de la mère;c) en produisant la preuve que le père ou la mère maîtrise au moins le néerlandais au niveau B1 du Cadre européen commun de référence pour les Langues;d) en produisant la preuve d'une connaissance suffisante du néerlandais après avoir subi un examen linguistique auprès du Bureau de sélection de l'Autorité fédérale;e) en produisant la preuve que le père ou la mère a suivi, pendant 9 ans, comme élève régulier, les cours de l'enseignement primaire et secondaire en langue néerlandaise. La production de la preuve du niveau B1, visée au point c), se fait au vu des documents suivants : - un titre de l'enseignement agréé, financé ou subventionné par la Communauté flamande ou un titre néerlandophone équivalent, démontrant le niveau requis de la connaissance du néerlandais; - une attestation de fixation du niveau, effectuée par une ' Huis van het Nederlands ' (Maison du néerlandais), démontrant le niveau requis de la connaissance du néerlandais.
La preuve de 9 ans d'enseignement en langue néerlandaise, visée au point e), se fait au vu d'attestations délivrées à cet effet par les autorités scolaires concernées.
La parenté entre l'élève et le porteur du diplôme, du certificat ou de la preuve, est démontrée au moyen d'un extrait du registre de la population, du registre des étrangers ou du registre d'attente; 2° que la plate-forme locale de concertation Bruxelles ait préalablement fixé, pour la zone d'action ou, le cas échéant, par secteur, le pourcentage pouvant recevoir la priorité.Ce pourcentage doit au moins s'élever à 55.
Si la plate-forme locale de concertation ne fixe pas de pourcentage, la priorité est accordée à 55 % d'élèves ayant le néerlandais comme langue familiale. § 2. Le pouvoir organisateur détermine le niveau dans l'école auquel et la période pendant laquelle ce régime prioritaire s'applique. Les principes visés à l'article III.8, § 2, deuxième alinéa, premier et troisième tirets s'appliquent à cet égard ».
B.2. Les dispositions attaquées ont essentiellement pour objet de remplacer, en ce qui concerne le mode de preuve de l'usage du néerlandais dans le milieu familial, la déclaration sur l'honneur par les diplômes, certificats, titres et attestations visés par l'article III.3, § 1er, 1°, nouveau du décret du 28 juin 2002 et de relever de 25 à 55 % le pourcentage d'élèves pouvant bénéficier de la priorité instaurée par cette disposition, la plate-forme locale de concertation pouvant fixer un pourcentage plus élevé.
B.3. Les dispositions attaquées furent introduites dans le projet de décret par un amendement qui était justifié comme suit : « 1) Le décret ' Egalité des chances en éducation ' du 28 juin 2002 reposait sur le droit fondamental à l'inscription dans l'école de son choix. A l'origine, aucune exception n'avait été prévue au principe ' premier arrivé, premier servi '; toutefois, deux possibilités d'aiguillage avaient été prévues, l'une sur la base d'une langue familiale qui n'est pas le néerlandais et l'autre sur la base des capacités financières pour les élèves ayant des besoins d'enseignement spécifiques.
Sous la forte pression des néerlandophones de Bruxelles, d'une part, et d'associations de parents et d'écoles, d'autre part, deux exceptions avaient déjà été introduites en 2004 : le droit de priorité pour les enfants néerlandophones à Bruxelles et le droit de priorité pour les frères et soeurs dans toutes les écoles. Personne ne trouvait raisonnable que des enfants d'une même famille doivent être envoyés dans des écoles différentes, personne ne mettait en doute la situation particulière des enfants néerlandophones à Bruxelles, qui avaient des difficultés à trouver une école néerlandophone dans le voisinage. En outre, l'objectif était de tendre vers une bonne proportion entre les élèves dont la langue familiale est le néerlandais et les élèves allophones.
Le droit de priorité des enfants néerlandophones à Bruxelles a fait l'objet de nombreux aménagements ces dernières années, mais il apparaît que le régime actuel de la ' déclaration sur l'honneur ' n'est pas encore en tous points satisfaisant. En raison du problème de capacité dans certaines régions, certains parents allophones voient le groupe prioritaire des ' élèves néerlandophones ' comme unique possibilité pour parvenir à inscrire leur enfant dans l'école néerlandophone de leur choix. Dès lors, ces parents utilisent de manière créative la déclaration sur l'honneur et privent ainsi des enfants réellement néerlandophones de ' places prioritaires '.
A l'heure actuelle, les directions n'ont aucun instrument juridique pour réfuter ces ' déclarations sur l'honneur créatives '.
Afin que la priorité réservée aux enfants néerlandophones soit aussi une priorité réelle pour ceux auxquels elle est destinée, il est nécessaire que celui qui souhaite s'en prévaloir puisse démontrer de manière concluante que la langue familiale est le néerlandais.
Nous optons à cet effet pour la piste du diplôme/certificat/preuve de la connaissance du néerlandais obtenu(e) par l'un des parents.
Les preuves relatives aux études qui peuvent être produites pour démontrer la connaissance du néerlandais de niveau B1 (degré 2) au moins sont des preuves d'études qui démontrent que l'intéressé a effectivement atteint ce niveau. Un certificat partiel d'un module d'une formation de niveau B1 n'est pas admis.
Par contre, la preuve de la connaissance suffisante du néerlandais obtenue après un examen linguistique auprès du Bureau de sélection de l'administration fédérale (SELOR) est aussi admise.
La personne ne pouvant démontrer que le néerlandais est la langue familiale par le biais d'un diplôme de l'enseignement secondaire, d'un certificat de la deuxième année du troisième degré de l'enseignement secondaire, d'une preuve de niveau B1 ou d'une preuve délivrée par SELOR, peut apporter la preuve en produisant des attestations déclarant qu'elle a suivi, pendant 9 ans, comme élève régulier, les cours de l'enseignement primaire et secondaire en langue néerlandaise. 2) En 2005, le décret ' Egalité des chances en éducation ' a instauré une catégorie prioritaire pour les enfants et les jeunes néerlandophones de Bruxelles.Cette priorité avait pour objectif, dans le contexte spécifique de Bruxelles, de tendre vers une bonne proportion entre les élèves dont le néerlandais est la langue familiale et les élèves allophones. La plateforme locale de concertation (LOP) s'est vu attribuer la possibilité de fixer le pourcentage d'élèves bénéficiant du droit de priorité, mais le législateur décrétal avait prévu un minimum de 20 % . La pratique d'aujourd'hui implique que les LOP bruxelloises ont établi le pourcentage à 45 %. La situation spécifique des enfants et jeunes néerlandophones à Bruxelles, qui ont beaucoup de mal à trouver un établissement scolaire néerlandophone, justifie le relèvement du taux de bénéficiaires du droit de priorité à 55 % » (Doc. parl., Parlement flamand, 2009-2010, n° 526/2, p. 33).
Quant au fond B.4. La partie requérante prend six moyens, tantôt de la violation des règles répartitrices de compétences, tantôt de la violation de plusieurs dispositions du titre II de la Constitution combinées ou non avec d'autres dispositions de droit national ou international.
B.5. La Cour examine d'abord les moyens pris de la violation des règles répartitrices de compétences.
En ce qui concerne les moyens pris de la violation des règles répartitrices de compétences Deuxième moyen B.6.1. Le moyen est pris de la violation des articles 127 et 129 de la Constitution.
B.6.2. La partie requérante fait valoir que l'article 129 de la Constitution réserve la compétence de régler l'emploi des langues en matière d'enseignement dans la région bilingue de Bruxelles-Capitale au législateur fédéral, lequel a prévu que la langue de l'enseignement serait le français ou le néerlandais selon le choix du chef de famille (article 5 de la loi du 30 juillet 1963 concernant le régime linguistique dans l'enseignement).
B.6.3. Selon le Gouvernement flamand, le moyen serait irrecevable parce qu'il ne critiquerait pas la disposition attaquée mais un régime de priorité, établi par des décrets antérieurs, que les pouvoirs organisateurs pourraient ou non appliquer et qui, de plus, n'implique nullement que tous les élèves des écoles néerlandophones de la région de Bruxelles-Capitale utilisent le néerlandais dans le milieu familial.
B.6.4. Il est exact que la priorité en cause est instaurée par la phrase liminaire de l'article III.3, § 1er, qui n'a pas été modifiée par le décret attaqué et qui la réserve aux élèves qui, en milieu familial, parlent le néerlandais avec au moins un des deux parents. Il n'en reste pas moins que la disposition attaquée modifie les conditions auxquelles cette priorité peut être reconnue.
Le moyen est recevable.
B.7.1. Les articles 127 et 129 de la Constitution disposent : «
Art. 127.§ 1er. Les Parlements de la Communauté française et de la Communauté flamande, chacun pour ce qui le concerne, règlent par décret : 1° les matières culturelles;2° l'enseignement, à l'exception : a) de la fixation du début et de la fin de l'obligation scolaire;b) des conditions minimales pour la délivrance des diplômes;c) du régime des pensions;3° la coopération entre les communautés, ainsi que la coopération internationale, y compris la conclusion de traités, pour les matières visées aux 1° et 2°. Une loi adoptée à la majorité prévue à l'article 4, dernier alinéa, arrête les matières culturelles visées au 1°, les formes de coopération visées au 3°, ainsi que les modalités de conclusion de traités, visée au 3°. § 2. Ces décrets ont force de loi respectivement dans la région de langue française et dans la région de langue néerlandaise, ainsi qu'à l'égard des institutions établies dans la région bilingue de Bruxelles-Capitale qui, en raison de leurs activités, doivent être considérées comme appartenant exclusivement à l'une ou à l'autre communauté ». «
Art. 129.§ 1er. Les Parlements de la Communauté française et de la Communauté flamande, chacun pour ce qui le concerne, règlent par décret, à l'exclusion du législateur fédéral, l'emploi des langues pour : 1° les matières administratives;2° l'enseignement dans les établissements créés, subventionnés ou reconnus par les pouvoirs publics;3° les relations sociales entre les employeurs et leur personnel, ainsi que les actes et documents des entreprises imposés par la loi et les règlements. § 2. Ces décrets ont force de loi respectivement dans la région de langue française et dans la région de langue néerlandaise, excepté en ce qui concerne : - les communes ou groupes de communes contigus à une autre région linguistique et où la loi prescrit ou permet l'emploi d'une autre langue que celle de la région dans laquelle ils sont situés. Pour ces communes, une modification aux règles sur l'emploi des langues dans les matières visées au § 1er ne peut être apportée que par une loi adoptée à la majorité prévue à l'article 4, dernier alinéa; - les services dont l'activité s'étend au-delà de la région linguistique dans laquelle ils sont établis; - les institutions fédérales et internationales désignées par la loi dont l'activité est commune à plus d'une communauté ».
B.7.2. Aux termes de l'article 129, § 1er, 2°, de la Constitution, les Parlements de la Communauté française et de la Communauté flamande règlent par décret, chacun pour ce qui le concerne, à l'exclusion du législateur fédéral, l'emploi des langues pour l'enseignement dans les établissements créés, subventionnés ou reconnus par les pouvoirs publics.
Ces décrets ont force de loi respectivement dans la région de langue française et dans la région de langue néerlandaise, excepté en ce qui concerne les communes ou groupes de communes contigus à une autre région linguistique et où la loi prescrit ou permet l'emploi d'une autre langue que celle de la région dans laquelle ils sont situés.
Pour ces communes, une modification aux règles sur l'emploi des langues en matière d'enseignement ne peut être apportée que par une loi adoptée à la majorité prévue à l'article 4, dernier alinéa, de la Constitution.
Il résulte de cette disposition constitutionnelle que le législateur fédéral est seul compétent pour régler l'emploi des langues en matière d'enseignement en ce qui concerne les communes de la région bilingue de Bruxelles-Capitale.
B.7.3. Contrairement aux décrets qui règlent l'emploi des langues dans l'enseignement, les décrets qui règlent l'enseignement ont force de loi, en vertu de l'article 127, § 2, de la Constitution, respectivement dans la région de langue française et dans la région de langue néerlandaise, ainsi qu'à l'égard des institutions établies dans la région bilingue de Bruxelles-Capitale qui, en raison de leurs activités, doivent être considérées comme appartenant exclusivement à l'une ou à l'autre communauté.
B.7.4. En déterminant les modes de preuve selon lesquels il est possible d'établir que des élèves parlent le néerlandais dans le milieu familial avec au moins un des deux parents afin de leur permettre de bénéficier ainsi de la priorité instaurée par la disposition attaquée, l'article III.3 du décret attaqué n'est pas une disposition qui règle l'emploi des langues dans l'enseignement, au sens de l'article 129, § 1er, 2°, de la Constitution, mais une disposition qui règle l'enseignement, au sens de l'article 127, § 1er, alinéa 1er, 2°, de la Constitution.
Les dispositions attaquées relèvent dès lors de la compétence du législateur décrétal.
B.8. Le moyen n'est pas fondé.
Quatrième moyen B.9.1. Le moyen est pris de la violation de l'article 143 de la Constitution et du principe de la loyauté fédérale, lus en combinaison avec l'article 127 de la Constitution.
B.9.2. La partie requérante fait valoir que la disposition attaquée aboutit, mathématiquement, à faire peser une charge supplémentaire sur l'enseignement francophone à Bruxelles, alors que l'offre y est aussi insuffisante et que les élèves allochtones, que la disposition attaquée empêche d'accéder à l'enseignement néerlandophone, peuvent conduire à mettre en péril l'équilibre de certaines classes de l'enseignement francophone.
B.10. L'article 143, § 1er, de la Constitution - les paragraphes 2 et 3 de cette disposition portant sur la procédure relative aux conflits d'intérêts et étant donc étrangers à l'objet du moyen - dispose : « Dans l'exercice de leurs compétences respectives, l'Etat fédéral, les communautés, les régions et la Commission communautaire commune agissent dans le respect de la loyauté fédérale, en vue d'éviter des conflits d'intérêts ».
B.11.1. Aux termes de l'article 143, § 1er, de la Constitution, dans l'exercice de leurs compétences respectives, l'Etat fédéral, les communautés, les régions et la Commission communautaire commune agissent dans le respect de la loyauté fédérale.
Le principe de loyauté fédérale, selon les travaux préparatoires de cet article de la Constitution, implique, pour l'autorité fédérale et pour les entités fédérées, l'obligation de ne pas perturber l'équilibre de la construction fédérale dans son ensemble, lorsqu'elles exercent leurs compétences; il concerne plus que le simple exercice des compétences : il indique dans quel esprit cela doit se faire.
B.11.2. Le Gouvernement flamand indique que la capacité des écoles néerlandophones dans la région bilingue de Bruxelles-Capitale n'a pas été modifiée. Dès lors qu'il n'est pas contesté que cette capacité n'est pas illimitée et que, comme l'indique la justification, reproduite en B.3, de l'amendement dont est issue la disposition attaquée le nombre de places disponibles dans l'enseignement est, dans la région bilingue de Bruxelles-Capitale, insuffisant tant en ce qui concerne l'enseignement francophone qu'en ce qui concerne l'enseignement néerlandophone, le législateur décrétal ne manque pas à la loyauté fédérale en cherchant à résoudre, à défaut de concertation entre les autorités concernées, les difficultés auxquelles se heurtent les établissements qui relèvent de sa compétence.
B.12. Le moyen n'est pas fondé.
En ce qui concerne les moyens pris de la violation des dispositions constitutionnelles relatives aux droits et libertés Premier moyen B.13.1. Le moyen est pris de la violation des articles 10, 11 et 191 de la Constitution, lus isolément ou en combinaison avec les articles 8, 9, 10 et 14 de la Convention européenne des droits de l'homme, avec les articles 17, 18, 19 et 26 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, avec les articles 10 et 13 du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, avec les articles 5, 14, 16, 18 et 28 de la Convention relative aux droits de l'enfant et avec les principes généraux de non-rétroactivité, de sécurité juridique, de standstill, de proportionnalité et de respect des attentes légitimes d'autrui.
B.13.2. La partie requérante fait valoir que la disposition attaquée créerait : - une première différence de traitement injustifiée entre élèves parlant le néerlandais suivant que l'un de leurs parents est en mesure ou non de démontrer, selon les modalités prévues par la disposition attaquée, que le néerlandais est utilisé dans le milieu familial, seuls ceux se trouvant dans la première situation pouvant bénéficier de la priorité instaurée par cette disposition, tout en pouvant, par ailleurs, la perdre si celui des parents répondant aux conditions du décret venait à décéder ou à quitter l'autre parent; - une seconde différence de traitement injustifiée entre, d'une part, les élèves qui ne parlent pas le néerlandais mais dont l'un des deux parents répond aux exigences établies par la disposition attaquée et, d'autre part, les élèves qui parlent le néerlandais mais dont aucun des parents ne répond à ces exigences : seuls les premiers peuvent bénéficier de la priorité instaurée par cette disposition; - une identité de traitement injustifiée entre enfants dont les parents ne répondent pas aux exigences établies par la disposition attaquée et qui ne peuvent donc bénéficier de la priorité instaurée par celle-ci, alors pourtant que certains d'entre eux parleraient le néerlandais et que cette langue serait utilisée dans le milieu familial.
B.13.3. Le Gouvernement flamand soutient que le moyen est irrecevable en ses première et seconde branches, en ce que, d'une part, les deux différences de traitement existaient déjà avant la modification de l'article III.3 du décret du 28 juin 2002 par la disposition attaquée et en ce que, d'autre part, la partie requérante ne tiendrait pas compte de ce que l'usage du néerlandais dans le milieu familial doit être prouvé par l'un des parents, non par l'élève.
B.13.4. Il est exact que, dans sa rédaction antérieure, le décret du 28 juin 2002 établissait des différences de traitement entre élèves, analogues à celles évoquées par la partie requérante et tenant à l'usage du néerlandais par au moins un des deux parents. Toutefois, en modifiant les conditions dans lesquelles cet usage doit être établi, la disposition attaquée altère cette différence de traitement.
Le moyen, qui se réfère aux parents répondant ou non aux conditions établies par le décret, est recevable.
B.14.1. Pour justifier, au regard du principe d'égalité et de non-discrimination, combiné avec les dispositions conventionnelles et les principes généraux visés par le moyen, une différence de traitement entre les élèves, il ne suffit pas que cette différence de traitement repose, comme en l'espèce, sur des critères objectifs; il doit être démontré qu'à l'égard de la matière réglée, cette distinction est pertinente au regard de l'objectif poursuivi par la disposition attaquée et qu'elle ne porte pas une atteinte disproportionnée aux droits des intéressés.
B.14.2. Parmi ces droits figure la liberté de choix des parents en matière d'enseignement, garantie par l'article 24, § 1er, de la Constitution. Cette liberté n'implique cependant ni qu'ils aient un droit inconditionnel à obtenir, pour leur enfant, une inscription dans l'établissement de leur choix, le législateur décrétal disposant à cet égard d'un large pouvoir d'appréciation pour tenir compte de la diversité des situations, ni qu'ils puissent fonder une attente légitime sur le régime antérieur de la déclaration sur l'honneur, le législateur décrétal ayant pu estimer qu'un changement de politique s'imposait compte tenu, notamment, du nombre de places disponibles.
B.14.3. En l'espèce, la disposition attaquée vise, comme l'indique la justification de l'amendement dont elle est issue, reproduite en B.3, à garantir la preuve effective de l'usage du néerlandais dans le milieu familial; le législateur décrétal a considéré que le régime antérieur de la déclaration sur l'honneur ne suffisait pas à garantir les objectifs pour lesquels il avait été instauré, à savoir, comme l'indique la même justification, permettre aux enfants bruxellois néerlandophones de trouver une école néerlandophone à proximité de chez eux et atteindre une bonne proportion d'élèves pratiquant le néerlandais chez eux et d'élèves allophones.
B.14.4. La disposition attaquée n'est pas de nature, par elle-même, à garantir que ces objectifs soient atteints; il peut toutefois être admis que l'usage du néerlandais dans le milieu familial peut conduire à ce que cette langue soit aussi utilisée dans le milieu scolaire, rendu ainsi plus homogène. Sans doute la disposition attaquée ne permet-elle ni d'éviter que des élèves qui, pour une raison ou pour une autre - tenant, par exemple, à leur scolarité antérieure -, connaîtraient le néerlandais ne puissent obtenir d'être inscrits par priorité si aucun de leurs parents n'est en mesure de répondre aux exigences qu'elle pose, ni d'éviter que des parents qui, pour une raison ou pour une autre, répondraient à ces exigences mais n'utiliseraient pas le néerlandais dans le milieu familial, puissent inscrire par priorité leur enfant dans une école visée par le décret alors que cet enfant aurait une connaissance insuffisante du néerlandais. Cependant, le législateur décrétal, confronté tout à la fois aux désirs de parents soucieux de trouver pour leurs enfants un établissement d'enseignement où sera pratiquée la langue qu'ils utilisent dans le milieu familial, à une grande variété de situations dans la population scolaire et au souhait des écoles de disposer de critères objectifs leur permettant d'éviter d'avoir elles-mêmes à apprécier ces situations (Doc. parl., Parlement flamand, 2009-2010, n° 526/4, p. 37), a pu estimer, compte tenu du large pouvoir d'appréciation dont il dispose, évoqué en B.14.2, que la mesure attaquée était adéquate.
La mesure serait disproportionnée si les preuves exigées des parents étaient exagérément difficiles à produire; toutefois, il ressort des déclarations faites par le ministre de l'Enseignement lors des travaux préparatoires (ibid., p. 37) que tel n'est pas le cas, de sorte que, sous cette réserve, la disposition attaquée ne peut être considérée comme portant une atteinte discriminatoire aux droits des intéressés.
B.14.5. L'examen de la disposition attaquée au regard des autres dispositions visées par le moyen n'aboutit pas à une autre conclusion.
B.14.6. Sous la réserve mentionnée en B.14.4, le moyen n'est pas fondé.
Troisième moyen B.15.1. Le moyen est pris de la violation des articles 10, 11, 24 et 30 de la Constitution et du principe de proportionnalité, combinés ou non avec l'article 16bis de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles.
B.15.2. La partie requérante fait valoir que la disposition attaquée constitue, au regard de la liberté de l'emploi des langues, une ingérence discriminatoire dans la sphère familiale qui n'est pas nécessaire pour permettre à la Communauté flamande d'exercer ses compétences en matière d'enseignement. De plus, en remplaçant le régime de la déclaration sur l'honneur par celui des titres qu'elle vise, elle contraint les parents à utiliser le néerlandais dans le milieu familial et porte ainsi atteinte aux garanties dont bénéficient les francophones dans les communes visées par les articles 7 et 8 des lois sur l'emploi des langues en matière administrative, coordonnées par l'arrêté royal du 18 juillet 1966.
B.15.3. L'exception d'irrecevabilité du moyen soulevée par le Gouvernement flamand et selon laquelle la disposition attaquée se bornerait à offrir aux établissements d'enseignement la possibilité d'accorder la priorité instaurée par la disposition attaquée lorsqu'ils sont saisis de demandes d'inscriptions et ne conférerait pas, comme tel, un droit de priorité à l'élève et selon laquelle cette disposition ne requiert la preuve qu'elle vise que d'un seul des deux parents, n'est pas fondée puisque c'est la disposition attaquée qui indique les conditions auxquelles doit être établi l'usage du néerlandais dans le milieu familial. La requête indique par ailleurs le rapport que la partie requérante établit entre la disposition attaquée et les articles 30 de la Constitution et 16bis de la loi spéciale du 8 août 1980.
B.16.1. L'article 16bis de la loi spéciale du 8 août 1980 dispose : « Les décrets, règlements et actes administratifs ne peuvent porter préjudice aux garanties existantes au moment de l'entrée en vigueur de la présente disposition dont bénéficient les francophones dans les communes citées à l'article 7 des lois sur l'emploi des langues en matière administrative, coordonnées le 18 juillet 1966, ainsi que celles dont bénéficient les néerlandophones, les francophones et germanophones dans les communes citées à l'article 8 des mêmes lois ».
B.16.2. Les travaux préparatoires relatifs à cette disposition indiquent qu'elle « vise à garantir aux communes de la périphérie et aux communes à facilités que les garanties existant actuellement seront maintenues intégralement, même après la régionalisation de la loi communale organique et électorale » (Doc. parl., Sénat, 2000-2001, n° 2-709/1, p.21), et que, par l'utilisation du terme « garanties », le législateur visait « l'ensemble des dispositions actuellement en vigueur qui organisent un régime spécifique au profit des particuliers cités dans le texte et, de manière générale, [...] toute disposition qui peut être identifiée comme protégeant les particuliers et, notamment, les mandataires publics dans les communes visées aux articles 7 et 8 des lois coordonnées » (Doc. parl., Chambre, 2000-2001, DOC 50-1280/003, p. 10).
B.16.3. L'article 30 de la Constitution dispose : « L'emploi des langues usitées en Belgique est facultatif; il ne peut être réglé que par la loi, et seulement pour les actes de l'autorité publique et pour les affaires judiciaires ».
B.16.4. L'article 1er de la loi du 30 juillet 1963 concernant le régime linguistique dans l'enseignement dispose : «
Art. 1er.Les établissements officiels d'enseignement gardien, primaire, moyen, normal, technique, artistique ou spécial et les mêmes établissements libres subventionnés ou reconnus par l'Etat sont soumis aux dispositions de la présente loi.
Toutefois, les établissements situés dans les communes visées au § 1 de l'article 7 de la loi sur l'emploi des langues en matière administrative, sont soumis en ce qui concerne la langue de l'enseignement et l'enseignement de la seconde langue aux dispositions du § 3 du même article ».
B.16.5. Les communes visées à l'article 7, § 1er, de la loi du 2 août 1963 sur l'emploi des langues en matière administrative, auquel cette disposition se réfère, sont celles de Drogenbos, Kraainem, Linkebeek, Rhode-Saint-Genèse, Wemmel et Wezembeek-Oppem, désormais visées à l'article 7, alinéa 1er, des lois sur l'emploi des langues en matière administrative, coordonnées par arrêté royal du 18 juillet 1966.
L'article 7, § 3, de la loi précitée du 2 août 1963 dispose : « En matière scolaire dans les six communes : A. La langue de l'enseignement est le néerlandais.
L'enseignement de la seconde langue peut être organisé dans l'enseignement primaire à raison de quatre heures par semaine au 2me degré et de huit heures par semaine aux 3me et 4me degrés.
B. L'enseignement gardien et primaire peut être donné aux enfants en français si cette langue est la langue maternelle ou usuelle de l'enfant et si le chef de famille réside dans une de ces communes.
Cet enseignement ne peut être organisé qu'à la demande de seize chefs de famille résidant dans la commune.
La commune qui est saisie de la demande susvisée doit organiser cet enseignement.
L'enseignement de la seconde langue nationale est obligatoire dans les écoles primaires à raison de quatre heures par semaine au 2me degré et de huit heures par semaine aux 3me et 4me degrés.
C. L'enseignement de la seconde langue peut comprendre des exercices de récapitulation des autres matières du programme ».
B.16.6. En imposant aux parents des élèves pour lesquels la priorité instaurée par le décret attaqué est demandée de fournir les titres visés par celui-ci, le législateur décrétal ne règle pas l'emploi des langues mais l'enseignement ainsi qu'il a été indiqué en B.7.4.
B.16.7. Dès lors qu'il règle l'enseignement, le décret attaqué ne pourrait pas, en principe, porter atteinte aux facilités linguistiques accordées aux particuliers par les lois sur l'emploi des langues en matière administrative.
La Cour examine néanmoins si le décret, en imposant cette obligation, porte atteinte aux garanties dont bénéficient les francophones dans les communes citées aux articles 7 et 8 des lois coordonnées sur l'emploi des langues en matière administrative.
B.16.8. Ces garanties sont, en vertu de l'article 16bis de la loi spéciale du 8 août 1980 précitée, celles dont les intéressés bénéficiaient lorsque cette disposition est entrée en vigueur, soit le 1er janvier 2002 (article 9 de la loi spéciale du 13 juillet 2001).
A ce moment, le décret du 28 juin 2002, que modifie le décret attaqué, n'avait pas encore été adopté et, de surcroît, la disposition relative à la déclaration sur l'honneur n'y fut insérée que par le décret du 15 juillet 2005. Il s'ensuit qu'au 1er janvier 2002, les intéressés ne bénéficiaient d'aucune garantie au sens de ce qui a été indiqué en B.16.2 et que la disposition attaquée ne saurait donc y porter atteinte.
L'article 16bis de la loi spéciale du 8 août 1980 n'est dès lors pas applicable.
B.17. Le moyen n'est pas fondé.
Cinquième moyen B.18.1. Le moyen est pris de la violation des articles 10, 11, 23, 24 et 191 de la Constitution lus en combinaison ou non avec les articles 8 et 14 de la Convention européenne des droits de l'homme et avec l'article 2 du Protocole additionnel à cette Convention.
B.18.2. La partie requérante fait valoir, d'une part, que la disposition attaquée, par l'obligation qu'elle instaure, conduit les parents allochtones à renoncer à inscrire leurs enfants dans l'enseignement néerlandophone et à les inscrire dans l'enseignement francophone et leur impose une obligation plus lourde que celle que la disposition ancienne faisait peser sur eux (première branche) et, d'autre part, que cette disposition menace la possibilité, pour les élèves ayant entamé leur scolarité en langue néerlandaise, de la poursuivre dans cette langue, alors qu'ils ne connaîtraient pas d'autre langue nationale et que leurs parents ne répondraient pas aux exigences de la disposition attaquée (seconde branche).
B.19.1. Il ressort des travaux préparatoires relatifs à l'article 23 de la Constitution que le Constituant ne souhaitait pas « confiner les citoyens dans un rôle passif ou [...] les inciter à adopter une attitude passive », mais qu'au contraire, il entendait affirmer que « quiconque a des droits, a également des devoirs », partant de l'idée que « le citoyen a pour devoir de collaborer au progrès social et économique de la société dans laquelle il vit » (Doc. parl., Sénat, S.E. 1991-1992, n° 100-2/4°, pp. 16-17). C'est pourquoi il a permis aux législateurs auxquels il confie la charge de garantir les droits économiques, sociaux et culturels de tenir compte des « obligations correspondantes », selon les termes de l'alinéa 2 de l'article 23.
B.19.2. Les citoyens bénéficiaires des droits économiques, sociaux et culturels énoncés à l'article 23 de la Constitution peuvent donc se voir imposer des obligations pour accéder à ces droits. Les mots « à cette fin », placés en tête de cet alinéa 2, indiquent toutefois que ces obligations doivent être liées à l'objectif général inscrit à l'alinéa 1er de l'article 23, qui est de permettre à chacun de mener une vie conforme à la dignité humaine par la jouissance des droits énumérés à l'alinéa 3 du même article. Ces obligations doivent permettre aux personnes à qui elles sont imposées de contribuer à la réalisation effective de cet objectif pour elles-mêmes ainsi que pour les autres bénéficiaires des droits énumérés à l'article 23, et doivent être proportionnées à l'objectif ainsi défini.
B.19.3. Le législateur décrétal a pu estimer que le but des dispositions attaquées, qui est d'améliorer la qualité de l'enseignement, ne pouvait être atteint que si les élèves étaient en mesure de s'exprimer chez eux dans la langue de leur enseignement et que la condition de pouvoir établir, dans le chef d'un des parents, une connaissance de cette langue qui soit suffisante à cet effet pouvait être considérée comme une « obligation correspondante » au sens de l'article 23 de la Constitution.
B.19.4. Compte tenu de la réservée formulée en B.14.4, l'obligation de prouver l'usage de cette langue sur la base des titres mentionnés par la disposition attaquée n'est pas disproportionnée à l'objectif indiqué en B.19.3 dès lors qu'elle porte sur l'usage de la langue dans le seul milieu familial, le cas échéant, par un seul des deux parents.
B.19.5. Le moyen se confond, pour le surplus, avec le premier moyen; l'examen de la disposition attaquée au regard des autres dispositions visées par le moyen n'aboutit pas à une autre conclusion.
B.20. Le moyen n'est pas fondé.
Sixième moyen B.21.1. Le moyen est pris de la violation des articles 10, 11 et 24 de la Constitution.
B.21.2. La partie requérante fait valoir que le taux de 55 % fixé par la disposition attaquée est discriminatoire vis-à -vis des enfants qui n'utilisent pas le néerlandais dans le milieu familial et aboutit, compte tenu du nombre d'enfants inscrits dans l'enseignement néerlandophone à Bruxelles et dont un des parents est néerlandophone, à fixer un nombre de places prioritaires largement supérieur à la demande.
B.21.3. Les travaux préparatoires du décret du 7 mai 2004 relatif à l'enseignement néerlandophone à Bruxelles-Capitale indiquent que le nombre d'enfants inscrits dans l'enseignement néerlandophone à Bruxelles pouvant parler le néerlandais dans le milieu familial avec au moins l'un des parents a sensiblement décru entre 1997 et 2003 : « Selon les données de la Commission communautaire flamande, on observe également la tendance très marquée d'une présence de plus en plus forte d'enfants dont la langue familiale est le français ou une autre langue. Les statistiques distinguent respectivement les familles néerlandophones homogènes (NH), les familles linguistiquement mixtes : le néerlandais est la langue maternelle d'un seul des parents (LM); les familles francophones homogènes (FH) : les deux parents sont francophones; les familles allophones homogènes : les deux parents parlent une autre langue ou le français comme autre langue (AH).
96-97
1er septembre 2003
%
%
Enseignement maternel
NH
13,8
12,6
LM
25,7
20,6
FH
31,5
34,8
AH
24,0
32,0
Enseignement primaire
NH
31,1
17,9
LM
30,6
24,9
FH
22,2
30,3
AH
16,1
26,9
Source : Information de la Commission communautaire flamande » (Doc. parl., Parlement flamand, 2003-2004, n° 2091/1, p. 16).
Il apparaît, de même, des données chiffrées établies par la Commission communautaire flamande et fournies par le Gouvernement flamand à la demande de la Cour que, de l'année scolaire 1979-1980 à l'année scolaire 2010-2011 dans l'enseignement primaire, le pourcentage des familles néerlandophones (homogènes ou mixtes) est passé de 96 % à 35,9 % et que, de l'année scolaire 1991-1992 à l'année scolaire 2010-2011, dans l'enseignement secondaire, il est passé de 93,7 % à 56,8 %.
B.21.4 Il peut être admis, au regard de la justification de l'amendement évoqué en B.3, que le législateur décrétal ait pu estimer nécessaire de relever le pourcentage de priorité en cause : d'une part, il ressort d'une évaluation de la procédure d'inscription pour l'année scolaire 2011-2012 effectuée par la plate-forme locale de concertation pour l'enseignement fondamental de la région bilingue de Bruxelles-Capitale, transmise par le Gouvernement flamand à la demande de la Cour, que pour les classes d'accueil en 2011, auxquelles la majorité des demandes se rapporte, le nombre d'enfants ayant l'usage du néerlandais comme langue familiale constituait 54,8 % du nombre d'inscriptions, ce qui démontre que la disposition actuelle répond à un besoin réel; d'autre part, la disposition attaquée ne porte pas d'atteinte disproportionnée aux droits des élèves qui ne relèvent pas de la catégorie prioritaire attaquée, puisqu'ils entrent en considération pour les 45 % de places restantes et, lorsque moins de 55 % des places disponibles sont occupées par des enfants relevant de la catégorie prioritaire qui a l'usage du néerlandais comme langue familiale, pour les places ainsi libérées.
B.21.5. Il découle aussi de la disposition attaquée que la plate-forme locale de concertation Bruxelles peut fixer, pour la zone d'action ou, le cas échéant, par secteur, un pourcentage prioritaire supérieur à 55 % pour les enfants ayant l'usage du néerlandais comme langue familiale. Cette faculté est justifiée par le fait qu'il n'est pas exclu que la plate-forme locale de concertation Bruxelles constate, à l'avenir, que le nombre d'enfants inscrits appartenant à cette catégorie prioritaire augmente et qu'il soit nécessaire de fixer un pourcentage prioritaire supérieur au minimum précisé dans le décret.
La plate-forme locale de concertation Bruxelles ne peut prendre la décision de fixer un pourcentage prioritaire supérieur à 55 % que dans des circonstances exceptionnelles, sur la base d'éléments objectifs et motivés qui démontrent cette nécessité. Compte tenu de ce que sont domiciliés dans la région bilingue de Bruxelles-Capitale des enfants soumis à l'obligation scolaire, dont les parents n'ont ni le néerlandais ni le français comme langue familiale, la plate-forme locale de concertation doit aussi veiller à ne pas fixer ce pourcentage à un niveau à ce point élevé que les écoles qui relèvent de la Communauté flamande ne seraient pas tenues d'accueillir une partie équitable de ces enfants.
Le juge compétent peut contrôler le respect des exigences précitées pour la fixation par la plate-forme locale de concertation Bruxelles d'un pourcentage de priorité supérieur au minimum prévu par le décret.
B.21.6. Sous réserve de ce qui est mentionné en B.21.5, le sixième moyen n'est pas fondé.
Par ces motifs, la Cour, sous réserve de ce qui est mentionné en B.14.4 et en B.21.5, rejette le recours.
Ainsi prononcé en langue française, en langue néerlandaise et en langue allemande, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, à l'audience publique du 18 janvier 2012.
Le greffier, P.-Y. Dutilleux.
Le président, R. Henneuse.