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Arrêt
publié le 04 juillet 2023

Extrait de l'arrêt n° 168/2022 du 22 décembre 2022 Numéro du rôle : 7563 En cause : la question préjudicielle relative à l'article 17, § 7, des lois sur le Conseil d'Etat, coordonnées le 12 janvier 1973, posée par le Conseil d'Etat. L composée des présidents P. Nihoul et L. Lavrysen, et des juges T. Giet, J. Moerman, M. Pâques, Y. K(...)

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COUR CONSTITUTIONNELLE


Extrait de l'arrêt n° 168/2022 du 22 décembre 2022 Numéro du rôle : 7563 En cause : la question préjudicielle relative à l'article 17, § 7, des lois sur le Conseil d'Etat, coordonnées le 12 janvier 1973, posée par le Conseil d'Etat.

La Cour constitutionnelle, composée des présidents P. Nihoul et L. Lavrysen, et des juges T. Giet, J. Moerman, M. Pâques, Y. Kherbache, T. Detienne, D. Pieters, S. de Bethune, E. Bribosia, W. Verrijdt et K. Jadin, assistée du greffier F. Meersschaut, présidée par le président P. Nihoul, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet de la question préjudicielle et procédure Par arrêt n° 250.083 du 11 mars 2021, dont l'expédition est parvenue au greffe de la Cour le 21 avril 2021, le Conseil d'Etat a posé la question préjudicielle suivante : « L'article 17, § 7, des lois coordonnées sur le Conseil d'Etat viole-t-il les articles 10 et 11 de la Constitution, lus en combinaison avec les articles 6 et 14 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, en ce qu'il s'applique indistinctement : - d'une part, au requérant qui a omis d'introduire une demande de poursuite de la procédure après le rejet d'une demande de mesures provisoires, introduite selon la procédure d'extrême urgence, dirigée contre un acte dérivé de celui dont il demande l'annulation, et, - d'autre part, au requérant qui a omis d'introduire une demande de poursuite de la procédure après le rejet d'une demande de mesures provisoires, introduite selon la procédure d'extrême urgence, dirigée contre l'acte dont il demande l'annulation, ou - au requérant qui a omis d'introduire une demande de poursuite de la procédure après le rejet d'une demande de mesures provisoires, introduite selon la procédure ordinaire, contre un acte dérivé de celui dont il demande l'annulation, ou - au requérant qui a omis d'introduire une demande de poursuite de la procédure après le rejet d'une demande de suspension de l'exécution, introduite selon la procédure ordinaire ou selon la procédure d'extrême urgence, de l'acte dont il demande l'annulation, ou - au requérant qui a omis d'introduire une demande de poursuite de la procédure après le rejet d'une demande de suspension de l'exécution, introduite selon la procédure ordinaire ou selon la procédure d'extrême urgence, d'un acte dérivé de celui dont il demande l'annulation ? ». (...) III. En droit (...) B.1. L'article 17 des lois sur le Conseil d'Etat, coordonnées le 12 janvier 1973 (ci-après : la loi 12 janvier 1973), tel qu'il a été remplacé par l'article 6 de la loi du 20 janvier 2014Documents pertinents retrouvés type loi prom. 20/01/2014 pub. 03/02/2014 numac 2014000082 source service public federal interieur Loi portant réforme de la compétence, de la procédure et de l'organisation du Conseil d'Etat fermer « portant réforme de la compétence, de la procédure et de l'organisation du Conseil d'Etat » (ci-après : la loi du 20 janvier 2014Documents pertinents retrouvés type loi prom. 20/01/2014 pub. 03/02/2014 numac 2014000082 source service public federal interieur Loi portant réforme de la compétence, de la procédure et de l'organisation du Conseil d'Etat fermer), dispose : « § 1er. La section du contentieux administratif est seule compétente pour ordonner par arrêt, les parties entendues ou dûment appelées, la suspension de l'exécution d'un acte ou d'un règlement susceptible d'être annulé en vertu de l'article 14, §§ 1er et 3, et pour ordonner toutes les mesures nécessaires afin de sauvegarder les intérêts des parties ou des personnes qui ont intérêt à la solution de l'affaire.

Cette suspension ou ces mesures provisoires peuvent être ordonnées à tout moment : 1° s'il existe une urgence incompatible avec le traitement de l'affaire en annulation;2° et si au moins un moyen sérieux susceptible prima facie de justifier l'annulation de l'acte ou du règlement est invoqué. [...] § 2. La requête en suspension ou en mesures provisoires contient un exposé des faits qui, selon son auteur, justifient l'urgence invoquée à l'appui de cette requête.

A la demande de la partie adverse ou de la partie intervenante, la section du contentieux administratif tient compte des conséquences probables de la suspension de l'exécution ou des mesures provisoires pour tous les intérêts susceptibles d'être lésés, en ce compris l'intérêt public, et peut décider de ne pas accéder à la demande de suspension ou de mesures provisoires lorsque ses conséquences négatives pourraient l'emporter de manière manifestement disproportionnée sur ses avantages.

Si la section du contentieux administratif rejette une demande de suspension ou de mesures provisoires en raison du défaut d'urgence, une nouvelle demande ne peut être introduite que si elle s'appuie sur des nouveaux éléments justifiant l'urgence de cette demande. La section du contentieux administratif peut, en outre, fixer un délai au cours duquel aucune nouvelle demande de suspension ou de mesures provisoires ne peut être introduite si le seul élément nouveau invoqué consiste en l'écoulement du temps. [...] § 4. Dans les cas d'extrême urgence incompatibles avec le délai de traitement de la demande de suspension ou de mesures provisoires visées au paragraphe 1er, la suspension ou des mesures provisoires peuvent être ordonnées, même avant l'introduction d'un recours en annulation, selon une procédure qui déroge à celle qui s'applique pour la suspension et les mesures provisoires visées au paragraphe 1er.

Le cas échéant, cette suspension ou ces mesures provisoires peuvent même être ordonnées sans que toutes les parties aient été convoquées.

Dans ce cas, l'arrêt qui ordonne la suspension provisoire ou les mesures provisoires convoque les parties à bref délai devant la chambre qui statue sur la confirmation de la suspension ou des mesures provisoires.

La suspension et les mesures provisoires qui ont été ordonnées avant l'introduction de la requête en annulation de l'acte ou du règlement seront immédiatement levées s'il apparaît qu'aucune requête en annulation invoquant des moyens qui les avaient justifiées n'a été introduite dans le délai prévu par le règlement de procédure. § 5. Le président de la chambre ou le conseiller d'Etat qu'il désigne statue dans les quarante-cinq jours sur la demande de suspension ou de mesures provisoires. Si la suspension ou des mesures provisoires ont été ordonnées, il est statué sur la requête en annulation dans les six mois du prononcé de l'arrêt. § 6. La section du contentieux administratif peut, suivant une procédure accélérée déterminée par le Roi, annuler l'acte ou le règlement si, dans les trente jours à compter de la notification de l'arrêt qui ordonne la suspension ou des mesures provisoires ou confirme la suspension provisoire ou les mesures provisoires, la partie adverse ou celui qui a intérêt à la solution de l'affaire n'a pas introduit une demande de poursuite de la procédure. § 7. Il existe dans le chef de la partie requérante une présomption de désistement d'instance lorsque, la demande de suspension d'un acte ou d'un règlement ou la demande de mesures provisoires ayant été rejetée, la partie requérante n'introduit aucune demande de poursuite de la procédure dans un délai de trente jours à compter de la notification de l'arrêt. [...] ».

B.2. La question préjudicielle porte sur l'article 17, § 7, de la loi du 12 janvier 1973Documents pertinents retrouvés type loi prom. 12/01/1973 pub. 01/10/2009 numac 2009000642 source service public federal interieur Lois coordonnées sur le Conseil d'Etat fermer.

Les termes de cette disposition législative sont presque identiques à ceux de l'article 17, § 4ter, de la même loi, tel qu'il était libellé à la suite de son insertion par l'article 11, 7°, de la loi du 4 août 1996Documents pertinents retrouvés type loi prom. 04/08/1996 pub. 08/06/2005 numac 2005015073 source service public federal affaires etrangeres, commerce exterieur et cooperation au developpement Loi portant assentiment à la Convention entre le Royaume de Belgique et la République gabonaise tendant à éviter la double imposition et à prévenir l'évasion fiscale en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune, signée à Bruxelles le 14 janvier 1993 type loi prom. 04/08/1996 pub. 24/07/1997 numac 1996015142 source ministere des affaires etrangeres, du commerce exterieur et de la cooperation au developpement Loi portant approbation de la Convention entre le Royaume de Belgique et la République Arabe d'Egypte tendant à éviter les doubles impositions et à prévenir l'évasion fiscale en matière d'impôts sur le revenu, signée au Caire le 3 janvier 1991 type loi prom. 04/08/1996 pub. 21/10/1999 numac 1999015088 source ministere des affaires etrangeres, du commerce exterieur et de la cooperation internationale Loi portant assentiment au Protocole entre le gouvernement du Royaume de Belgique et le gouvernement de la République française relatif aux allocations de naissance, signé à Bruxelles, le 26 avril 1993 fermer « modifiant les lois sur le Conseil d'Etat, coordonnées le 12 janvier 1973 ». La seule différence se situe dans les mots « ou la demande de mesures provisoires », qui ont été ajoutés afin de tenir compte du fait que, depuis l'entrée en vigueur de la loi du 20 janvier 2014Documents pertinents retrouvés type loi prom. 20/01/2014 pub. 03/02/2014 numac 2014000082 source service public federal interieur Loi portant réforme de la compétence, de la procédure et de l'organisation du Conseil d'Etat fermer, la demande de mesures provisoires n'est plus conçue comme un « accessoire » de la demande de suspension de l'exécution d'un acte administratif mais comme un « accessoire » du recours en annulation de cet acte administratif (Doc. parl., Sénat, 2012-2013, n° 2277/1, pp. 14 et 104).

B.3. Lors des travaux préparatoires de la loi du 4 août 1996Documents pertinents retrouvés type loi prom. 04/08/1996 pub. 08/06/2005 numac 2005015073 source service public federal affaires etrangeres, commerce exterieur et cooperation au developpement Loi portant assentiment à la Convention entre le Royaume de Belgique et la République gabonaise tendant à éviter la double imposition et à prévenir l'évasion fiscale en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune, signée à Bruxelles le 14 janvier 1993 type loi prom. 04/08/1996 pub. 24/07/1997 numac 1996015142 source ministere des affaires etrangeres, du commerce exterieur et de la cooperation au developpement Loi portant approbation de la Convention entre le Royaume de Belgique et la République Arabe d'Egypte tendant à éviter les doubles impositions et à prévenir l'évasion fiscale en matière d'impôts sur le revenu, signée au Caire le 3 janvier 1991 type loi prom. 04/08/1996 pub. 21/10/1999 numac 1999015088 source ministere des affaires etrangeres, du commerce exterieur et de la cooperation internationale Loi portant assentiment au Protocole entre le gouvernement du Royaume de Belgique et le gouvernement de la République française relatif aux allocations de naissance, signé à Bruxelles, le 26 avril 1993 fermer, il a été précisé qu'en cas de « présomption de désistement d'instance », le pouvoir d'appréciation du Conseil d'Etat est limité au « cas de force majeure ou d'erreur invincible » (Doc. parl., Sénat, 1995-1996, n° 321/1, p. 7).

La Cour a, par ailleurs, rappelé, par l'arrêt n° 88/98 du 15 juillet 1998 (point 6) et par l'arrêt n° 143/2002 du 9 octobre 2002 (B.5.1), que la règle qui était auparavant énoncée à l'article 17, § 4ter, de la loi du 12 janvier 1973Documents pertinents retrouvés type loi prom. 12/01/1973 pub. 01/10/2009 numac 2009000642 source service public federal interieur Lois coordonnées sur le Conseil d'Etat fermer ne dispensait pas le Conseil d'Etat de respecter le principe général de droit « selon lequel la rigueur de la loi peut être tempérée en cas de force majeure ou d'erreur invincible ».

B.4. Il résulte de ce qui précède que la section du contentieux administratif du Conseil d'Etat ne peut examiner le bien-fondé d'un recours en annulation ayant été introduit par une personne qui, après avoir reçu notification d'un arrêt refusant de suspendre l'acte visé par ce recours ou d'ordonner des mesures provisoires sollicitées par le requérant dans la même affaire, n'a pas demandé au Conseil d'Etat la « poursuite de la procédure » conformément à l'article 17, § 7, de la loi du 12 janvier 1973Documents pertinents retrouvés type loi prom. 12/01/1973 pub. 01/10/2009 numac 2009000642 source service public federal interieur Lois coordonnées sur le Conseil d'Etat fermer, sauf si le requérant démontre qu'il n'a pas formulé cette dernière demande en raison d'une force majeure ou d'une erreur invincible.

B.5. Il ressort des motifs de la décision de renvoi et du dossier transmis à la Cour par le Conseil d'Etat que la Cour est invitée à statuer sur la question de savoir si l'article 17, § 7, de la loi du 12 janvier 1973Documents pertinents retrouvés type loi prom. 12/01/1973 pub. 01/10/2009 numac 2009000642 source service public federal interieur Lois coordonnées sur le Conseil d'Etat fermer est compatible avec les articles 10 et 11 de la Constitution, lus en combinaison avec les articles 6, paragraphe 1, et 14 de la Convention européenne des droits de l'homme, en ce qu'il interdit au Conseil d'Etat d'examiner le bien-fondé d'un recours en annulation introduit par une personne qui, après avoir reçu notification d'un arrêt rejetant la demande de mesures provisoires qu'elle avait formulée en extrême urgence « contre un acte dérivé de » l'acte administratif qui est attaqué par le recours en annulation, n'a pas demandé la poursuite de la procédure et n'invoque ni force majeure, ni erreur invincible pour justifier cette abstention.

B.6. Les articles 10 et 11 de la Constitution ont une portée générale.

Ils interdisent toute discrimination, quelle qu'en soit l'origine : les règles constitutionnelles de l'égalité et de la non-discrimination sont applicables à l'égard de tous les droits et de toutes les libertés, en ce compris ceux résultant des conventions internationales liant la Belgique.

Le principe d'égalité et de non-discrimination n'exclut pas qu'une différence de traitement soit établie entre des catégories de personnes, pour autant qu'elle repose sur un critère objectif et qu'elle soit raisonnablement justifiée. Ce principe s'oppose, par ailleurs, à ce que soient traitées de manière identique, sans qu'apparaisse une justification raisonnable, des catégories de personnes se trouvant dans des situations qui, au regard de la mesure critiquée, sont essentiellement différentes.

L'existence d'une telle justification doit s'apprécier en tenant compte du but et des effets de la mesure critiquée ainsi que de la nature des principes en cause; le principe d'égalité et de non-discrimination est violé lorsqu'il est établi qu'il n'existe pas de rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et le but visé.

B.7.1. L'article 14 de la Convention européenne des droits de l'homme dispose : « La jouissance des droits et libertés reconnus dans la présente Convention doit être assurée, sans distinction aucune, fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur, la langue, la religion, les opinions politiques ou toutes autres opinions, l'origine nationale ou sociale, l'appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance ou toute autre situation ».

B.7.2. Cette disposition reconnaît le droit de jouir sans discrimination des droits et libertés reconnus par cette Convention.

Ce droit est violé lorsque des personnes dont les situations sont sensiblement différentes sont traitées de manière identique sans justification objective et raisonnable (CEDH, grande chambre, 6 avril 2000, Thlimmenos c. Grèce, § 44; 2 novembre 2010, Serife Yigit c.

Turquie, § 69; 24 octobre 2019, J.D. et A c. Royaume-Uni, § 84).

B.8. Le droit à un procès équitable défini par l'article 6, paragraphe 1, de la Convention européenne des droits de l'homme comprend entre autres le droit d'accès à un tribunal. Cette disposition garantit donc à chacun le droit de faire statuer par un tribunal sur toute contestation portant sur ses « droits et obligations de caractère civil » (CEDH, grande chambre, 15 mars 2022, Grzeda c. Pologne, § 342;

CEDH, 20 juillet 2021, Loquifer c. Belgique, § 52).

B.9. Il ressort des motifs de la décision de renvoi que la Cour est, en premier lieu, invitée à se prononcer sur le point de savoir s'il n'est pas discriminatoire de traiter de manière identique deux catégories de requérants qui n'ont pas demandé la poursuite de la procédure après avoir reçu notification d'un arrêt refusant d'ordonner les mesures provisoires qu'ils avaient demandées après avoir introduit un recours en annulation : d'une part, ceux dont la demande de mesures provisoires était « dirigée contre un acte dérivé de celui dont [ils demandent] l'annulation » et, d'autre part, ceux dont la demande de mesures provisoires était « dirigée contre l'acte dont [ils demandent] l'annulation ».

B.10. Les mesures provisoires qu'une personne qui a préalablement introduit un recours en annulation contre un acte administratif déterminé demande au Conseil d'Etat d'ordonner sont des mesures nécessaires à la sauvegarde des intérêts de cette personne durant la période de traitement de ce recours (article 17, § 1er, alinéas 1er et 2, de la loi du 12 janvier 1973Documents pertinents retrouvés type loi prom. 12/01/1973 pub. 01/10/2009 numac 2009000642 source service public federal interieur Lois coordonnées sur le Conseil d'Etat fermer). Ces mesures ne sont donc pas elles-mêmes dirigées contre l'acte administratif attaqué par le recours en annulation. En ce que la question préjudicielle établit une distinction entre ceux dont la demande de mesures provisoires « était dirigée contre un acte dérivé de celui dont [ils demandent] l'annulation » et, d'autre part, ceux dont la demande de mesures provisoires était « dirigée contre l'acte dont [ils demandent] l'annulation », cette question préjudicielle est basée sur une prémisse erronée.

B.11. En ce qui concerne la première identité de traitement qu'elle décrit, la question préjudicielle n'appelle pas de réponse.

B.12. Il ressort des motifs de la décision de renvoi que la Cour est, en deuxième lieu, invitée à se prononcer sur le point de savoir s'il n'est pas discriminatoire de traiter de manière identique deux catégories de parties requérantes qui n'ont pas demandé la poursuite de la procédure après avoir reçu notification d'un arrêt refusant d'ordonner les mesures provisoires qu'elles avaient demandées après avoir introduit un recours en annulation : d'une part, celles qui avaient demandé des mesures provisoires en alléguant l'extrême urgence et, d'autre part, celles qui les avaient demandées sans alléguer l'extrême urgence. En troisième lieu, la Cour est invitée à se prononcer sur l'identité de traitement entre, d'une part, celles qui, en extrême urgence, avaient formulé une demande de mesures provisoires et, d'autre part, celles qui avaient demandé la suspension de l'exécution de l'acte dont elles demandent l'annulation.

B.13. Par l'arrêt n° 88/98, la Cour a considéré à propos de la mesure contenue dans l'article 17, § 4ter, de la loi du 12 janvier 1973Documents pertinents retrouvés type loi prom. 12/01/1973 pub. 01/10/2009 numac 2009000642 source service public federal interieur Lois coordonnées sur le Conseil d'Etat fermer que, quelque lourde que soit pour la partie requérante la conséquence de l'inobservation du délai fixé pour l'introduction d'une demande de poursuite de la procédure, une telle mesure n'est pas manifestement disproportionnée au regard de l'objectif poursuivi par le législateur, à savoir réduire la durée de la procédure et inciter la partie requérante à ne pas poursuivre inutilement les procédures, compte tenu du principe général du droit selon lequel la rigueur de la loi peut être tempérée en cas de force majeure ou d'erreur invincible, principe auquel la loi en cause n'a pas dérogé (voir point 6 de l'arrêt précité). Comme il est dit en B.2, les termes de l'article 17, § 7, sont quasiment identiques à l'ancien article 17, § 4ter. En ce qui concerne les autres dispositions de la loi du 12 janvier 1973Documents pertinents retrouvés type loi prom. 12/01/1973 pub. 01/10/2009 numac 2009000642 source service public federal interieur Lois coordonnées sur le Conseil d'Etat fermer qui lient une sanction analogue à l'introduction ou non d'une demande de poursuite de la procédure, la Cour a également déjà jugé dans ce sens à plusieurs reprises (arrêts n° 144/2016 du 17 novembre 2016 et n° 24/2020 du 13 février 2020). Indépendamment de la question de savoir si les catégories de parties requérantes comparées se trouvent réellement dans une situation fondamentalement différente, il convient de constater que les motifs précités s'appliquent de la même manière en ce qui concerne ces catégories.

B.14. En ce qui concerne les deuxième et troisième identités de traitement qu'elle décrit, la question préjudicielle appelle une réponse négative.

B.15. Il ressort des motifs de la décision de renvoi que la Cour est enfin invitée à se prononcer sur le point de savoir s'il n'est pas discriminatoire de traiter de manière identique deux catégories de requérants qui n'ont volontairement pas demandé la poursuite de la procédure après avoir reçu notification d'un arrêt du Conseil d'Etat refusant de faire droit à une demande relative à un « acte dérivé de celui dont [ils demandent] l'annulation » qu'ils avaient formulée après l'introduction de leur recours en annulation : d'une part, ceux qui, en extrême urgence, avaient formulé une demande de mesures provisoires « dirigée contre » un tel acte et, d'autre part, ceux qui avaient demandé la suspension de l'exécution de cet acte.

B.16. En plus de ce qui est dit en B.10, il convient de constater que la non-introduction d'une demande de poursuite de la procédure dans le cadre d'une demande de suspension contre un acte administratif autre que celui qui constitue l'objet du recours en annulation ne donne pas lieu à l'application de l'article 17, § 7, de la loi du 12 janvier 1973Documents pertinents retrouvés type loi prom. 12/01/1973 pub. 01/10/2009 numac 2009000642 source service public federal interieur Lois coordonnées sur le Conseil d'Etat fermer dans le cadre de ce recours en annulation. Cette disposition n'instaure en effet pas de présomption de désistement d'instance dans le chef de la personne qui a reçu notification d'un arrêt du Conseil d'Etat statuant sur une demande de suspension de l'exécution d'un acte administratif autre que celui qui constitue l'objet du recours en annulation que cette personne a préalablement introduit.

B.17. La disposition en cause ne traite pas les deux catégories précitées de parties requérantes de la même manière.

En ce qui concerne la quatrième identité de traitement qu'elle décrit, la question préjudicielle appelle donc une réponse négative.

Par ces motifs, la Cour dit pour droit : L'article 17, § 7, des lois sur le Conseil d'Etat, coordonnées le 12 janvier 1973, ne viole pas les articles 10 et 11 de la Constitution, lus en combinaison avec les articles 6 et 14 de la Convention européenne des droits de l'homme.

Ainsi rendu en langue française et en langue néerlandaise, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, le 22 décembre 2022.

Le greffier, F. Meersschaut Le président, P. Nihoul

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