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Arrêt De La Cour Constitutionelle
publié le 23 décembre 2000

Arrêt n° 127/2000 du 6 décembre 2000 Numéros du rôle : 1722 et 1954 En cause : les recours en annulation : - des articles 56 à 62 du décret du Parlement flamand du 19 décembre 1998 contenant diverses mesures d'accompagnement du budget 1999 - des articles 30 à 36 du décret du Parlement flamand du 22 décembre 1999 contenant diverses mesure(...)

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2000021589
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COUR D'ARBITRAGE


Arrêt n° 127/2000 du 6 décembre 2000 Numéros du rôle : 1722 et 1954 En cause : les recours en annulation : - des articles 56 à 62 du décret du Parlement flamand du 19 décembre 1998 contenant diverses mesures d'accompagnement du budget 1999, - des articles 30 à 36 du décret du Parlement flamand du 22 décembre 1999 contenant diverses mesures d'accompagnement du budget 2000 introduits par la Fédération royale des transporteurs belges et par la s.a. Hendrickx Frans en Zonen.

La Cour d'arbitrage, composée des présidents G. De Baets et M. Melchior, et des juges P. Martens, A. Arts, R. Henneuse, M. Bossuyt et E. De Groot, assistée de la référendaire B. Renauld, faisant fonction de greffier, présidée par le président G. De Baets, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet des recours a. Par requête adressée à la Cour par lettre recommandée à la poste le 30 juin 1999 et parvenue au greffe le 2 juillet 1999, la Fédération royale des transporteurs belges, dont le siège est établi à 1020 Bruxelles, rue de l'Entrepôt 5A, et la s.a. Hendrickx Frans en Zonen, dont le siège est établi à 2222 Heist-op-den-Berg, Wittegracht 17, ont introduit un recours en annulation des articles 56 à 62 du décret du Parlement flamand du 19 décembre 1998 contenant diverses mesures d'accompagnement du budget 1999 (publié au Moniteur belge du 31 décembre 1998, deuxième édition).

Cette affaire est inscrite sous le numéro 1722 du rôle de la Cour. b. Par requête adressée à la Cour par lettre recommandée à la poste le 19 avril 2000 et parvenue au greffe le 20 avril 2000, la Fédération royale des transporteurs belges, dont le siège est établi à 1020 Bruxelles, rue de l'Entrepôt 5A, et la s.a. Hendrickx Frans en Zonen, dont le siège est établi à 2222 Heist-op-den-Berg, Wittegracht 17, ont introduit un recours en annulation des articles 30 à 36 du décret du Parlement flamand du 22 décembre 1999 contenant diverses mesures d'accompagnement du budget 2000 (publié au Moniteur belge du 30 décembre 1999, deuxième édition).

Cette affaire est inscrite sous le numéro 1954 du rôle de la Cour.

II. La procédure a. L'affaire n° 1722 Par ordonnance du 1er juillet 1999, le président en exercice a désigné les juges du siège conformément aux articles 58 et 59 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage. Les juges-rapporteurs ont estimé n'y avoir lieu de faire application des articles 71 ou 72 de la loi organique.

Le recours a été notifié conformément à l'article 76 de la loi organique, par lettres recommandées à la poste le 1er septembre 1999.

L'avis prescrit par l'article 74 de la loi organique a été publié au Moniteur belge du 10 septembre 1999.

Des mémoires ont été introduits par : - le Conseil des ministres, rue de la Loi 16, 1000 Bruxelles, par lettre recommandée à la poste le 15 octobre 1999; - le Gouvernement flamand, place des Martyrs 19, 1000 Bruxelles, par lettre recommandée à la poste le 18 octobre 1999; - le Gouvernement wallon, rue Mazy 25-27, 5100 Namur, par lettre recommandée à la poste le 18 octobre 1999.

Par ordonnance du 30 novembre 1999, la Cour a prorogé jusqu'au 30 juin 2000 le délai dans lequel l'arrêt doit être rendu.

Les mémoires ont été notifiés conformément à l'article 89 de la loi organique, par lettres recommandées à la poste le 18 janvier 2000.

Des mémoires en réponse ont été introduits par : - le Gouvernement flamand, par lettre recommandée à la poste le 15 février 2000; - les parties requérantes, par lettre recommandée à la poste le 16 février 2000; - le Conseil des ministres, par lettre recommandée à la poste le 17 février 2000; - le Gouvernement wallon, par lettre recommandée à la poste le 17 février 2000. b. L'affaire n° 1954 Par ordonnance du 20 avril 2000, le président en exercice a désigné les juges du siège conformément aux articles 58 et 59 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage. Les juges-rapporteurs ont estimé n'y avoir lieu de faire application des articles 71 ou 72 de la loi organique.

Le recours a été notifié conformément à l'article 76 de la loi organique, par lettres recommandées à la poste le 18 mai 2000.

L'avis prescrit par l'article 74 de la loi organique a été publié au Moniteur belge du 30 mai 2000.

Des mémoires ont été introduits par : - le Conseil des ministres, par lettre recommandée à la poste le 30 juin 2000; - le Gouvernement flamand, par lettre recommandée à la poste le 3 juillet 2000; - le Gouvernement wallon, par lettre recommandée à la poste le 3 juillet 2000.

Ces mémoires ont été notifiés conformément à l'article 89 de la loi organique, par lettres recommandées à la poste le 17 juillet 2000.

Des mémoires en réponse ont été introduits par : - le Conseil des ministres, par lettre recommandée à la poste le 26 juillet 2000; - le Gouvernement wallon, par lettre recommandée à la poste le 16 août 2000; - les parties requérantes, par lettre recommandée à la poste le 17 août 2000. c. Les affaires jointes Par ordonnance du 3 mai 2000, la Cour a joint les affaires. Par ordonnance du 31 mai 2000, la Cour a prorogé jusqu'au 30 décembre 2000 le délai dans lequel l'arrêt doit être rendu.

Par ordonnance du 20 septembre 2000, la Cour a constaté que les juges H. Coremans et E. Cerexhe, légitimement empêchés, ont été remplacés comme membres du siège respectivement par le juge M. Bossuyt et le juge R. Henneuse, a déclaré les affaires en état et fixé l'audience au 25 octobre 2000.

Cette ordonnance a été notifiée aux parties ainsi qu'à leurs avocats, par lettres recommandées à la poste le 21 septembre 2000.

A l'audience publique du 25 octobre 2000 : - ont comparu : - Me F. Vandendriessche, avocat au barreau de Bruxelles, pour les parties requérantes; - Me P. Peeters, avocat au barreau de Bruxelles, pour le Conseil des ministres; - Me P. Van Orshoven, avocat au barreau de Bruxelles, pour le Gouvernement flamand; - Me J. Bourtembourg, avocat au barreau de Bruxelles, pour le Gouvernement wallon; - les juges-rapporteurs E. De Groot et P. Martens ont fait rapport; - les avocats précités ont été entendus; - les affaires ont été mises en délibéré.

La procédure s'est déroulée conformément aux articles 62 et suivants de la loi organique, relatifs à l'emploi des langues devant la Cour.

III. En droit - A a) Affaire n° 1722 Recevabilité A.1.1. La première partie requérante, la Fédération royale belge des transporteurs (en abrégé FEBETRA), est une union professionnelle agréée dont sont membres quelque 2.500 entreprises de transport. Par son recours, elle souhaite défendre les intérêts de ses membres, conformément à sa mission statutaire, en attaquant des dispositions décrétales qui, selon elle, violent leurs intérêts (collectifs) de manière manifeste et abusive. En effet, les dispositions attaquées instaurent des sanctions pénales pour les dégâts causés aux revêtements des routes par suite de surcharge, ce qui affecte les intérêts financiers et professionnels du secteur du transport par route. Les dispositions entreprises portent en outre atteinte aux intérêts professionnels individuels des transporteurs routiers, en tant que ceux-ci sont soumis à des amendes pénales supplémentaires et à une cotisation de solidarité. En vertu de l'article 10 de la loi du 31 mars 1898Documents pertinents retrouvés type loi prom. 31/03/1898 pub. 11/10/2011 numac 2011000638 source service public federal interieur Loi sur les Unions professionnelles Coordination officieuse en langue allemande fermer sur les unions professionnelles, la FEBETRA peut également ester en justice pour la défense des droits individuels de ses membres.

A.1.2. La seconde partie requérante, la s.a. Hendrickx Frans en Zonen, est une entreprise qui se consacre au transport par route de marchandises. Etant donné que les dispositions décrétales attaquées portent atteinte aux intérêts des transporteurs routiers, la seconde partie requérante considère qu'elle justifie de l'intérêt requis.

A.2.1. Selon le Gouvernement flamand, le recours de la deuxième partie requérante est irrecevable, à défaut de preuve de la publication de ses statuts. Etant donné que cette partie ne produit pas ses statuts, il n'est pas possible de vérifier si la décision d'introduire le recours a été prise par l'organe compétent de la société.

A.2.2. Le Gouvernement flamand estime que les parties requérantes visent au maintien d'une situation illégale, ce qui rend leur intérêt illégitime. Le représentant du secteur des transports par route ou une entreprise de transport n'ont en effet aucun intérêt licite à attaquer une interdiction régionale d'endommager les routes, puisqu'ils ne peuvent pas non plus enfreindre les limites de poids par essieu fixées par l'autorité fédérale.

A.3. Dans son mémoire en réponse, le Gouvernement wallon déclare se rallier au point de vue du Gouvernement flamand selon lequel le recours des parties requérantes n'est pas recevable, faute d'un intérêt légitime.

A.4.1. Dans leur mémoire en réponse, les parties requérantes déclarent qu'elles ne cherchent nullement à maintenir une situation illégale mais à éviter au contraire d'être soumises à des sanctions supplémentaires illégales (voire inconstitutionnelles) que la Région flamande a attachées à la violation d'une interdiction fédérale. Nier l'intérêt des parties requérantes aboutirait, selon celles-ci, à la conséquence absurde que tout recours dirigé contre une sanction supplémentaire, aussi inconstitutionnelle qu'elle soit, devrait être rejetée a priori, faute d'un intérêt légitime.

A.4.2. Les parties requérantes soulignent, pour le surplus, que les statuts de la deuxième partie requérante ont été transmis au greffe de la Cour à la première demande, par lettre du 20 juillet 1999.

A.5. Dans son mémoire en réponse, le Conseil des ministres affirme que le recours est recevable. La première partie requérante justifie de l'intérêt requis en droit, sur la base de l'article 2 de ses statuts et de l'article 10 de la loi du 31 mars 1898Documents pertinents retrouvés type loi prom. 31/03/1898 pub. 11/10/2011 numac 2011000638 source service public federal interieur Loi sur les Unions professionnelles Coordination officieuse en langue allemande fermer sur les unions professionnelles. Les dispositions attaquées sont par ailleurs susceptibles d'affecter directement et défavorablement la situation des deux parties requérantes.

Premier moyen A.6. Le premier moyen est pris de la violation de l'article 134 de la Constitution et des articles 6, § 1er, X, 1°, 6, § 4, 3°, 10 et 11 de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles.

Selon les parties requérantes, les dispositions précitées sont violées en ce que les dispositions décrétales attaquées punissent la transgression de prescriptions techniques relatives aux moyens de communication et de transport, organisent un contrôle sur celles-ci et lient le paiement d'une « cotisation complémentaire » à la violation de ces dispositions, alors que la compétence en matière d'élaboration des règles de police générale et de la réglementation relatives aux communications et aux transports, ainsi qu'aux prescriptions techniques relatives aux moyens de communication et de transport relève exclusivement du législateur fédéral, en vertu de l'article 134 de la Constitution et des articles 6, § 4, 3°, et 11 de la loi spéciale du 8 août 1980. Les parties requérantes estiment que les disposition attaquées ne peuvent s'inscrire dans le cadre des compétences de gestion régionales concernant les routes et leurs dépendances. Elles ne sauraient pas davantage trouver un fondement dans les pouvoirs implicites de la Région flamande, inscrits à l'article 10 de la loi spéciale du 8 août 1980.

A.7.1. Le Gouvernement flamand souligne la ratio legis du règlement flamand en matière de dommages causés au revêtement routier par la surcharge des camions : les « dépassements de charge des essieux » sont la cause d'une importante formation d'ornières et d'autres dommages causés à l'infrastructure routière.

Au départ, le législateur décrétal flamand avait envisagé de compléter la réglementation fédérale relative aux conditions techniques auxquelles doivent répondre les véhicules automobiles. La section de législation du Conseil d'Etat a cependant considéré qu'il était ainsi empiété sur le domaine des « prescriptions techniques relatives aux moyens de communication et de transport », au sens de l'article 6, § 4, 3°, de la loi spéciale du 8 août 1980, qui sont une compétence fédérale. A la suite de cet avis, une réglementation propre a été élaborée en vue de combattre la formation d'ornières sur les routes, réglementation qui ne complète plus la réglementation fédérale en matière de prescriptions techniques relatives aux moyens de communication et de transport mais est exclusivement fondée sur la compétence régionale concernant « les routes et leurs dépendances », au sens de l'article 6, § 1er, X, 1°, de la loi spéciale du 8 août 1980. Le Conseil d'Etat a considéré que cette réglementation autonome pouvait cadrer avec la compétence de la Région flamande. A.7.2. Pour réfuter le premier moyen, il suffit, selon le Gouvernement flamand, de renvoyer à cet avis du Conseil d'Etat. En vertu de l'article 6, § 1er, X, 1°, de la loi spéciale du 8 août 1980, la Région flamande est compétente pour prendre des mesures destinées à combattre les dommages causés à l'infrastructure routière suite à la formation d'ornières et donc, d'une manière générale, pour instaurer une interdiction « de causer des dégâts » au revêtement routier, pour sanctionner pénalement ou administrativement les contraventions à cette interdiction et pour prévoir d'autres mesures d'accompagnement.

Le fait que cette interdiction ne s'applique que quand elle résulte d'un dépassement « [d]es poids maximums autorisés et [d]es poids sous les essieux maximums autorisés comme prévus par les articles 32 et 32bis de l'arrêté royal du 15 mars 1968 » n'y change rien, et signifie encore moins qu'il serait ainsi empiété sur le domaine fédéral des « prescriptions techniques relatives aux moyens de communication et de transport ».

En effet, le dépassement des limites de la charge par essieu fixées par l'autorité fédérale n'est rien de plus qu'une sorte de critère commun à deux matières différentes : la sécurité routière (qui est une compétence fédérale), d'une part, et la préservation des routes (qui est une compétence régionale), d'autre part. Rien n'empêche les régions d'utiliser le critère fédéral, pour autant que puisse être admise l'existence d'un lien raisonnable de proportionnalité entre le dépassement des limitations fédérales de la charge par essieu et les dommages causés aux routes. Selon le Gouvernement flamand, ce lien ressort de la formule utilisée pour convertir une surcharge par essieu en un nombre équivalent de charges d'essieu standard.

Un seul et même fait le dépassement des masses et masses sous les essieux peut donc constituer tout à la fois une infraction aux normes fédérales de sécurité et une infraction aux normes régionales en matière d'infrastructure. La circonstance qu'un tel concours idéal d'infractions peut, en cas de poursuite cumulée, donner lieu à une réduction de la peine en vertu de l'article 65 du Code pénal n'enlève rien au fait qu'il s'agit de deux délits distincts et différents et que l'autorité qui a instauré le second délit ne sanctionne pas le premier.

Compte tenu de ce qui précède, il n'y a pas lieu, selon le Gouvernement flamand, de fonder les dispositions attaquées sur l'article 10 de la loi spéciale du 8 août 1980.

A.8. Le Conseil des ministres fait référence à la jurisprudence de la Cour (arrêts nos 5/96, 68/96 et 2/97) établissant qu'il ressort des articles 6, § 1er, X, et 6, § 4, 3°, lus conjointement, de la loi spéciale du 8 août 1980 que les régions sont compétentes pour régler la gestion des routes et des voies d'eau au sens le plus large du terme, mais que cette attribution de compétence ne comprend pas le pouvoir d'adopter les règles de police générale ou la réglementation relative aux communications et aux transports, compétences qui sont demeurées fédérales, même si les gouvernements de région doivent être associés à leur élaboration. Selon le Conseil des ministres, ce que la Cour a constaté s'agissant des règles de police générale et de la réglementation relatives aux communications et aux transports s'applique pareillement au pouvoir de fixer les prescriptions techniques relatives aux moyens de communication et de transport.

Cette compétence est un élément de la police générale de la circulation routière; elle figure, de surcroît, explicitement à l'article 6, § 4, 3°, de la loi spéciale du 8 août 1980. Il s'agit par conséquent aussi, ajoute le Conseil des ministres, d'une compétence fédérale exclusive.

Les dispositions attaquées ne constituent nullement une réglementation autonome qui relèverait de la compétence des régions pour les « routes et leurs dépendances » mais doivent bel et bien être qualifiées de règlement de police de la circulation routière. La seule circonstance que la réglementation entreprise aurait pour unique finalité d'empêcher que l'on endommage l'infrastructure routière n'enlève rien à ce constat. Le Conseil des ministres estime que la Région flamande ne peut du reste pas davantage invoquer ses pouvoirs implicites.

Le Conseil des ministres conclut que les dispositions décrétales attaquées doivent être annulées pour cause d'excès de compétence.

A.9. Selon le Gouvernement wallon, le moyen manque en droit. Les dispositions attaquées portent en effet exclusivement sur l'interdiction d'endommager le revêtement routier et sur la manière de sanctionner les infractions à cette interdiction. Il ne s'agit donc pas de règles de police générale ou d'une réglementation relatives aux communications et aux transports au sens de l'article 6, § 4, 3°, de la loi spéciale du 8 août 1980. Ce n'est pas l'infraction à la réglementation fédérale en matière de poids des véhicules qui est sanctionnée, mais le fait d'endommager le revêtement routier. Les normes techniques imposées par l'autorité fédérale ne servent, en l'espèce, que de référence. Par ailleurs, la sphère des compétences régionales ne saurait être diminuée du simple fait que des normes fédérales emportent des conséquences favorables dans un domaine de la compétence régionale.

Les dispositions attaquées ayant été prises sur la base des articles 6, § 1er, X, 1°, et 11 de la loi spéciale du 8 août 1980, le législateur décrétal flamand n'avait nullement besoin, selon le Gouvernement wallon, de recourir à l'article 10 de la même loi spéciale.

A.10. Dans leur mémoire en réponse, les parties requérantes affirment que la réglementation litigieuse n'instaure nullement une « réglementation autonome » sanctionnant le fait d'endommager le revêtement routier. Les dispositions attaquées peuvent seulement être définies comme (la sanction frappant le non-respect) des prescriptions techniques en matière de moyens de communication et de transport.

A.11. Dans son mémoire en réponse, le Conseil des ministres déclare que si le but était réellement d'interdire et de sanctionner les dommages causés au revêtement routier, il ne comprend pas pourquoi seul le dépassement des masses maximales autorisées et masses sous les essieux a été retenu comme cause de cet endommagement, à l'exclusion des dommages ayant d'autres causes. Le Conseil des ministres considère dès lors que les dispositions attaquées ont réellement pour objet de sanctionner les infractions aux prescriptions techniques en matière de moyens de communication et de transport, à ceci près que les recettes qui en résultent bénéficient à la Région flamande.

Deuxième moyen A.12. Le deuxième moyen est pris de la violation des articles 10 et 11 de la Constitution.

Les articles 56 à 60 du décret du 19 décembre 1998 instaurent une distinction entre, d'une part, les personnes poursuivies pour infraction à l'article 56 du décret précité devant le tribunal correctionnel qui peut, lors de la fixation de la peine, tenir compte de circonstances atténuantes et, d'autre part, les personnes sanctionnées pour la même infraction par l'infliction de l'amende administrative mentionnée aux articles 59 et 60 du décret précité, pour lesquelles il ne peut être tenu compte de circonstances atténuantes. Selon les parties requérantes, cette distinction n'est pas susceptible d'une justification objective et raisonnable.

La réglementation dénoncée a ainsi pour effet qu'une personne condamnée par le juge pénal du chef d'infraction à l'article 56 peut, par application des circonstances atténuantes, être condamnée à une amende inférieure à l'amende administrative la moins élevée qui puisse être infligée à une personne ayant commis la même infraction mais que l'on n'a pas décidé de poursuivre, en particulier parce que le parquet a estimé que les faits n'étaient pas suffisamment graves pour justifier des poursuites.

Selon les parties requérantes, on ne saurait d'ailleurs raisonnablement justifier cette distinction par le fait que l'infliction d'une amende administrative est moins déshonorante qu'une amende infligée par le juge pénal et que l'amende n'est pas inscrite au casier judiciaire (arrêt n° 40/97).

Les articles 56 à 60 doivent par conséquent être annulés. Il en va de même, selon les parties requérantes, pour les articles 61 et 62, qui sont indissolublement liés aux dispositions décrétales précitées.

A.13.1. Selon le Gouvernement flamand, la condition selon laquelle les parties requérantes doivent justifier d'un intérêt a pour effet que le moyen peut conduire seulement à l'annulation des articles 59 et 60 du décret du 19 décembre 1998. Le grief des requérants porte en effet exclusivement sur l'amende administrative prévue par les dispositions précitées.

A.13.2. Selon le Gouvernement flamand, le moyen n'est pas recevable, étant donné que le grief formulé par les parties requérantes vise en fait une lacune du décret du 19 décembre 1998, lacune qui peut difficilement être annulée. Les parties requérantes dénoncent en effet l'absence d'une règle analogue à celle de l'article 85 du Code pénal, en vertu de laquelle l'amende administrative prévue aux articles 59 et 60 du décret pourrait être réduite au-dessous du minimum, si des circonstances atténuantes pouvaient être retenues.

A.13.3. S'agissant du fond du moyen, le Gouvernement flamand observe tout d'abord que le fait de ne pas pouvoir tenir compte de circonstances atténuantes n'est pas la conséquence nécessaire de la distinction entre la sanction pénale et la sanction administrative d'un même fait. En effet, en vertu de l'article 11, alinéa 1er, de la loi spéciale du 8 août 1980, les régions peuvent déclarer inapplicables les dispositions du livre Ier du Code pénal, y compris donc l'article 85 dudit Code, pour les infractions particulières qu'elles déterminent.

Le Gouvernement flamand considère par ailleurs que la paraphrase de la jurisprudence de la Cour (arrêts nos 40/97 et 45/97) suggérée par les parties requérantes ne tient pas en l'espèce. En effet, les amendes administratives contestées ne sont pas comparables à celles visées dans la loi du 30 juin 1971Documents pertinents retrouvés type loi prom. 30/06/1971 pub. 12/05/2009 numac 2009000304 source service public federal interieur Loi relative aux amendes administratives applicables en cas d'infraction à certaines lois sociales. - Coordination officieuse en langue allemande fermer relative aux amendes administratives applicables en cas d'infraction à certaines lois sociales. Cette loi prévoit un système « alternatif » de sanctions pénales et de sanctions administratives qui fixe, pour les deux types de sanctions, une peine minimale et une peine maximale. Le montant de l'amende administrative visée à l'article 59 du décret du 19 décembre 1998 est au contraire toujours égal à l'amende pénale minimale prévue à l'article 57, augmentée des centimes additionnels. Selon le Gouvernement flamand, il n'est pas manifestement déraisonnable que le système pénal des circonstances atténuantes ne soit pas applicable à l'amende administrative contestée, et cela d'autant moins qu'il est non seulement impossible d'infliger des amendes plus élevées que le minimum pénal mais qu'il n'est en outre pas tenu compte de circonstances aggravantes telles que la récidive légale.

A.14. Le Gouvernement wallon considère que la jurisprudence de la Cour concernant les amendes administratives, contenue dans les arrêts nos 40/97 et 45/97, ne peut utilement être invoquée en l'espèce, en raison des différences qui existent entre les dispositions de la loi du 30 juin 1971Documents pertinents retrouvés type loi prom. 30/06/1971 pub. 12/05/2009 numac 2009000304 source service public federal interieur Loi relative aux amendes administratives applicables en cas d'infraction à certaines lois sociales. - Coordination officieuse en langue allemande fermer visées dans ces arrêts et les dispositions présentement attaquées : - le recours contre la décision du fonctionnaire chargé de prononcer l'amende administrative n'est pas introduit devant le tribunal du travail, comme le prévoient les dispositions de la loi du 30 juin 1971Documents pertinents retrouvés type loi prom. 30/06/1971 pub. 12/05/2009 numac 2009000304 source service public federal interieur Loi relative aux amendes administratives applicables en cas d'infraction à certaines lois sociales. - Coordination officieuse en langue allemande fermer, mais devant le Gouvernement flamand; la procédure reste administrative, même en appel; - le montant de l'amende administrative visée dans les dispositions attaquées est égal à l'amende minimale applicable au pénal; ce montant ne saurait être comparé aux montants élevés fixés par la loi du 30 juin 1971Documents pertinents retrouvés type loi prom. 30/06/1971 pub. 12/05/2009 numac 2009000304 source service public federal interieur Loi relative aux amendes administratives applicables en cas d'infraction à certaines lois sociales. - Coordination officieuse en langue allemande fermer; - les dispositions décrétales attaquées prévoient aussi un certain nombre d'avantages : le fonctionnaire qui a infligé l'amende peut accorder un sursis de paiement dont il fixe le délai (article 60, § 4, alinéa 2) et l'absence de décision du Gouvernement flamand dans les trois mois de l'interjection de l'appel emporte l'annulation de l'amende administrative (article 60, § 3, alinéa 3).

Le Gouvernement wallon estime par conséquent que la catégorie de personnes visée dans les dispositions décrétales attaquées n'est pas comparable à la catégorie de personnes visée dans la loi du 30 juin 1971Documents pertinents retrouvés type loi prom. 30/06/1971 pub. 12/05/2009 numac 2009000304 source service public federal interieur Loi relative aux amendes administratives applicables en cas d'infraction à certaines lois sociales. - Coordination officieuse en langue allemande fermer.

A.15.1. Dans leur mémoire en réponse, les parties requérantes affirment que le moyen n'est pas limité aux articles 59 et 60 du décret du 19 décembre 1998, comme le soutient le Gouvernement flamand.

En effet, la différence de traitement dénoncée ne provient pas de ce que ces dispositions ne permettent pas de tenir compte de circonstances atténuantes mais bien de ce que le législateur décrétal a décidé dans le même temps de ne pas exclure l'application des circonstances atténuantes en cas d'infliction de l'amende pénale. Il pourrait être remédié à cette différence de traitement, soit en excluant aussi les circonstances atténuantes pour les sanctions pénales, soit en permettant également leur application lors de l'infliction des amendes administratives.

Les parties requérantes estiment dès lors que l'exception d'irrecevabilité soulevée par le Gouvernement flamand doit être rejetée.

A.15.2. Quant au fond, les parties requérantes considèrent que les arguments avancés par le Gouvernement flamand ne sont nullement de nature à justifier la différence dénoncée. Même s'il est vrai qu'il ne peut pas être infligé aux personnes poursuivies administrativement une sanction plus lourde que l'amende pénale minimale et que ces personnes ne sont pas non plus redevables de la cotisation spéciale de solidarité prévue à l'article 58, il n'en demeure pas moins que, pour une infraction identique, l'amende administrative infligée peut s'élever presque au double de l'amende pénale notamment lorsque des circonstances atténuantes sont acceptées lors de l'infliction de l'amende pénale.

Troisième moyen A.16. Le troisième moyen est pris de la violation des articles 10 et 11 de la Constitution, lus conjointement avec le principe non bis in idem inscrit à l'article 14, § 7, du Pacte international relatif aux droits civils et politiques du 19 décembre 1966 (ci-après : P.I.D.C.P.).

Les articles 56 à 60 du décret du 19 décembre 1998 instaurent une différence de traitement entre, d'une part, les personnes dont le véhicule excède les masses maximales autorisées et les masses sous les essieux et qui s'exposent ainsi à deux poursuites pénales et à deux peines distinctes et, d'autre part, les personnes qui commettent une autre infraction, pour laquelle elles ne peuvent être poursuivies et sanctionnées qu'une seule fois.

Selon les parties requérantes, il n'existe aucune justification raisonnable pour cette différence. La possibilité de double poursuite et de double sanction viole la disposition conventionnelle précitée en vertu de laquelle personne ne peut être poursuivi ou puni deux fois pour le même fait.

Une personne qui se rend coupable d'un dépassement des masses maximales autorisées par les articles 32 et 32bis de l'arrêté royal du 15 mars 1968 pourra être poursuivie et punie non seulement sur la base de l'article 80 de cet arrêté royal qui renvoie, en ce qui concerne les peines, à la loi du 21 juin 1985Documents pertinents retrouvés type loi prom. 21/06/1985 pub. 15/02/2012 numac 2012000076 source service public federal interieur Loi relative aux conditions techniques auxquelles doivent répondre tout véhicule de transport par terre, ses éléments ainsi que les accessoires de sécurité. - Coordination officieuse en langue allemande fermer, mais également sur la base des articles 56 à 60 attaqués du décret du 19 décembre 1998.

Selon les parties requérantes, les articles 56 à 60 précités doivent par conséquent être annulés, de même que les articles 61 et 62 du même décret, étant donné que ces dernières dispositions sont indissolublement liées aux premières.

A.17. Le Gouvernement flamand soutient que le moyen part à tort du principe que les dispositions décrétales attaquées interdisent et punissent le dépassement du poids maximal par essieu. Ces dispositions portent au contraire sur l'endommagement des routes et ont été adoptées sur la base de la compétence régionale en matière de routes et de leurs dépendances. Le Gouvernement flamand renvoie à nouveau à la figure juridique du concours idéal d'infractions (article 65 du Code pénal), ce qui ne signifie pas davantage « bis in idem », étant donné que d'un seul et même comportement peuvent effectivement résulter plusieurs infractions.

A.18. Le Gouvernement wallon estime que les personnes dont le véhicule excède les charges maximales sous essieu ne s'exposent pas à deux sanctions pour une même infraction mais à deux sanctions pour deux infractions distinctes, à savoir le non-respect des normes techniques fédérales (article 80 de l'arrêté royal du 15 mars 1968), d'une part, et la violation de l'interdiction d'endommager le revêtement routier (l'article 56 attaqué), d'autre part.

Le Gouvernement wallon observe que la situation décriée par les parties requérantes n'est pas rare et trouve sa solution dans l'article 65 du Code pénal, applicable en l'espèce, en vertu de l'article 11, alinéa 1er, de la loi spéciale du 8 août 1980. Il apparaît ainsi que l'article 65 précité prévient le risque de double sanction.

Quatrième moyen A.19. Le quatrième moyen est pris de la violation de l'article 11 de la loi spéciale du 8 août 1980.

Selon les parties requérantes, les articles 57, 58 et 59 attaqués du décret du 19 décembre 1998 instaurent des incriminations et des sanctions pénales qui ne sont pas prévues au livre Ier du Code pénal, sans qu'un avis conforme du Conseil des ministres ait été obtenu préalablement aux délibérations du Gouvernement de région sur l'avant-projet de décret.

L'article 57 instaure une amende progressive, l'article 58 instaure une cotisation forfaitaire et prévoit la responsabilité de l'employeur et l'article 59 instaure une amende administrative de même que la responsabilité de l'employeur. Cette cotisation forfaitaire et cette amende administrative doivent être considérées comme une peine au sens de l'article 11 de la loi spéciale du 8 août 1980.

A.20.1. Le Gouvernement flamand soutient en ordre principal que le moyen n'est pas recevable, étant donné qu'il ne dénonce pas un excès de compétence ou une discrimination mais simplement la violation d'une formalité prescrite pour l'adoption des dispositions décrétales attaquées.

A.20.2. En ordre subsidiaire, le Gouvernement flamand estime que le moyen n'est pas fondé. Le Gouvernement wallon partage ce point de vue.

Selon les deux gouvernements, l'avis conforme du Conseil des ministres n'était requis pour aucune des trois sanctions critiquées, étant donné que l'article 11, alinéa 2, de la loi spéciale du 8 août 1980 ne s'applique pas en l'espèce.

Concernant l'amende pénale dite « progressive » (article 57), le Gouvernement flamand et le Gouvernement wallon considèrent qu'il s'agit bien d'une peine prévue au livre Ier du Code pénal : elle est, sans le moindre doute, une « amende » au sens de l'article 7 de ce Code. Les modalités « progressives » particulières de l'amende contestée n'y changent rien. L'article 11, alinéa 2, de la loi spéciale du 8 août 1980 doit en effet être interprété de manière téléologique et était de toute évidence destiné seulement à des sanctions répressives et préventives nouvelles, d'un point de vue matériel.

S'agissant de l'amende administrative (article 59), celle-ci, selon le Gouvernement flamand, constitue peut-être une peine visée à l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, mais n'est pas une « peine » au sens de l'article 11, alinéa 2, de la loi spéciale du 8 août 1980. Le Gouvernement flamand renvoie, à ce propos, aux travaux préparatoires de cette disposition ainsi qu'à la jurisprudence de la Cour. Même si une amende administrative était une peine au sens de l'article 11, alinéa 2, précité, elle constituerait sans aucun doute, compte tenu de son caractère purement pécuniaire indubitable et compte tenu de l'interprétation téléologique qu'il convient de donner à cet article 11, alinéa 2, une « amende » au sens de l'article 7 du Code pénal et donc une peine prévue au livre Ier du Code pénal.

Pour ce qui concerne la cotisation spéciale de solidarité (article 58), les Gouvernements flamand et wallon estiment qu'il ne s'agit pas non plus d'une peine au sens de l'article 11, alinéa 2, précité. Cette cotisation est en effet une contribution forfaitaire au financement du « Vlaams Infrastructuurfonds » et tend à compenser le dommage subi par la Région flamande. Elle n'a donc ni un caractère répressif ni un caractère préventif, ce qui est la première caractéristique d'une peine.

A.21.1. Le Conseil des ministres fait observer que l'avis conforme du Conseil des ministres, prescrit par l'article 11 de la loi spéciale du 8 août 1980, doit être considéré comme une règle répartitrice de compétences au sens de l'article 124bis de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage. La violation de cette prescription peut dès lors être attaquée devant la Cour par un recours en annulation.

A.21.2. Tant la cotisation forfaitaire (article 58) que l'amende administrative (article 59) doivent, selon le Conseil des ministres, être qualifiées de « peine » au sens de l'article 11 de la loi spéciale du 8 août 1980. Etant donné que ces deux peines ne sont pas prévues au livre Ier du Code pénal, l'avis conforme du Conseil des ministres était requis. En l'absence d'un tel avis, il y a lieu de conclure, selon le Conseil des ministres, à la violation de l'article 11 de la loi spéciale du 8 août 1980 et les dispositions concernées - ainsi que celles qui y sont indissociablement liées doivent être annulées conformément à l'article 124bis de la loi spéciale du 6 janvier 1989.

Premier moyen nouveau pris par le Conseil des ministres A.22. Dans son mémoire, le Conseil des ministres formule un premier moyen nouveau pris de la violation, par les articles 59 et 60 du décret du 19 décembre 1998, des articles 10 et 11 de la Constitution, lus conjointement avec l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, avec l'article 14 du P.I.D.C.P., ainsi qu'avec les principes généraux du droit pénal. Ce moyen est, selon le Conseil des ministres, subsidiaire au quatrième moyen des parties requérantes.

La réglementation décrétale relative à l'amende administrative doit être qualifiée de « peine ». Il s'ensuit, selon le Conseil des ministres, qu'il doit être satisfait tant aux garanties procédurales qu'aux garanties matérielles que comporte la protection juridique et qui sont inscrites dans les conventions internationales relatives aux droits de l'homme, dans la Constitution et dans les principes généraux du droit pénal. Ceci implique en particulier l'obligation, résultant de l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme et de l'article 14 du P.I.D.C.P., de permettre que la décision d'infliger une amende administrative soit susceptible d'appel auprès d'une instance juridictionnelle ayant pleine juridiction. L'article 60 attaqué ne prévoit pas cette possibilité, en sorte que les dispositions et les principes généraux cités au moyen sont, selon le Conseil des ministres, violés.

A.23.1. Selon le Gouvernement flamand, le moyen manque en fait, en tant que le Conseil des ministres considère qu'aucun recours de pleine juridiction ne serait ouvert contre la décision infligeant une amende administrative en vertu du décret. Les décisions d'infliger une amende administrative prises par le fonctionnaire désigné ou, en appel, par le Gouvernement flamand, sont en effet des actes administratifs contre lesquels un recours en annulation est ouvert devant le Conseil d'Etat ou contre lesquels une exception d'illégalité peut être soulevée devant n'importe quel juge.

A.23.2. Selon le Gouvernement flamand, le moyen est en outre dénué de fondement, étant donné qu'aucune disposition législative ni a fortiori le principe d'égalité n'oblige les communautés ou régions à organiser elles-mêmes une protection juridictionnelle contre les actes administratifs qu'elles instaurent, a fortiori lorsque l'accès au juge résulte du droit commun fédéral. Au contraire, si les communautés ou les régions procédaient de la sorte, le Conseil des ministres invoquerait sans aucun doute la violation de l'article 146 de la Constitution combiné avec l'article 19, § 1er, alinéa 1er, de la loi spéciale du 8 août 1980 et l'incompétence du législateur décrétal concerné, ajoute le Gouvernement flamand.

A.24. Selon le Gouvernement wallon, seule la qualification de « peine » attribuée à l'amende administrative visée par les articles 59 et 60 du décret incriminé aurait pour effet qu'il doive être satisfait aux garanties de procédure inscrites dans les dispositions visées au moyen. Or, il a été montré, selon lui, dans la discussion du quatrième moyen, que cette amende administrative ne saurait être considérée comme une peine au sens du droit pénal.

Deuxième moyen nouveau invoqué par le Conseil des ministres A.25. Dans son mémoire, le Conseil des ministres invoque un deuxième moyen nouveau pris de la violation, par l'article 58, § 1er, alinéa 4, du décret du 19 décembre 1998, des articles 39 et 134 de la Constitution, ainsi que des articles 6, § 1er, X, 1°, et § 4, 3°, 78 et 87, § 1er, de la loi spéciale du 8 août 1980.

En vertu de la disposition décrétale précitée, le recouvrement de la cotisation forfaitaire est confié à l'Administration fédérale de la taxe sur la valeur ajoutée, de l'enregistrement et des domaines. Selon le Conseil des ministres, il découle cependant des dispositions visées au moyen que la Région dispose uniquement de compétences attribuées.

Conformément au principe de verticalité, l'autorité qui est compétente pour la réglementation est, sauf dispositions contraires, chargée aussi de l'exécution. Il n'appartient donc pas au législateur régional, estime le Conseil des ministres, de charger unilatéralement des administrations relevant d'une autre autorité, en l'espèce l'autorité fédérale, du recouvrement de ces « cotisations » qui seraient par hypothèse régionales.

A.26.1. Selon le Gouvernement flamand, le moyen n'est pas recevable, étant donné qu'il ne porte sur aucune disposition invoquée valablement par les parties requérantes. En effet, les parties requérantes n'articulent aucun moyen à l'encontre de l'article 58, § 1er, alinéa 4, du décret du 19 décembre 1998. Elles ne disposeraient du reste pas de l'intérêt requis à cette fin.

A.26.2. Selon le Gouvernement flamand, le moyen est en tout état de cause non fondé, étant donné qu'il néglige l'article 1er de la loi du 18 décembre 1986 « habilitant l'Administration de la taxe sur la valeur ajoutée, de l'enregistrement et des domaines à réaliser certaines opérations patrimoniales pour le compte des institutions communautaires et régionales ». Aux termes de cette disposition, les fonctionnaires de l'Administration précitée peuvent exercer, à la demande, au nom et pour compte des communautés et des régions, toutes les attributions domaniales qu'ils assument à l'égard des biens de l'Etat, « y compris le recouvrement des créances non fiscales ». b) Affaire n° 1954 Recevabilité A.27. Concernant l'existence de leur intérêt, les parties requérantes réitèrent l'exposé contenu dans la requête qu'elles ont introduite dans l'affaire n° 1722. Elles soulignent que les dispositions décrétales attaquées dans l'affaire n° 1954 se rattachent en tous points aux sanctions pénales pour l'endommagement du revêtement routier par surcharge instaurées par le décret du 19 décembre 1998 attaqué dans l'affaire n° 1722 et qu'elles en constituent une explicitation et un complément.

A.28. Selon le Gouvernement flamand, rejoint en cela par le Gouvernement wallon, l'intérêt éventuel à l'annulation des dispositions attaquées dans l'affaire n° 1722 n'emporte pas automatiquement l'intérêt à l'annulation des dispositions modificatives attaquées dans l'affaire n° 1954. Le Gouvernement flamand ne voit pas en quoi les parties requérantes pourraient être affectées par la « dépénalisation des surcharges en cas de transport exceptionnel », par le fait que « soit rendue opérationnelle la perception immédiate » ou par « la déclaration d'une affectation définitive des montants consignés », qui constituent l'objet des dispositions attaquées dans l'affaire n° 1954.

A.29. Le Conseil des ministres considère que les parties requérantes justifient de l'intérêt requis en droit.

Les moyens A.30. Les parties requérantes articulent trois moyens qui correspondent aux trois premiers moyens formulés dans l'affaire n° 1722.

A.31.1. Le Gouvernement flamand observe que ces moyens, repris de la requête introduite dans l'affaire n° 1722, ne tiennent pas debout à l'encontre des dispositions attaquées dans l'affaire n° 1954, étant donné que ces dernières dispositions modificatives n'ont pas nécessairement le même objet que la réglementation globale originelle.

Il s'ensuit que les moyens ne sont pas recevables, faute d'un exposé, et qu'ils ne satisfont pas aux conditions de l'article 6 de la loi spéciale sur la Cour d'arbitrage.

A.31.2. Le Gouvernement flamand reproduit ensuite dans l'affaire n° 1954 sa réfutation des trois premiers moyens dans l'affaire n° 1722.

A.32.1. Selon le Gouvernement wallon, les dispositions attaquées dans l'affaire n° 1954 n'ont pas la portée normative que leur prêtent les parties requérantes. En tant qu'ils sont dirigés contre le décret du 22 décembre 1999, les moyens ne peuvent être accueillis.

A.32.2. Le Gouvernement wallon reproduit ensuite dans l'affaire n° 1954 sa réfutation des trois premiers moyens dans l'affaire n° 1722.

A.33.1. Le Conseil des ministres constate, dans son mémoire, que les parties requérantes reproduisent les moyens formulés dans l'affaire n° 1722, à l'exception du quatrième d'entre eux. Le Conseil des ministres renvoie aux moyens qu'il a lui-même formulés à l'appui de la requête en annulation dans l'affaire n° 1722 et reproduit la formulation de ceux-ci dans l'affaire n° 1954.

A.33.2. Dans son mémoire en réponse, le Conseil des ministres réfute le point de vue des Gouvernements flamand et wallon selon lequel les dispositions modificatives attaquées dans l'affaire n° 1954 n'auraient pas le même objet que la réglementation globale originelle. En effet, ces dispositions modificatives n'enlèvent rien aux moyens formulés par le Conseil des ministres à l'appui de l'annulation de la réglementation originelle. Selon le Conseil des ministres, ces moyens demeurent par conséquent pleinement valables dans l'affaire n° 1954 visant l'annulation des dispositions modificatives.

A.34. Les parties requérantes déclarent, dans leur mémoire ne réponse, qu'elles justifient bien d'un intérêt à l'annulation des articles 30 à 36 du décret du 22 décembre 1999, étant donné que ces dispositions développent le système de sanction prévu dans le décret du 19 décembre 1998.

Elles produisent également les statuts de la deuxième partie requérante actuellement en vigueur et renvoient, pour le surplus, à l'argumentation qu'elles ont développée dans la requête introduite dans l'affaire n° 1954 et dans les requête et mémoire en réponse introduits dans l'affaire n° 1722.

A.35. Dans son mémoire en réponse, le Gouvernement wallon considère que les moyens formulés par le Conseil des ministres ne sont pas recevables, faute d'un exposé. Ces moyens ne répondent donc pas aux conditions de l'article 6 de la loi spéciale sur la Cour d'arbitrage.

Le Conseil des ministres se borne en effet à renvoyer aux moyens qu'il a développés dans son mémoire déposé dans l'affaire n° 1722.

En ordre très subsidiaire, le Gouvernement wallon estime par ailleurs que le point de vue que le Conseil des ministres défend dans ces moyens ne peut être admis. A ce propos, le Gouvernement wallon réitère pour l'essentiel l'argumentation qu'il a développée dans l'affaire n° 1722. - B Quant aux dispositions attaquées B.1.1. Les parties requérantes demandent l'annulation des articles 56 à 62 du décret du Parlement flamand du 19 décembre 1998 contenant diverses mesures d'accompagnement du budget 1999 (affaire n° 1722).

Ces articles entrent en vigueur le 1er janvier 1999 (article 64 du décret).

Les mêmes parties requérantes demandent l'annulation des articles 30 à 36 du décret du Parlement flamand du 22 décembre 1999 contenant diverses mesures d'accompagnement du budget 2000 (affaire n° 1954).

Ces dispositions visent à modifier ou à compléter certains articles attaqués dans l'affaire n° 1722. Elles entrent en vigueur le 1er janvier 2000 (article 61 du décret).

B.1.2. Les articles 56 à 62 du décret du 19 décembre 1998 attaqués dans l'affaire n° 1722, qui forment le chapitre XIV (« Dégâts au revêtement routier à la suite de surcharges ») de ce décret, visent à combattre l'endommagement de l'infrastructure routière résultant de la formation d'ornières (Doc., Parlement flamand, 1998-1999, n° 1214/8, p. 5).Selon le Gouvernement flamand, le poids excessif par essieu des camions surchargés constitue la principale cause de la formation d'ornières (ibid.).

Les dispositions attaquées du décret précité prévoient une interdiction générale d'endommager le revêtement routier en excédant les masses maximales autorisées et les masses sous les essieux (article 56). Les infractions à cette interdiction sont punies d'un emprisonnement et/ou d'amendes progressives (article 57). En cas de condamnation pour une infraction à l'article 56, une cotisation forfaitaire est due au profit du « Vlaams Infrastructuurfonds » (article 58). Des amendes administratives peuvent également être infligées pour les infractions visées à l'article 56 (articles 59 et 60). Il est enfin prévu des mesures de contrôle (articles 61 et 62).

Au départ, le législateur décrétal flamand avait envisagé de compléter la réglementation fédérale relative aux conditions techniques auxquelles doivent répondre les véhicules automobiles (Doc., Parlement flamand, 1998-1999, n° 1214/1). Le Conseil d'Etat avait cependant considéré qu'il était ainsi empiété sur le domaine des « prescriptions techniques relatives aux moyens de communication et de transport », qui relèvent de la compétence du législateur fédéral (Doc., Parlement flamand, 1998-1999, n° 1214/1, pp. 77-82). A la suite de cet avis, le Gouvernement flamand déposa une série d'amendements prévoyant une réglementation autonome en vue de combattre la formation d'ornières sur les routes, réglementation fondée sur la compétence régionale concernant « les routes et leurs dépendances » (Doc., Parlement flamand, 1998-1999, n° 1214/8, pp. 2-8). Le Conseil d'Etat a considéré que cette réglementation pouvait s'inscrire dans la compétence de la Région flamande (Doc., Parlement flamand, 1998-1999, n° 1214/8, pp. 11-16).

B.1.3. Les articles 30 à 36 du décret du 22 décembre 1999 attaqués dans l'affaire n° 1954 modifient sur certains points la réglementation originaire. Les travaux préparatoires montrent que ces modifications apportées à la réglementation originaire relative à l'endommagement du revêtement routier par suite de surcharges sont principalement dictées par les trois motifs suivants : la dépénalisation des surcharges en cas de transport exceptionnel, la volonté de rendre opérationnelle la perception immédiate et la désignation d'une affectation définitive des montants consignés (Doc., Parlement flamand, 1999-2000, n° 94/1, pp. 9-11; ibid., n° 94/13, pp. 4-5).

B.1.4. Selon la « disposition générale » de l'article 56 du décret du 19 décembre 1998 : « Il est interdit de causer des dégâts au revêtement routier en excédant les poids maximums autorisés et les poids sous les essieux maximums autorisés comme prévus par les articles 32 et 32bis de l'arrêté royal du 15 mars 1968 portant règlement général sur les conditions techniques auxquelles doivent répondre les véhicules automobiles, leurs remorques, pièces et dispositifs de sécurité. » Quant à la recevabilité des recours En ce qui concerne la publication des statuts de la deuxième partie requérante B.2.1. Le Gouvernement flamand soulève, dans les deux affaires, une exception d'irrecevabilité fondée sur le défaut de publication ou de la preuve de cette publication - des statuts de la deuxième partie requérante.

B.2.2. La Cour constate que la seconde partie requérante a transmis au greffe de la Cour ses statuts, dans l'affaire n° 1722, par lettre du 20 juillet 1999 et les a transmis à nouveau, dans l'affaire n° 1954, en annexe à son mémoire en réponse. Il en ressort que les statuts de la deuxième partie requérante ont été publiés aux annexes du Moniteur belge du 27 mars 1974.

L'exception d'irrecevabilité tirée de la non-publication des statuts ou de l'absence de preuve de cette publication est rejetée.

En ce qui concerne le caractère légitime de l'intérêt des parties requérantes (affaire n° 1722) B.3.1. Le Gouvernement flamand, rejoint en cela par le Gouvernement wallon, soulève une exception d'irrecevabilité fondée sur le caractère illégitime de l'intérêt des parties requérantes. Celles-ci viseraient à maintenir une situation illégale. Elles n'auraient pas un intérêt licite à attaquer l'interdiction régionale d'endommager les routes, étant donné qu'elles ne peuvent pas non plus enfreindre les limites de poids par essieu fixées par l'autorité fédérale.

B.3.2. Les entreprises de transport peuvent être affectées directement et défavorablement dans leur situation par des normes qui prévoient des sanctions en cas d'endommagement du revêtement routier résultant de surcharges. La première partie requérante, qui est une union professionnelle d'entreprises de transport, et la seconde partie requérante, qui est une entreprise de transport, justifient dès lors de l'intérêt requis. Cet intérêt ne cesse pas d'être légitime pour la raison que les normes attaquées permettraient de sanctionner davantage des comportements fautifs.

L'exception d'irrecevabilité tirée du caractère illégitime de l'intérêt des parties requérantes est rejetée.

En ce qui concerne l'intérêt au recours contre des dispositions modificatives (affaire n° 1954) B.4.1. Selon le Gouvernement flamand, rejoint en cela par le Gouvernement wallon, l'intérêt éventuel à l'annulation des dispositions attaquées dans l'affaire n° 1722 n'emporte pas automatiquement l'intérêt à l'annulation des dispositions modificatives entreprises dans l'affaire n° 1954. ces dernières dispositions n'auraient pas le même objet que les dispositions attaquées dans la première affaire.

B.4.2. Il ressort des travaux préparatoires cités en B.1.3 que le législateur décrétal a explicité et précisé dans le décret du 22 décembre 1999 la réglementation de base fixée dans le décret du 19 décembre 1998. Il peut dès lors être admis que les parties requérantes qui ont un intérêt au recours en annulation de la réglementation originaire justifient également d'un intérêt au recours intenté contre des dispositions qui développent la réglementation de base.

L'exception d'irrecevabilité tirée du défaut d'intérêt à l'annulation des dispositions modificatives (affaire n° 1954) est rejetée.

Quant à la compétence de la Cour pour connaître du quatrième moyen pris dans l'affaire n° 1722 B.5.1. Selon le Gouvernement flamand, le quatrième moyen n'est pas pris d'un excès de compétence ou d'une discrimination mais de la violation d'une formalité prescrite pour l'adoption des dispositions attaquées. La Cour ne serait dès lors pas compétente pour connaître d'un tel moyen.

B.5.2. Le quatrième moyen est fondé sur la violation de l'article 11 de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles, en ce que les articles 57, 58 et 59 attaqués du décret du 19 décembre 1998 instauraient des incriminations et des sanctions pénales qui ne seraient pas prévues au livre Ier du Code pénal, sans que l'avis conforme du Conseil des ministres ait été obtenu préalablement aux délibérations du Gouvernement flamand sur l'avant-projet de décret.

B.5.3. L'avis conforme du Conseil des ministres, prescrit par l'article 11, alinéa 2, de la loi spéciale précitée du 8 août 1980, doit être considéré comme une règle répartitrice de compétences au sens de l'article 124bis de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage. En vertu de cette dernière disposition, pour l'application des articles 1er et 26, § 1er, de la loi spéciale sur la Cour d'arbitrage, sont notamment considérés comme règles visées au 1° de ces deux dispositions « les avis conformes » prévus, entre autres, par la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles.

La Cour est donc compétente pour connaître d'un moyen critiquant le non-respect de la formalité précitée imposée par l'article 11 de la loi spéciale du 8 août 1980.

L'exception d'incompétence de la Cour pour connaître du quatrième moyen est rejetée.

Quant à la recevabilité des moyens Quant à la recevabilité du deuxième moyen, formulé dans les deux affaires B.6.1. Selon le Gouvernement flamand, le deuxième moyen n'est pas recevable, les parties requérantes attaquant en fait une lacune du décret du 19 décembre 1998, qui peut difficilement être annulée. En effet, elles dénoncent l'absence d'une règle analogue à celle de l'article 85 du Code pénal, en vertu de laquelle l'amende administrative prévue aux articles 59 et 60 du décret précité pourrait être réduite au-dessous du minimum fixé, s'il existait des circonstances atténuantes.

B.6.2. Les parties requérantes reprochent aux dispositions attaquées de traiter différemment, sans justification admissible, deux catégories de personnes prévenues d'avoir commis la même infraction : celles qui sont poursuivies par le procureur du Roi peuvent se voir infliger une peine inférieure au minimum légal si le juge constate l'existence de circonstances atténuantes; celles que le procureur du Roi a décidé de ne pas poursuivre ne peuvent se voir infliger une amende administrative inférieure au minimum légal, même s'il existe des circonstances atténuantes.

B.6.3. En tant que les parties requérantes reprochent au législateur décrétal d'avoir prévu dans les dispositions attaquées des sanctions pénales auxquelles sont applicables, conformément à l'article 11, alinéa 1er, de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles, remplacé par l'article 5 de la loi spéciale du 16 juillet 1993, les dispositions des articles 1er à 99 du Code pénal, en ce compris l'article 85 relatif aux circonstances atténuantes, alors que, lorsqu'il a fixé les amendes administratives, il n'a pas prévu, dans le même décret, de circonstances atténuantes pour une même infraction, l'objet du moyen est effectivement contenu dans les articles attaqués.

Il s'ensuit que le deuxième moyen est dirigé contre une des normes dont la Cour peut connaître en vertu de l'article 1er, alinéa 1er, de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage.

B.6.4. Le deuxième moyen formulé dans les deux affaires est recevable.

Quant à la recevabilité du deuxième moyen nouveau formulé par le Conseil des ministres dans l'affaire n° 1722 B.7.1. Selon le Gouvernement flamand, le deuxième moyen nouveau formulé par le Conseil des ministres n'est pas recevable, étant donné qu'il porte sur une disposition à savoir l'article 58, § 1er, alinéa 4, du décret du 19 décembre 1998 qui n'est pas attaquée de façon recevable par les parties requérantes.

B.7.2. L'article 85, alinéa 2, de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage permet notamment au Conseil des ministres d'introduire un mémoire dans une affaire concernant un recours en annulation et d'y formuler des moyens nouveaux. Une telle intervention ne peut cependant ni modifier ni étendre le recours. Ce serait le cas lorsqu'un moyen nouveau est articulé contre une disposition qui n'est pas attaquée de manière recevable devant la Cour par les parties requérantes.

Dès lors que l'article 58, § 1er, alinéa 4, du décret du 19 décembre 1998 a été soumis au contrôle de la Cour par les parties requérantes et que leur recours, ainsi qu'il est dit en B.3.2, est recevable, l'exception d'irrecevabilité dirigée contre le deuxième moyen nouveau formulé par le Conseil des ministres est rejetée.

Quant à la recevabilité des trois moyens formulés dans l'affaire n° 1954 B.8.1. Le Gouvernement flamand considère que les trois moyens pris dans l'affaire n° 1954 ne sont pas recevables, faute d'un exposé, et qu'ils ne satisfont donc pas aux exigences de l'article 6 de la loi spéciale sur la Cour d'arbitrage. Ces moyens seraient en effet repris de la requête introduite dans l'affaire n° 1722, alors que les normes qui sont attaquées dans les deux affaires n'ont pas nécessairement le même objet.

B.8.2. Dans leur recours contre les articles 30 à 36 du décret du 22 décembre 1999 (affaire n° 1954), les parties requérantes reproduisent les trois premiers moyens qu'elles avaient formulés à l'encontre des articles 56 à 62 du décret du 19 décembre 1998 (affaire n° 1722).

Les dispositions attaquées dans l'affaire n° 1954 visent à modifier et compléter certaines dispositions attaquées dans l'affaire n° 1722. Ces modifications et ajouts visent à expliciter et à préciser la réglementation originaire. Il peut dès lors être admis que les normes qui sont attaquées dans les deux affaires concernent le même objet.

Dans ce cas, les parties requérantes pouvaient reproduire, dans leur recours contre les dispositions modificatives, des moyens formulés à l'encontre de la réglementation originaire.

Dès lors que, pour le surplus, les trois moyens invoqués dans l'affaire n° 1954 satisfont aux conditions de l'article 6 de la loi spéciale sur la Cour d'arbitrage, l'exception d'irrecevabilité dirigée contre ces moyens ne peut être accueillie.

Quant à la recevabilité des moyens nouveaux invoqués par le Conseil des ministres dans l'affaire n° 1954 B.9.1. Selon le Gouvernement wallon, les moyens invoqués par le Conseil des ministres ne sont pas recevables faute d'un exposé de ceux-ci. Le Conseil des ministres se borne en effet à renvoyer aux moyens nouveaux qu'il avait développés dans son mémoire introduit dans l'affaire n° 1722.

B.9.2. La circonstance que le Conseil des ministres se borne, dans l'affaire n° 1954, à un simple renvoi aux moyens qu'il a formulés dans l'affaire n° 1722 n'a pas mis en péril, en l'espèce, le caractère contradictoire de la procédure, étant donné que les mêmes parties sont à la cause dans les deux affaires jointes et que toutes ont reçu notification de chacune des pièces qui ont été déposées dans les deux affaires. Il s'ensuit que les parties ont eu la possibilité de prendre connaissance de l'exposé des moyens nouveaux que le Conseil des ministres a formulés dans l'affaire n° 1722 et auxquels il renvoie dans l'affaire n° 1954.

L'exception invoquée dans l'affaire n° 1954 et tirée de l'irrecevabilité des moyens formulés par le Conseil des ministres est rejetée.

Quant au fond Concernant le premier moyen invoqué dans les deux affaires B.10.1. Le premier moyen est pris de la violation de l'article 134 de la Constitution et de l'article 6, § 1er, X, 1°, de l'article 6, § 4, 3°, de l'article 10 et de l'article 11 de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles, en ce que les articles 56 à 62 du décret du 19 décembre 1998 (affaire n° 1722) et les articles 30 à 36 du décret du 22 décembre 1999 (affaire n° 1954) punissent la transgression de prescriptions techniques relatives aux moyens de communication et de transport, organisent un contrôle y relatif et lient le paiement d'une cotisation complémentaire à la violation de ces dispositions, alors que le pouvoir d'élaborer les règles de police générale et la réglementation relatives aux communications et aux transports ainsi que les prescriptions techniques relatives aux moyens de communication et de transport appartient exclusivement au législateur fédéral en vertu des dispositions citées au moyen et que les dispositions décrétales attaquées ne peuvent s'inscrire dans le cadre des compétences de gestion régionales concernant les routes et leurs dépendances. Ces dispositions ne pourraient davantage trouver leur fondement dans les pouvoirs implicites de la Région flamande visés à l'article 10 de la loi spéciale du 8 août 1980.

B.10.2. En exécution de l'article 39 de la Constitution, l'article 6, § 1er, X, 1°, de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles, inséré par la loi spéciale du 8 août 1988, a attribué aux régions, en ce qui concerne les travaux publics et le transport, la compétence concernant « les routes et leurs dépendances ».

Dans les travaux préparatoires de l'article 6, § 1er, X, de la loi spéciale précitée du 8 août 1980, la compétence attribuée aux régions en matière de travaux publics et de transport est qualifiée de « compétence de gestion au sens large » (Doc. parl., Chambre, S.E. 1988, n° 516/1, p.13; Doc. parl., Sénat, 1992-1993, n° 558-5, p. 412).

Les régions sont donc compétentes, en vertu de l'article 6, § 1er, X, 1°, précité, pour adopter des normes en vue de la protection de l'infrastructure routière, notamment en vue de combattre l'endommagement du revêtement routier par la formation d'ornières et de prévoir des sanctions pour les infractions à de telles normes.

B.10.3. Il convient toutefois de vérifier si la compétence régionale de prendre des mesures en vue de la protection du revêtement routier ne porte pas atteinte à la compétence fédérale d'élaborer des prescriptions techniques relatives aux moyens de communication et de transport, étant donné que l'interdiction d'endommager le revêtement routier décidée par le législateur décrétal ne vaut en l'espèce qu'en tant que ce dommage résulte d'un dépassement des masses maximales autorisées et des masses sous les essieux, fixées dans la réglementation fédérale relative aux conditions techniques auxquelles doivent répondre les véhicules automobiles, à savoir les articles 32 et 32bis de l'arrêté royal du 15 mars 1968 portant règlement général sur les conditions techniques auxquelles doivent répondre les véhicules automobiles, leurs remorques, leurs éléments ainsi que les accessoires de sécurité (article 56 du décret du 19 décembre 1998).

L'article 6, § 4, 3°, de la loi spéciale précitée dispose en effet : « Les gouvernements seront associés : 3° à l'élaboration des règles de police générale et de la réglementation relatives aux communications et aux transports ainsi qu'aux prescriptions techniques relatives aux moyens de communication et de transport;».

Il ressort de la lecture conjointe des articles 6, § 1er, X, et 6, § 4, 3°, précités, que les régions sont compétentes pour régler la gestion de la voirie terrestre et des « voies hydrauliques » au sens le plus large du terme, mais que cette attribution de compétences ne comprend pas l'adoption des prescriptions techniques relatives aux moyens de communication et de transport, qui sont demeurées une compétence fédérale, même si les gouvernements de région doivent être associés à leur élaboration.

B.10.4. L'utilisation par le législateur décrétal de critères qui ont été fixés par l'autorité fédérale ne peut conduire à ce que le législateur décrétal dépasse ses compétences propres. Tel n'est pas le cas en l'espèce puisque le législateur décrétal flamand utilise seulement ces critères pour exercer une compétence qui lui est explicitement attribuée, à savoir la gestion de l'infrastructure routière. La circonstance que ces critères ont été établis par l'autorité fédérale dans l'exercice d'une compétence fédérale, à savoir la sécurité de la circulation routière, n'y change rien.

Dès lors qu'il pouvait être admis qu'il existe un lien de cause à effet entre, d'une part, le dépassement des normes fédérales concernant la charge par essieu et, d'autre part, l'endommagement du revêtement routier les travaux préparatoires font référence, sur ce point, à une étude réalisée notamment par le Centre de recherches routières (Doc., Parlement flamand, 1998-1999, n° 1214/8, p. 6) , il peut raisonnablement être considéré que le législateur décrétal flamand était en droit, pour la mise en oeuvre de ses compétences propres, de renvoyer à des critères fixés par l'autorité fédérale.

B.10.5. La disposition générale de l'article 56 du décret du 19 décembre 1998 relevant de la compétence de la Région flamande, les autres dispositions décrétales attaquées pouvaient également être adoptées par le législateur décrétal - sous réserve de l'examen des autres moyens -, compte tenu de l'étroite relation qui unit ces dispositions et l'article 56 précité.

B.10.6. Il résulte de ce qui précède qu'il n'y a pas lieu d'examiner si les dispositions décrétales attaquées peuvent ou non être fondées sur l'article 10 de la loi spéciale du 8 août 1980.

B.10.7. Le premier moyen formulé dans les deux affaires ne peut être admis.

Quant au deuxième moyen invoqué dans les deux affaires B.11.1. Lorsque le procureur du Roi décide d'engager des poursuites, le prévenu peut se voir infliger une peine inférieure au minimum légal si le juge reconnaît l'existence de circonstances atténuantes, en application de l'article 85 du Code pénal.

Lorsque le procureur du Roi décide de ne pas engager de poursuites pénales et qu'il n'y a pas eu de perception immédiate, le fonctionnaire désigné peut imposer une amende administrative, sans qu'aucune disposition ne lui permette de descendre en dessous du minimum légal.

Selon les parties requérantes, cette différence de traitement serait discriminatoire. Elles se réfèrent notamment aux arrêts nos 40/97 et 45/97 dans lesquels la Cour a jugé incompatible avec les articles 10 et 11 de la Constitution une différence de traitement identique créée par la loi du 30 juin 1971Documents pertinents retrouvés type loi prom. 30/06/1971 pub. 12/05/2009 numac 2009000304 source service public federal interieur Loi relative aux amendes administratives applicables en cas d'infraction à certaines lois sociales. - Coordination officieuse en langue allemande fermer relative aux amendes administratives applicables en cas d'infraction à certaines lois sociales.

B.11.2. La différence de traitement dénoncée au moyen paraît prima facie injustifiée en ce qu'elle semble aboutir à traiter plus sévèrement des personnes dont le comportement est moins répréhensible puisque le procureur du Roi a renoncé à les poursuivre. Il convient cependant d'examiner in concreto l'ensemble du système d'amendes administratives organisé par les décrets attaqués afin d'apprécier s'il est discriminatoire ou non.

B.11.3. Les dispositions attaquées n'obligent pas le fonctionnaire désigné à infliger d'office une amende administrative dès qu'il constate que l'infraction est établie. L'article 59, § 4, alinéa 2, du décret précise en effet que ce fonctionnaire « peut » infliger une telle amende, qu'il peut décider de ne pas le faire et qu'il est censé y avoir renoncé s'il n'a pas communiqué son intention de le faire au procureur du Roi dans un délai de trente jours.

B.11.4. Les peines que peut prononcer le juge vont de huit jours à un an de prison et, selon que la surcharge est de 5, 10, 20 ou plus de 20 p.c., les amendes pénales peuvent s'élever, respectivement, de 100 à 10 000 francs, de 300 à 30 000 francs, de 500 à 50 000 francs ou de 750 à 75 000 francs, augmentés des décimes additionnels.

Le fonctionnaire désigné ne peut, en application de l'article 59, § 2, infliger que l'amende minimale, donc une peine forfaitaire dont le taux varie, selon la surcharge, de 100 à 750 francs, augmentés des décimes additionnels.

Il s'ensuit que le taux des amendes administratives est beaucoup plus favorable au contrevenant que celui des amendes pénales.

B.11.5. Sauf dans les cas où le contrevenant a marqué son accord sur une perception immédiate, l'amende ne peut être infligée qu'après que le contrevenant ou son employeur a été convoqué, a été entendu s'il le souhaite, a pu consulter le dossier s'il le désire, a pu déposer une note et se faire assister ou représenter par un conseil. La décision du fonctionnaire désigné, rendue dans les trente jours de l'audition, est motivée. Elle peut faire l'objet d'un appel suspensif devant le Gouvernement flamand qui, au terme d'une procédure comparable à celle qui se déroule devant le fonctionnaire, notifie sa décision au contrevenant ou à son employeur dans les trois mois, faute de quoi l'amende est tacitement annulée.

La décision du Gouvernement flamand est susceptible d'un recours en annulation devant le Conseil d'Etat.

Il résulte de ces constatations que l'infliction d'une amende administrative est entourée de garanties qui sont différentes de celles qui accompagnent la condamnation à une amende pénale mais il n'apparaît pas - et il n'est d'ailleurs pas allégué - que cette différence de régime serait discriminatoire.

B.11.6. En ne permettant au fonctionnaire désigné que d'infliger une amende administrative de 100 à 750 francs, alors que le juge pénal peut condamner à une peine de prison de huit jours à un an et à des amendes variant de 100 à 75 000 francs, en donnant à ce fonctionnaire un pouvoir d'appréciation qu'il n'exerce, par une décision motivée, qu'au terme d'une procédure contradictoire, en organisant une procédure d'appel, en imposant des délais stricts et en permettant la saisine du Conseil d'Etat, le législateur décrétal a entouré la possibilité d'infliger des amendes administratives de garanties et de limitations telles que la seule impossibilité de pouvoir tenir compte de circonstances atténuantes ne saurait être tenue pour incompatible avec les articles 10 et 11 de la Constitution.

Dès lors qu'il décide de fixer le montant de l'amende administrative au taux minimal de l'amende pénale, le législateur peut, en contrepartie, faire en sorte que cette amende conserve un caractère suffisamment dissuasif en ne permettant pas de la réduire en application de circonstances atténuantes.

B.11.7. Le moyen n'est pas fondé.

Quant au troisième moyen invoqué dans les deux affaires B.12.1. Le troisième moyen est pris de la violation des articles 10 et 11 de la Constitution, lus conjointement avec le principe non bis in idem inscrit à l'article 14, paragraphe 7, du Pacte international relatif aux droits civils et politiques du 19 décembre 1966 (ci-après P.I.D.C.P.), en ce que les articles 56 à 60 du décret du 19 décembre 1998 (affaire n° 1722) et les articles 30 à 36 du décret du 22 décembre 1999 (affaire n° 1954) instaurent une différence de traitement entre, d'une part, les personnes dont le véhicule excède la masse maximale autorisée et les masses sous les essieux et qui s'exposent ainsi à deux poursuites pénales et à deux peines distinctes et, d'autre part, les personnes qui commettent une infraction pour laquelle elles ne peuvent être poursuivies et sanctionnées qu'une seule fois. Il n'existerait aucune justification raisonnable pour cette distinction. La possibilité de double poursuite et de double sanction violerait aussi la disposition conventionnelle précitée.

B.12.2. En tant que le moyen doit être interprété en ce sens que les dispositions décrétales attaquées interdisent et sanctionnent une seconde fois le dépassement des masses maximales autorisées et des masses sous les essieux déjà interdit et sanctionné par l'autorité fédérale, en sorte qu'une même infraction serait réprimée deux fois, le moyen n'est pas fondé.

En effet, les dispositions décrétales attaquées concernent l'endommagement du revêtement routier et le législateur décrétal pouvait les adopter sur la base de sa compétence concernant les routes et leurs dépendances, même s'il a fait, et était en droit de faire, référence pour cela à des critères fixés par l'autorité fédérale.

La surcharge du véhicule, mesurée à l'aide de ces critères, est une indication pertinente de ce que l'infraction, à savoir le dégât causé au revêtement routier, a été commise.

B.12.3. Le moyen peut toutefois aussi être compris en ce sens qu'il critique les dispositions décrétales attaquées parce qu'un fait unique, à savoir le dépassement des masses maximales autorisées et des masses sous les essieux, constitue à la fois une infraction aux normes fédérales, fixées en vue de la sécurité de la circulation routière, et une infraction aux normes régionales concernant l'endommagement du revêtement routier par surcharge.

Dans ce cas, il s'agit de deux infractions différentes qui sont la conséquence d'un même comportement.

B.12.4. Il ne peut être déduit des dispositions fédérales et décrétales précitées qu'elles auraient pour effet de permettre que des personnes puissent être condamnées deux fois pour le même fait.

C'est au juge chargé d'apprécier si les préventions sont établies qu'il appartiendra d'éviter que la règle « non bis in idem » soit violée.

Au cas où un prévenu serait poursuivi simultanément pour avoir violé la réglementation fédérale et les dispositions décrétales attaquées, le juge ne pourra prononcer qu'une seule peine - la plus forte - en application de l'article 65, alinéa 1er, du Code pénal.

Au cas où une personne serait prévenue successivement pour avoir violé l'une et l'autre disposition, l'autorité de chose jugée qui s'attache au premier jugement et qui emporte l'extinction de l'action publique empêchera le juge qui statue en second lieu de prononcer une nouvelle peine pour un fait qui a déjà entraîné une condamnation dans le chef de l'intéressé.

B.12.5. Le moyen n'est pas fondé.

Quant au quatrième moyen, invoqué dans l'affaire n° 1722 B.13.1. Le quatrième moyen est pris de la violation de l'article 11 de la loi spéciale du 8 août 1980 en ce que les articles 57, 58 et 59 du décret du 19 décembre 1998 instaurent des incriminations et des sanctions pénales non prévues au livre Ier du Code pénal sans que l'avis conforme du Conseil des ministres ait été obtenu préalablement aux délibérations du Gouvernement de région sur l'avant-projet de décret.

B.13.2. L'article 11, alinéa 2, de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles dispose : « L'avis conforme du Conseil des ministres est requis pour toute délibération au sein du Gouvernement de Communauté ou de Région sur un avant-projet de décret reprenant une peine ou une pénalisation non prévue au livre Ier du Code pénal. » En principe, le législateur décrétal flamand ne peut déroger au livre Ier du Code pénal, en instaurant d'autres sanctions pénales ou incriminations que celles prévues au livre Ier, sauf avis conforme du Conseil des ministres.

Il convient d'examiner si l'article 11, alinéa 2, précité s'applique aux mesures prévues par les articles 57, 58 et 59 attaqués du décret du 19 décembre 1998.

B.13.3. L'article 57 du décret du 19 décembre 1998 est critiqué parce qu'il instaure, sans que l'avis conforme du Conseil des ministres ait été obtenu, une amende pénale « progressive », en ce sens qu'elle croît en fonction de l'importance de la surcharge du véhicule.

L'amende est une peine prévue à l'article 7 du Code pénal, figurant au livre Ier de ce Code.

Le caractère progressif de l'amende contestée n'y change rien, étant donné que l'article 11, alinéa 2, de la loi spéciale du 8 août 1980 vise seulement les peines et les incriminations qui sont neuves, d'un point de vue matériel.

En tant que l'article 57 attaqué prévoit une amende progressive, il ne doit par conséquent pas être soumis à l'avis conforme précité du Conseil des ministres.

B.13.4. L'article 58, § 1er, du décret du 19 décembre 1998 est critiqué parce qu'il instaure, sans que l'avis conforme du Conseil des ministres ait été obtenu, une « cotisation de solidarité », à savoir un montant forfaitaire à payer en manière de contribution au financement du « Vlaams Infrastructuurfonds ». Le paragraphe 2 de cette disposition rend l'employeur civilement responsable du paiement de cette cotisation à laquelle ses préposés ou mandataires ont été condamnés.

Les travaux préparatoires mentionnent à ce propos ce qui suit : « Il doit être souligné que la cotisation a un caractère sui generis et n'est pas une imposition ou une peine supplémentaire.

Il s'agit en fait d'une sorte de cotisation de solidarité à charge des personnes qui, au moyen de véhicules trop lourds, sont la cause notamment de la formation d'ornières sur les routes flamandes.

La cotisation ici visée a été instaurée par analogie avec la contribution fixée par la loi du 1er août 1985Documents pertinents retrouvés type loi prom. 01/08/1985 pub. 15/11/2000 numac 2000000832 source ministere de l'interieur Loi portant des mesures fiscales et autres . - chapitre III, section II. - Traduction allemande fermer en ce qui concerne l'aide de l'Etat aux victimes d'actes intentionnels de violence. La Cour de cassation a déjà décidé à plusieurs reprises à ce sujet qu'une telle cotisation avait un caractère spécifique et n'était pas une peine : la circonstance que l'obligation de payer cette cotisation aggrave matériellement la situation du prévenu ne constitue pas, vu le caractère de cette contribution, un empêchement (voir notamment Cass. 9 juin 1987, Arr. Cass., 1986-1987, nos 607 et 609).

Le fait que la cotisation de solidarité exigée n'a pas le caractère d'une peine justifie son recouvrement au profit de la Région.

Vu le caractère sui generis de la cotisation proposée, l'avis conforme du Conseil des ministres n'est pas nécessaire. [ . ] Etant donné que la cotisation de solidarité ne constitue pas une peine [ . ], [l'avis conforme du Conseil des ministres] n'est pas non plus nécessaire en ce qui concerne le régime de la responsabilité sur ce point. » (Doc., Parlement flamand, 1998-1999, n° 1214/8, p. 6).

Les motifs avancés dans les travaux préparatoires permettent de considérer que la cotisation forfaitaire visée n'est pas une peine au sens de l'article 11, alinéa 2, de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles, si bien que cette disposition ne s'applique pas en l'espèce. L'avis conforme du Conseil des ministres n'était donc pas requis.

B.13.5. L'article 59 du décret du 19 décembre 1998 est critiqué parce qu'il prévoit des amendes administratives sans qu'ait été obtenu l'avis conforme du Conseil des ministres.

Il ne peut se déduire de l'article 11 précité de la loi spéciale du 8 août 1980 qu'en leur attribuant le pouvoir d'adopter des dispositions pénales, le législateur spécial aurait privé les régions du pouvoir d'établir des amendes administratives dans les matières régionales.

Le fait qu'une amende administrative doive être qualifiée de pénale au sens de l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme n'a pas pour conséquence que cette amende soit de nature pénale au sens de la législation belge.

L'amende administrative prévue à l'article 59 attaqué ne peut par conséquent être considérée comme une peine au sens de l'article 11 de la loi spéciale du 8 août 1980.

Etant donné que cette dernière disposition n'est pas applicable en l'espèce, l'avis conforme du Conseil des ministres n'était pas requis.

B.13.6. Le quatrième moyen ne peut être admis.

Quant au premier moyen nouveau formulé par le Conseil des ministres B.14.1. Le premier moyen nouveau est pris de la violation, par les articles 59 et 60 du décret du 19 décembre 1998, des articles 10 et 11 de la Constitution lus conjointement avec l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, avec l'article 14 du P.I.D.C.P. ainsi qu'avec les principes généraux du droit pénal.

B.14.2. Selon le Conseil des ministres, le fait que l'amende administrative doive être qualifiée de peine a pour conséquence que doivent être données les garanties, tant procédurales que matérielles, relatives à la protection juridique qui sont inscrites dans les conventions internationales relatives aux droits de l'homme, dans la Constitution et dans les principes généraux du droit pénal. Ceci impliquerait notamment que la décision d'infliger une amende administrative soit susceptible d'appel devant une instance juridictionnelle ayant pleine juridiction. L'article 60 du décret ne prévoirait pas une telle possibilité de recours.

B.14.3. La décision d'infliger une amende administrative, prise par les fonctionnaires que le Gouvernement flamand désigne, et la décision rendue par le Gouvernement flamand sur appel administratif contre la première décision sont des actes administratifs. Contre de tels actes administratifs, un recours en annulation peut être introduit devant le Conseil d'Etat et une exception d'illégalité peut être soulevée devant n'importe quel juge. Tant la section d'administration du Conseil d'Etat que les juridictions visées à l'article 159 de la Constitution exercent un contrôle en fait et en droit sur les actes administratifs précités. En outre, tant la section d'administration du Conseil d'Etat que les juridictions précitées satisfont aux exigences de l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme et de l'article 14 du P.I.D.C.P. B.14.4. Le premier moyen nouveau formulé par le Conseil des ministres ne peut être admis.

Quant au deuxième moyen nouveau formulé par le Conseil des ministres B.15.1. Le deuxième moyen nouveau est pris de la violation, par l'article 58, § 1er, alinéa 4, du décret du 19 décembre 1998, des articles 39 et 134 de la Constitution ainsi que des articles 6, § 1er, X, 1°, et § 4, 3°, 78 et 87, § 1er, de la loi spéciale du 8 août 1980.

Selon le Conseil des ministres, il n'appartiendrait pas au législateur décrétal de charger unilatéralement des fonctionnaires fédéraux du recouvrement des cotisations, régionales par définition, prévues par les dispositions décrétales précitées.

B.15.2. L'article 1er de la loi du 18 décembre 1986 habilitant l'Administration de la taxe sur la valeur ajoutée, de l'enregistrement et des domaines à réaliser certaines opérations patrimoniales pour le compte des institutions communautaires et régionales (Moniteur belge, 24 février 1987) dispose ce qui suit : « Les fonctionnaires de l'Administration de la taxe sur la valeur ajoutée, de l'enregistrement et des domaines peuvent exercer, à la demande, au nom et pour compte des Communautés, des Régions, ainsi que des organismes d'intérêt public qui en dépendent, toutes les attributions domaniales qu'ils assument à l'égard des biens de l'Etat en vertu des lois et arrêtés pris en exécution de celles-ci, y compris le recouvrement des créances non fiscales. » Dès lors qu'il peut être considéré que la cotisation visée à l'article 58, § 1er, alinéa 4, du décret du 19 décembre 1998 constitue une « créance non fiscale » au sens de l'article 1er de la loi du 18 décembre 1986, le législateur décrétal était en droit de charger l'Administration de la taxe sur la valeur ajoutée, de l'enregistrement et des domaines du recouvrement de cette cotisation.

B.15.3. Le deuxième moyen nouveau formulé par le Conseil des ministres ne peut être admis.

Par ces motifs, la Cour rejette les recours.

Ainsi prononcé en langue néerlandaise, en langue française et en langue allemande, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage, à l'audience publique du 6 décembre 2000.

Le greffier f.f., B. Renauld.

Le président, G. De Baets.

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