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Arrêt De La Cour Constitutionelle
publié le 12 septembre 2002

Arrêt n° 116/2002 du 26 juin 2002 Numéros du rôle : 2392 et 2407 En cause : les demandes de suspension du décret de la Région flamande du 14 décembre 2001 « pour quelques permis de construire pour lesquels valent des raisons obligatoires d'in La Cour d'arbitrage, composée des présidents A. Arts et M. Melchior, et des juges L. François, P(...)

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Arrêt n° 116/2002 du 26 juin 2002 Numéros du rôle : 2392 et 2407 En cause : les demandes de suspension du décret de la Région flamande du 14 décembre 2001 « pour quelques permis de construire pour lesquels valent des raisons obligatoires d'intérêt général », introduites par J. Creve et autres et par G. Van Mieghem et autres.

La Cour d'arbitrage, composée des présidents A. Arts et M. Melchior, et des juges L. François, P. Martens, R. Henneuse, M. Bossuyt, L. Lavrysen, A. Alen, J.-P. Snappe et E. Derycke, assistée du greffier P.-Y. Dutilleux, présidée par le président A. Arts, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet des demandes de suspension a. Par requête adressée à la Cour par lettre recommandée à la poste le 18 mars 2002 et parvenue au greffe le 19 mars 2002, une demande de suspension du décret de la Région flamande du 14 décembre 2001 « pour quelques permis de construire pour lesquels valent des raisons obligatoires d'intérêt général » (publié au Moniteur belge du 20 décembre 2001), a été introduite, par J.Creve, demeurant à 9130 Kieldrecht, Oud Arendberg 111, M. Vergauwen, demeurant à 9130 Doel, Camermanstraat 12, R. Van Buel, demeurant à 9130 Doel, Engelsesteenweg 80, M. Rijssens, demeurant à 9130 Doel, Engelsesteenweg 80, L. Adriaenssen, demeurant à 9130 Doel, Vissersstraat 11, G. Adriaenssen, demeurant à 9130 Doel, Vissersstraat 11, I. Tempelaer, demeurant à 9130 Doel, Vissersstraat 11, P. Van Broeck, demeurant à 9130 Kieldrecht, Belgische Dreef 4, C. Coolen, demeurant à 9130 Doel, Scheldemolenstraat 87, H. Van Reeth, demeurant à 9130 Kieldrecht, Oud Arendberg 111, J. Soetens, demeurant à 9130 Doel, Camermanstraat 12, G. Van De Walle, demeurant à 9130 Doel, Scheldemolenstraat 61, M. Aspers, demeurant à 9130 Doel, Scheldemolenstraat 61, I. De Paepe, demeurant à 9130 Doel, Scheldemolenstraat 65, B. Brijs, demeurant à 9130 Doel, Scheldemolenstraat 51, G. Snoeck, demeurant à 9130 Doel, Havenweg 16, R. Van Lomberghe, demeurant à 9130 Doel, Havenweg 16, R. Marin, demeurant à 9130 Doel, Vissersstraat 6, R. Marin, demeurant à 9130 Doel, Havenweg 27, H. Barbieres, demeurant à 9130 Doel, Hooghuisstraat 13, E. Peeters, demeurant à 9130 Doel, Hooghuisstraat 13, J. Fierlefijn, demeurant à 9130 Doel, Camermanstraat 14, L. Hack, demeurant à 9130 Doel, Camermanstraat 19, M. De Lee, demeurant à 9130 Doel, Vissersstraat 20, M. Van Den Keybys, demeurant à 9130 Doel, Vissersstraat 21, C. Kimpe, demeurant à 9130 Doel, Vissersstraat 21, J. Malcorps, demeurant à 9130 Doel, Camermanstraat 11, J. Gillis, demeurant à 9130 Doel, Liefkenshoekstraat 28, M. Windey, demeurant à 9130 Doel, Vissersstraat 5, C. De Wael, demeurant à 9130 Doel, Pastorijstraat 28, W. De Nijs, demeurant à 9130 Doel, Pastorijstraat 28, S. De Graef, demeurant à 9130 Doel, Scheldemolenstraat 47, J. Kouijzer, demeurant à 9130 Doel, Scheldemolenstraat 47, M. De Spiegeleer, demeurant à 9130 Doel, Zoetenberm 19, M. Janssens, demeurant à 9130 Doel, Engelsesteenweg 78, R. De Maayer, demeurant à 9130 Doel, Engelsesteenweg 78, C. De Caluwe, demeurant à 9130 Doel, Engelsesteenweg 82, A. Cool, demeurant à 9130 Doel, Engelsesteenweg 82, W. Paelinck, demeurant à 9130 Doel, Scheldemolenstraat 25, H. Orleans, demeurant à 9130 Doel, Camermanstraat 11, S. Collier, demeurant à 9130 Doel, Engelsesteenweg 100, R. Buisseret, demeurant à 9130 Doel, Engelsesteenweg 100, H. Versmissen, demeurant à 9130 Doel, Havenweg 13, G. Verelst, demeurant à 9130 Doel, Dreefstraat 1, Jeanne De Paepe, demeurant à 9130 Doel, Scheldemolenstraat 55, Jerome De Paepe, demeurant à 9130 Doel, Scheldemolenstraat 65, I. Huybrechts, demeurant à 9130 Doel, Engelsesteenweg 51, L. De Cleene, demeurant à 9130 Doel, Engelsesteenweg 44, L. Lockefeer, demeurant à 9130 Doel, Engelsesteenweg 55, S. Lockefeer, demeurant à 9130 Doel, Engelsesteenweg 55, P. Peeters, demeurant à 9130 Doel, Hooghuisstraat 1, K. Suykens, demeurant à 9130 Doel, Vissersstraat 21, D. Barnes, demeurant à 9130 Doel, Havenweg 21, D. Severius, demeurant à 9130 Doel, Havenweg 30, S. Geuens, demeurant à 9130 Doel, Vissersstraat 10, S. Schoetens, demeurant à 9130 Doel, Vissersstraat 10, H. Hermans, demeurant à 9130 Doel, Vissersstraat 9c, J. Tronckoe, demeurant à 9130 Doel, Vissersstraat 9c, S. Van De Craen, demeurant à 9130 Doel, Vissersstraat 9c, A. De Man, demeurant à 9130 Doel, Vissersstraat 24, E. Sonck, demeurant à 9130 Doel, Vissersstraat 24, L. Hooft, demeurant à 9130 Doel, Vissersstraat 25, G. De Pette, demeurant à 9130 Doel, Vissersstraat 25, J. Meul, demeurant à 9130 Doel, Vissersstraat 27, G. Gillis, demeurant à 9130 Doel, Vissersstraat 33, P. Meulen, demeurant à 9130 Doel, Liefkenshoekstraat 20, L. De Vos, demeurant à 9130 Doel, Liefkenshoekstraat 20, S. Moenssen, demeurant à 9130 Doel, Camermanstraat 41, A. Helmut, demeurant à 9130 Doel, Hooghuisstraat 21, K. Van Gijsel, demeurant à 9130 Doel, Hooghuisstraat 21, N. Poppe, demeurant à 9130 Doel, Oostlangeweg 18, V. Druyts, demeurant à 9130 Doel, Oostlangeweg 18, G. Maesen, demeurant à 9130 Doel, Engelsesteenweg 668, P. Borghs, demeurant à 9130 Doel, Engelsesteenweg 68, I. Struys, demeurant à 9130 Doel, Engelsesteenweg 45, D. Boeckling, demeurant à 9130 Doel, Engelsesteenweg 45, L. Gys, demeurant à 9130 Doel, Zoetenberm 33, R. Van Mol, demeurant à 9130 Doel, Hertog Prosperstraat 4, F. Verhulst, demeurant à 9130 Doel, Hertog Prosperstraat 4, F. Dejonck, demeurant à 9130 Doel, Saftingen 26, D. Vercauteren, demeurant à 9130 Doel, Saftingen 26, T. Wille, demeurant à 9130 Doel, Havenweg 30a, K. Caps, demeurant à 9130 Doel, Saftingen 14, L. De Rijcke, demeurant à 9130 Kieldrecht, Sint-Engelbertusstraat 27, R. Bleijenberg, demeurant aux Pays-Bas, Nieuw Namen, Kerkpad 15, T. Werkers, demeurant à 9130 Doel, Sint-Engelbertusstraat, L. Buysrogge, demeurant à 9130 Doel, Hertog Prosperstraat 8, J. De Cleene, demeurant à 9130 Doel, Sint-Engelbertusstraat 22, S. De Bruyn, demeurant à 9130 Doel, Sint-Engelbertusstraat 20, L. Fransen, demeurant à 9130 Doel, Hertog Prosperstraat 7, I. Weyenberg, demeurant à 9130 Doel, Ouden Doel 19, M. Jacobs, demeurant à 9130 Doel, Oostlangeweg 26, C. Smet, demeurant à 9130 Kieldrecht, Pillendijk 77, W. Aelbrecht, demeurant à 9130 Kieldrecht, Pillendijk 73, W. Faure, demeurant à 9130 Kieldrecht, Pillendijk 53, B. De Decker, demeurant à 9130 Kieldrecht, Pillendijk 41, L. D'Hamers, demeurant à 9130 Kieldrecht, Oud Arendberg 116, O. Van As, demeurant à 9130 Doel, Engelsesteenweg 63, B. De Bock, demeurant à 9130 Doel, Zoetenberm 26, R. De Bock, demeurant à 9130 Doel, Zoetenberm 26, A. Geerts, demeurant à 9130 Doel, Saftingen 3, P. Onghena, demeurant à 9130 Doel, Oostlangeweg 26, K. Van Mol, demeurant à 9130 Doel, Oostlangeweg 24, M. Van Mol, demeurant à 9130 Doel, Oostlangeweg 24, A. Collier, demeurant à 9130 Kieldrecht, Oud Arendberg 118, J. De Vriendt, demeurant à 9130 Doel, Engelsesteenweg 8, J. De Smet, demeurant à 9130 Doel, Pastorijstraat 9, et F. Van Gijsel, demeurant à 9130 Verrebroek, Gemenestraat 22.

Par la même requête, les parties requérantes demandent également l'annulation de la norme précitée.

Cette affaire est inscrite sous le numéro 2392 du rôle de la Cour. b. Par requête adressée à la Cour par lettre recommandée à la poste le 2 avril 2002 et parvenue au greffe le 3 avril 2002, une demande de suspension du décret de la Région flamande du 14 décembre 2001 « pour quelques permis de construire pour lesquels valent des raisons obligatoires d'intérêt général » (publié au Moniteur belge du 20 décembre 2001) a été introduite par G.Van Mieghem, demeurant à 9130 Doel, Oostlangeweg 3, P. Cleiren, demeurant à 9130 Doel, Oostlangeweg 16, C. Van Haelst, demeurant à 9130 Kieldrecht, Molenstraat 43, J. Anne, demeurant à 9130 Kieldrecht, Oud Arenberg 57, B. Anne, demeurant à 9130 Kieldrecht, Oud Arenberg 57 A, P. Weelmaes, demeurant à 9130 Kieldrecht, Oud Arenberg 92, E. Onghena, demeurant à 9130 Doel, Oostlangeweg 26, K. Van Mol, demeurant à 9130 Doel, Oostlangeweg 24, C. Smet, demeurant à 9130 Kieldrecht, Pillendijk 77, O. Vanas, demeurant à 9130 Doel, Engelsesteenweg 65, et K. Smet, demeurant à 9130 Kieldrecht, Kreek 106.

Par la même requête, les parties requérantes demandent également l'annulation de la norme précitée.

Cette affaire est inscrite sous le numéro 2407 du rôle de la Cour.

II. La procédure a. L'affaire n° 2392 Par ordonnance du 19 mars 2002, le président en exercice a désigné les juges du siège conformément aux articles 58 et 59 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage. Les juges-rapporteurs ont estimé qu'il n'y avait pas lieu de faire application des articles 71 ou 72 de la loi organique.

Par ordonnance du 28 mars 2002, la Cour a fixé l'audience au 30 avril 2002, après avoir dit que les observations écrites éventuelles des autorités visées à l'article 76, § 4, de la loi spéciale susdite devront parvenir au greffe le 24 avril 2002 au plus tard.

Cette ordonnance a été notifiée auxdites autorités ainsi qu'aux parties requérantes et à leur avocat, par lettres recommandées à la poste le 28 mars 2002. b. L'affaire n° 2407 Par ordonnance du 3 avril 2002, le président en exercice a désigné les juges du siège conformément aux articles 58 et 59 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage. Les juges-rapporteurs ont estimé qu'il n'y avait pas lieu de faire application des articles 71 ou 72 de la loi organique.

Par ordonnance du 16 avril 2002, la Cour a fixé l'audience au 30 avril 2002, après avoir dit que les observations écrites éventuelles des autorités visées à l'article 76, § 4, de la loi spéciale susdite devront parvenir au greffe le 24 avril 2002 au plus tard.

Cette ordonnance a été notifiée auxdites autorités ainsi qu'aux parties requérantes et à leur avocat, par lettres recommandées à la poste le 17 avril 2002. c. Les affaires jointes Par ordonnance du 16 avril 2002, la Cour a joint les affaires. Le Gouvernement flamand, place des Martyrs 19, 1000 Bruxelles, a introduit des observations écrites le 23 avril 2002.

Le « Gemeentelijk Havenbedrijf Antwerpen », ayant son siège social à 2000 Anvers, Entrepotkaai 1, a introduit dans les deux affaires un mémoire par lettre recommandée à la poste le 24 avril 2002.

Par ordonnance du 30 avril 2002, le président A. Arts a soumis les affaires à la Cour réunie en séance plénière.

A l'audience publique du 30 avril 2002 : - ont comparu : . Me M. Storme et Me I. Rogiers, avocats au barreau de Bruxelles, pour les parties requérantes dans l'affaire n° 2392; . Me K. Helsen, avocat au barreau de Louvain, pour les parties requérantes dans l'affaire n° 2407; . Me P. Van Orshoven, avocat au barreau de Bruxelles, Me H. Sebreghts et Me Y. Loix, avocats au barreau d'Anvers, pour le Gouvernement flamand; . Me G. Janssens, loco Me D. D'Hooghe, et Me J. Bouckaert, avocats au barreau de Bruxelles, pour le « Gemeentelijk Havenbedrijf Antwerpen »; - les juges-rapporteurs A. Alen et J.-P. Snappe ont fait rapport; - les avocats précités ont été entendus; - les affaires ont été mises en délibéré.

La procédure s'est déroulée conformément aux articles 62 et suivants de la loi organique, relatifs à l'emploi des langues devant la Cour.

III. Objet des dispositions attaquées Les demandes de suspension sont dirigées contre tous les articles et les cartes y afférentes du décret de la Région flamande du 14 décembre 2001 « pour quelques permis de construire pour lesquels valent des raisons obligatoires d'intérêt général ». Ce décret est libellé comme suit : «

Article 1er.Le présent décret règle une matière régionale.

Art. 2.Les travaux, opérations et aménagements nécessaires à aménager et à rendre opérationnel le bassin "Deurganck", tel qu'indiqué sur la carte 1re, sont déclarés de grand intérêt général et stratégique obligatoire : 1° L'aménagement en 3 phases d'au maximum 5.300 m de murs de quai à fondations profondes, y compris tous les travaux de terrassement sec et les éventuelles extractions de sable; 2° Le dragage du bassin et son accès vers le Bas-Escaut maritime, y compris l'extension du "Drempel van Frederik et Zandvliet", tels qu'indiqués sur la carte 3, et l'utilisation des matière de dragage ainsi obtenues en vue du remblai des terrains autour du bassin et des terrains à l'ouest et limitrophes au bassin de "Doel", tels qu'indiqués sur la carte 2 et du comblement partiel du bassin de "Doel", y compris les éventuelles extractions de sable;3° L'aménagement d'un tampon de viabilité entre Doel et les terrains autour du bassin "Deurganck";4° L'aménagement de l'infrastructure de désenclavement routière et ferroviaire, y compris les adaptations à l'infrastructure de transport existante et ses attenances;5° Les mesures compensatoires en application de l'article 6, alinéas 2, 3 et 4 de la directive 92/43/CEE du Conseil du 21 mai 1992 concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages, tel qu'indiqué sur les cartes 4 et 5;a) Zone de oiseaux de pré [lire : d'oiseaux de prairie] située dans une zone inondable contrôlée dans la zone Kruibeke-Bazel-Rupelmonde;b) Le "Paardenschor";c) Crique au droit du "Paardenschor"; d) Crique d'eau douce dans la zone tampon (Zuid-West B.); e) Etang "Drydijck" y compris le tampon écologique;f) Zone de oiseaux de pré [lire : d'oiseaux de prairie] située dans la zone de recherche "Doelpolder Noord" ' (V) et dans la Zone de oiseaux de pré [lire : d'oiseaux de prairie] temporaire "Putten West" ' (ZTA);g) Amélioration de la qualité écologique du polder en propriété de l'Autorité flamande;h) Gestion temporaire et permanente des nappes d'eau situées dans la zone "Putten Plas" et des autres nappes d'eau dans la zone Z2;i) Aménagement temporaire des terrains à sable projeté "Zwijndrecht", ex-Doeldok "et zone Z2";

Art. 3.Lors de l'octroi des autorisations urbanistiques, le Gouvernement flamand, ainsi que les autorités octroyant des autorisations lors de l'octroi d'autres autorisations et la prise d'acte des mentions nécessaires en vue de l'exécution de ces travaux, peuvent faire exception aux affectations des plans d'aménagement. Ces autorisations urbanistiques sont demandées au fonctionnaire urbanistique régional et présentées au Gouvernement flamand.

Les autorisations visées au premier alinéa sont demandées et, sauf les dispositions du premier alinéa, traitées suivant les procédures existantes à cet effet.

Art. 4.Avant l'octroi des autorisations urbanistiques visés [lire : visées] à l'article 3, le Gouvernement flamand garantit, sauf les dispositions du présent décret, l'application [du décret] du 18 mai 1999 portant organisation de l'aménagement du territoire, les articles 14 et 16, § 1er, du décret du 21 octobre 1997 concernant la conservation de la nature et le milieu naturel, la directive 85/337/CEE du Conseil du 27 juin 1985 concernant l'évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l'environnement, les articles 3 et 4 de la directive 79/409/CEE du conseil du 2 avril 1979 concernant la conservation des oiseaux sauvages et l'article 6 de la directive 92/43/CEE du Conseil du 21 mai 1992 concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages.

Art. 5.Les autorisations urbanistiques octroyées en application du présent décret doivent être présentées au Parlement flamand pour ratification dans un délai de 15 jours à compter à partir du jour auquel elles ont été octroyées.

Le Parlement flamand ratifie les autorisations urbanistiques visés à l'article 3 du présent décret dans un délai de 30 jours à compter à partir de l'introduction lorsqu'il a été satisfait aux conditions décrites à l'article 4 du présent décret.

Lorsqu'aucun décret de ratification n'est approuvé dans le délai précité, les autorisations urbanistiques visés à l'article 3 du présent décret sont réputées être non-octroyées.

Art. 6.Les autorisations urbanistiques visés à l'article 3 du présent décret sont exécutables le jour suivant la publication du décret de ratification au Moniteur belge , le cas échéant en dérogation à l'article 5, § 1er, du décret du 28 juin 1985 relatif à l'autorisation écologique et à l'article 128, quatrième alinéa, du décret du 18 mai 1999 portant organisation de l'aménagement du territoire.

Lorsque lors de l'octroi des autorisations urbanistiques visés à l'article 3, les articles 158 et 159 du décret du 18 mai 1999 portant organisation de l'aménagement du territoire doivent être appliqués, cette application n'est pas opposée à l'octroi préalable de cette autorisation urbanistique par le Gouvernement flamand et aux dispositions du premier alinéa.

Art. 7.En exécution des articles 3 et 4 de la directive 92/43/CEE [lire : 79/409/CEE] du Conseil du 2 avril 1979 [concernant la conservation des oiseaux sauvages et l'article 6, alinéa 4, de la directive 92/43/CEE] du Conseil du 21 mai 1992, concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages et des articles 14 et 16, § 1er, du décret du 21 octobre 1997 concernant la conservation de la nature et le milieu naturel, les demandeurs des autorisations urbanistiques visés à l'article 3 du présent décret sont tenus, sous peine d'application des articles 146 à 162 du décret du 18 mai 1999 portant organisation de l'aménagement du territoire et des articles 58 à 62 du décret du 21 octobre 1997 concernant la conservation de la nature et le milieu naturel, de prendre toutes les mesures nécessaires afin de réaliser les mesures compensatoires et afin de garantir la cohésion général de Natura 2000.

Ces mesures compensatoires peuvent être concrétisées dans une autorisation urbanistique ou par un arrêté du Gouvernement flamand.

Elles compensent de manière équivalente les habitats auxquels une grave atteinte a été constatée. Par type d'habitat auquel une grave atteinte a été constatée, les mesures compensatoires doivent être entamées simultanément et exécutées avec les travaux correspondants, qui sont éventuellement mentionnés dans une autorisation urbanistique.

Art. 8.Le Gouvernement flamand décide de dresser les plans d'exécution spatiaux nécessaires visés à l'article 37 du décret du 18 mai 1999 portant organisation de l'aménagement du territoire de sorte que suite soit donnée à l'article 2 du présent décret et aux articles 3 et 4 de la directive 79/409/CEE du Conseil du 2 avril 1979 concernant la conservation des oiseaux sauvages, de la directive 92/43/CEE du Conseil du 21 mai 1992, concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages et de sorte que les demandeurs des autorisations urbanistiques visés à l'article 3 du présent décret puissent répondre aux obligations imposées par l'article 7 du présent décret.

Art. 9.La "Grondbank", telle que visée à la décision du Gouvernement flamand du 24 juillet 1998, est activée au profit des agriculteurs par profession principale dont les biens agricoles se situent dans les zones énumérées dans le décret.

Art. 10.Lorsque suite à l'application du présent décret, un terrain obtient l'affectation : 1° de zone verte, zone naturelle, zone naturelle à valeur scientifique ou réserve naturelle, zone forestière ou zone comparable, lorsque cette zone, le jour précédant l'entrée en vigueur du présent décret, était située dans une zone agricole, une zone agricole à caractère rural de grande valeur, une zone agricole d'intérêt écologique ou particulier ou une zone de réservation particulière à couleur de fond d'une zone agricole ou une zone comparable;2° de zone agricole d'intérêt écologique ou particulier ou une zone comparable, lorsque cette zone, le jour précédant l'entrée en vigueur du présent décret, était située dans une zone agricole, une zone agricole à caractère rural de grande valeur, une zone agricole d'intérêt écologique ou particulier ou une zone de réservation particulière à couleur de fond d'une zone agricole ou une zone comparable; il est accordé aux propriétaires une indemnité correspondant à la perte de valeur du terrain et qui est diminuée des indemnités déjà prévues par d'autre règlements.

Lorsque des terrains non-bâtis en utilisation agricole professionnelle principale ou secondaire subissent une modification d'affectation causant une perte d'exploitation, cette dernière sera indemnisée sauf si cette perte spécifique à déjà été réglée suite à d'autre réglementations.

Le Gouvernement flamand peut fixer les règles détaillées.

Art. 11.Les articles 3, premier alinéa, 5 et 6, deuxième alinéa, du présent décret cessent de produire leurs effets à partir du moment que le Gouvernement flamand ou les autorités attribuant les permis ont la possibilité d'attribuer les permis visés à l'article 3, premier alinéa, du présent décret sur la base de l'article 103 du décret du 18 mai 1999 portant organisation de l'aménagement du territoire.

Art. 12.Le présent décret entre en vigueur le jour de sa publication au Moniteur belge . » IV. En droit - A - Quant à l'intérêt des parties requérantes Affaire n° 2392 A.1.1. Les parties requérantes estiment avoir un intérêt à leur recours en annulation et à leur demande de suspension du décret attaqué. Toutes habitent à proximité d'un des travaux déclarés d'intérêt général ou y sont propriétaires ou locataires de terres.

Beaucoup d'entre elles sont également demanderesses ou requérantes dans une ou plusieurs des procédures judiciaires pendantes dans lesquelles le décret attaqué s'immisce, selon elles. Ce décret les prive également, selon elles, de la faculté de s'adresser au Conseil d'Etat. Enfin, elles allèguent avoir un intérêt à ce que le territoire de leur région soit aménagé selon les règles normales, c'est-à-dire en concertation et d'une manière globale.

A.1.2. Le Gouvernement flamand allègue que les parties requérantes ne justifient pas d'un intérêt à demander la suspension et à requérir l'annulation, étant donné qu'elles ne sauraient être défavorablement affectées par un décret qui ne prend pas encore mais rend seulement possibles les décisions qu'elles attaquent réellement. Le décret attaqué est en effet un décret de procédure prévoyant des exceptions aux « procédures standard ». Les décisions réellement préjudiciables aux yeux des parties requérantes sont les décisions du Gouvernement flamand du 18 mars 2002 et le décret de confirmation du 29 mars 2002.

Selon le Gouvernement flamand, les parties requérantes n'expliquent pas en quoi elles pourraient être défavorablement affectées par les parties du décret qui rendent possible l'exécution de la réglementation européenne.

A.1.3. La partie intervenante, la Régie portuaire communale d'Anvers (« Gemeentelijk Havenbedrijf Antwerpen », ci-après : « le G.H.A. »), estime que le préjudice que les parties requérantes prétendent subir ne résulte pas du décret attaqué lui-même, mais des décisions ultérieures, à savoir les permis d'urbanisme du 18 mars 2002 et le décret de confirmation qui a suivi.

Le G.H.A. considère en outre que l'intérêt allégué par les parties requérantes est en contradiction avec les moyens de suspension et d'annulation invoqués. En effet, ces parties demandent la suspension et l'annulation des dispositions se rapportant à la mise en oeuvre des directives sur la conservation des oiseaux et des habitats naturels, alors que leurs moyens sont, pour l'essentiel, tirés de la non-exécution de ces directives. On ne voit dès lors pas très bien, selon le G.H.A., quel intérêt les parties requérantes pourraient avoir pour ce qui concerne les dispositions du décret attaqué qui transposent les directives sur la conservation des oiseaux et des habitats naturels.

Affaire n° 2407 A.2.1. Les parties requérantes estiment justifier d'un intérêt au recours en annulation et à la demande de suspension du décret attaqué, parce que ce décret affecte directement et défavorablement leur situation juridique.

Elles sont, en tant que locataires et/ou propriétaires de terres agricoles, directement affectées par le décret attaqué. Le mode d'exploitation et la valeur de leurs terres ainsi que leur liberté de choix concernant les cultures et les méthodes de culture risquent d'être gravement menacés suite aux compensations des préjudices environnementaux prévues par le décret attaqué.

A.2.2. Le Gouvernement flamand déduit de la requête que les parties requérantes contestent uniquement les « compensations des préjudices environnementaux prévues par le décret contesté » et « l'aménagement prévu de la crique tampon nord ». Leur recours en annulation est recevable seulement pour autant qu'il concerne la possibilité de prévoir des compensations pour les préjudices environnementaux.

Le Gouvernement flamand se demande en outre si le fait de prévoir la possibilité de compenser les préjudices environnementaux suffit pour que le décret attaqué affecte directement et défavorablement les parties requérantes.

A.2.3. La partie intervenante, le G.H.A., estime que le préjudice que les parties requérantes prétendent subir ne résulte pas du décret attaqué lui-même, mais bien des décisions ultérieures, à savoir les permis d'urbanisme du 18 mars 2002 et le décret de confirmation du 29 mars 2002.

De surcroît, le G.H.A. considère que les parties requérantes ne justifient pas d'un intérêt dans la mesure où leur requête est dirigée aussi contre les dispositions du décret attaqué autres que celles prévoyant la possibilité de compenser les préjudices environnementaux.

Quant à la capacité d'agir et à l'intérêt de la partie intervenante A.3. Le G.H.A. déclare qu'il dispose de la capacité d'agir requise et qu'il a décidé d'agir, conformément à ses statuts.

Le G.H.A. est titulaire d'un certain nombre de permis d'urbanisme délivrés, en application du décret attaqué, le 18 mars 2002. En tant qu'instance responsable de la gestion et de l'exploitation du port d'Anvers et en tant que titulaire de l'autorisation pour la poursuite de l'aménagement du « Deurganckdok », le G.H.A. a de toute évidence un intérêt à intervenir dans les procédures de suspension et d'annulation du décret attaqué.

Quant au sérieux des moyens Affaire n° 2392 A.4.1. Les parties requérantes estiment que le décret du 14 décembre 2001 viole les articles 10 et 11 de la Constitution, combinés ou non avec d'autres dispositions du droit national ou international et avec les règles répartitrices de compétences.

A.4.2. Le G.H.A. souligne que les catégories de personnes entre lesquelles une inégalité est alléguée doivent être comparées l'une avec l'autre. Les catégories de personnes à comparer sont, d'une part, les personnes qui sont confrontées à des travaux d'intérêt général réalisés en suivant les règles normales de procédure, et, d'autre part, les personnes qui sont confrontées à des travaux d'intérêt général visés dans le décret attaqué. En tant que cette dernière catégorie est comparée aux personnes qui sont confrontées à des travaux qui ne sont pas des travaux d'intérêt général, il ne s'agit pas de catégories comparables. Le Gouvernement flamand et le G.H.A. ne peuvent pas non plus être comparés avec des demandeurs de permis privés. C'est précisément en raison du caractère non comparable que le décret relatif à l'aménagement du territoire, coordonné le 22 octobre 1996, a prévu une procédure d'autorisation particulière pour les demandes introduites par des personnes morales de droit public ou pour des travaux d'utilité publique. Actuellement, l'article 127 du nouveau décret relatif à l'aménagement du territoire prévoit une procédure spéciale similaire. Selon le G.H.A., les catégories visées ne sont donc pas suffisamment comparables et le principe d'égalité ne saurait être violé en l'espèce.

A.5.1. Dans un premier moyen, les parties requérantes allèguent que le décret attaqué et en particulier ses articles 3, 5, 6 et 8 violent les articles 10 et 11 de la Constitution, parce que le Gouvernement flamand est autorisé à délivrer des permis d'urbanisme en contradiction avec le plan de secteur. Le décret attaqué prévoit également la possibilité de confirmer ces permis d'urbanisme qui auront été délivrés, de sorte que c'est par décret et donc pas conformément à la procédure normale qu'une modification du plan de secteur est réalisée. Il n'existe, pour cette dérogation au droit commun en matière d'aménagement du territoire, aucun critère objectif de distinction ni but légitime. Selon les parties requérantes, les effets du décret attaqué doivent tout au moins être considérés comme disproportionnés à l'objectif que poursuit le législateur décrétal.

A.5.2. Le Gouvernement flamand observe que le premier moyen manque en fait à divers titres. Le décret attaqué ne modifie pas un plan de secteur. Il est seulement autorisé, lors de l'octroi de permis, de déroger aux affectations prévues dans les plans d'aménagement, de sorte que le plan d'affectation auquel il est dérogé demeure inchangé.

Le décret attaqué prévoit une procédure sui generis et la question de droit posée est de savoir si cette procédure dérogatoire est justifiée à la lumière du principe d'égalité. Selon le Gouvernement flamand, qui fait amplement référence aux travaux préparatoires, la distinction opérée par le décret attaqué peut être justifiée par des circonstances exceptionnelles et des « raisons impératives d'intérêt public majeur », en particulier les effets économiques et budgétaires et les travaux de sécurité, et le législateur décrétal n'a pas usé de manière (manifestement) déraisonnable de son pouvoir discrétionnaire d'appréciation. Il appartient en effet au législateur d'apprécier souverainement l'intérêt général. Cette appréciation s'opère en premier lieu sous contrôle politique et ensuite, dans les limites du contrôle marginal, sous le contrôle du juge, lequel exerce toutefois exclusivement un contrôle de légalité et non un contrôle politique d'opportunité.

Le Gouvernement flamand souligne enfin que la différence entre la procédure ordinaire et la procédure d'exception contenue dans le décret attaqué peut parfaitement être comparée à la protection des dunes prévue par le décret de la Région flamande du 14 juillet 1993 « portant des mesures de protection des dunes côtières ». La Cour a considéré que la procédure d'exception contenue dans ce dernier décret n'était pas contraire aux articles 10 et 11 de la Constitution.

A.5.3. Le G.H.A. examine, à la lumière des articles 10 et 11 de la Constitution, chacun des articles du décret du 14 décembre 2001 attaqués dans le premier moyen, à savoir les articles 3, 5, 6, alinéa 1er, 6, alinéa 2, et 8 du décret précité. Faisant référence aux travaux préparatoires et à la jurisprudence de la Cour, le G.H.A. estime que chacun de ces articles résiste au contrôle au regard du principe d'égalité.

Selon le G.H.A., le décret attaqué vise à ce que les travaux au « Deurganckdok » soient repris le plus rapidement possible et la procédure suivie à cette occasion procure un avantage considérable en temps, qui est de nature à contribuer à la réalisation rapide des objectifs économiques, budgétaires, écologiques et de sécurité du législateur décrétal. A cet égard, le champ d'application de la procédure est limité tant en ce qui concerne les travaux et les mesures qui peuvent être autorisés, que dans le temps. Grâce à la confirmation décrétale, le législateur décrétal peut exercer un contrôle sur le respect notamment du nouveau décret relatif à l'aménagement du territoire ainsi que des directives concernant les oiseaux et les habitats naturels. Enfin, une mesure qui permet de déroger aux prescriptions des plans d'aménagement n'est nullement exceptionnelle.

A.6.1. Les parties requérantes font valoir, comme deuxième moyen, que le décret attaqué et en particulier ses articles 2, 3, 5 et 8 violent les articles 10 et 11 de la Constitution, combinés avec la répartition constitutionnelle des compétences entre les pouvoirs législatif et exécutif, laquelle est notamment formulée dans les articles 33, 36, 37, 39, 115, § 2, et 121, § 2, de la Constitution, ainsi qu'avec l'interdiction du détournement de pouvoir. Les parties requérantes estiment que le législateur décrétal s'arroge des compétences qui appartiennent au pouvoir exécutif, à savoir aménager le territoire et déclarer d'intérêt général des travaux, sans que cette appropriation de compétences soit justifiée par un motif légitime ou repose sur un critère objectif ou soit au moins proportionnée.

A.6.2. Le Gouvernement flamand affirme que le deuxième moyen n'est pas recevable, d'une part, parce que la Cour n'est pas compétente pour connaître des moyens pris de la violation de la répartition des compétences entre les pouvoirs législatifs et exécutifs et, d'autre part, faute d'un exposé concernant la violation du principe d'égalité.

Selon le Gouvernement flamand, le deuxième moyen est de toute façon non fondé, parce qu'il n'existe aucune règle en vertu de laquelle « aménager le territoire » et « déclarer d'intérêt général des travaux » seraient une compétence réservée au pouvoir exécutif. Les parties requérantes omettent de démontrer pourquoi ces compétences devraient essentiellement appartenir au pouvoir exécutif, dès lors que le pouvoir législatif incarne à tous égards la souveraineté et dispose d'une compétence résiduaire.

Pour autant qu'il serait admis que le deuxième moyen dénonce de manière recevable une inégalité de traitement, celui-ci n'est rien d'autre, selon le Gouvernement flamand, qu'une paraphrase du premier moyen.

A.6.3. Selon le G.H.A. aussi, le deuxième moyen n'est pas recevable, puisque la répartition des compétences entre le pouvoir exécutif et le pouvoir « décrétal » ne constitue pas une règle constitutionnelle répartitrice de compétences dont la Cour pourrait contrôler le respect et que cette répartition de compétences ne peut pas non plus être considérée comme une règle d'égalité.

En ordre subsidiaire, le G.H.A. observe que l'article 2 du décret attaqué ne viole pas le principe constitutionnel d'égalité ni les autres dispositions constitutionnelles invoquées par les parties requérantes.

A.7.1. Les parties requérantes allèguent, comme troisième moyen, que le décret attaqué et en particulier ses articles 3, 5, 6, alinéa 2, et 8 violent les articles 10 et 11 de la Constitution, combinés avec la répartition constitutionnelle des compétences entre le pouvoir législatif, d'une part, et le pouvoir judiciaire et le Conseil d'Etat, d'autre part, telle que cette répartition ressort notamment des articles 33, 36, 39, 40, 115, § 2, et 160 de la Constitution, avec les articles 13 et 160 de celle-ci, avec les articles 6, 13 et 14 de la Convention européenne des droits de l'homme et avec l'interdiction du détournement de pouvoir. Selon les parties requérantes, le décret attaqué intervient « volontairement et sciemment » dans une série de procédures pendantes, dans le but de « bloquer » les demandes qu'elles contiennent, et cela sans aucune justification raisonnable. En outre, la Région flamande s'érige en « juge de sa propre cause » et le droit d'accès au juge est limité de manière discriminatoire.

A.7.2. Le Gouvernement flamand observe que le troisième moyen manque en fait en tant qu'il est reproché au législateur décrétal d'intervenir dans des procédures judiciaires pendantes. Le décret attaqué ne confirme aucun acte juridique attaqué devant une instance juridictionnelle. Il ne porte pas non plus atteinte à des décisions juridictionnelles coulées en force de chose jugée. Il prévoit seulement que des actes administratifs futurs, qui ne font encore l'objet d'aucun litige, seront confirmés par décret, ce qui a pour effet que ne seront ouvertes contre eux que les actions qui peuvent être intentées contre des décisions ayant force de loi. Ces décisions ne sont pas soustraites au contrôle juridictionnel : ce sont seulement d'autres mécanismes de contrôle qui trouvent à s'appliquer. Ainsi que la Cour l'a déjà jugé, ceci est lié à la différence objectivement justifiée, en matière de contrôle, entre les actes législatifs et les actes administratifs. Les parties requérantes ne sont pas non plus privées de leur droit à un recours effectif.

Il n'est pas question de « régularisation » ou de « validation » d'actes administratifs illégaux, ni d'illégalités constatées par le Conseil d'Etat. Dans le décret attaqué, il est seulement question d'une confirmation organisée a priori par le pouvoir législatif, en l'espèce le cas dans lequel le législateur décide, avant même qu'un arrêté d'exécution ait été pris, que les décisions qui seront prises par le pouvoir exécutif devront être approuvées par le législateur.

Une telle procédure de confirmation instaurée préalablement par le législateur n'est, selon la Cour, pas contraire aux articles 10 et 11 de la Constitution.

Le troisième moyen des parties requérantes pourrait, selon le Gouvernement flamand, tout au plus être suivi si la condition de la confirmation décrétale avait exclusivement pour but de faire échec au pouvoir juridictionnel du Conseil d'Etat, c'est-à-dire de nouveau pour la « régularisation » a posteriori de décisions administratives illégales. Ce n'est pas le cas en l'espèce. Le raisonnement des parties requérantes aurait du reste pour effet que les législateurs régionaux et communautaires ne pourraient jamais décider, même préalablement, d'aucune confirmation décrétale de décisions de leurs pouvoirs exécutifs respectifs et ne pourraient dès lors obtenir le renforcement du contrôle parlementaire visé par ces confirmations.

Pour autant qu'il serait admis que le troisième moyen dénonce de manière recevable un traitement inégal, il n'est rien d'autre, selon le Gouvernement flamand, qu'une paraphrase du premier moyen.

A.7.3. Le G.H.A. estime que les parties requérantes confondent l'une des conséquences du régime décrétal - le pouvoir juridictionnel de la Cour d'arbitrage au lieu de celui du Conseil d'Etat - avec les objectifs légitimes réels du législateur décrétal. L'argumentation des parties requérantes manque dès lors en fait en l'espèce.

En outre, prétendre que le législateur décrétal intervient illicitement dans des litiges pendants est erroné dans les faits. Le décret attaqué ne prévoit nullement la confirmation d'actes juridiques attaqués précédemment devant le Conseil d'Etat ou les tribunaux ordinaires ou suspendus par ceux-ci. Le législateur décrétal ne substitue pas non plus, d'une autre manière, son appréciation à celle du Conseil d'Etat ni ne passe outre aux décisions de ce dernier.

La procédure sui generis instaurée par le décret attaqué a certes pour effet que le Conseil d'Etat ne peut plus exercer un contrôle de légalité sur les permis d'urbanisme, mais il est inhérent à toute norme législative que celle-ci doive être attaquée devant la Cour d'arbitrage, ce qui ne signifie toutefois pas que l'on soit privé du droit à un recours juridictionnel. Par ailleurs, conformément à la jurisprudence de la Cour, le législateur décrétal peut instaurer un contrôle sur l'exercice des pouvoirs qu'il a conférés au Gouvernement flamand dans une matière qu'il peut régler lui-même, même lorsque ceci remédie à des litiges pendants.

Selon le G.H.A., c'est en vain que les parties requérantes font référence aux litiges encore pendants en vue de dénoncer « l'objectif réel » du législateur décrétal. Il est inhérent à l'aménagement du territoire que le cadre de référence urbanistique puisse subir des modifications, alors qu'un litige est pendant. Si l'on suivait les parties requérantes, toute modification, par exemple d'un plan de secteur, devrait être considérée comme une ingérence illicite dans le pouvoir de décision des juridictions. Pourtant, une telle modification n'est que le signe du caractère évolutif de l'aménagement du territoire.

A.8.1. Les parties requérantes allèguent, dans un quatrième moyen, que le décret attaqué et en particulier ses articles 3, 5, 6, alinéa 1er, et 8 violent les articles 10 et 11 de la Constitution combinés avec les articles 16, 22 et 23 de celle-ci, avec les articles 8 et 14 de la Convention européenne des droits de l'homme et avec l'article 1er du Premier Protocole additionnel à cette Convention, en ce que le décret attaqué contient une atteinte « inimaginable » au droit de propriété, à l'environnement et à la vie privée, alors que ces droits sont des droits fondamentaux protégés. Il s'agit d'une limitation discriminatoire de droits fondamentaux, qui n'est pas le fait d'une loi, au sens de règle générale, ni n'est justifiée par un motif légitime, ou qui doit tout au moins être considérée comme disproportionnée.

A.8.2. Selon le Gouvernement flamand, le quatrième moyen est irrecevable faute pour la Cour de pouvoir connaître des moyens pris de la violation directe de l'article 14 de la Convention européenne des droits de l'homme et des autres dispositions invoquées au moyen, d'une part, et faute d'un exposé concernant la violation du principe d'égalité, d'autre part.

Selon le Gouvernement flamand, le quatrième moyen manque en fait et est en tout cas non fondé, parce qu'aucun droit fondamental n'est absolu. Le moyen manque aussi en fait en tant qu'il considère que le décret attaqué serait une mesure purement individuelle, puisqu'il est applicable in abstracto à un nombre indéterminé de cas.

Pour autant qu'il serait admis que le quatrième moyen dénonce de manière recevable un traitement inégal, il n'est rien d'autre, selon le Gouvernement flamand, qu'une paraphrase du premier moyen.

A.8.3. Selon le G.H.A. aussi, le quatrième moyen est irrecevable puisqu'il n'est pas conçu comme un moyen pris de la violation du principe constitutionnel d'égalité ou d'une autre règle constitutionnelle répartitrice de compétences.

En ordre subsidiaire, le G.H.A. estime que le quatrième moyen n'est pas fondé. L'aménagement du territoire peut en effet impliquer, en toute légalité, des restrictions du droit de propriété. Les restrictions de ce genre qui sont imposées par les autorités sont permises si elles respectent un juste équilibre entre l'intérêt général de la société et la protection des droits fondamentaux de l'individu. Selon le G.H.A., le décret attaqué constitue un exercice d'équilibre qui garantit l'environnement des parties requérantes en déclarant d'intérêt général et stratégique majeur et impérieux les compensations des préjudices environnementaux.

A.9.1. Dans un cinquième moyen, les parties requérantes dénoncent la violation, par le décret attaqué et en particulier par ses articles 3, 5, 6 et 8, des articles 10 et 11 de la Constitution, combinés avec l'interdiction du détournement de pouvoir et avec les principes de bonne législation et plus précisément le principe de la confiance et le principe objectif de la sécurité juridique. Selon les parties requérantes, le décret attaqué porte atteinte de manière disproportionnée à leur confiance dans l'affectation de leur région et de leur milieu de vie. Le législateur décrétal autorise et confirme dans le seul et unique but d'éviter que les permis d'urbanisme et les modifications d'affectation doivent être soumis au Conseil d'Etat. Les parties requérantes observent en outre que si elle déroge par décret aux affectations fixées par le plan de secteur ou par les plans d'exécution spatiaux et rend ainsi ces affectations inopérantes, l'autorité trompe la confiance légitime et porte atteinte au principe de la sécurité juridique.

A.9.2. Le Gouvernement flamand déclare que le cinquième moyen est irrecevable, faute pour la Cour de pouvoir connaître des moyens pris de la violation directe du principe de la sécurité juridique, d'une part, et faute d'un exposé concernant la violation du principe d'égalité, d'autre part.

En outre, le cinquième moyen manque en fait, selon le Gouvernement flamand, parce que le décret attaqué ne modifie en rien l'affectation des parcelles concernées et qu'il n'est pas question, sur le plan de la sécurité juridique, d'un traitement inégal de différentes catégories de citoyens. En effet, la procédure dérogatoire d'urgence utilisée en l'espèce ne porte pas davantage atteinte aux éventuelles attentes des intéressés que l'autre branche de l'alternative, c'est-à-dire l'application des « procédures standard ». En l'absence d'un décret d'urgence, l'affectation antérieure ne devrait pas davantage être maintenue. Mais même si le décret attaqué modifiait l'affectation des parcelles concernées, il n'en résulterait pas ipso facto, selon le Gouvernement flamand, une violation du principe de la sécurité juridique. On ne peut déduire du principe de la sécurité juridique que toutes les situations existantes, a fortiori en matière d'aménagement du territoire, doivent être maintenues définitivement.

A.9.3. Selon le G.H.A. aussi, le cinquième moyen est irrecevable parce qu'il est tiré seulement des principes de la sécurité juridique et de la confiance légitime, lesquels ne constituent pas des principes constitutionnels autonomes.

En ordre subsidiaire, le G.H.A. estime que les parties requérantes n'articulent pas vraiment, dans l'exposé du cinquième moyen, d'autres arguments que ceux déjà avancés précédemment. Il suffit par conséquent de renvoyer à la réfutation par le G.H.A. des moyens précédents. Du reste, un plan de secteur peut être modifié à tout instant et les travaux qui font l'objet du décret attaqué cadrent avec la poursuite légalement décidée de l'extension à long terme du port d'Anvers et de la zone de la rive gauche de l'Escaut.

A.10.1. Les parties requérantes allèguent, dans un sixième moyen, que le décret attaqué et en particulier ses articles 3, 5, 6, alinéa 1er, et 8 violent les règles constitutionnelles répartitrices de compétences, combinées avec l'article 160 de la Constitution, parce que la Région flamande n'est pas compétente pour restreindre ou supprimer les attributions du Conseil d'Etat. Selon elles, le décret attaqué revient en fait à modifier de façon implicite notamment l'article 14 des lois coordonnées sur le Conseil d'Etat, ce qui est toutefois une compétence purement fédérale.

A.10.2. Selon le Gouvernement flamand, le sixième moyen manque en fait, dès lors qu'aucune disposition du décret attaqué ne vise à limiter la compétence du Conseil d'Etat. Le Conseil d'Etat demeure pleinement compétent, conformément aux règles fédérales existantes.

En ordre subsidiaire, le Gouvernement flamand estime que le sixième moyen n'est rien d'autre qu'une paraphrase du troisième.

A.10.3. Le G.H.A. estime que les parties requérantes n'articulent pas vraiment des arguments nouveaux dans l'exposé du sixième moyen. Il suffit par conséquent de renvoyer à la réfutation par le G.H.A. des moyens précédents, et en particulier du troisième moyen.

Le législateur décrétal peut du reste régler la matière, ce qui implique de manière inhérente que les normes concernées peuvent être attaquées devant la Cour d'arbitrage et non devant le Conseil d'Etat.

Ce seul fait ne constitue pas une ingérence prohibée dans les règles de compétence relatives au Conseil d'Etat.

A.11.1. Dans un septième et dernier moyen, les parties requérantes dénoncent la violation par le décret attaqué, et en particulier par son article 5, des articles 10 et 11 de la Constitution combinés avec l'article 10 du Traité C.E. et avec l'article 6 de la directive 92/43/CEE du 21 mai 1992 concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages.

L'article 10 du Traité C.E. interdit aux Etats membres de prévoir, dans une procédure juridictionnelle dans laquelle est invoquée la violation du droit communautaire européen, une protection juridique moindre que dans les autres procédures devant les autres juridictions.

En outre, le Gouvernement flamand ne peut faire une exception en se basant sur l'article 6 de la directive 92/43/CEE, parce que cette dérogation n'est possible qu'après que la zone a été désignée comme zone spéciale de conservation et après que la directive a été transposée dans la législation nationale, ce qui, après 22 ans, n'a pas encore été fait.

A.11.2. Le Gouvernement flamand déclare que le septième moyen est irrecevable, faute pour la Cour d'arbitrage de pouvoir connaître des moyens pris de la violation directe du droit communautaire européen, d'une part, et faute d'un exposé concernant la violation du principe d'égalité, d'autre part.

En ordre subsidiaire, le Gouvernement flamand estime que les parties requérantes ne démontrent pas en quoi un décret qui prévoit seulement une procédure - procédure destinée à satisfaire à la directive dont la violation est invoquée - pourrait effectivement violer la directive 92/43/CEE concernant la conservation des habitats naturels, en supposant, dans cette hypothèse, que ladite directive ait en soi effet direct dans l'ordre juridique interne.

Selon le Gouvernement flamand, l'obligation de désignation, imposée par l'article 4 de la directive 92/43/CEE concernant la conservation des habitats naturels, a été respectée et cette directive ainsi que la directive 79/409/CEE concernant la conservation des oiseaux sauvages ont également été correctement transposées, notamment par le décret attaqué. Le législateur décrétal flamand pouvait dès lors valablement invoquer la possibilité de dérogation prévue à l'article 6 de la directive 92/43/CEE. Les droits revenant aux parties requérantes en vertu de cette directive sont garantis et l'obligation de loyauté de l'article 10 du Traité C.E. n'est pas non plus violée.

En ordre extrêmement subsidiaire, le Gouvernement flamand estime que le fait de garantir de manière éventuellement inégale les droits résultant de la directive invoquée ne constituerait pas encore pour autant une garantie discriminatoire au sens de l'article 11 de la Constitution.

A.11.3. Le G.H.A. observe que les parties requérantes n'indiquent pas entre quelles catégories comparables les normes attaquées opèrent une distinction. De même, il n'est pas exposé pour quels motifs cette distinction ne serait pas objective, quel but illégitime serait poursuivi et/ou en quoi les moyens utilisés ne seraient pas pertinents et proportionnés à l'objectif. Il n'est en outre pas précisé de quelle manière la Cour pourrait contrôler le décret attaqué au regard de l'article 6 de la directive concernant la conservation des habitats naturels.

En ordre subsidiaire, le G.H.A. estime que le septième moyen n'est pas fondé, parce que le décret attaqué contient précisément les dispositions nécessaires pour assurer la transposition et l'application des directives sur les oiseaux et sur les habitats naturels, en ce qui concerne la zone dans laquelle le « Deurganckdok » est aménagé. On ne voit dès lors pas pour quels motifs il ne pourrait être fait usage de la dérogation prévue à l'article 6, paragraphe 4, de la directive concernant la conservation des habitats naturels. Si un doute quelconque devait exister quant à la transposition correcte de la directive, la Cour doit utiliser les méthodes d'interprétation du droit interne pour donner au décret attaqué une interprétation conforme à la directive.

Affaire n° 2407 A.12. Les parties requérantes estiment que le décret du 14 décembre 2001 viole les articles 10 et 11 de la Constitution, parce que le traitement inégal auquel le décret donne lieu pour les entreprises agricoles lésées n'est susceptible d'aucune justification raisonnable et qu'il n'existe aucun rapport raisonnable de proportionnalité entre l'objectif poursuivi et les moyens utilisés.

A.13.1. L'égalité garantie par les articles 10 et 11 de la Constitution est menacée, selon les parties requérantes, lorsque les règles normales de procédure en matière d'aménagement du territoire sont abandonnées, de sorte que dans une zone, pour un projet de construction déterminé, des permis d'urbanisme peuvent être délivrés par un décret spécial d'exception. Ce décret fait naître une discrimination injustifiée entre les personnes qui n'habitent pas dans les zones auxquelles le décret est applicable et les personnes qui habitent dans ces zones. Ces dernières voient illégitimement entravé l'exercice normal de leurs droits et libertés garantis par la Constitution.

Le premier droit fondamental que viole le décret attaqué, selon les parties requérantes, est le droit de propriété garanti par l'article 16 de la Constitution et par l'article 1er du Premier Protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme. Les compensations des préjudices environnementaux contenues dans le décret attaqué feront en effet baisser fortement la valeur des terres agricoles.

Le deuxième droit fondamental que viole, selon elles, le décret est la liberté de choisir une profession et d'entreprendre, garantie par l'article 23 de la Constitution. Les compensations des préjudices environnementaux prévues par le décret attaqué imposent en effet de nombreuses restrictions à la liberté d'exploitation de l'agriculteur.

Une troisième violation invoquée par les parties requérantes concerne le manquement à l'article 33 du Traité C.E. Cet article dispose que la politique agricole commune a entre autres pour but d'assurer un niveau de vie équitable à la population agricole, notamment par le relèvement du revenu individuel de ceux qui travaillent dans l'agriculture. En rendant impossible, pour les parties requérantes, le fait d'acquérir des revenus normaux à l'intérieur des régimes agricoles prévus au niveau européen, le décret attaqué porte atteinte à cette garantie européenne.

A.13.2. Le Gouvernement flamand observe que l'article 23 de la Constitution ne garantit nullement la « liberté de choisir une profession et d'entreprendre ». Pour autant que les parties requérantes viseraient par contre la liberté de commerce et d'industrie, cette liberté n'est pas absolue et son éventuelle violation concerne la violation des articles 10 et 11 de la Constitution, de sorte qu'il peut être renvoyé à ce qui a été dit à propos de l'affaire n° 2392.

Concernant la violation alléguée de l'article 33 du Traité C.E., il est évident, selon le Gouvernement flamand, que l'objectif de la « politique agricole commune » formulée dans cette disposition constitue un objectif de politique agricole de l'Union européenne. Même si cette disposition contenait une prescription normative et si le décret attaqué avait en outre des conséquences pour le « niveau de vie équitable de la population agricole », on peut difficilement considérer que le législateur décrétal a violé une norme qui n'est pas applicable.

A.13.3. Le G.H.A. estime que le premier grief, à savoir la violation du droit de propriété, ne repose en fait pas sur la violation du principe d'égalité, en sorte qu'il doit être rejeté comme irrecevable.

En ordre subsidiaire, le G.H.A. réitère ses observations formulées dans l'affaire n° 2392 et conclut que le premier grief n'est pas fondé, parce que le décret attaqué contient notamment un régime spécial d'indemnisation visant à accorder aux propriétaires concernés une indemnité qui corresponde à la perte de valeur de leur terre.

Le deuxième grief, c'est-à-dire la violation de l'article 23 de la Constitution, est aussi irrecevable, selon le G.H.A., parce qu'il ne repose en fait pas sur la violation du principe d'égalité. En ordre subsidiaire, le G.H.A. estime que le deuxième grief manque en fait, parce que l'article 23 de la Constitution ne garantit nullement la « liberté de choisir une profession et d'entreprendre ». Pour autant que les parties requérantes viseraient la liberté de commerce et d'industrie, il convient de souligner que cette liberté n'a nullement une portée absolue.

Concernant le troisième grief, à savoir la violation de l'article 33 du Traité C.E., le G.H.A. estime que celui-ci n'est pas recevable, parce qu'il ne repose en fait pas sur la violation du principe d'égalité. En ordre subsidiaire, le G.H.A. déclare que le troisième grief est non fondé, parce que l'article 33 du Traité C.E. porte sur un objectif de la politique agricole européenne auquel le décret attaqué demeure étranger et qu'il s'agit seulement d'une norme d'intention dont il ne semble pas découler d'obligations concrètes et dans laquelle les parties requérantes ne sauraient en tout cas puiser directement et individuellement des droits. Le décret attaqué prévoit en outre un régime spécial d'indemnisation pour les pertes d'exploitation que certains agriculteurs pourraient éventuellement subir.

A.14.1. Les parties requérantes contestent en outre les mesures unilatérales en matière d'environnement qui sont, pour l'essentiel, mises à charge des terres agricoles, ce qui entrave lourdement l'activité agricole normale et l'exclut même parfois. Des mesures aussi excessives ne sont toutefois aucunement exigées par les directives 79/409/CE et 92/43/CEE, qui partent au contraire de l'idée que l'utilisation traditionnelle de la terre n'est pas incompatible avec la protection des oiseaux et la conservation des habitats.

A.14.2. Selon le Gouvernement flamand, les compensations des préjudices environnementaux attaquées n'ont rien à voir avec les mesures positives de conservation figurant dans les dispositions des directives invoquées par les parties requérantes. Les compensations des préjudices environnementaux découlent de dispositions du décret attaqué qui transposent l'article 6, paragraphe 4, de la directive concernant la conservation des habitats naturels.

A.14.3. Le G.H.A. constate que les parties requérantes ne démontrent pas que le législateur décrétal serait allé déraisonnablement loin en matière de compensations des préjudices environnementaux et qu'il aurait pris ainsi des mesures éventuellement discriminatoires à l'égard des parties requérantes.

Quant au risque de préjudice grave difficilement réparable Affaire n° 2392 A.15. Dans leur demande de suspension, les parties requérantes exposent les faits dont il doit ressortir que l'application immédiate du décret attaqué est susceptible de causer un préjudice grave difficilement réparable.

A.16.1. Au préalable, les parties requérantes font référence à la jurisprudence de la Cour de justice des Communautés européennes, selon laquelle le droit des Etats membres ne peut limiter l'accès au tribunal en édictant des conditions de recevabilité excessives. Ceci vaudrait également pour la condition d'un « préjudice » grave difficilement réparable.

A.16.2. Selon le Gouvernement flamand, on ne peut conclure de cette thèse des parties requérantes que la condition en vertu de laquelle il faut qu'un préjudice grave difficilement réparable existe pour que la Cour d'arbitrage puisse suspendre une norme législative ne serait pas applicable lorsque la demande de suspension est (partiellement) fondée sur des moyens pris de la violation de normes du droit européen. Un tel privilège ne peut certainement pas se déduire de la jurisprudence de la Cour de justice. La Cour de justice exige au contraire que les actions concernant le droit européen soient traitées de la même manière que les actions relatives au droit interne.

A.16.3. Selon le G.H.A., le droit communautaire européen ne prive pas les régimes juridiques nationaux de la possibilité de fixer des exigences qui soumettent l'accès aux juridictions à des conditions sans empêcher une bonne administration de la justice. En outre, la jurisprudence citée par les parties requérantes ne s'applique qu'aux litiges dans lesquels une violation du droit communautaire européen est ou peut être directement alléguée.

A.17.1. Les parties requérantes soulignent que, conformément à l'article 12 du décret attaqué, ce décret entre en vigueur le jour de sa publication au Moniteur belge , c'est-à-dire le 20 décembre 2001. A partir de cette date, le Gouvernement flamand a la possibilité de délivrer des permis d'urbanisme qui dérogent aux affectations fixées par les plans d'aménagement. Après la ratification requise du Parlement flamand, les permis d'urbanisme sont exécutoires le jour qui suit la publication du décret de ratification au Moniteur belge . Dans ces circonstances, ce n'est pas seulement le recours devant le Conseil d'Etat qui est exclu, mais il devient aussi impossible de demander utilement à la Cour d'arbitrage la suspension ou l'annulation du décret de ratification, étant donné que lorsqu'interviendra un éventuel arrêt de suspension ou d'annulation, les travaux seront déjà à ce point avancés que l'effet utile de l'arrêt de la Cour sera fortement atténué et que, pour les parties requérantes, le dommage sera pour une large part déjà concrétisé.

La suspension du décret attaqué entend prévenir qu'un décret de ratification suive, qui rendrait aussi les permis d'urbanisme immédiatement exécutoires.

A.17.2. Les parties requérantes estiment encore que l'adaptation des plans d'exécution spatiaux prescrite d'urgence par les articles 2 et 8 du décret attaqué aboutissent à ce que leurs propriétés deviennent non conformes à la destination de la zone dans laquelle elles sont situées et qu'elles ne peuvent plus effectuer de nouveaux travaux pour lesquels une autorisation est requise. Les bailleurs et les preneurs de terres agricoles sont également directement touchés par le décret attaqué. Leurs terres risquent d'être rehaussées au moyen de boues de dragage et d'être rendues ainsi pour longtemps, sinon définitivement, inutilisables pour l'agriculture. La perte de plusieurs années, dans le cadre de l'exercice d'une profession indépendante, doit être considérée comme un préjudice grave difficilement réparable.

A.17.3. Les parties requérantes soulignent ensuite l'atteinte à leurs conditions de logement, à leur santé, à leur sécurité et à leur environnement : un tel dommage dépasse largement le simple dommage moral que ferait disparaître une annulation.

A l'appui de leurs allégations, les parties requérantes citent plusieurs exemples, tels que : la nécessité de faire un grand détour pour joindre Doel à Kallo; l'accessibilité réduite de Doel en voiture; l'autorisation de travaux portuaires et d'industries à l'intérieur d'un périmètre de 1.800 mètres autour de la centrale nucléaire et l'installation d'activités qui, selon les normes généralement admises, ne peuvent trouver place dans ce périmètre; le risque de voir disparaître l'environnement visuel et agricole au profit d'activités portuaires et de lagunage, qui comportent également un risque pour la pollution du sol et la perturbation du niveau des nappes phréatiques; le danger de rupture de digues et d'inondations; les dégâts importants aux terres de culture, etc. La majorité de ces conséquences n'est, selon les parties requérantes, pas susceptible d'une réparation intégrale dans un délai raisonnable.

A.17.4. Le décret attaqué induit également comme préjudice difficilement réparable que les parties requérantes demeurent privées d'une réelle forme de protection juridique contre l'intervention des autorités flamandes. Tous les préjudices signalés par les parties requérantes seront nés totalement ou partiellement dès que les décisions attaquées de l'autorité auront sorti leurs effets et avant que les requérants auront pu faire valoir la moindre forme de protection juridique contre les permis d'urbanisme et leur ratification.

Non seulement les parties requérantes sont privées de diverses formes de protection juridique préventive, telles que les différentes possibilités de concertation prévues dans le décret du 18 mai 1999 relatif à l'aménagement du territoire et le fait de lier le permis d'urbanisme au permis d'environnement comme le prévoit le décret du 28 juin 1985 « relatif à l'autorisation anti-pollution », mais leur protection juridique a posteriori est également fortement limitée.

A.18.1. Le G.H.A. soutient que le préjudice que les parties requérantes prétendent subir n'est ni individualisé ni concrétisé. Il n'est indiqué en aucune manière, dans la requête, quelle partie requérante subirait un préjudice grave difficilement réparable, de quelle manière et à la suite de quelle disposition du décret attaqué.

A.18.2. Le préjudice allégué, à savoir la perte d'utilité d'une procédure de suspension, résultant du caractère immédiatement exécutoire d'un permis d'urbanisme confirmé par décret, qui ferait progresser trop rapidement les travaux, ne découle pas, selon le G.H.A., du décret attaqué, mais de décisions antérieures et ultérieures. Dans la procédure standard prévue par le décret relatif à l'aménagement du territoire, les permis d'urbanisme octroyés sont aussi immédiatement exécutoires.

A.18.3. Le G.H.A. fait observer que les arguments des parties requérantes, selon lesquels leurs bâtiments seraient rendus non conformes à la destination de la zone, en raison du décret attaqué, et ne pourraient plus subir de modifications, manquent en fait et en droit. Le décret attaqué prévoit seulement que des exceptions peuvent être faites aux plans d'aménagement, mais ne modifie pas ces plans d'aménagement eux-mêmes.

A.18.4. S'agissant de l'atteinte prétendue aux conditions de logement et à l'environnement, le G.H.A. estime que ceci ne peut pas être considéré comme un préjudice grave difficilement réparable. Des effets similaires peuvent résulter de la suppression de chemins vicinaux, de la suppression de passages superflus enjambant les chemins de fer, de la démolition de ponts, bref lors de toute restructuration du réseau routier public.

A.18.5. Concernant l'atteinte prétendue à la protection juridique a posteriori offerte par le Conseil d'Etat, le G.H.A. répète que le décret attaqué ne s'immisce pas dans des procédures pendantes devant le Conseil d'Etat, puisqu'aucun acte administratif déjà attaqué devant celui-ci n'a fait l'objet d'une confirmation décrétale.

Concernant l'atteinte prétendue à la protection juridique préventive, c'est à tort, selon le G.H.A., que les parties requérantes soutiennent que le décret attaqué apporterait des modifications d'affectation sans aucune forme de concertation. Le décret attaqué ne prévoit aucune modification d'affectation, mais autorise seulement à déroger aux affectations prévues dans les plans d'aménagement.

Contrairement à ce que prétendent les parties requérantes, elles pourront bien être associées à l'élaboration des plans d'exécution spatiaux qui, selon le décret attaqué, doivent du reste être établis conformément aux procédures standard qui sont prévues et elles pourront participer aux enquêtes publiques qui seront organisées à cette fin. S'agissant de la dissociation du permis d'urbanisme et du permis d'environnement, celle-ci est justifiée à la lumière des circonstances exceptionnelles et des raisons impératives d'intérêt général qui fondent le décret attaqué. Enfin, le G.H.A. observe que, dans le cadre des permis d'urbanisme du 18 mars 2002 confirmées par décret, les parties requérantes ont bien pu intervenir et que les aspects environnementaux ont été examinés de manière suffisante par une autorité compétente à cette fin.

Affaire n° 2407 A.19. Les parties requérantes demandent la suspension du décret attaqué, étant donné qu'il leur cause un préjudice grave difficilement réparable. Le décret attaqué est à la base des permis d'urbanisme qui ont été délivrés par le Gouvernement flamand le 18 mars 2002 et ont été confirmés par décret du 29 mars 2002.

Etant donné que les travaux seront immédiatement entamés, les parties requérantes seront rapidement confrontées aux conséquences effectives des mesures de compensation des préjudices environnementaux. Elles subiront de ce fait non seulement des préjudices économiques, mais verront aussi gravement limitée leur liberté d'exploiter leurs entreprises, en sorte que les possibilités d'avenir pour les agriculteurs concernés seront gravement menacées.

Un climat d'insécurité est créé qui affecte directement l'exploitation normale et la vie dans les fermes touchées.

A.20. Le G.H.A. fait valoir que le préjudice allégué ne résulte pas directement du décret attaqué. L'aménagement du « Deurganckdok » et la poursuite de l'extension du port d'Anvers ainsi que la réalisation des mesures compensatoires résultent en effet des permis d'urbanisme du 18 mars 2002 confirmés par décret.

En outre, le préjudice que les parties requérantes prétendent subir n'est ni individualisé ni concrétisé. En effet, les parties requérantes ne démontrent pas, par exemple à l'aide de cartes indiquant la situation de leurs entreprises et les mesures compensatoires prévues, de quelle manière ces compensations constitueraient une atteinte à l'exploitation de leurs entreprises. Il n'est nullement indiqué dans la requête quelles parties requérantes subiraient un préjudice grave difficilement réparable, de quelle manière et en quoi consisterait ce préjudice.

Observations du Gouvernement flamand concernant les affaires nos 2392 et 2407 A.21.1. Le Gouvernement flamand estime qu'il n'est pas satisfait à l'article 22, alinéa 1er, de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage. La requête doit exposer, pour chacune des parties requérantes séparément, les faits concrets dont résulte un préjudice grave difficilement réparable, et ce pour chacune des parties du décret attaqué dont la suspension est demandée. La suspension constitue en effet une exception extrêmement lourde de conséquences au principe du privilège du préalable, c'est-à-dire au caractère unilatéralement obligatoire et exécutoire des actes juridiques de droit public, en sorte que les conditions auxquelles elle est soumise sont de stricte interprétation.

Les parties requérantes se bornent, selon le Gouvernement flamand, à énoncer un certain nombre de lieux communs qui sont particulièrement peu concrets et ne permettent en tout cas pas d'évaluer, pour chacune des parties requérantes, l'effet de chacune des parties du décret dont la suspension est demandée.

A.21.2. Le Gouvernement flamand estime en outre que les préjudices invoqués ne sont pas le fait du décret attaqué. Les parties requérantes invoquent des préjudices qui ne sont manifestement pas causés par le décret attaqué, mais tout au plus par des faits et/ou des actes juridiques antérieurs ou postérieurs au décret attaqué, à savoir les travaux déjà effectués en décembre 2001 au « Deurganckdok », les permis d'urbanisme du 18 mars 2002 et la confirmation décrétale de ceux-ci.

Les parties requérantes ne démontrent tout au moins pas que le préjudice invoqué est causé par le décret attaqué et doit donc nécessairement être distingué du préjudice qui est déjà résulté antérieurement et qui découle donc d'autres décisions ou activités que le décret attaqué. - B - B.1. Aux termes de l'article 20, 1°, de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage, deux conditions de fond doivent être remplies pour que la suspension puisse être décidée : - des moyens sérieux doivent être invoqués; - l'exécution immédiate de la règle attaquée doit risquer de causer un préjudice grave difficilement réparable.

Les deux conditions étant cumulatives, la constatation que l'une de ces deux conditions n'est pas remplie entraîne le rejet de la demande de suspension.

Quant au préjudice grave difficilement réparable B.2.1. La Régie portuaire communale d'Anvers (« Gemeentelijk Havenbedrijf Antwerpen », ci-après : le « G.H.A. ») et le Gouvernement flamand estiment que le préjudice allégué par les parties requérantes dans les affaires nos 2392 et 2407 ne peut pas être admis, parce qu'il n'est pas individualisé, ni concrétisé, de sorte qu'il ne serait pas satisfait à l'article 22, alinéa 1er, de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage.

B.2.2. Dans leurs demandes de suspension, les parties requérantes exposent les faits qui, selon elles, sont de nature à établir que l'application immédiate du décret attaqué est susceptible de leur causer un préjudice grave difficilement réparable.

B.2.3. L'exception soulevée par le G.H.A. et le Gouvernement flamand est rejetée.

B.3.1. Le G.H.A. et le Gouvernement flamand considèrent aussi que les préjudices allégués ne résultent pas du décret attaqué lui-même, mais tout au plus de faits et/ou d'actes juridiques antérieurs ou postérieurs au décret attaqué, à savoir les travaux déjà réalisés précédemment au « Deurganckdok », les permis d'urbanisme délivrés le 18 mars 2002 et la confirmation décrétale de ceux-ci le 29 mars 2002, de sorte que les parties requérantes dans les affaires nos 2392 et 2407 ne justifieraient pas de l'intérêt requis.

B.3.2. Le décret attaqué du 14 décembre 2001 constitue le fondement sur la base duquel les permis d'urbanisme accordés ont pu être confirmés le 29 mars 2002 et qui prive les parties requérantes de la possibilité d'attaquer ces permis d'urbanisme devant le Conseil d'Etat.

B.3.3. L'exception soulevée par le G.H.A. et par le Gouvernement flamand est rejetée.

S'agissant de l'affaire n° 2392 B.4.1. Au préalable, les parties requérantes font référence à la jurisprudence de la Cour de justice des Communautés européennes, selon laquelle le droit des Etats membres ne peut limiter l'accès au tribunal en édictant des conditions de recevabilité excessives. Ceci vaudrait aussi, selon elles, pour la condition du préjudice grave difficilement réparable.

B.4.2. Selon cette même jurisprudence, « il appartient à l'ordre juridique interne de chaque Etat membre de désigner les juridictions compétentes et de régler les modalités procédurales des recours en justice destinés à assurer la sauvegarde des droits que les justiciables tirent de l'effet direct du droit communautaire, à condition toutefois que ces modalités ne soient pas moins favorables que celles concernant des réclamations semblables de nature interne (principe d'équivalence) et qu'elles ne soient pas aménagées de manière à rendre en pratique impossible l'exercice des droits reconnus par l'ordre juridique communautaire (principe d'effectivité) » (C.J.C.E., 16 mai 2000, n° C-78/98, Rec., 2000, I, p. 3201).

Les conditions d'une suspension mentionnées au B.1 s'appliquent de la même manière, indépendamment du fait que la demande de suspension concerne ou non le droit communautaire européen. En outre, l'existence de la demande de suspension et du recours en annulation introduits par les parties requérantes démontre que celles-ci ont pu s'adresser à une juridiction, notamment pour éviter de subir un préjudice grave difficilement réparable. Les parties requérantes n'indiquent pas en quoi la procédure à laquelle elles ont recours serait organisée de manière telle qu'elle rendrait impossible l'exercice de droits qui leur seraient attribués par le droit communautaire européen.

Leur grief est tiré des conséquences que pourrait avoir un rejet de leur demande de suspension et non de l'impossibilité de pouvoir la demander. Il se confond avec la preuve du préjudice grave difficilement réparable, exigée par la loi spéciale.

B.5.1. Les parties requérantes allèguent en premier lieu, comme préjudice difficilement réparable, que, conformément à son article 12, le décret attaqué du 14 décembre 2001 entre en vigueur le jour de sa publication au Moniteur belge , c'est-à-dire le 20 décembre 2001. A partir de cette date, le Gouvernement flamand a la possibilité de délivrer des permis d'urbanisme qui dérogent aux affectations prévues par les plans d'aménagement. Après leur nécessaire confirmation par le Parlement flamand, les permis d'urbanisme sont exécutoires le jour suivant la publication du décret de confirmation au Moniteur belge .

Dans ces circonstances, expliquent les parties requérantes, ce n'est pas seulement l'introduction d'un recours devant le Conseil d'Etat qui est exclue, mais il devient aussi impossible de demander utilement à la Cour de suspendre ou d'annuler le décret de confirmation, étant donné que lorsqu'interviendra un éventuel arrêt de suspension ou d'annulation, les travaux seront déjà à ce point avancés que l'effet utile de l'arrêt de la Cour sera fortement atténué et que le dommage, pour les parties requérantes, sera pour une large part déjà concrétisé. Les parties requérantes estiment en particulier que la suspension du décret attaqué permettrait d'éviter qu'un décret de confirmation suive, qui rendrait les permis d'urbanisme exécutoires.

B.5.2. Le décret attaqué ayant été publié au Moniteur belge du 20 décembre 2001 et les parties requérantes, ayant introduit leur demande de suspension le 18 mars 2002, une éventuelle suspension ne pourra empêcher le préjudice allégué par les parties requérantes, puisque, dans l'intervalle, des permis d'urbanisme ont été délivrés pour presque tous les travaux subordonnés à l'octroi d'un tel permis et ont été confirmés par le décret de la Région flamande du 29 mars 2002 « portant confirmation des autorisations urbanistiques accordées par le Gouvernement flamand le 18 mars 2002 en application du décret du 14 décembre 2001 pour quelques permis de bâtir auxquels s'appliquent des raisons obligatoires de grand intérêt [public] ». En application de l'article 6 du décret attaqué, cette confirmation a pour effet que les permis d'urbanisme précités sont devenus exécutoires le 31 mars 2002, soit le jour suivant la publication du décret de confirmation du 29 mars 2002 au Moniteur belge du 30 mars 2002.

B.5.3. Une suspension par la Cour doit permettre d'éviter qu'un préjudice grave résulte pour les requérants de l'application immédiate de la norme entreprise, préjudice qui ne pourrait être réparé ou qui pourrait difficilement être réparé par l'effet d'une annulation éventuelle. En outre, une demande de suspension ne peut pas être accueillie lorsqu'elle concerne un préjudice déjà réalisé.

B.5.4. En ce qui concerne la « crique [à la hauteur] du Paardenschor », il ressort des déclarations faites à l'audience que le permis d'urbanisme requis n'a pas encore été délivré selon la procédure prévue dans le décret attaqué, mais aucune des parties requérantes dans l'affaire n° 2392 ne démontre qu'un préjudice grave difficilement réparable lui sera causé lorsque l'article 2, 5°, c), du décret attaqué sera exécuté.

B.5.5. Il n'y a donc pas lieu d'accueillir la demande de suspension en ce qui concerne le préjudice invoqué au B.5.1.

B.6.1. Les parties requérantes font valoir en deuxième lieu comme préjudice grave difficilement réparable que l'adaptation des plans d'exécution spatiaux prescrite d'urgence par les articles 2 et 8 du décret attaqué a pour effet que leurs propriétés deviennent non conformes à la destination de la zone dans laquelle elles sont situées et qu'elles ne pourront plus exécuter de nouveaux travaux soumis à l'octroi d'un permis. Les bailleurs et les preneurs de terres agricoles sont également directement touchés par le décret attaqué.

Leurs terres risquent d'être rehaussées par des boues de dragage et d'être rendues ainsi pour longtemps, sinon définitivement, inutilisables pour l'agriculture. La perte de plusieurs années d'exercice d'une profession indépendante doit être considérée, selon les parties requérantes, comme un préjudice grave difficilement réparable.

Les parties requérantes soulignent en troisième lieu l'atteinte à leurs conditions de logement, à leur santé, à leur sécurité et à leur environnement : un tel dommage dépasse largement le simple dommage moral que ferait disparaître une annulation.

B.6.2. Le G.H.A. fait observer que les arguments des parties requérantes, selon lesquels leurs bâtiments seraient rendus non conformes à la destination de la zone en raison du décret attaqué et ne pourraient plus subir de transformations, manquent en fait et en droit, le décret attaqué prévoyant seulement qu'il peut être dérogé aux plans d'aménagement, mais ne modifiant pas ces plans eux-mêmes.

Le G.H.A. estime en outre que les effets de l'atteinte prétendue aux conditions de logement et à l'environnement peuvent survenir aussi lors de toute restructuration du réseau routier public.

B.6.3. Certains préjudices allégués par les parties requérantes peuvent être considérés comme graves.

B.6.4. Il résulte toutefois de l'emploi du mot « peut » à l'article 19 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage que la Cour, même si elle juge qu'il est satisfait aux deux conditions de fond de l'article 20, 1°, pour pouvoir procéder à la suspension, n'est pas tenue de suspendre. La Cour examine donc s'il se justifie de procéder à la suspension du décret attaqué, en faisant la balance des avantages qu'une suspension procurerait aux parties requérantes et des inconvénients qu'une telle suspension entraînerait pour l'intérêt général.

B.6.5.1. A l'article 2 du décret attaqué, le législateur décrétal a déclaré « de grand intérêt général et stratégique obligatoire » une série de travaux, d'opérations et d'aménagements destinés à agencer et à rendre opérationnel le « Deurganckdok » et il a considéré que les permis d'urbanisme nécessaires à cette fin devaient être délivrés, par dérogation à certaines règles, sous certaines conditions et sous son contrôle (article 5).

B.6.5.2. Les motifs pour lesquels le législateur décrétal a agi de cette manière ont été exposés de manière détaillée au cours des travaux préparatoires du décret attaqué (Doc., Parlement flamand, 2001-2002, n° 872/1, pp. 1-16; n° 872/5, pp. 6-7, 9 et 19-27) et peuvent être résumés comme suit : - le « Deurganckdok » est considéré comme un projet stratégique pour la Région flamande, dont la réalisation a été décidée depuis longtemps déjà et dont l'exécution a été entamée mais a été arrêtée après que des irrégularités dans la procédure administrative eurent été constatées; - le projet revêt une très grande importance, tant du point de vue social, collectif et économique que du point de vue écologique et du point de vue de l'aménagement du territoire, et il doit être réalisé et rendu opérationnel sans délai; - l'intérêt social réside dans les effets sur l'emploi qui sont censés liés à la réalisation dudit projet et à la perte d'emplois en cas de non-exécution de celui-ci; il concerne également l'aspect de la sécurité après l'arrêt des travaux; - l'intérêt économique concerne aussi bien les conséquences économiques et budgétaires de l'arrêt des travaux (dont le coût direct est estimé à 9,4 millions de francs par jour et le coût total à au moins 18,4 millions de francs par jour) que la perte d'attractivité du port d'Anvers pour le transport par conteneurs si le projet n'est pas réalisé; - l'intérêt pour la collectivité tient à l'économie escomptée en matière de mobilité; - l'intérêt écologique tient à l'obligation de réaliser conjointement les mesures compensatoires des préjudices environnementaux imposée par la directive 79/409/CEE du 2 avril 1979 concernant la conservation des oiseaux sauvages et la directive 92/43/CEE du 21 mai 1992 concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages.

B.6.5.3. Le décret attaqué poursuit des objectifs à ce point importants pour la collectivité qu'une suspension de ce décret risquerait de causer à l'intérêt général et à l'intérêt de tiers un préjudice plus grave et plus difficilement réparable que celui que son exécution immédiate pourrait causer aux parties requérantes.

B.6.6. Il n'y a donc pas lieu d'accueillir la demande de suspension en ce qui concerne les préjudices invoqués au B.6.1.

B.7.1. En quatrième et dernier lieu, les parties requérantes font valoir que le décret attaqué engendre également comme préjudice grave difficilement réparable le fait qu'elles demeureront privées d'une forme effective de protection juridique contre l'intervention des autorités flamandes.

B.7.2. Le G.H.A. estime que le décret attaqué ne porte pas atteinte à la protection juridique a posteriori, parce que le décret ne s'immisce pas dans des procédures pendantes devant le Conseil d'Etat puisqu'aucun acte administratif déjà attaqué devant celui-ci n'a fait l'objet d'une confirmation décrétale. Selon le G.H.A., le décret attaqué ne porte pas non plus atteinte à la protection juridique préventive parce que, selon le décret, les procédures prévues dans le décret du 18 mai 1999 portant organisation de l'aménagement du territoire sont applicables.

B.7.3.1. S'agissant de la protection juridique a posteriori, la confirmation, prévue par l'article 5 du décret attaqué, des permis d'urbanisme visés à l'article 3 du même décret a certes pour effet que ces permis ne peuvent plus faire l'objet d'une demande de suspension ni d'un recours en annulation devant le Conseil d'Etat. Par contre, le décret confirmant les permis visés pourra être attaqué devant la Cour par une demande de suspension et un recours en annulation, de sorte que les parties requérantes ne sont pas privées de leur droit à une protection juridictionnelle effective. Dans les limites de l'examen auquel la Cour a pu se livrer dans le cadre de la demande de suspension, il n'apparaît pas davantage que le décret attaqué intervienne dans des affaires pendantes.

B.7.3.2. S'agissant de la protection juridique préventive, la Cour observe que l'article 3, alinéa 2, du décret attaqué dispose que les permis et avis visés à l'alinéa 1er de cette disposition sont demandés et, sauf les dispositions de l'alinéa 1er, traités suivant les procédures existantes. Le décret attaqué ne déroge donc pas aux diverses possibilités de consultation prévues par le décret précité du 18 mai 1999 en ce qui concerne l'octroi des permis.

B.7.4. Il n'y a donc pas lieu d'accueillir la demande de suspension en ce qui concerne le préjudice visé au B.7.1.

Concernant l'affaire n° 2407 B.8.1. Les parties requérantes demandent la suspension du décret attaqué parce que celui-ci constitue la base des permis d'urbanisme qui ont été délivrés le 18 mars 2002 par le Gouvernement flamand et qui ont été confirmés par le décret du 29 mars 2002, et parmi lesquels se trouvent aussi les permis concernant les mesures compensatoires des préjudices environnementaux. Etant donné que les travaux seront immédiatement entamés en vertu des articles 6 et 7 du décret attaqué, les parties requérantes seront confrontées dans les semaines à venir aux conséquences effectives des mesures compensatoires des préjudices environnementaux. Selon elles, elles subiront de ce fait non seulement des préjudices économiques mais verront aussi très gravement limitée leur liberté d'exploiter leur entreprise, en sorte que les possibilités d'avenir pour les agriculteurs concernés seront gravement menacées. Un climat d'insécurité serait ainsi créé qui affecterait directement la gestion normale des entreprises et l'exploitation agricole.

B.8.2. Les préjudices invoqués par les parties requérantes concernent les mesures compensatoires des préjudices environnementaux que le législateur décrétal a jugé devoir prendre pour se conformer aux exigences des directives 79/409/CEE et 92/43/CEE déjà mentionnées en B.6.5.2.

B.8.3. L'examen auquel la Cour a pu procéder dans le cadre de la demande de suspension ne fait pas apparaître que la manière d'agir du législateur décrétal, qui est de prévoir des mesures compensatoires des préjudices environnementaux en vue de se conformer aux directives précitées, soit entachée d'erreur manifeste.

Compte tenu notamment des articles 9 et 10 du décret attaqué, on ne saurait considérer que le préjudice allégué par les parties requérantes puisse l'emporter sur le risque pour l'autorité d'être tenue responsable d'avoir enfreint la réglementation européenne pour n'avoir pas pris simultanément des mesures environnementales compensatoires suffisantes.

B.9. Il n'y a donc pas lieu d'accueillir la demande de suspension.

Par ces motifs, la Cour rejette les demandes de suspension.

Ainsi prononcé en langue néerlandaise et en langue française, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage, à l'audience publique du 26 juin 2002.

Le greffier, P.-Y. Dutilleux.

Le président, A. Arts.

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