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Arrêt
publié le 30 janvier 2023

Extrait de l'arrêt n° 138/2022 du 27 octobre 2022 Numéros du rôle : 7623, 7625, 7627, 7628, 7629, 7630 et 7631 En cause : les recours en annulation totale ou partielle de la loi du 17 février 2021 « portant introduction d'une taxe annuelle su La Cour constitutionnelle, composée des présidents L. Lavrysen et P. Nihoul, des juges T. Giet, (...)

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COUR CONSTITUTIONNELLE


Extrait de l'arrêt n° 138/2022 du 27 octobre 2022 Numéros du rôle : 7623, 7625, 7627, 7628, 7629, 7630 et 7631 En cause : les recours en annulation totale ou partielle de la loi du 17 février 2021Documents pertinents retrouvés type loi prom. 17/02/2021 pub. 25/02/2021 numac 2021040569 source service public federal finances Loi portant introduction d'une taxe annuelle sur les comptes-titres fermer « portant introduction d'une taxe annuelle sur les comptes-titres », introduits par l'union professionnelle « Assuralia » et autres, par la SA « Groupe Bruxelles Lambert » et la SA « Sagerpar », par la SA « Portus », par l'ASBL « Vlaamse Federatie van Beleggers » et autres, par Laurent Donnay de Casteau, par l'ASBL « Ligue des Contribuables » et par la SRL « NXMH ».

La Cour constitutionnelle, composée des présidents L. Lavrysen et P. Nihoul, des juges T. Giet, J. Moerman, M. Pâques, Y. Kherbache, T. Detienne, D. Pieters, S. de Bethune, E. Bribosia et W. Verrijdt, et, conformément à l'article 60bis de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, du juge émérite J.-P. Moerman, assistée du greffier F. Meersschaut, présidée par le président L. Lavrysen, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet des recours et procédure a. Par requête adressée à la Cour par lettre recommandée à la poste le 12 août 2021 et parvenue au greffe le 16 août 2021, un recours en annulation de l'article 4 de la loi du 17 février 2021Documents pertinents retrouvés type loi prom. 17/02/2021 pub. 25/02/2021 numac 2021040569 source service public federal finances Loi portant introduction d'une taxe annuelle sur les comptes-titres fermer « portant introduction d'une taxe annuelle sur les comptes-titres » (publiée au Moniteur belge du 25 février 2021) a été introduit par l'union professionnelle « Assuralia », la SA « Argenta Assuranties », la SA « AG Insurance » et la SA « Allianz Benelux », assistées et représentées par Me P.Berger, avocat au barreau d'Anvers, et par Me B. Martens et Me P. Hinnekens, avocats au barreau de Bruxelles. b. Par requête adressée à la Cour par lettre recommandée à la poste le 18 août 2021 et parvenue au greffe le 19 août 2021, un recours en annulation des articles 4 et 16 de la même loi a été introduit par la SA « Groupe Bruxelles Lambert » et la SA « Sagerpar », assistées et représentées par Me B.Paquot et Me P. Maufort, avocats au barreau de Bruxelles. c. Par requête adressée à la Cour par lettre recommandée à la poste le 19 août 2021 et parvenue au greffe le 23 août 2021, la SA « Portus », assistée et représentée par Me A.Visschers et Me F. Smet, avocats au barreau de Bruxelles, a introduit un recours en annulation des articles 4, 15, 16 et 21 de la même loi. d. Par quatre requêtes adressées à la Cour par lettres recommandées à la poste les 23 et 24 août 2021 et parvenues au greffe les 25 et 26 août 2021, des recours en annulation de la même loi ont été introduits respectivement par l'ASBL « Vlaamse Federatie van Beleggers », Luc Braeckmans, Jozef Moerenhout, Brigitte Broekaert et Herman Roelens, assistés et représentés par Me D.Coveliers, Me Y. Cools et Me E. Vandingenen, avocats au barreau d'Anvers, et par Me B. De Cock, avocat au barreau de Gand, par Laurent Donnay de Casteau, par l'ASBL « Ligue des Contribuables », assistée et représentée par Me T. Afschrift, avocat au barreau d'Anvers, et par Me S. Chatzigiannis, avocat au barreau de Bruxelles, et par la SRL « NMXH », assistée et représentée par Me H. Vanhulle, Me L. Swartenbroux, Me C. Borgers et Me W. Verhoeye, avocats au barreau de Bruxelles.

Ces affaires, inscrites sous les numéros 7623, 7625, 7627, 7628, 7629, 7630 et 7631 du rôle de la Cour, ont été jointes. (...) II. En droit (...) Quant aux dispositions attaquées B.1.1. La loi du 17 février 2021Documents pertinents retrouvés type loi prom. 17/02/2021 pub. 25/02/2021 numac 2021040569 source service public federal finances Loi portant introduction d'une taxe annuelle sur les comptes-titres fermer « portant introduction d'une taxe annuelle sur les comptes-titres » (ci-après : la loi attaquée) a pour objet d'instaurer une taxe annuelle sur les comptes-titres, qui est inscrite dans le titre X, nouveau, du livre II du Code des droits et taxes divers. Cette taxe annuelle est perçue sur la détention d'un compte-titres, tant par des résidents que par des non-résidents. Le taux est fixé à 0,15 % de la valeur moyenne de tous les instruments financiers détenus sur un compte-titres entre le 1er octobre et le 30 septembre de l'année suivante. Une exonération est toutefois applicable si la valeur moyenne n'excède pas 1 000 000 euros.

B.1.2. L'article 201/3 du Code des droits et taxes divers, inséré par l'article 3 de la loi attaquée, comporte plusieurs définitions : « Pour l'application du présent titre, l'on entend par : 1° résidents : a) les habitants du royaume visés à l'article 2, § 1er, 1°, du Code des impôts sur les revenus 1992;b) les sociétés visées à l'article 2, § 1er, 5°, b, du Code des impôts sur les revenus 1992;c) les personnes morales visées à l'article 220 du Code des impôts sur les revenus 1992;2° non-résidents : les contribuables visés à l'article 227 du Code des impôts sur les revenus 1992;3° compte-titres : un compte sur lequel des instruments financiers peuvent être crédités ou duquel des instruments financiers peuvent être débités, peu importe qu'il soit détenu en indivision ou en propriété divisée, et qui : a) en ce qui concerne les résidents, est détenu auprès d'un intermédiaire, peu importe où cet intermédiaire a été constitué ou est établi;b) en ce qui concerne les non-résidents, est détenu auprès d'un intermédiaire belge, à l'exception du cas visé sous c);c) en ce qui concerne les établissements belges de non-résidents visés à l'article 229 du Code des impôts sur les revenus 1992, fait partie de l'actif dudit établissement et est détenu auprès d'un intermédiaire, peu importe où cet intermédiaire a été constitué ou est établi;4° instruments financiers imposables : tous les instruments financiers, comme entre autres ceux visés à l'article 2, 1°, de la loi du 2 août 2002Documents pertinents retrouvés type loi prom. 02/08/2002 pub. 04/09/2002 numac 2002003392 source ministere des finances Loi relative à la surveillance du secteur financier et aux services financiers type loi prom. 02/08/2002 pub. 04/09/2002 numac 2002003391 source ministere des finances Loi complétant, en ce qui concerne les voies de recours contre les décisions prises par le ministre, par la CBF, par l'OCA et par les entreprises de marché et en ce qui concerne l'intervention de la CBF et de l'OCA devant les juridictions répressives, la loi du 2 août 2002 relative à la surveillance du secteur financier et aux services financiers et modifiant diverses autres dispositions légales fermer relative à la surveillance du secteur financier et aux services financiers, ainsi que les fonds, détenus sur un compte-titres;5° période de référence : une période de douze mois successifs qui commence le 1er octobre et se termine le 30 septembre de l'année suivante, ou, le cas échéant, au moment : a) de la clôture du compte-titres;ou b) où l'unique ou le dernier titulaire devient résident d'un Etat avec lequel la Belgique a conclu une convention préventive de double imposition ayant pour effet que le pouvoir d'imposition du patrimoine sur le compte-titres est attribué à l'autre Etat;c) où le compte-titres ne fait plus partie de l'actif d'un établissement belge visé à l'article 229 du Code des impôts sur les revenus 1992 d'un non-résident, si cela a pour conséquence que la Belgique, en raison d'une convention préventive de double imposition, n'est plus compétente pour imposer le patrimoine sur le compte-titres;d) où le compte cesse de répondre à la définition visée au 3°;6° intermédiaire : la Banque nationale de Belgique, la Banque centrale européenne et les banques centrales étrangères exerçant des fonctions similaires, un dépositaire central de titres visé à l'article 198/1, § 6, 12°, du Code des impôts sur les revenus 1992, un établissement de crédit ou une société de bourse visé à l'article 1er, § 3, de la loi du 25 avril 2014Documents pertinents retrouvés type loi prom. 25/04/2014 pub. 07/05/2014 numac 2014003194 source service public federal finances et service public federal justice Loi relative au statut et au contrôle des établissements de crédit type loi prom. 25/04/2014 pub. 28/05/2014 numac 2014003234 source service public federal economie, p.m.e., classes moyennes et energie, service public federal justice et service public federal finances Loi modifiant la loi du 22 février 1998 fixant le statut organique de la Banque nationale de Belgique, la loi du 2 août 2002 relative à la surveillance du secteur financier et aux services financiers, la loi du 22 mars 1993 relative au statut et au contrôle des établissements de crédit, la loi du 9 juillet 1975 relative au contrôle des entreprises d'assurances, la loi du 16 février 2009 relative à la réassurance, la loi du 6 avril 1995 relative au statut et au contrôle des entreprises d'investissement, la loi du 21 décembre 2009 relative au statut des établissements de paiement et des établissements de monnaie électronique, à l'accès à l'activité de prestataire de services de paiement, à l'activité d'émission de monnaie électronique et à l'accès aux systèmes de paiement, la loi du 28 avril 1999 visant à transposer la Directive 98/26/CE du 19 mai 1998 concernant le caractère définitif du règlement dans les systèmes de paiement et de règlement des opérations sur titres et la loi du 15 décembre 2004 relative aux suretés financières et portant des dispositions fiscales diverses en matière de conventions constitutives de sureté réelle et de prêts portant sur des instruments financiers type loi prom. 25/04/2014 pub. 27/05/2014 numac 2014003225 source service public federal finances Loi relative au statut et au contrôle des planificateurs financiers indépendants et à la fourniture de consultations en planification par des entreprises réglementées et modifiant le Code des sociétés et la loi du 2 août 2002 relative à la surveillance du secteur financier et aux services financiers type loi prom. 25/04/2014 pub. 18/01/2016 numac 2016000006 source service public federal interieur Loi modifiant la loi du 22 février 1998 fixant le statut organique de la Banque nationale de Belgique, la loi du 2 août 2002 relative à la surveillance du secteur financier et aux services financiers, la loi du 22 mars 1993 relative au statut et au contrôle des établissements de crédit, la loi du 9 juillet 1975 relative au contrôle des entreprises d'assurances, la loi du 16 février 2009 relative à la réassurance, la loi du 6 avril 1995 relative au statut et au contrôle des entreprises d'investissement, la loi du 21 décembre 2009 relative au statut des établissements de paiement et des établissements de monnaie électronique, à l'accès à l'activité de prestataire de services de paiement, à l'activité d'émission de monnaie électronique et à l'accès aux systèmes de paiement, la loi du 28 avril 1999 visant à transposer la Directive 98/26/CE du 19 mai 1998 concernant le caractère définitif du règlement dans les systèmes de paiement et de règlement des opérations sur titres et la loi du 15 décembre 2004 relative aux suretés financières et portant des dispositions fiscales diverses en matière de conventions constitutives de sureté réelle et de prêts portant sur des instruments financiers. - Traduction allemande d'extraits fermer relative au statut et au contrôle des établissements de crédit et des sociétés de bourse, ainsi que les entreprises d'investissement, visées à l'article 3, § 1er, de la loi de 25 octobre 2016 relative à l'accès à l'activité de prestation de services d'investissement et au statut et au contrôle des sociétés de gestion de portefeuille et de conseil en investissement, qui, en vertu du droit national, sont autorisés à détenir des instruments financiers pour le compte de clients;7° intermédiaire belge : un intermédiaire constitué conformément au droit belge ainsi qu'un intermédiaire établi en Belgique.Les intermédiaires qui ne sont pas établis en Belgique et qui ont désigné un représentant visé à l'article 201/9/1, sont assimilés à un intermédiaire belge pour l'application du présent titre; 8° titulaire : le(s) détenteur(s) du compte-titres y compris le(s) fondateur(s) de constructions juridiques, constructions filiales, constructions mères et constructions en chaîne dans le cadre desquelles le compte est détenu;9° fondateur : la personne considérée comme fondateur d'une construction juridique en application de l'article 2, § 1er, 14°, du Code des impôts sur les revenus 1992;10° construction juridique, construction filiale construction mère et construction en chaîne : les constructions, où qu'elles soient établies, considérées comme construction juridique, construction filiale, construction mère et construction en chaîne, en application respectivement de l'article 2, § 1er, 13°, 13°/2, 13°/3 et 13°/4, du Code des impôts sur les revenus 1992;11° redevable : selon le cas, l'intermédiaire belge, le représentant responsable visé à l'article 201/9/1 ou le titulaire ». B.1.3. L'article 201/4 du Code des droits et taxes divers, inséré par l'article 4 de la loi attaquée, règle la matière imposable, la base imposable, l'exonération si la valeur moyenne des instruments financiers imposables n'excède pas 1 000 000 euros, ainsi que l'exonération pour les comptes-titres détenus exclusivement pour compte propre par un certain nombre d'institutions financières et par des organismes de placement collectif. L'article 201/4, alinéa 6, dispose que les opérations effectuées à partir du 30 octobre 2020 et consistant à scinder un compte-titres en plusieurs comptes-titres détenus auprès du même intermédiaire et à convertir des instruments financiers imposables, détenus sur un compte-titres, en instruments financiers nominatifs, ne sont pas opposables à l'administration fiscale : « Une taxe annuelle est perçue sur les comptes-titres.

La base imposable est la valeur moyenne des instruments financiers imposables au cours de la période de référence.

La taxe est due seulement si cette valeur moyenne est supérieure à 1 000 000 euros.

La taxe n'est pas due quant aux comptes-titres, sans qu'un tiers autre qu'une institution, société ou entité visée au présent alinéa dispose d'un droit de créance direct ou indirect lié à la valeur du compte-titres détenu, qui sont détenus par : 1° la Banque nationale de Belgique, la Banque centrale européenne et les banques centrales étrangères exerçant des fonctions similaires, et par les institutions financières visées à l'article 198/1, § 6, 1° à 12° du Code des impôts sur les revenus 1992;2° une société de bourse visée à l'article 1er, § 3, de la loi du 25 avril 2014Documents pertinents retrouvés type loi prom. 25/04/2014 pub. 07/05/2014 numac 2014003194 source service public federal finances et service public federal justice Loi relative au statut et au contrôle des établissements de crédit type loi prom. 25/04/2014 pub. 28/05/2014 numac 2014003234 source service public federal economie, p.m.e., classes moyennes et energie, service public federal justice et service public federal finances Loi modifiant la loi du 22 février 1998 fixant le statut organique de la Banque nationale de Belgique, la loi du 2 août 2002 relative à la surveillance du secteur financier et aux services financiers, la loi du 22 mars 1993 relative au statut et au contrôle des établissements de crédit, la loi du 9 juillet 1975 relative au contrôle des entreprises d'assurances, la loi du 16 février 2009 relative à la réassurance, la loi du 6 avril 1995 relative au statut et au contrôle des entreprises d'investissement, la loi du 21 décembre 2009 relative au statut des établissements de paiement et des établissements de monnaie électronique, à l'accès à l'activité de prestataire de services de paiement, à l'activité d'émission de monnaie électronique et à l'accès aux systèmes de paiement, la loi du 28 avril 1999 visant à transposer la Directive 98/26/CE du 19 mai 1998 concernant le caractère définitif du règlement dans les systèmes de paiement et de règlement des opérations sur titres et la loi du 15 décembre 2004 relative aux suretés financières et portant des dispositions fiscales diverses en matière de conventions constitutives de sureté réelle et de prêts portant sur des instruments financiers type loi prom. 25/04/2014 pub. 27/05/2014 numac 2014003225 source service public federal finances Loi relative au statut et au contrôle des planificateurs financiers indépendants et à la fourniture de consultations en planification par des entreprises réglementées et modifiant le Code des sociétés et la loi du 2 août 2002 relative à la surveillance du secteur financier et aux services financiers type loi prom. 25/04/2014 pub. 18/01/2016 numac 2016000006 source service public federal interieur Loi modifiant la loi du 22 février 1998 fixant le statut organique de la Banque nationale de Belgique, la loi du 2 août 2002 relative à la surveillance du secteur financier et aux services financiers, la loi du 22 mars 1993 relative au statut et au contrôle des établissements de crédit, la loi du 9 juillet 1975 relative au contrôle des entreprises d'assurances, la loi du 16 février 2009 relative à la réassurance, la loi du 6 avril 1995 relative au statut et au contrôle des entreprises d'investissement, la loi du 21 décembre 2009 relative au statut des établissements de paiement et des établissements de monnaie électronique, à l'accès à l'activité de prestataire de services de paiement, à l'activité d'émission de monnaie électronique et à l'accès aux systèmes de paiement, la loi du 28 avril 1999 visant à transposer la Directive 98/26/CE du 19 mai 1998 concernant le caractère définitif du règlement dans les systèmes de paiement et de règlement des opérations sur titres et la loi du 15 décembre 2004 relative aux suretés financières et portant des dispositions fiscales diverses en matière de conventions constitutives de sureté réelle et de prêts portant sur des instruments financiers. - Traduction allemande d'extraits fermer relative au statut et au contrôle des établissements de crédit et des sociétés de bourse;3° les institutions et entités visées à l'article 2, § 1er, 13°/1, alinéa 1er, a à c du Code des impôts sur les revenus 1992, à l'exception des institutions, entités et compartiments visés à l'article 2, § 1er, 13°/1, alinéas 2 et 3 du même Code. La taxe n'est pas non plus due quant aux comptes-titres : 1° détenus, directement ou indirectement, et exclusivement pour compte-propre, par des non-résidents qui n'affectent pas ces comptes-titres à un établissement belge visé à l'article 229 du Code des impôts sur les revenus 1992 dont ils disposent, auprès d'un dépositaire central de titres visé à l'article 198/1, § 6, 12°, du Code des impôts sur les revenus 1992, ou auprès d'une banque dépositaire agréée par la Banque nationale de Belgique en application de l'article 36/26/1, § 6, de la loi du 22 février 1998Documents pertinents retrouvés type loi prom. 22/02/1998 pub. 28/03/1998 numac 1998003158 source ministere des finances Loi fixant le statut organique de la Banque Nationale de Belgique fermer fixant le statut organique de la Banque Nationale de Belgique;2° détenus, pour le compte de tiers, par les intermédiaires, en couverture d'instruments financiers inscrits en compte-titres dans leurs livres ou en couverture de droits détenus par une institution, entité ou société visée à l'alinéa 4, auprès d'un autre intermédiaire ou auprès d'un dépositaire central de titres visé à l'article 2, alinéa 1er, point 1, du Règlement (UE) n° 909/2014 du Parlement européen et du Conseil du 23 juillet 2014 concernant l'amélioration du règlement de titres dans l'Union européenne et les dépositaires centraux de titres, et modifiant les Directives 98/26/CE et 2014/65/UE ainsi que le Règlement (UE) n° 236/2012. Pour l'application du présent article ne sont pas opposables à l'administration fiscale, les opérations effectuées à partir du 30 octobre 2020 et consistant en : 1° la scission d'un compte-titres en plusieurs comptes-titres détenus auprès du même intermédiaire;2° la conversion d'instruments financiers imposables, détenus sur un compte-titres, en instruments financiers nominatifs ». B.1.4. Outre la réglementation anti-abus prévue par l'article 201/4, alinéa 6, qui rend deux opérations spécifiques irréfragablement inopposables à l'administration fiscale, les articles 15 et 16 de la loi attaquée instaurent également une disposition « générale » anti-abus. L'article 202 du Code des droits et taxes divers, inséré par l'article 16 de la loi attaquée, dispose : « N'est pas opposable à l'administration, l'acte juridique ni l'ensemble d'actes juridiques réalisant une même opération lorsque l'administration en charge de l'établissement ou de la perception et du recouvrement des taxes établies par le Livre II démontre par présomptions ou par d'autres moyens de preuve visés à l'article 2061 et à la lumière de circonstances objectives, qu'il y a abus fiscal.

Il y a abus fiscal lorsque le redevable ou le contribuable réalise, par l'acte juridique ou l'ensemble d'actes juridiques qu'il a posé, l'une des opérations suivantes : 1° une opération par laquelle il se place, en violation des objectifs d'une disposition applicable à un impôt établi par ce Code ou des arrêtés pris en exécution de celui-ci, en-dehors du champ d'application de cette disposition;ou 2° une opération par laquelle il prétend à un avantage fiscal prévu par une disposition applicable à un impôt établi par ce Code ou des arrêtés pris en exécution de celui-ci, dont l'octroi serait contraire aux objectifs de cette disposition et dont le but essentiel est l'obtention de cet avantage. Il appartient au redevable ou au contribuable de prouver que le choix de cet acte juridique ou de cet ensemble d'actes juridiques se justifie par d'autres motifs que la volonté d'éviter l'impôt.

Lorsque le redevable ou le contribuable ne fournit pas la preuve contraire, l'opération est soumise à un prélèvement conforme à l'objectif de la loi, comme si l'abus n'avait pas eu lieu ».

B.1.5. L'article 201/5, inséré par l'article 5 de la loi attaquée, détermine comment est calculée la valeur moyenne des instruments financiers imposables qui sont détenus sur le compte-titres durant la période de référence : « Au cours de la période de référence, les points de référence sont le 31 décembre, le 31 mars, le 30 juin et le 30 septembre.

La base imposable est la somme de la valeur des instruments financiers imposables aux points de référence, divisée par le nombre de ceux-ci.

En cas d'ouverture ou de clôture d'un compte-titres durant la période de référence, les points de référence visés à l'alinéa 1er et auxquels le compte existait sont pris en compte pour le calcul de la base imposable ».

La taxe est due le premier jour qui suit la fin de la période de référence (article 201/8, inséré par l'article 8 de la loi attaquée).

Le taux de 0,15 % est limité à 10 % de la différence entre la base imposable et le seuil de 1 000 000 euros (article 201/6, alinéa 2, inséré par l'article 6 de la loi attaquée).

B.1.6. S'ils sont établis ou constitués en Belgique, les intermédiaires fournissent aux titulaires, au terme de la période de référence, un aperçu contenant des données sur la taxe due, le compte-titres concerné et l'identité du ou des titulaires (article 201/7 du Code des droits et taxes divers, inséré par l'article 7 de la loi attaquée) et effectuent la retenue, la déclaration et le paiement de la taxe (articles 201/9, § 1er, et 201/9/2, § 1er, du Code des droits et taxes divers, insérés par les articles 9 et 11 de la loi attaquée). Si l'intermédiaire belge n'effectue pas la retenue, la déclaration et le paiement de la taxe, le titulaire procède lui-même à la déclaration électronique et au paiement, et ce solidairement s'il y a plusieurs titulaires d'un même compte-titres (articles 201/9, § 2, et 201/9/3, §§ 1er et 2, du Code des droits et taxes divers, insérés par les articles 9 et 12 de la loi attaquée).

Les intermédiaires non constitués ou non établis en Belgique peuvent faire agréer un représentant responsable pour la déclaration et le paiement de la taxe (article 201/9/1 du Code des droits et taxes divers, inséré par l'article 10 de la loi attaquée). Des amendes sont prévues en cas d'absence de déclaration, de déclaration tardive, inexacte ou incomplète ainsi qu'en cas d'absence de paiement ou de paiement tardif (articles 201/9/2, § 2, et 201/9/3, § 3, du Code des droits et taxes divers, insérés par les articles 11 et 12 de la loi attaquée). L'administration fiscale peut demander au titulaire tous les renseignements nécessaires et une amende est prévue pour toute communication fautive ou absence de communication (article 201/9/5 du Code des droits et taxes divers, inséré par l'article 14 de la loi attaquée).

B.1.7. La loi attaquée est entrée en vigueur le 26 février 2021, le jour qui suit celui de sa publication au Moniteur belge, à l'exception des dispositions anti-abus qui produisent leurs effets le 30 octobre 2020.

Quant à la recevabilité B.2.1. Le Conseil des ministres conteste la recevabilité de plusieurs moyens, à défaut d'exposé.

B.2.2. Pour satisfaire aux exigences de l'article 6 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, les moyens de la requête doivent faire connaître, parmi les règles dont la Cour garantit le respect, celles qui seraient violées ainsi que les dispositions qui violeraient ces règles et exposer en quoi ces règles auraient été transgressées par ces dispositions.

La Cour examine les moyens en ce qu'ils répondent aux exigences précitées.

Quant au fond B.3. Les griefs des parties requérantes portent sur les éléments suivants : I. le but de la loi attaquée (premier moyen dans l'affaire n° 7628 et première branche du deuxième moyen dans l'affaire n° 7630) (B.4.1-B.6);

II. le choix de la matière imposable (troisième branche du deuxième moyen dans l'affaire n° 7628, deuxième branche du premier moyen et quatrième moyen dans l'affaire n° 7630, deuxième, troisième, cinquième et sixième branches du premier moyen dans l'affaire n° 7631, troisième moyen dans l'affaire n° 7629, première branche du premier moyen dans l'affaire n° 7630, troisième branche du deuxième moyen dans l'affaire n° 7630) (B.7.1-B.12);

III. l'exonération si la valeur moyenne des instruments financiers imposables inscrits sur les comptes-titres au cours de la période de référence ne dépasse pas 1 000 000 euros (première branche du deuxième moyen dans l'affaire n° 7628, premier moyen dans l'affaire n° 7629, première et deuxième branches du deuxième moyen dans l'affaire n° 7630, première branche du premier moyen dans l'affaire n° 7631) (B.13-B.15);

IV. l'exonération des comptes-titres détenus par certaines institutions financières et certains organismes de placement collectif (premier, deuxième et troisième moyens dans l'affaire n° 7623, cinquième moyen dans l'affaire n° 7630, deuxième branche du deuxième moyen dans l'affaire n° 7628, quatrième moyen dans l'affaire n° 7629) (B.16.1-B.20);

V. la non-opposabilité à l'administration de certaines opérations relatives à des comptes-titres (premier, deuxième et troisième moyens dans l'affaire n° 7625, premier, deuxième et troisième moyens dans l'affaire n° 7627, troisième moyen dans l'affaire n° 7628, sixième et septième moyens dans l'affaire n° 7629, septième moyen dans l'affaire n° 7630, quatrième branche du premier moyen dans l'affaire n° 7631) (B.21.1-B.39);

VI. le principe non bis in idem en matière fiscale (quatrième moyen dans l'affaire n° 7628, troisième moyen dans l'affaire n° 7630) (B.40.1-B.42);

VII. l'obligation d'information des intermédiaires belges et les obligations des titulaires de comptes-titres (deuxième moyen dans l'affaire n° 7629) (B.44-B.48);

VIII. le délai prévu pour la déclaration et le paiement de la taxe attaquée (cinquième moyen dans l'affaire n° 7629) (B.49-B.51);

IX. l'application potentielle de conventions internationales préventives de la double imposition (première et deuxième branches du huitième moyen dans l'affaire n° 7630) (B.52.1-B.53.4.2);

X. la libre prestation des services et la libre circulation des capitaux (cinquième et sixième moyens dans l'affaire n° 7628, troisième moyen dans l'affaire n° 7631) (B.54-B.62);

XI. l'interdiction de percevoir des impôts indirects sur l'apport de capital dans une société (sixième moyen dans l'affaire n° 7628, troisième moyen dans l'affaire n° 7631) (B.63-B.68);

XII. les règles en matière d'aide d'Etat (deuxième moyen dans l'affaire n° 7631) (B.69-B.71).

I. En ce qui concerne le but de la loi attaquée B.4.1. Le premier moyen dans l'affaire n° 7628 est pris de la violation des articles 10, 11 et 172 de la Constitution par les articles 3 à 21 de la loi attaquée. Les parties requérantes font valoir en substance que la taxe annuelle sur les comptes-titres instaurée par la loi attaquée ne poursuit pas seulement un objectif budgétaire, mais qu'elle constitue en réalité plutôt un impôt sur la fortune. A la lumière de ce qui précède, les parties requérantes dénoncent le fait que la loi attaquée établit une différence de taxation injustifiée entre les personnes dont le patrimoine dépassant 1 000 000 euros est détenu sur un compte-titres et les personnes dont le patrimoine dépassant 1 000 000 euros n'est pas détenu sur un compte-titres. Si la première catégorie de personnes est soumise à la taxe attaquée, la seconde catégorie de personnes ne doit pas payer un impôt sur la fortune comparable.

La première branche du deuxième moyen dans l'affaire n° 7630 est prise de la violation des articles 10, 11, 170 et 172 de la Constitution, par l'article 4 de la loi attaquée, en ce qu'il insère l'article 201/4, alinéa 3, dans le Code des droits et taxes divers. La partie requérante dénonce en substance que le seuil d'1 000 000 euros, prévu dans cette disposition, n'est pas pertinent et est disproportionné à la lumière de l'objectif du législateur consistant à instaurer un impôt sur la fortune.

B.4.2. Plusieurs autres parties requérantes font également valoir qu'en adoptant la loi attaquée, le législateur a en réalité poursuivi le même objectif que celui de la loi du 7 février 2018Documents pertinents retrouvés type loi prom. 07/02/2018 pub. 09/03/2018 numac 2018011027 source service public federal finances Loi instaurant une taxe sur les comptes-titres type loi prom. 07/02/2018 pub. 15/05/2019 numac 2019012240 source service public federal interieur Loi instaurant une taxe sur les comptes-titres Traduction allemande fermer « instaurant une taxe sur les comptes-titres » (ci-après : la loi du 7 février 2018Documents pertinents retrouvés type loi prom. 07/02/2018 pub. 09/03/2018 numac 2018011027 source service public federal finances Loi instaurant une taxe sur les comptes-titres type loi prom. 07/02/2018 pub. 15/05/2019 numac 2019012240 source service public federal interieur Loi instaurant une taxe sur les comptes-titres Traduction allemande fermer), à savoir aboutir à une politique fiscale plus juste par une taxe sur les grosses fortunes. Elles se réfèrent à cet égard au contexte dans lequel la nouvelle taxe attaquée a été instaurée, aux déclarations qui ont été faites au Parlement au cours du traitement du projet qui a abouti à la loi attaquée ainsi qu'aux similitudes entre la nouvelle taxe et la taxe annulée.

B.5.1. Dans l'exposé des motifs du projet qui se trouve à la base de la loi attaquée, le but de la loi est défini comme suit : « Cette loi introduit une taxe annuelle sur les compte-titres. Cette nouvelle taxe est une taxe d'abonnement. Le Code des droits et taxes divers (ci-après CDTD) en contient plusieurs. Il s'agit d'une taxe indirecte, caractérisée par une perception simple et efficiente.

La taxe a une finalité purement budgétaire et vise à apporter une contribution visible au maintien de la sécurité sociale qui, en des temps cruciaux, a protégé la population de notre pays en termes de santé et revenus.

Cette taxe annuelle sur les comptes-titres ne doit pas être confondue avec la taxe sur les comptes-titres annulée par la Cour constitutionnelle (arrêt n° 138/2019 du 17 octobre 2019). L'objectif n'est pas de corriger la taxe annulée, en fonction de l'arrêt précité mais d'introduire une nouvelle taxe, sur base d'un ensemble de nouveaux principes.

La nouvelle taxe est un impôt annuel sur la détention d'un compte-titres, ayant comme base imposable la valeur moyenne des instruments financiers imposables détenus sur ce compte-titres. Il est opté pour l'introduction d'une taxe sur un moyen servant à gérer et centraliser des instruments financiers, à savoir le compte-titres. Par conséquent, l'objectif des dispositions légales instaurant cette nouvelle taxe est que la taxe puisse être perçue de manière efficiente sur le moyen ' compte-titres ' simplement et uniquement en fonction de la valeur du compte-titres » (Doc. parl., Chambre, 2020-2021, DOC 55-1708/001, p. 4).

B.5.2. La section de législation du Conseil d'Etat a, dans son avis, relevé des imprécisions concernant les objectifs du législateur : « Selon l'exposé des motifs, la taxe annuelle sur les comptes-titres ne doit pas être confondue avec la taxe sur les comptes-titres annulée par la Cour constitutionnelle dans son arrêt n° 138/2019 et ' l'objectif n'est pas de corriger la taxe annulée, en fonction de l'arrêt précité mais d'introduire une nouvelle taxe, sur base d'un ensemble de nouveaux principes '.

Le dispositif relatif à la taxe sur les comptes-titres annulé par la Cour constitutionnelle avait pour objectif, outre un rendement budgétaire, d'imposer les patrimoines plus élevés, dans le but d'une politique fiscale plus juste. Dans son arrêt n° 138/2019, la Cour constitutionnelle a qualifié de légitime ce deuxième objectif, mais elle a jugé contraires au principe constitutionnel d'égalité différentes inégalités de traitement contenues dans le dispositif, à savoir : - le fait que sont exclus de la taxe attaquée les produits financiers dérivés, les billets de trésorerie, les certificats de dépôt et les certificats immobiliers; - le fait que sont exclus de la taxe attaquée les instruments financiers qui ne sont pas inscrits sur un compte-titres, en particulier les actions nominatives; - le fait que ne sont pas soumis à la taxe attaquée certains titulaires qui disposent en réalité d'une part dans la valeur moyenne des instruments financiers imposables de 500 000 euros ou plus, alors que les personnes physiques qui ne détiennent pas leurs comptes-titres en indivision sont soumises à cette taxe si la valeur moyenne des instruments financiers imposables atteint 500 000 euros ou plus.

La nouvelle taxe annuelle sur les comptes-titres en projet est qualifiée de ' taxe d'abonnement ' et de ' taxe indirecte ' qui concerne uniquement ' un moyen servant à gérer et centraliser des instruments financiers, à savoir le compte-titre ' et se caractérise par une ' perception simple et efficiente '. A première vue, l'objectif visant à imposer les patrimoines plus élevés est ainsi abandonné et la taxe poursuit encore uniquement un objectif budgétaire.

L'exposé des motifs fait néanmoins encore allusion à d'autres objectifs, qui soulèvent la question de savoir si l'avant-projet ne poursuit effectivement qu'un objectif budgétaire. Il fait ainsi référence à la large marge d'appréciation dont dispose le législateur en matière fiscale, non seulement pour obtenir des recettes, mais également dans le but ' d'orienter certains comportements et d'adopter des mesures correctrices afin de donner corps à la politique sociale et économique '. L'affectation du produit de la taxe au financement de la sécurité sociale est certes compatible avec l'objectif budgétaire précité, mais l'exposé des motifs précise à cet égard que ' [d]e cette façon, la taxe devient la contribution visible des personnes ayant la plus grande capacité de maintien de la sécurité sociale qui, en des temps cruciaux, a protégé la population de notre pays en termes de santé et revenus ' (les italiques ont été ajoutés) » (Doc. parl., Chambre, 2020-2021, DOC 55-1708/001, pp. 45-46).

Les délégués du Gouvernement ont réagi en ces termes : « De taks heeft inderdaad een louter budgettair doel en beoogt een significante bijdrage te leveren aan de instandhouding van de sociale zekerheid die in cruciale tijden de bevolking van ons land heeft beschermd op vlak van gezondheid en inkomen. Daarbij aansluitend en zoals vermeld in de memorie van toelichting heeft de regering bij de uitwerking van de modaliteiten van de nieuwe taks tot doel een taks in te voeren die efficiënt is en zoveel mogelijk geautomatiseerd kan worden geïnd.

De passage waarin de regering haar beleidsvrijheid benadrukt kan, indien gewenst, uit de memorie van toelichting worden verwijderd om elke mogelijke verwarring ter zake te vermijden. Het ene lijkt ons nochtans niet tegenstrijdig met het andere. In de betrokken passage wordt enkel benadrukt dat er een grote mate van beleidsvrijheid en beoordelingsbevoegdheid bestaat in fiscale zaken. Met andere woorden, de keuze van belastbaar object is een beleidskeuze die aan de regering en het Parlement toekomt in functie van de door hen vastgestelde sociaal-economische politiek, en die er in casu toe leidt dat de keuze wordt gemaakt om ' effectenrekeningen ' als dusdanig aan een abonnementstaks te onderwerpen » (ibid., pp. 46-47).

B.5.3. Le constat qu'une justification déterminée n'a pas été mentionnée lors des travaux préparatoires n'exclut pas qu'une mesure ait pour fondement un objectif d'intérêt général pouvant raisonnablement justifier la différence de traitement qui en découle (voy. entre autres l'arrêt n° 160/2010 du 22 décembre 2010, B.10). Il n'est dès lors pas exclu que des objectifs qui n'ont pas été mentionnés lors des travaux préparatoires soient également pris en considération dans l'appréciation de la constitutionnalité de dispositions attaquées.

En l'espèce, tant les travaux préparatoires que les mémoires du Conseil des ministres nient toutefois explicitement qu'un autre objectif soit poursuivi.

B.5.4. La Cour limite son examen à l'objectif budgétaire avancé explicitement par le législateur dans ce contexte.

B.6. Etant donné qu'ils reposent sur une prémisse erronée, le premier moyen dans l'affaire n° 7628 et le deuxième moyen dans l'affaire n° 7630, en sa première branche, ne sont pas fondés.

II. En ce qui concerne le choix de la matière imposable B.7.1. La troisième branche du deuxième moyen dans l'affaire n° 7628, la deuxième branche du premier moyen et le quatrième moyen dans l'affaire n° 7630 et les deuxième, troisième, cinquième et sixième branches du premier moyen dans l'affaire n° 7631 sont pris notamment de la violation, par l'article 201/4 du Code des droits et taxes divers, inséré par l'article 4 de la loi attaquée, des articles 10, 11 et 172 de la Constitution. En substance, les parties requérantes dans ces affaires font valoir que seuls les instruments financiers qui sont inscrits sur un compte-titres entrent dans le champ d'application de la taxe attaquée, ce qui a pour effet qu'ils se trouvent hors de ce champ d'application s'ils sont détenus d'une autre manière.

B.7.2. Le troisième moyen dans l'affaire n° 7629 et la première branche du premier moyen dans l'affaire n° 7630 sont pris de la violation des articles 10, 11 et 172 de la Constitution, par l'article 201/3, 4°, du Code des droits et taxes divers, inséré par l'article 3 de la loi attaquée. Les parties requérantes font valoir en substance que l'inclusion des liquidités détenues sur un compte-titres dans le calcul de la valeur moyenne de ce compte viole le principe d'égalité, dès lors que les liquidités qui sont détenues sur un autre compte bancaire ne sont pas soumises à la taxe attaquée.

B.7.3. La troisième branche du deuxième moyen dans l'affaire n° 7630 est prise de la violation de l'article 170 de la Constitution, par l'article 201/3, 4°, du Code des droits et taxes divers, inséré par l'article 3 de la loi attaquée. La partie requérante dénonce que la disposition attaquée expose de manière insuffisamment prévisible la matière imposable de la taxe attaquée.

B.8.1. Il se déduit de l'article 170, § 1er, et de l'article 172, alinéa 2, de la Constitution qu'aucun impôt ne peut être levé et qu'aucune exemption d'impôt ne peut être accordée sans qu'ait été recueilli le consentement des contribuables, exprimé par leurs représentants. Il s'ensuit que la matière fiscale est une compétence que la Constitution réserve en l'espèce à la loi et que toute délégation qui porte sur la détermination d'un des éléments essentiels de l'impôt est, en principe, inconstitutionnelle.

Les dispositions constitutionnelles précitées ne vont toutefois pas jusqu'à obliger le législateur compétent à régler lui-même chacun des aspects d'un impôt ou d'une exemption. Une délégation conférée à une autre autorité n'est pas contraire au principe de légalité, pour autant qu'elle soit définie de manière suffisamment précise et qu'elle porte sur l'exécution de mesures dont les éléments essentiels ont été fixés préalablement par le législateur compétent.

Font partie des éléments essentiels de l'impôt, la désignation des contribuables, la matière imposable, la base d'imposition, le taux d'imposition et les éventuelles exonérations d'impôt.

B.8.2. Dans ce cas, il n'est pas reproché aux dispositions attaquées d'accorder injustement une délégation à une autre autorité, mais qu'elles ne contiennent pas de critères précis, univoques et clairs sur la base desquels il est possible d'établir en quoi consistent la matière imposable et la base imposable de la taxe attaquée. Le principe de légalité en matière fiscale garantit que tout justiciable puisse déterminer avec un degré minimum de prévisibilité s'il est soumis à une imposition.

B.9.1. Les articles 10 et 11 de la Constitution ont une portée générale. Ils interdisent toute discrimination, quelle qu'en soit l'origine : les règles constitutionnelles de l'égalité et de la non-discrimination sont applicables à l'égard de tous les droits et de toutes les libertés.

B.9.2. Le principe d'égalité et de non-discrimination n'exclut pas qu'une différence de traitement soit établie entre des catégories de personnes, pour autant qu'elle repose sur un critère objectif et qu'elle soit raisonnablement justifiée.

L'existence d'une telle justification doit s'apprécier en tenant compte du but et des effets de la mesure critiquée ainsi que de la nature des principes en cause; le principe d'égalité et de non-discrimination est violé lorsqu'il est établi qu'il n'existe pas de rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et le but visé.

B.9.3. L'article 172, alinéa 1er, de la Constitution constitue une application particulière, en matière fiscale, du principe d'égalité et de non-discrimination inscrit dans les articles 10 et 11 de la Constitution.

B.10. Il appartient au législateur d'établir la matière imposable et la base de l'impôt. Il dispose en la matière d'un large pouvoir d'appréciation. En effet, les mesures fiscales constituent un élément essentiel de la politique socioéconomique. Elles assurent non seulement une part substantielle des recettes qui doivent permettre la réalisation de cette politique, mais elles permettent également au législateur d'orienter certains comportements et d'adopter des mesures correctrices afin de donner corps à la politique sociale et économique.

Les choix sociaux qui doivent être réalisés lors de la collecte et de l'affectation des ressources relèvent par conséquent du pouvoir d'appréciation du législateur. La Cour ne peut sanctionner un tel choix politique et les motifs qui le fondent que s'ils reposent sur une erreur manifeste ou s'ils sont manifestement déraisonnables.

B.11.1. La matière imposable est l'élément générateur de l'impôt, la situation ou le fait qui donne lieu à la débition de l'impôt. La matière imposable se distingue de la base imposable (« base d'imposition »), qui est la base sur laquelle l'impôt est calculé.

En matière de taxe annuelle sur les comptes-titres, il ressort de manière suffisamment claire du texte de la loi, que la matière imposable est la détention d'un compte-titres et que la base d'imposition concerne la valeur de tous les instruments financiers imposables détenus sur ce compte-titres.

B.11.2. Le législateur a opté « pour l'introduction d'une taxe sur un moyen servant à gérer et centraliser des instruments financiers, à savoir le compte-titres » (Doc. parl., Chambre, 2020-2021, DOC 55-1708/001, p. 4). Le choix spécifique de la détention d'un compte-titres en tant que matière imposable est justifié ainsi : « Dans l'élaboration des modalités de la nouvelle taxe, le gouvernement a pour but d'introduire une taxe efficiente et qui peut, autant que possible, être perçue automatiquement. A la lumière de cet objectif, les comptes-titres sont un objet approprié à imposer puisque ces comptes présentent au moins trois grands avantages : 1° ils sont aisément traçables auprès des institutions financières qui sont déjà soumises à une législation financière stricte;2° la valeur actuelle du patrimoine investi est connue à tout instant; 3° de ce fait, les institutions financières peuvent jouer un rôle central pour la perception, la déclaration et le paiement de la taxe » (ibid., p. 5).

Compte tenu des avantages mentionnés, il ne saurait être reproché au législateur de ne pas avoir élaboré un régime uniforme pour toutes les formes de placement (voy. aussi l'avis de la section de législation du Conseil d'Etat, relatif à l'avant-projet de loi qui a donné lieu à la loi attaquée (Doc. parl., Chambre, 2020-2021, DOC 55-1708/001, pp. 58-59)).

Dans son avis relatif à l'avant-projet de loi qui est devenu la loi attaquée, la section de législation du Conseil d'Etat a observé ce qui suit : « La base imposable de la taxe annuelle sur les comptes-titres est la valeur moyenne des instruments financiers imposables au cours de la période de référence. L'article 201/3, 2°, du CDTD, en projet (article 3 de l'avant-projet), définit le terme ' instruments financiers imposables ' comme étant uniquement ' tous les instruments financiers détenus sur un [lire: le] compte-titres '.

Dès lors, la question se pose notamment de savoir si les soldes en espèce sur un compte-titres doivent être considérés comme un instrument financier imposable. Les délégués ont répondu à cette question comme suit : ' De taks viseert de effectenrekeningen als dusdanig, ongeacht de aard van de financiële instrumenten, waaronder de tegoeden worden begrepen, die er op staan. De memorie van toelichting is op dat vlak duidelijk : " Dat wil zeggen dat niet enkel aandelen, obligaties en dergelijke in aanmerking komen, maar ook afgeleide producten zoals turbo's, speeders en trackers, en het geldsaldo ".

Bijgevolg wordt voor de vaststelling van de belastbare grondslag rekening gehouden met het gehele bedrag zonder enig onderscheid, met inbegrip van eventuele tijdelijke cash bedragen die op de effectenrekening worden aangehouden. Indien daarentegen de politiek van de titularis van de effectenrekening er in bestaat dat elke cash opbrengst van verkopen dadelijk op een zichtrekening wordt gestort, zal een effectenrekening wellicht geen of weinig cash middelen bevatten.

Indien de Raad van State meent dat de wettekst in die zin meer duidelijkheid behoeft, kan worden ingestemd met volgende tekstaanpassing : " 2° belastbare instrumenten : alle financiële instrumenten en geldmiddelen die worden aangehouden op een effectenrekening ". ' On peut se rallier à cette adaptation. On peut néanmoins se demander s'il ne serait pas préférable de prévoir une énumération non exhaustive dans la définition en projet des instruments financiers qui sont concernés (par exemple en ajoutant : ', comme entre autres (...) ') » (ibid., pp. 67-68).

B.11.3. Il résulte de ce qui précède que, compte tenu du pouvoir d'appréciation étendu dont dispose le législateur en matière fiscale, la différence de traitement entre les titulaires d'instruments financiers et la différence dans la taxation des liquidités, selon qu'ils sont détenus ou non sur des comptes-titres, sont objectivement et raisonnablement justifiées.

B.12. Le deuxième moyen dans l'affaire n° 7628, en sa troisième branche, le troisième moyen dans l'affaire n° 7629, le premier moyen, en sa première branche, le premier moyen, en sa deuxième branche, le deuxième moyen, en sa troisième branche, et le quatrième moyen dans l'affaire n° 7630 et le premier moyen dans l'affaire n° 7631, en ses deuxième, troisième, cinquième et sixième branches, ne sont pas fondés.

III. En ce qui concerne l'exonération si la valeur moyenne des instruments financiers imposables inscrits sur les comptes-titres au cours de la période de référence ne dépasse pas 1 000 000 euros B.13. La première branche du deuxième moyen dans l'affaire n° 7628, le premier moyen dans l'affaire n° 7629, les première et deuxième branches du deuxième moyen dans l'affaire n° 7630 et la première branche du premier moyen dans l'affaire n° 7631 sont pris notamment de la violation des articles 10, 11 et 172 de la Constitution par l'article 201/4, alinéa 3, du Code des droits et taxes divers, inséré par l'article 4 de la loi attaquée, en ce que la taxe attaquée n'est due que si la valeur moyenne des instruments financiers imposables inscrits sur les comptes-titres au cours de la période de référence est supérieure à 1 000 000 euros.

Les parties requérantes dans ces affaires allèguent notamment que la disposition attaquée a pour effet qu'un titulaire qui détient seul un compte-titres dont la base imposable est tout juste inférieure au seuil de 1 000 000 euros n'est pas soumis à la taxe, alors que plusieurs titulaires qui détiennent ensemble un compte-titres dont la valeur dépasse ce montant sont imposés, même si leur quote-part respective dans cette valeur est inférieure à celle que détient le titulaire de la première catégorie.

B.14.1. Il relève du pouvoir d'appréciation du législateur de déterminer, lorsqu'il lève un impôt, les exonérations et les modalités de celui-ci. Le législateur ne pourrait cependant, sans violer le principe d'égalité et de non-discrimination, accorder des exonérations ou des réductions de l'impôt à certains redevables et les refuser à d'autres qui leur seraient comparables, si cette différence de traitement n'est pas objectivement et raisonnablement justifiée.

B.14.2. Comme il a déjà été dit, le législateur souligne que la taxe attaquée ne vise pas à imposer principalement les patrimoines plus élevés. La disposition attaquée ne saurait dès lors être évaluée au regard d'un tel objectif. Interrogé par la section de législation du Conseil d'Etat sur les objectifs qui sont effectivement poursuivis par le choix d'un seuil de 1 000 000 euros, le délégué du Gouvernement a répondu : « En dessous d'un certain montant d'actifs détenu sur un compte-titres, il est très facile de retirer du compte-titres les actifs qui y sont investis afin de les utiliser dans d'autres formes d'investissement. Un investissement immobilier ou un carnet d'épargne ou un compte à terme constituent dans ce cas d'autres options très réalistes, qui permettent d'échapper de facto à la taxe. Du point de vue de la technique fiscale, il apparaît que, pour ces montants plus limités, la base imposable est à ce point élastique que l'efficacité fiscale en souffre et qu'elle laisse une trop grande place à l'influence comportementale. Au-delà de ce seuil, il devient beaucoup plus difficile d'échapper à la taxe par une simple réorientation de la forme d'investissement, car cela impliquerait déjà un investissement dans tout un patrimoine immobilier constitué de différents biens immeubles et aussi car les institutions bancaires appliquent actuellement un taux d'intérêt négatif à ces montants plus importants, de sorte que cette option devient elle aussi moins réaliste.

Du point de vue technique, deux possibilités ont été prises en considération : l'instauration d'un taux de 0 % pour le premier million d'euros de la base imposable ou un seuil au-delà de ce premier million d'euros. Finalement, la préférence a été donnée à cette seconde possibilité pour des raisons de simplicité. (...) Ce seuil vise à ménager un équilibre entre l'objectif budgétaire et d'efficacité de la mesure, d'une part, et la justification éventuelle de la distinction (...), d'autre part » (traduction libre) (Doc. parl., Chambre, 2020-2021, DOC 55-1708/001, p. 48).

Il ressort de ces déclarations, ainsi que des autres déclarations faites lors des travaux préparatoires et des mémoires du Conseil des ministres, que le choix du législateur d'instaurer un seuil de 1 000 000 euros repose sur la considération qu'en dessous de ce montant, il est plus simple de trouver d'autres options d'investissement pour échapper à la taxe. En outre, le produit de la taxe en dessous de ce montant ne serait pas proportionné aux charges administratives liées à sa perception.

B.14.3. En ce qui concerne l'argument relatif à l'« élasticité » des investissements sous le seuil de 1 000 000 euros, s'est posée, selon la section de législation du Conseil d'Etat, la question de savoir pourquoi d'autres possibilités de placement seraient flexibles pour des montants jusqu'à 1 000 000 euros, alors qu'elles seraient quasiment inexistantes pour des montants à partir de 1 000 000 euros. (ibid., pp. 49-50).

B.14.4. La détermination d'un seuil relève toutefois du pouvoir d'appréciation du législateur. Le législateur fiscal ne peut pas prendre en compte les particularités des divers cas d'espèce. Plus particulièrement, il doit pouvoir faire usage de catégories qui, nécessairement, n'appréhendent la diversité de situations qu'avec un certain degré d'approximation, le choix d'un seuil nécessitant de tracer une limite quelque part.

B.14.5. Eu égard à l'objectif budgétaire que poursuit le législateur par l'instauration d'une taxe d'abonnement sur la détention d'un compte-titres, en particulier compte tenu du produit escompté de la taxe et du taux appliqué, il n'est pas manifestement déraisonnable que le seuil soit fixé à 1 000 000 euros.

B.15. Le deuxième moyen dans l'affaire n° 7628, en sa première branche, le premier moyen dans l'affaire n° 7629, le deuxième moyen dans l'affaire n° 7630, en ses première et deuxième branches, et le premier moyen dans l'affaire n° 7631, en sa première branche, ne sont pas fondés.

IV. En ce qui concerne l'exonération des comptes-titres détenus par certaines institutions financières et certains organismes de placement collectif B.16.1. Les parties requérantes dans l'affaire n° 7623 demandent l'annulation, à l'article 201/4, alinéa 4, du Code des droits et taxes divers, inséré par la loi attaquée, des mots « sans qu'un tiers autre qu'une institution, société ou entité visée au présent alinéa dispose d'un droit de créance direct ou indirect lié à la valeur du compte-titres détenu ». Le premier moyen est pris de la violation du principe de légalité en matière fiscale, consacré par l'article 170 de la Constitution, lu en combinaison ou non avec les articles 10, 11 et 172 de la Constitution, en ce que le membre de phrase attaqué précise insuffisamment l'exonération de la taxe attaquée, contenue dans l'article 201/4, alinéa 4, du Code des droits et taxes divers.

Leur deuxième moyen est pris de la violation des articles 10, 11 et 172 de la Constitution, en ce que le membre de phrase attaqué établirait une différence de traitement injustifiée entre les entreprises d'assurances, d'une part, et les institutions, entités ou sociétés énumérées dans l'article 201/4, alinéa 4, du Code des droits et taxes divers, et les investisseurs particuliers, d'autre part, ainsi qu'entre les entreprises d'assurances entre elles, et entre les entreprises d'assurances belges et les entreprises d'assurances étrangères. Les parties requérantes relèvent en substance le fait que l'exonération de la taxe attaquée ne vaut pas pour les comptes-titres détenus par les entreprises d'assurances dans le cadre d'un produit d'assurance-vie branche 23 conclu par un preneur d'assurance, alors qu'il s'agit de comptes-titres que ces entreprises utilisent comme instrument de travail.

B.16.2. Le troisième moyen dans l'affaire n° 7623 et le cinquième moyen dans l'affaire n° 7630 sont pris de la violation des articles 10, 11 et 172 de la Constitution, en ce que la loi attaquée, et en particulier son article 4, qui insère un article 201/4, alinéa 4, dans le Code des droits et taxes divers, établit une différence de traitement entre les investisseurs qui détiennent directement un compte-titres auprès d'un établissement de crédit et les investisseurs qui détiennent une assurance-vie branche 23 auprès d'une entreprise d'assurances. Les parties requérantes relèvent en substance le fait qu'alors que la première catégorie de personnes est uniquement soumise à la taxe attaquée lorsque la valeur moyenne des instruments financiers imposables sur leur compte-titres dépasse le seuil d'1 000 000 euros, la deuxième catégorie de personnes est soumise à la taxe lorsque la valeur moyenne du compte-titres que l'entreprise d'assurances concernée utilise comme instrument de travail dépasse le seuil de 1 000 000 euros, quelle que soit la valeur de leur droit de créance à l'égard de cette entreprise d'assurances.

B.16.3. La deuxième branche du deuxième moyen dans l'affaire n° 7628 et le quatrième moyen dans l'affaire n° 7629 sont pris de la violation des articles 10, 11 et 172 de la Constitution, par l'article 201/4 du Code des droits et taxes divers, inséré par l'article 4 de la loi attaquée. Les parties requérantes font valoir en substance que la disposition attaquée établit une discrimination entre les entités qui sont exonérées de la taxe attaquée et les entités qui ne sont pas exonérées de la taxe attaquée.

B.17.1. Comme il est dit en B.1.3, l'article 201/4, alinéa 4, du Code des droits et taxes divers, inséré par l'article 4 de la loi attaquée, prévoit une exonération de la taxe annuelle sur les comptes-titres pour les comptes-titres énumérés dans cette disposition. Ainsi, sont notamment exonérés de la taxe attaquée les comptes-titres détenus par la Banque nationale de Belgique, la Banque centrale européenne et les banques centrales étrangères exerçant des fonctions similaires et les institutions financières visées à l'article 198/1, § 6, 1° à 12°, du Code des impôts sur les revenus 1992 (ci-après : le CIR 1992) et les organismes de placement collectif.

B.17.2. L'exclusion des comptes-titres détenus par les entités énumérées à l'article 201/4, alinéa 4, du Code des droits et taxes divers est justifiée, dans l'exposé des motifs du projet de la loi attaquée, par le fait que ces institutions, sociétés et entités jouent un rôle crucial dans le fonctionnement du système financier et que les comptes-titres concernés sont détenus en tant qu'instruments de travail : « Nonobstant ce qui précède, les comptes-titres détenus exclusivement pour leur propre compte par des entreprises financières ne sont pas soumis à la taxe. Sont ainsi exclus du champ d'application les comptes-titres qui sont les instruments de travail technique, vu l'activité qu'elles exercent, des institutions, sociétés et entités concernées. Ne sont par contre pas exclus du champ d'application de la taxe les comptes-titres servant à détenir des placements de trésorerie ou patrimoniaux de tiers (autres que ces institutions, sociétés et entités). Par conséquent, la taxe ne s'applique pas aux comptes-titres qui sont détenus pour compte propre par la Banque nationale de Belgique, la Banque centrale européenne, les banques centrales étrangères exerçant des fonctions similaires et la liste connue des entreprises financières, parmi lesquelles les établissements de crédit, les entreprises d'assurance, les entreprises d'investissement, les sociétés de bourse, les institutions de retraite, etc. Pour l'application de cette taxe, il est à cet égard fait référence à la liste exhaustive reprise à l'article 198/1, § 6, 1° à 12°, du CIR 1992, à laquelle sont ajoutées les sociétés de bourse visées à l'article 1er, § 3, de la loi du 25 avril 2014Documents pertinents retrouvés type loi prom. 25/04/2014 pub. 07/05/2014 numac 2014003194 source service public federal finances et service public federal justice Loi relative au statut et au contrôle des établissements de crédit type loi prom. 25/04/2014 pub. 28/05/2014 numac 2014003234 source service public federal economie, p.m.e., classes moyennes et energie, service public federal justice et service public federal finances Loi modifiant la loi du 22 février 1998 fixant le statut organique de la Banque nationale de Belgique, la loi du 2 août 2002 relative à la surveillance du secteur financier et aux services financiers, la loi du 22 mars 1993 relative au statut et au contrôle des établissements de crédit, la loi du 9 juillet 1975 relative au contrôle des entreprises d'assurances, la loi du 16 février 2009 relative à la réassurance, la loi du 6 avril 1995 relative au statut et au contrôle des entreprises d'investissement, la loi du 21 décembre 2009 relative au statut des établissements de paiement et des établissements de monnaie électronique, à l'accès à l'activité de prestataire de services de paiement, à l'activité d'émission de monnaie électronique et à l'accès aux systèmes de paiement, la loi du 28 avril 1999 visant à transposer la Directive 98/26/CE du 19 mai 1998 concernant le caractère définitif du règlement dans les systèmes de paiement et de règlement des opérations sur titres et la loi du 15 décembre 2004 relative aux suretés financières et portant des dispositions fiscales diverses en matière de conventions constitutives de sureté réelle et de prêts portant sur des instruments financiers type loi prom. 25/04/2014 pub. 27/05/2014 numac 2014003225 source service public federal finances Loi relative au statut et au contrôle des planificateurs financiers indépendants et à la fourniture de consultations en planification par des entreprises réglementées et modifiant le Code des sociétés et la loi du 2 août 2002 relative à la surveillance du secteur financier et aux services financiers type loi prom. 25/04/2014 pub. 18/01/2016 numac 2016000006 source service public federal interieur Loi modifiant la loi du 22 février 1998 fixant le statut organique de la Banque nationale de Belgique, la loi du 2 août 2002 relative à la surveillance du secteur financier et aux services financiers, la loi du 22 mars 1993 relative au statut et au contrôle des établissements de crédit, la loi du 9 juillet 1975 relative au contrôle des entreprises d'assurances, la loi du 16 février 2009 relative à la réassurance, la loi du 6 avril 1995 relative au statut et au contrôle des entreprises d'investissement, la loi du 21 décembre 2009 relative au statut des établissements de paiement et des établissements de monnaie électronique, à l'accès à l'activité de prestataire de services de paiement, à l'activité d'émission de monnaie électronique et à l'accès aux systèmes de paiement, la loi du 28 avril 1999 visant à transposer la Directive 98/26/CE du 19 mai 1998 concernant le caractère définitif du règlement dans les systèmes de paiement et de règlement des opérations sur titres et la loi du 15 décembre 2004 relative aux suretés financières et portant des dispositions fiscales diverses en matière de conventions constitutives de sureté réelle et de prêts portant sur des instruments financiers. - Traduction allemande d'extraits fermer relative au statut et au contrôle des établissements de crédit et des sociétés de bourse. [...] L'exclusion concernant les organismes de pension vise tant les institutions de retraite professionnelle (cf. article 198/1, § 6, 7°, du CIR 1992) que, de manière fonctionnelle, toutes les institutions ou entités qui gèrent des régimes de retraite ou qui gèrent les placements de ces régimes (cf. article 198/1, § 6, 8°, du CIR 1992), tels que les organismes de pension auxquels les employeurs doivent confier la gestion d'engagements de pension. Dans les cas exceptionnels où un employeur n'a pas cette obligation, comme par exemple, en ce qui concerne des entités de droit public, l'exclusion concernera les comptes-titres détenus par ces entités dans le cadre du régime de retraite. En d'autres termes, les comptes-titres détenus dans le cadre du placement nécessaire des avoirs de retraite du ' deuxième pilier ' ne sont pas soumis à la taxe.

Les comptes-titres qui sont détenus par les organismes de placement collectif visés à l'article 2, § 1er, 13°/1, a à c, du CIR 1992 sont également exclus. La raison en est que les actions ou certificats de ces organismes constituent eux-mêmes un instrument d'investissement qui est plus communément détenu sur des comptes-titres qui entrent eux-mêmes déjà dans le champ d'application de la taxe. ' Plus communément ' se réfère au fait que les actions ou certificats mentionnés sont en principe placés sur des comptes-titres, mais que ces instruments financiers peuvent également être détenus sous une autre forme, ce qui n'est pas commun dans la pratique. Ce constat conduit à une distinction claire et objective par rapport aux comptes-titres détenus dans le cadre d'un contrat d'assurance branche 23 dans lequel les droits de l'investisseur prennent la forme du bénéfice d'un contrat d'assurance et ne sont donc jamais détenus sur un compte-titres. Il est à cet égard aussi explicitement fait référence à l'exclusion de cette liste des ' fonds dédiés ' dont les droits sont détenus par une ou plusieurs personnes liées entre elles et pour lesquels cette appréciation doit le cas échéant être faite séparément par compartiment d'une institution concernée.

Les fonds de placement ne sont pas des indivisions ordinaires. Les participants n'ont pas de droit sur la valeur d'un compte-titres, mais disposent de droits définis légalement et règlementairement, similaires à ceux des actionnaires, de sorte que le fonds est réglementairement autonomisé de telle sorte que les comptes-titres sont détenus pour le compte propre des actifs du fonds. En effet, en vertu de la loi de 3 août 2012 relative aux organismes de placement collectif qui répondent aux conditions de la directive 2009/65/CE et aux organismes de placement en créances, les participants n'ont droit qu'à un coupon et peuvent se retirer du fonds sur base de la valeur d'inventaire calculée, de sorte que les actifs du fonds sont légalement autonomisés. S'il existe des fonds individualisés qui ne présentent pas ces caractéristiques, la taxe s'applique donc car le texte de loi ne prévoit pas une exclusion à cet effet. Cela s'inscrit parfaitement dans la logique de la taxe : il s'agit des parts du fonds détenues par le titulaire sur un compte-titres, et une cascade de prélèvements est évitée. [...] Ainsi, le prélèvement reste neutre en ce qui concerne l'ensemble de cascades qui se sont développées dans le monde financier international, où les titres détenus par des investisseurs sur leur compte-titres auprès de la banque, sont eux-mêmes détenus sur le compte tenu par la banque auprès d'un dépositaire central de titres (ou non) qui, pour divers titres qu'il ne ' conserve ' pas lui-même, garantit via son propre compte-titres auprès du ' dépositaire ' réel des titres.

Cette approche est conforme à l'objectif et la portée des exclusions prévues par la loi pour les entités professionnelle intervenantes nécessaires : le fonctionnement normal du système financier n'est pas affecté grâce à l'exclusion nécessaire des institutions énumérées dans la loi, sauf dans la mesure où celles-ci seraient destinées à tenter d'organiser un droit économique sur (la valeur d')un compte-titres au moyen d'un droit juridique qui ne constituerait pas lui-même un compte-titres.

En d'autres termes, le texte du projet de loi vise à prévenir des doubles impositions à répétition et à préserver la participation de notre pays au système international professionnellement développé d'opérations sur des titres, et ce d'une manière qui vise effectivement la conversion juridique d'un compte-titres détenu indirectement » (Doc. parl., Chambre, 2020-2021, DOC 55-1708/001, pp. 13-16).

Au cours du débat au sein de la commission compétente, le vice-premier ministre et ministre des Finances a ensuite affirmé : « Les seuls comptes-titres exclus du champ d'application de la taxe sont ceux détenus comme instruments techniques de travail par des entreprises financières. Cette exclusion est nécessaire pour garantir le fonctionnement normal du système financier. Deux exclusions supplémentaires spécifiques valent dans la sphère financière. Ces exclusions sont nécessaires pour garantir la participation de notre pays au système professionnel international d'opérations sur titres » (Doc. parl., Chambre, 2020-2021, DOC 55-1708/003, p. 4).

Dans son avis concernant l'avant-projet de loi qui a donné lieu à la loi attaquée, la section de législation du Conseil d'Etat a observé, à la lumière d'un exposé fait par les délégués du Gouvernement, concernant les exonérations précitées ce qui suit : « Il existe également d'autres entreprises qui détiennent un compte-titres dans le cadre de leur activité professionnelle propre, tant à des fins spéculatives que d'acquisition ou d'extension de certaines participations dans leur secteur d'activités, mais qui restent toutefois soumises à la taxe. Les délégués ont justifié cette différence de traitement comme suit : ' In het licht van de opmerkingen van de Raad van State van 11 oktober 2017 omtrent het onderscheid tussen natuurlijke personen en rechtspersonen is ervoor geopteerd om in het voorliggende ontwerp geen enkel onderscheid te maken in functie van de juridische hoedanigheid van de titularis van de effectenrekening, zonder dat dergelijk onderscheid redelijkerwijs kan worden verantwoord. Vanuit dat perspectief wordt enkel voorzien in een uitsluiting van de taks voor de effectenrekeningen die, uitsluitend voor eigen rekening, worden aanhouden door financiële instellingen.

Het aanhouden van effectenrekeningen betreft immers één van de kerntaken van de financiële sector. In dat opzicht onderscheiden ondernemingen in die sector zich van alle andere ondernemingen. Mocht JTER ook worden toegepast op die activiteiten, dan zou die sector onevenredig worden getroffen door de taks. Daarenboven mag niet uit het oog worden verloren dat reeds een hele reeks verschillend taksen van het Wetboek diverse rechten en taksen specifiek van toepassing is op die ondernemingen. Vanuit dat perspectief kan een onderscheid, waarbij dat onderscheid dan ook nog eens is beperkt tot effectenrekeningen die, uitsluitend voor eigen rekening, worden gehouden door financiële instellingen, [worden] gerechtvaardigd.

Daarnaast is het van belang te onderstrepen dat de uitgesloten financiële instellingen ook een centrale rol spelen wat betreft effectenrekeningen aangehouden door hun klanten. Zij verschaffen de beleggers toegang tot financiële instrumenten aangehouden op een effectenrekening, door in een " rug-aan-rug " situatie zelf de financiële instrumenten aankocht door de klant, te gaan voorzien voor de klant, door de aangekochte financiële instrumenten op de eigen, al dan niet omnibus rekening, te gaan aanhouden bij een andere financiële instelling die als bewaarnemer optreedt, zoals Euroclear of een andere effectenbewaarnemingsinstelling. Deze cascade aan effectenrekeningen is essentieel voor de normale werking, ook internationaal, van de financiële markten, en kan niet leiden tot een cascade aan heffingen.

Aldus zullen beleggers ook veelal hun aandelen in een collectieve beleggingsinstelling aanhouden via een, aan de taks onderworpen, effectenrekening, zodat dezelfde logica geldt voor wat betreft de effectenrekeningen aangehouden door deze collectieve beleggingsinstellingen voor eigen rekening.

Om alle verwarring ter zake te vermijden kan worden ingestemd met een aanpassing van de memorie van toelichting waarbij de bewoordingen " Niettegenstaande het voorgaande worden de effectenrekeningen die een rechtspersoon aanhoudt in het kader van de eigen beroepswerkzaamheid, niet aan de taks onderworpen. " wordt vervangen door de bewoordingen " Niettegenstaande het voorgaande worden de effectenrekeningen die, uitsluitend voor eigen rekening, worden aanhouden door financiële instellingen, niet aan de taks onderworpen ". ' On peut marquer son accord sur cette justification et l'adaptation proposée » (Doc. parl., Chambre, 2020-2021, DOC 55-1708/001, pp. 55-56).

B.17.3. L'article 201/4, alinéa 4, du Code des droits et taxes divers exclut l'application de l'exonération de la taxe attaquée aux comptes-titres sur lesquels un tiers autre qu'une institution, société ou entité exonérée dispose d'un droit de créance direct ou indirect.

Cette exigence a été ajoutée par le législateur afin d'éviter qu'une personne physique, une personne morale ou une entité non exclue abuse de l'intervention de ces institutions, sociétés ou entités afin d'échapper à la taxe attaquée.

L'exposé des motifs du projet de loi qui est devenu la loi attaquée dit à ce sujet : « L'exclusion du champ d'application vaut seulement pour autant que le compte-titres est détenu exclusivement pour compte propre, c'est-à-dire sans qu'un tiers autre qu'une institution, société ou entité visée à l'article 201/4, alinéa 4 dispose d'un droit de créance direct ou indirect lié à la valeur du compte-titres détenu. Ceci implique par exemple que des comptes-titres qui sont détenus par des institutions d'assurance dans le cadre d'assurances branche 23 conclues avec un preneur d'assurance, sont dans le champ d'application de la taxe puisque la détention d'un portefeuille au moyen d'une assurance branche 23 et d'un compte-titres sous-jacent équivaut totalement à la détention directe d'un compte-titres. [...] L'exigence selon laquelle les institutions, sociétés et entités exclues détiennent les compte-titres pour compte propre vise à éviter que l'interposition d'une de ces institutions, sociétés ou entités exclues, ne transforme la détention d'un compte-titres par une personne physique, une personne morale ou une entité non exclue en un autre type de droit qui échappe à l'application de la taxe.

C'est notamment le cas si, via une institution, société ou entité exclue, des droits économiques sur un compte-titres sont détenus sous la forme d'un simple droit de créance, de droits du bénéficiaire d'une assurance (cf. ce qui peut se passer dans le cadre d'une assurance branche 23), etc.

Inversement, si une personne physique, une personne morale ou une entité qui n'est pas exclue de la taxe a des droits sur un compte détenu par une entité exclue, mais détient celui-ci sous la forme d'un compte-titres qui est soumis à la taxe, une telle situation ne se présentera pas. Dans ce cas, le texte vise donc à éviter une cascade de prélèvements, et à se concentrer sur le compte-titres finalement détenu par la personne ou l'entité auprès d'une entité exclue » (Doc. parl., Chambre, 2020-2021, DOC 55-1708/001, pp. 13-16).

B.17.4. Il ressort des travaux préparatoires que le législateur était conscient du fait que les comptes-titres utilisés par les entreprises d'assurances comme instruments de travail dans le cadre des produits d'assurance-vie branche 23 seraient probablement également soumis à la taxe attaquée en raison de l'exigence mentionnée en B.17.3 : « Quant à la constitution de pension stimulée fiscalement dans le troisième pilier, une distinction doit être faite entre les fonds de pension et les assurances-pension : - en ce qui concerne les fonds de pension, la taxe ne s'applique pas sur les comptes-titres détenus par les fonds; pas non plus sur les comptes-épargne pension sur lesquels des droits de participation dans de tels fonds sont détenus, parce qu'ils n'atteindront jamais plus qu'un million d'euros; - en ce qui concerne les assurances-pension, la taxe ne s'applique pas sur les produits d'assurance parce qu'ils ne sont pas détenus sur des comptes-titres. Dans le chef des entreprises d'assurance, il faut toutefois faire une distinction entre : ? une assurance-pension branche 21 : la taxe ne s'applique pas sur les comptes-titres détenus par des entreprises d'assurance dans le cadre des produits branche 21, parce que ces comptes-titres sont détenus exclusivement pour compte propre. Le preneur d'assurance a en effet seulement droit à un rendement annuel fixe; ? une assurance-pension branche 23 : la taxe est bien due sur les comptes-titres détenus par les entreprises d'assurance dans le cadre de produits branche 23, parce que ces comptes-titres ne sont pas détenus exclusivement pour compte propre. Le preneur d'assurance a en effet droit à un rendement en fonction des placements réalisés par l'entreprise d'assurance. L'avantage fiscal, accordé dans le cadre de l'impôt des personnes physiques relativement à de telles assurances-pension, n'a donc pas pour effet que des comptes-titres détenus dans ce cadre par des entreprises d'assurance, pour compte de tiers, tomberaient en dehors du champ d'application de la taxe.

Notez que les produits d'épargne-pension ne sont en aucun cas soumis à la taxe. Seuls les comptes-titres détenus par des entreprises d'assurance dans le cadre de produits branche 23, autres que ceux détenus dans le cadre d'engagements de pension du ' premier pilier ' et du ' deuxième pilier ', sont soumis à la taxe. La mesure dans laquelle la taxe sera répercutée par les entreprises d'assurance aux preneurs d'assurance est une affaire contractuelle entre parties intéressées, dans laquelle le présent projet n'interfère en aucune manière. Il en va d'ailleurs de même pour tous les impôts à charge des entreprises d'assurance. Il n'appartient donc pas au législateur de prévoir un seuil supplémentaire d'un million d'euros au niveau des produits d'assurance concernés. En pareil cas, il serait fondamentalement porté atteinte à la matière imposable de la taxe, c'est-à-dire une taxe sur les comptes-titres, peu importe les rapports sous-jacents de propriété. Au point 13.3 de son avis, le Conseil d'Etat a indiqué pouvoir marquer son accord sur la justification de ce traitement donnée par le gouvernement.

Le constat qui précède est en ligne avec l'idée de base sous-tendant l'élaboration de la taxe, qui vise seulement et exclusivement le moyen ' compte-titres '. En dehors du système de cascade de comptes-titres, tel que le vice-premier ministre l'a déjà expliqué, tous les comptes-titres détenus par une entreprise financière pour compte de tiers, ce qui se présente le plus souvent dans le cadre d'assurances branche 23, sont soumis à la taxe, sauf si ce tiers est lui-même une institution, société ou entité exclue » (Doc. parl., Chambre, 2020-2021, DOC 55-1708/003, pp. 11-12).

B.17.5. Dans son avis concernant l'avant-projet qui est devenu la loi attaquée, la section de législation du Conseil d'Etat a observé concernant l'application de la taxe attaquée aux comptes-titres détenus par les entreprises d'assurances dans le cadre des produits d'assurance-vie branche 23 : « Toujours selon l'exposé des motifs, ' des comptes-titres qui sont détenus par des institutions d'assurance dans le cadre d'assurances branche 23 conclues avec un preneur, sont dans le champ d'application de la taxe puisque la détention d'un portefeuille au moyen d'une assurance branche 23 et d'un compte-titres sous-jacent équivaut totalement à la détention directe d'un compte-titres '.

Dès lors que le seuil de 1 million d'euros doit être apprécié au niveau de l'organisme assureur qui détient le compte-titres et non au niveau du preneur d'assurance, même si celui-ci n'investit par exemple que 10 000 euros dans une assurance branche 23, l'investisseur concerné subira également les effets de la taxe lorsque l'organisme assureur inclura cette taxe, sur le plan économique, dans les conditions de cette assurance. C'est ce que les délégués ont confirmé : ' In geval van verzekeringsproducten is het inderdaad zo dat de verzekeringnemer niet betrokken wordt bij de heffing van de taks omdat die verzekeringsproducten niet worden aangehouden op een effectenrekening en de verzekeringnemer enkel over vorderingsrechten beschikt verbonden aan de waarde van de aangehouden effectenrekening, maar mogelijks wel de verzekeringsinstelling die in het kader van dit (en/of andere) verzekeringsproduct(en), de onderliggende financiële instrumenten aanhoudt op een effectenrekening, weliswaar in eigen naam maar voor rekening van de verzekeringsnemers.

Gelet op het feit dat de taks het aanhouden van een effectenrekening viseert, en wat betreft de vaststelling van de belastbare grondslag de drempel moet worden beoordeeld op het niveau van de effectenrekening, zal de taks op dat niveau worden toegepast zoals bij elke andere effectenrekening. De mate waarin de taks zal worden doorgerekend door de verzekeringsinstelling aan de verzekeringsnemer is een contractuele aangelegenheid tussen betrokken partijen. Dat laatste geldt voor alle belastingen geheven in hoofde van verzekeringsinstellingen '.

On peut se rallier à cette justification, qui s'inscrit dans le prolongement de l'objectif de la taxe précisé par les délégués » (Doc. parl., Chambre, 2020-2021, DOC 55-1708/001, pp. 57-58).

B.18.1. Comme il est mentionné en B.8.1, il découle des articles 170, § 1er, et 172, alinéa 2, de la Constitution que la matière fiscale est une compétence que la Constitution réserve à la loi. Une délégation conférée à une autre autorité n'est pas contraire au principe de légalité, pour autant qu'elle soit définie de manière suffisamment précise et qu'elle porte sur l'exécution de mesures dont les éléments essentiels ont été fixés préalablement par le législateur compétent.

Font partie des éléments essentiels de l'impôt, la désignation des contribuables, la matière imposable, la base d'imposition, le taux d'imposition et les éventuelles exonérations d'impôts.

B.18.2. En l'espèce, il n'est pas reproché à la disposition attaquée d'accorder injustement une délégation à une autre autorité, mais de définir de manière insuffisamment précise et claire l'exonération de la taxe attaquée qu'elle contient, en particulier en ce qui concerne les comptes-titres détenus par les entreprises d'assurances dans le cadre de produits d'assurance-vie branche 23. Ainsi qu'il est mentionné en B.8.2, le principe de légalité en matière fiscale garantit que chaque justiciable puisse déterminer avec un degré minimum de prévisibilité s'il est soumis à une imposition.

B.18.3. Contrairement à ce que soutiennent les parties requérantes dans l'affaire n° 7623, il ressort du texte de l'article 201/4, alinéa 4, du Code des droits et taxes divers, en ce compris le membre de phrase attaqué inséré par la loi attaquée, quels comptes-titres sont exonérés ou non de la taxe attaquée.

B.19. A la lumière de son pouvoir d'appréciation étendu en matière fiscale, il appartient au législateur de décider quels comptes-titres, en tant qu'instruments de travail détenus en nom propre ou pour compte propre par des institutions et entités financières et des organismes de placement collectif, doivent être exonérés afin de ne pas perturber le fonctionnement normal du système financier national et international.

A la lumière de l'objectif du législateur consistant, d'une part, à instaurer une taxe d'abonnement annuel à l'égard de tous les comptes-titres d'une valeur moyenne d'1 000 000 euros et, d'autre part, au moyen d'une exonération fiscale pour les comptes-titres que détiennent en nom propre et pour compte propre certaines institutions financières et certains organismes de placement collectif, à assurer le fonctionnement normal du système financier national et international, il n'est en outre pas davantage manifestement déraisonnable que l'exonération de la taxe attaquée ne s'applique pas aux comptes-titres qui, dans le cadre d'un produit d'assurance-vie branche 23 conclu par un preneur d'assurance, sont détenus par des entreprises d'assurances, certes en nom propre, mais sur lesquels des tiers ont un droit de créance, lié à la valeur du compte concerné.

B.20. Les premier, deuxième et troisième moyens dans l'affaire n° 7623, le deuxième moyen dans l'affaire n° 7628, en sa seconde branche, le quatrième moyen dans l'affaire n° 7629 et le cinquième moyen dans l'affaire n° 7630 ne sont pas fondés.

V. En ce qui concerne la non-opposabilité à l'administration de certaines opérations relatives à des comptes-titres B.21.1. Les trois premiers moyens dans l'affaire n° 7625, les premier, deuxième et troisième moyens dans l'affaire n° 7627, le troisième moyen dans l'affaire n° 7628, les sixième et septième moyens dans l'affaire n° 7629, le septième moyen dans l'affaire n° 7630 et la quatrième branche du premier moyen dans l'affaire n° 7631 portent sur l'article 201/4, alinéa 6, du Code des droits et taxes divers, inséré par l'article 4 de la loi attaquée, et sur l'article 202 du Code des droits et taxes divers, inséré par l'article 16 de la loi attaquée.

B.21.2. Les articles 201/4 et 202, du Code des droits et taxes divers sont reproduits dans les considérants B.1.3 et B.1.4. La Cour examine d'abord les dispositions anti-abus qu'ils contiennent et ensuite leur effet rétroactif.

Les dispositions anti-abus contenues dans les articles 201/4, alinéa 6, et 202 du Code des droits et taxes divers, insérés par la loi attaquée B.22. Les trois premiers moyens dans l'affaire n° 7625, le premier moyen dans l'affaire n° 7627, le troisième moyen dans l'affaire n° 7628, les sixième et septième moyens dans l'affaire n° 7629, le septième moyen dans l'affaire n° 7630 et la quatrième branche du premier moyen dans l'affaire n° 7631 sont pris notamment de la violation de l'article 170, § 1er, de la Constitution par les articles 201/4, alinéa 6, et 202 du Code des droits et taxes divers, insérés par la loi attaquée. En raison du flou qui règne autour de l'objectif du législateur et des contradictions entre les travaux préparatoires et le texte de la loi, il est impossible de savoir, selon les parties requérantes, quelles opérations sont inopposables à l'administration.

De ce fait, la base imposable n'est pas définie avec suffisamment de clarté.

B.23.1. Dans l'exposé des motifs relatif au projet de loi qui est à l'origine de la loi attaquée, l'article 202 du Code des droits et taxes divers, inséré par la loi attaquée, est défini comme une « disposition générale anti-abus » (Doc. parl., Chambre, 2020-2021, DOC 55-1708/001, p. 20). Il ressort des travaux préparatoires que, pour cette disposition, le législateur s'est fondé sur l'article 344, § 1er, du CIR 1992.

Par son arrêt n° 141/2013 du 30 octobre 2013, la Cour a jugé en ce qui concerne l'article 344, § 1er, du CIR 1992 : « B.19. Non seulement les dispositions attaquées n'enlèvent rien au principe selon lequel le contribuable peut opter pour la voie la moins imposée, et ce, malgré des limites qui y sont mises (Doc. parl., Chambre, 2011-2012, DOC 53-2081/016, p. 69) sans porter fondamentalement atteinte à ce principe (ibid., DOC 53-2081/001, p. 111), mais en outre l'application de ces dispositions est soumise à plusieurs conditions strictes.

B.20.1. Il est tout d'abord requis que l'acte juridique ou l'ensemble des actes juridiques réalisant une même opération ait pour objectif d'échapper à l'impôt.

B.20.2. En outre, la nouvelle disposition anti-abus contient, contrairement à l'ancienne, une définition de l'' abus fiscal ', dont la portée a été indiquée en B.4.

A cet égard, bien que les dispositions attaquées soient libellées différemment quant aux conditions objective et subjective de l'abus fiscal, il ressort à suffisance des travaux préparatoires de la loi attaquée que le législateur a souhaité donner une même signification à ces conditions, que l'opération ait pour effet d'échapper à l'application de la disposition fiscale concernée ou de prétendre à un avantage fiscal accordé par cette dernière.

B.20.3. Par ailleurs, en ce qui concerne l'élément subjectif de l'abus fiscal, il ressort tant du libellé que des travaux préparatoires des dispositions attaquées que, pour être qualifiée d'abus fiscal, l'opération doit être exclusivement motivée par le souci d'éviter l'impôt ou l'être d'une manière à ce point essentielle que les éventuels autres objectifs de l'opération doivent être considérés comme négligeables ou purement artificiels, non seulement sur le plan économique, mais aussi eu égard à d'autres considérations pertinentes, notamment personnelles ou familiales (Doc. parl., Chambre, 2011-2012, DOC 53-2081/001, pp. 114-115).

A cet effet, un système de preuve et de preuve contraire a été prévu (B.4 et B.15).

Il revient d'abord à l'administration de démontrer que l'acte juridique ou l'ensemble d'actes juridiques réalisant une même opération choisi par le contribuable est en contradiction avec les objectifs d'une disposition fiscale clairement identifiée et a pour motif déterminant, sinon exclusif, d'éviter l'impôt, sans qu'elle doive nécessairement à ce stade prendre en compte les autres raisons éventuelles pour lesquelles le contribuable a pu décider de réaliser une telle opération et que le fisc peut ignorer. La charge de la preuve incombe dès lors en premier lieu à l'administration.

Ce n'est qu'ensuite que le contribuable doit démontrer à suffisance de droit que son choix de l'opération litigieuse a été justifié par d'autres motifs éventuels que le fait d'échapper à l'impôt.

Il s'agit donc non d'un renversement de la charge de la preuve, mais d'un aménagement de celle-ci.

B.20.4. En ce qui concerne la possibilité pour l'administration de revoir la situation fiscale du contribuable si ce dernier ne parvient pas à apporter la preuve contraire (B.4), l'exposé des motifs mentionne en ce qui concerne l'article 167 attaqué : ' Dans son avis n° 50 883/1, le Conseil d'Etat se réfère à la jurisprudence de la Cour Constitutionnelle et de la Cour de Cassation, de laquelle on peut déduire que le principe de légalité de l'article 170 de la Constitution exige que la loi indique clairement à quels critères objectifs la requalification doit répondre ou de quelle manière l'opération imposable, en cas d'évitement fiscal avéré, doit être redéfinie par l'administration et que, en d'autres termes, le législateur délimite suffisamment les frontières de la requalification. Il découle de ceci que la clarification concernant la possibilité de requalification par l'administration, donnée dans le projet proposé, ne constitue pas une délimitation de la possibilité d'une requalification suffisamment justifiée par rapport aux exigences de l'article 170 de la Constitution. Pour répondre à cela, le Conseil renvoie à son avis du 4 mai 2006, n° 40 372/1/2/3/4 qui a été rendu sur les dispositions concernant la mesure anti-abus en matière de taxe sur la valeur ajoutée ' (ibid., pp. 115-116).

Il a été constaté en B.15 que la nouvelle disposition anti-abus est une règle de procédure relative à l'administration de la preuve, dans le cadre de l'établissement factuel de la base imposable, de sorte que la mesure attaquée n'affecte ni la base imposable ni le taux d'imposition.

B.21.1. En ce qui concerne l'élément objectif de l'abus fiscal, le législateur exige que l'opération en cause ait pour effet d'échapper à l'impôt, soit en profitant d'un avantage fiscal, soit en se plaçant en dehors du champ d'application d'une disposition taxatrice.

Il faut en outre que l'effet ainsi décrit de l'opération soit en contradiction avec les objectifs poursuivis par la disposition fiscale concernée, et pas simplement étranger à de tels objectifs.

Par conséquent, la mesure attaquée n'est pas une habilitation générale autorisant l'administration à fixer elle-même, par voie de mesure générale, la matière imposable, mais constitue un moyen de preuve destiné à apprécier, dans des cas concrets, sous le contrôle du juge, des situations particulières, de manière individuelle.

Le principe constitutionnel de légalité en matière fiscale n'exige pas que le législateur définisse de façon plus détaillée encore les conditions concrètes d'application de la mesure, puisque la nature même du phénomène que celle-ci combat ne le permet pas.

B.21.2. Toutefois, lorsque l'administration fiscale établit l'existence de l'élément objectif de l'abus fiscal, au sens des articles 344, § 1er, et 18, § 2, elle ne peut constater la contrariété de l'opération aux objectifs de la disposition fiscale concernée que lorsque ces objectifs ressortent de manière suffisamment claire du texte et, le cas échéant, des travaux préparatoires de la disposition législative applicable. A cet égard, l'administration devra tenir compte, notamment, du contexte général de la législation fiscale pertinente, des pratiques communément en vigueur au moment de l'entrée en vigueur de la disposition fiscale dont elle invoque l'usage abusif ainsi que de l'existence éventuelle de dispositions spécifiques qui visent déjà à lutter contre certains usages abusifs de la disposition fiscale concernée ».

B.23.2. La Cour a dès lors jugé que le régime contenu dans l'article 344, § 1er, du CIR 1992 ne viole pas le principe de légalité en matière fiscale, mais que la contrariété aux objectifs de la disposition fiscale concernée peut uniquement être constatée lorsque ces objectifs ressortent de manière suffisamment claire du texte et, le cas échéant, des travaux préparatoires de la disposition législative applicable.

B.23.3. Comme l'a observé le Conseil d'Etat dans son avis relatif à l'avant-projet qui est devenu la loi attaquée, l'objectif budgétaire du législateur consistant à prélever une taxe d'abonnement annuelle sur les seuls comptes-titres rend l'application d'une règle anti-abus potentiellement imprévisible.

Le Conseil d'Etat a notamment observé : « Le caractère très simple et spécifique de la matière imposable (la détention d'un compte-titres) et l'objectif purement budgétaire de la taxe en projet, tel que l'ont souligné les délégués eux-mêmes (voir l'observation 5), semblent en effet rendre fondamentalement problématique l'application de la disposition anti-abus à la taxe en projet, ainsi qu'il ressort de ce qui suit.

Si l'on considère que des opérations qui ont pour effet de ne pas dépasser le seuil de 1 million d'euros - que celles-ci concernent des comptes-titres existants ou de nouveaux comptes-titres - sont uniquement, de ce fait, contraires à l'objectif de la taxe en projet de percevoir des moyens d'une manière efficace et simple, chaque opération de ce type pourra être qualifiée d'abus fiscal, impliquant que la charge de la preuve sera chaque fois renversée au détriment du redevable ou du contribuable.

Par contre, si l'on considère que l'intention du législateur est précisément de ne pas taxer d'autres formes de placement et comptes-titres d'une valeur ne dépassant pas 1 million d'euros, on aperçoit mal comment des opérations visant à utiliser ces formes alternatives non taxées peuvent être considérées comme contraires à cet objectif. Le Conseil d'Etat n'aperçoit pas quel critère pourrait être élaboré qui permettrait ' de manière suffisamment claire ' d'opérer une distinction entre certaines opérations qui relèveraient du champ d'application de la disposition anti-abus et d'autres opérations qui n'en relèveraient pas.

Il apparaît dès lors au Conseil d'Etat que la disposition anti-abus soit a une portée très stricte, soit devient une disposition dépourvue de toute signification, selon l'interprétation que l'on donne aux ' objectifs ' des dispositions relatives à la taxe en projet. Dans le premier cas cité, chaque opération qui a pour seul effet (indépendamment de l'intention) d'échapper au champ d'application de la taxe en projet entraîne un renversement de la charge de la preuve en défaveur du redevable ou du contribuable. Dans le deuxième cas précité, l'objectif budgétaire même de la taxe en projet est compromis dans une large mesure, étant donné que l'on ne pourra pas agir, dans la pratique, contre des possibilités d'éluder la taxe, soit vers des formes de placement alternatives, soit vers différents comptes-titres d'une valeur ne dépassant pas 1 million d'euros.

On ne peut en tout cas remédier à cette ambiguïté assez fondamentale en élaborant dans l'exposé des motifs une casuistique qui mentionne pour un certain nombre d'exemples ceux qui seraient admissibles et ceux qui ne le seraient pas. Pareil procédé manque non seulement de cohérence, mais n'offre en outre pas une sécurité juridique suffisante et est contraire au principe de légalité consacré par les articles 170 et 172 de la Constitution, qui implique en effet que les éléments essentiels du régime fiscal en projet doivent être fixés dans la loi » (Doc. parl., Chambre, 2020-2021, DOC 55-1708/001, pp. 63-64).

B.23.4. A la lumière de l'avis du Conseil d'Etat, l'exposé des motifs du projet de loi qui est devenu la loi attaquée précise : « L'objectif des dispositions légales instaurant la taxe annuelle sur les comptes-titres est, comme indiqué ci-dessus, que la taxe puisse être perçue de manière efficiente sur le moyen ' compte-titres ' simplement et uniquement en fonction de la valeur du compte-titres. La taxe est perçue seulement si la valeur moyenne des instruments financiers détenus sur le compte-titres est supérieure à 1 million d'euros. Cette considération a pour conséquence que les comportements visant à réduire la valeur imposable d'un compte-titres en utilisant des formes et moyens d'investissement alternatifs, en poursuivant le même but mais en utilisant un autre moyen, seulement pour contourner le seuil de 1 million d'euros par compte-titres, sont contraires à l'objectif des dispositions de ce projet de loi. Par exemple, un investisseur agit contrairement à l'objectif de ces dispositions lorsque, ayant au départ deux comptes-titres, l'un de 1,5 million d'euros, l'autre de 200 000 euros, il opère des transferts de l'un à l'autre tels que les deux comptes-titres soient sous le seuil imposable sans réduire la valeur totale de ses comptes.

Il découle également de ce qui précède que la vente de titres d'un compte-titres afin de réinvestir le produit dans des actifs, en utilisant non seulement un autre moyen mais en visant aussi un autre but, ne donne pas lieu à un abus.

Contrairement à l'avis du Conseil d'Etat, il est donc possible de développer un critère qui permet de distinguer de manière suffisamment claire certaines opérations qui entrent dans le champ d'application de la mesure anti-abus et d'autres qui n'y entrent pas. En effet, du point de vue de l'objectif budgétaire du présent projet, il ne peut être admis que la valeur imposable d'un compte-titres soit réduite afin de poursuivre avec cette valeur un même objectif via un autre moyen. De cette manière, l'intention du législateur serait, en effet, contrecarrée. De ce point de vue, il peut donc être admis que la valeur imposable passe sous le seuil d'1 million d'euros en vue d'opérer des investissements immobiliers (autre moyen et autre objectif). En effet, il s'agit d'un autre objectif d'investissement que l'on soumet aux conséquences de la poursuite de cet objectif (autre type de rendement, paiement du précompte immobilier, contrôle de l'état et entretien, etc.). En revanche, il ne peut être admis que la valeur imposable tombe sous le seuil d'1 million d'euros par la conversion d'actions, obligations et autres instruments financiers imposables en actions nominatives (autre moyen, mais même objectif).

Il s'agit en effet d'un même objectif d'investissement mais sous une autre forme (même rendement, mêmes droits, etc.). En d'autres mots, la mesure anti-abus empêche que l'on se place en dehors de l'application de la taxe tout en continuant à poursuivre le même objectif d'investissement. Ainsi, bien qu'il s'agisse dans les deux exemples mentionnés de formes de placement alternatives pour les instruments financiers imposables détenus sur un compte-titres, la logique de la réduction de la valeur imposable est fondamentalement différente. La mesure anti-abus n'est donc pas soit très rigoureuse soit dénuée de sens; il s'agit d'une mesure soigneusement équilibrée qui préserve précisément l'objectif budgétaire du présent projet. [...] A la lumière de ce qui précède, les situations suivantes peuvent être qualifiées d'abus : 1° la scission de comptes-titres par laquelle des titres sont déplacés entre des comptes auprès du même intermédiaire financier ou vers des comptes-titres auprès d'un autre intermédiaire financier en vue d'éviter que la valeur totale des titres sur un compte soit de plus d'1 million d'euros;2° l'ouverture de comptes-titres par laquelle des titres sont répartis entre des comptes auprès du même intermédiaire financier ou auprès d'un autre intermédiaire financier en vue d'éviter que la valeur totale des titres sur un compte soit de plus d'1 million d'euros;3° la conversion d'actions, obligations ou d'autres instruments financiers imposables en titres nominatifs de sorte qu'ils ne soient plus détenus sur un compte-titres, en vue d'échapper à la taxe.C'est par exemple le cas lorsque la conversion a lieu dans des situations dans lesquelles il est habituel que les titres soient détenus de manière dématérialisée et où la conversion ne concerne pas les (souvent importantes) participations au capital dans (principalement) les sociétés familiales détenues comme investissement à long terme et/ou aux fins de contrôles, lesquelles se trouvent d'ailleurs en dehors du cadre normal d'un portefeuille de placement; 4° le placement d'un compte-titres soumis à la taxe dans une personne morale étrangère qui transfère les titres sur un compte-titres étranger, en vue d'éviter la taxe;5° le placement d'un compte-titres soumis à la taxe dans un fonds dont les parts sont nominatives, en vue d'éviter la taxe;6° le transfert d'un compte-titres ou d'un contrat d'assurance branche 23 existant vers un contrat d'assurance branche 23 conclu avec une entreprise d'assurance établie en dehors de la Belgique, en vue d'échapper à la taxe ;7° le transfert d'un compte-titres lorsque les titres sont transférés à l'étranger auprès du même intermédiaire financier ou sur des comptes auprès d'un autre intermédiaire financier, en vue d'échapper à la taxe;8° la détention d'un compte-titres dans lequel tous les titres ont été vendus ou transférés afin de créer des valeurs nulles à des points de référence afin de réduire la valeur moyenne des instruments financiers imposables au cours de la période de référence, en vue de réduire ou d'échapper à la taxe. Dans les situations mentionnées ci-dessus, il existe une présomption réfutable d'évasion fiscale qui est contraire à l'objectif des dispositions de cette loi et, l'Administration peut raisonnablement supposer qu'il y a abus fiscal. Ceci n'empêche évidemment pas que le redevable a toujours le droit de démontrer, par des éléments concrets et vérifiables, que les opérations s'expliquent par d'autres motifs que l'évitement de la taxe. De tels motifs sont en principe propres au titulaire du compte et dépendent de chaque cas séparément. Il n'est toutefois pas impensable que des événements tels ceux décrits dans les exemples susmentionnés résultent de motifs techniques, opérationnels ou organisationnels propres à l'intermédiaire financier et s'imposent au titulaire du compte. Ceux-ci sont évidemment à prendre en compte aussi.

Cela créé également de la clarté pour l'intermédiaire financier en ce qui concerne l'obligation de paiement. En effet, ce n'est que lorsqu'il peut être démontré par des éléments concrets que l'opération a eu lieu pour des raisons principalement autres que fiscales, que le redevable - in casu l'intermédiaire belge, le représentant responsable ou le titulaire - pourra apporter à l'Administration la preuve contraire. Cela sera par exemple le cas en cas de scission d'un compte-titres suite à une séparation qui va de pair avec un changement d'adresse d'au moins l'un des deux partenaires. En cas de détention de plusieurs comptes-titres auprès de différents intermédiaires financiers, une répartition prouvée et sérieuse du risque pourrait constituer un motif non-fiscal admissible » (Doc. parl., Chambre, 2020-2021, DOC 55-1708/001, pp. 21-24).

Au cours du débat au sein de la commission compétente, le vice-premier ministre et ministre des Finances a déclaré : « En ce qui concerne l'application de la nouvelle taxe, la disposition générale anti-abus place le redevable au centre et donc pas le compte-titre lui-même. C'est logique puisqu'une disposition générale anti-abus doit être appliquée au cas par cas et que les intentions sous-jacentes à l'exécution de l'opération sont déterminantes. A cet égard, il faut garder à l'esprit que le législateur introduit une taxe sur les comptes-titres, à partir d'une certaine valeur moyenne des instruments financiers imposables de ces comptes-titres, avec un objectif budgétaire. Lorsqu'une opération est réalisée qui frustre l'intention du législateur, un jeu de preuve et de contre-preuve se met en oeuvre entre le fisc et le redevable. Ainsi, la scission d'un compte-titres de 1,8 million d'euros en deux comptes-titres de 900 000 euros, détenus auprès de banques différentes, n'a pas d'effet quant à la taxe, à condition que l'intention principale ait consisté à échapper à la taxe. Si cette condition est remplie, la taxe continuera à être perçue comme si la scission n'avait pas eu lieu.

Ici aussi vaut le principe qu'en cas de séparation ou de décès ayant pour effet la cessation d'une indivision forcée d'un compte-titres, la disposition anti-abus n'est pas d'application. En effet, dans ces situations souvent pénibles, l'on peut difficilement considérer que l'intention principale consiste à échapper à la taxe. La disposition anti-abus reste dès lors sans effet si, par exemple, à l'occasion d'une séparation, un compte-titres détenu dans le patrimoine commun est converti en deux comptes-titres distincts détenus par chacun des deux ex-partenaires auprès d'une banque que l'on a soi-même choisie.

Il en va de même si, par exemple à l'occasion d'une séparation, un compte-titres détenu au nom des deux partenaires dans le cadre d'une communauté matrimoniale, est converti en deux comptes-titres distincts détenus par les ex-partenaires en nom propre auprès de la même banque.

Un même raisonnement vaut en cas de partage d'un compte-titres lors de la cessation d'une indivision forcée dans le cadre d'un héritage.

A la lumière de l'avis du Conseil d'Etat, le gouvernement a précisé davantage le fonctionnement et les effets de la disposition anti-abus.

Un certain nombre d'exemples ont été ajoutés, relatifs aux autres droits et taxes pour lesquels la disposition générale anti-abus joue.

Les exemples relatifs à la nouvelle taxe ont été complétés en fonction des voies d'évitement auxquelles il est apparemment songé dans la pratique depuis la publication des plans du gouvernement. Ceux qui ont lu l'exposé des motifs auront pris conscience que la disposition générale anti-abus est une mesure soigneusement équilibrée qui préserve précisément l'objectif budgétaire du projet à l'examen. En effet, chaque opération visant le même but mais via le choix d'un autre moyen en vue d'échapper à la taxe, pourra être effectivement contrée. Ceux qui souhaitent réaliser de telles opérations, ou les ont déjà réalisées, ont dès lors été clairement avertis. Ainsi par exemple aussi des sociétés belges qui veulent placer des liquidités excédentaires sur un compte-titres et à cet effet mettent temporairement les fonds à disposition d'un membre étranger du groupe qui, ceci sur demande ou incitation de la société belge, passe à la détention d'un compte-titres auprès d'une institution étrangère » (Doc. parl., Chambre, 2020-2021, DOC 55-1708/003, pp. 14-15).

B.23.5. Il ressort de ce qui précède que les travaux préparatoires postérieurs à l'avis du Conseil d'Etat exposent en des termes suffisamment clairs de quelle manière la disposition « générale » anti-abus contenue dans l'article 202 du Code des droits et taxes divers, inséré par la loi attaquée, doit être interprétée. Il découle de l'exposé des motifs du projet de loi que l'article 202 du Code des droits et taxes divers doit être interprété en ce sens que les comportements visant à réduire la valeur imposable d'un compte-titres en utilisant des formes et moyens d'investissement alternatifs en poursuivant le même but mais en utilisant un autre moyen d'investissement dans le seul but de contourner le seuil de 1 000 000 euros par compte-titres sont contraires à l'objectif de la taxe annuelle sur les comptes-titres.

Il revient d'abord à l'administration de démontrer que le contribuable a choisi un acte juridique ou un ensemble d'actes juridiques réalisant une même opération qui est contraire à l'objectif de la taxe annuelle sur les comptes-titres, sans qu'elle doive nécessairement à ce stade prendre en compte les autres raisons éventuelles pour lesquelles le contribuable a pu décider de réaliser une telle opération et que le fisc peut ignorer. La charge de la preuve incombe dès lors en premier lieu à l'administration.

Ce n'est qu'ensuite que le contribuable doit démontrer à suffisance de droit que son choix de l'opération litigieuse a été justifié par d'autres motifs éventuels que le fait d'échapper à l'impôt.

B.23.6. Le principe constitutionnel de légalité en matière fiscale n'exige pas que le législateur définisse de façon plus détaillée encore les conditions de fond pour l'application de la disposition « générale » anti-abus contenue dans l'article 202 du Code des droits et taxes divers, inséré par la loi attaquée.

B.23.7. Compte tenu de ce qui est dit en B.23.5, les trois premiers moyens dans l'affaire n° 7625, le premier moyen dans l'affaire n° 7627, le troisième moyen dans l'affaire n° 7628, les sixième et septième moyens dans l'affaire n° 7629, le septième moyen dans l'affaire n° 7630 et le premier moyen dans l'affaire n° 7631, en sa quatrième branche, ne sont pas fondés, en ce qu'ils sont pris de la violation de l'article 170, § 1er, de la Constitution par l'article 202 du Code des droits et taxes divers, inséré par la loi attaquée.

B.24.1. En vertu de l'article 201/4, alinéa 6, du Code des droits et taxes divers, inséré par la loi attaquée, deux catégories d'opérations qui portent sur un compte-titres soumis à la taxe annuelle ne sont pas opposables à l'administration fiscale, à savoir : « 1° la scission d'un compte-titres en plusieurs comptes-titres détenus auprès du même intermédiaire; 2° la conversion d'instruments financiers imposables, détenus sur un compte-titres, en instruments financiers nominatifs ». B.24.2. En ce qui concerne cette disposition, l'exposé des motifs du projet de la loi attaquée mentionne : « Enfin, le présent projet prévoit une présomption irréfragable visant les cas les plus évidents de scission des comptes-titres. La scission d'un compte-titres en plusieurs, détenus auprès du même intermédiaire financier, n'est pas opposable à l'administration fiscale, si elle a eu lieu à partir du 30 octobre 2020. Cette date correspond à celle à laquelle la disposition générale anti-abus produit ses effets dans le cadre de la taxe annuelle sur les comptes-titres. En cas de séparation ou de décès ayant pour effet la cessation de l'indivision forcée d'un compte-titres, la présomption irréfragable ne vaut pas. Il en va de même si, par exemple, un compte de 50 000 euros est divisé en deux comptes de 25 000 euros.

Une même présomption irréfragable est d'ailleurs prévue pour les cas de conversion d'instruments financiers imposables, détenus sur un compte-titres, en instruments financiers nominatifs » (Doc. parl., Chambre, 2020-2021, DOC 55-1708/001, p. 12).

Au sein de la commission compétente, le vice-premier ministre et ministre des Finances a déclaré ce qui suit : « Il ne sera pas possible d'échapper à la taxe par exemple en scindant des comptes-titres, en ouvrant différents comptes-titres, en convertissant en titres nominatifs des titres figurant sur un compte, en logeant des comptes-titres auprès de personnes morales étrangères ou en rhabillant des comptes-titres en produits nominatifs. En effet, dans ces situations, il sera question d'une opération inopposable ou d'une présomption réfragable laissant au redevable la possibilité de fournir la preuve contraire. [...] Les deux dispositions spécifiques d'inopposabilité placent de nouveau les comptes-titres au centre. Dès que l'opération légalement définie est réalisée, elle n'est pas opposable au fisc. Les intentions sous-jacentes à l'exécution de l'opération sont donc irrelevantes.

Ainsi, la scission d'un compte-titres de 1,8 millions d'euros, en deux comptes-titres de 900 000 euros détenus auprès de la même banque, ne produit aucun effet pour l'application de la taxe. La taxe restera donc perçue comme si la scission n'avait pas eu lieu.

Il va de soi que la disposition d'inopposabilité ne joue de rôle que si la taxe pourrait être d'application. Ainsi, la scission d'un compte-titres de 50 000 euros en deux comptes-titres de 25 000 euros détenus auprès de la même banque, n'est pas touchée par la disposition d'inopposabilité.

Il en va de même en cas de séparation ou de décès ayant pour effet la cessation d'une indivision forcée d'un compte-titres. Autrement, il serait en effet porté atteinte au principe de droit civil que nul ne peut être forcé de rester en indivision. Dans le même sens, le vice-premier ministre confirme qu'aussi en cas de conversion de comptes-titres dits ' omnibus ', détenus par des intermédiaires auprès d'un dépositaire central de titres ou une banque dépositaire, en différents comptes-titres distincts, cela ne qualifie pas comme scission pour la disposition d'inopposabilité. En effet, autrement, il serait porté atteinte à une obligation supranationale imposée par le Règlement (UE) n° 909/2014. Enfin, il va de soi que la scission d'un compte-titres en vue d'une application correcte des exclusions pour les entreprises financières, est opposable. Autrement, il serait fondamentalement porté atteinte à l'objectif de l'exclusion juridique/technique dans le projet à l'examen, que le vice-premier ministre a déjà expliqué et dont il a explicité l'impact sur certains produits d'investissement connus. [...] Enfin, le vice-premier ministre veut souligner l'interaction entre les deux dispositions spécifiques d'inopposabilité et la disposition générale anti-abus. Il n'en va pas ainsi qu'une même situation serait soit visée par les dispositions d'inopposabilité soit par la disposition générale anti-abus. En effet, les dispositions s'appliquent l'une après l'autre. Ainsi, une scission d'un compte-titres de 900 000 euros en deux comptes-titres de 450 000 euros, détenus auprès de la même banque, n'entraînera pas l'application de la disposition d'inopposabilité puisque le compte-titres ne franchissait pas le seuil d'un million d'euros. Mais cela pourrait donner lieu à l'application de la disposition générale anti-abus, selon les intentions sous-jacentes à l'exécution de cette scission. Si, par exemple, la scission a lieu en vue de ne pas dépasser le seuil de 1 million d'euros à la lumière de cours de bourse continuant à monter ou en tenant compte d'un investissement complémentaire planifié, l'intention de scinder le compte-titres en vue d'échapper à la taxe existe et la disposition générale anti-abus sera appliquée » (Doc. parl., Chambre, 2020-2021, DOC 55-1708/003, pp. 5 et 13-16).

B.25. Il ne ressort pas de manière suffisamment claire du texte de la loi et des travaux préparatoires les deux catégories d'opérations qui sont concernées par la disposition anti-abus contenue dans l'article 201/4, alinéa 6, du Code des droits et taxes divers, inséré par l'article 4 de la loi attaquée. Le Conseil des ministres affirme qu'il convient d'admettre, eu égard à la connexité avec les autres parties de la loi attaquée, que la disposition anti-abus contenue dans l'article 201/4, alinéa 6, du Code des droits et taxes divers, inséré par la loi attaquée, est uniquement applicable aux opérations qui visent à éluder la taxe annuelle sur les comptes-titres et qui ne répondent pas à une modification de la situation patrimoniale sous-jacente du redevable ou qui ne sont pas causées par une telle modification. Il ressort toutefois clairement du texte de l'article 201/4, alinéa 6, que cette disposition ne permet pas de prouver que l'opération est justifiée par d'autres motifs que l'évasion fiscale.

On n'aperçoit pas comment ce caractère clairement irréfragable peut être concilié avec la prétendue possibilité de démontrer que l'opération répond à une modification de la situation patrimoniale sous-jacente du redevable. Même à supposer que telle fût l'intention du législateur, les travaux préparatoires ne permettent du reste nullement de déterminer ce qu'il convient d'entendre par « modification de la situation patrimoniale sous-jacente ». On n'aperçoit pas non plus en quoi la preuve qu'une opération répond à une modification de la situation patrimoniale sous-jacente diffère de la preuve que cette opération est justifiée par d'autres motifs que l'évasion fiscale.

L'article 201/4, alinéa 6, du Code des droits et taxes divers, inséré par l'article 4 de la loi attaquée, ne répond donc pas aux exigences du principe constitutionnel de légalité en matière fiscale.

B.26. Les trois premiers moyens dans l'affaire n° 7625, le premier moyen dans l'affaire n° 7627, le troisième moyen dans l'affaire n° 7628, les sixième et septième moyens dans l'affaire n° 7629, le septième moyen dans l'affaire n° 7630 et le premier moyen dans l'affaire n° 7631, en sa quatrième branche, sont fondés en ce qu'ils sont pris de la violation de l'article 170, § 1er, de la Constitution par l'article 201/4, alinéa 6, du Code des droits et taxes divers, inséré par la loi attaquée. Il y a lieu d'annuler l'article 201/4, alinéa 6, du Code des droits et taxes divers, inséré par la loi attaquée.

B.27.1. Les trois premiers moyens dans l'affaire n° 7625, le premier moyen dans l'affaire n° 7627, le troisième moyen dans l'affaire n° 7628, les sixième et septième moyens dans l'affaire n° 7629, le sixième moyen dans l'affaire n° 7630 et la quatrième branche du premier moyen dans l'affaire n° 7631 sont notamment pris de la violation, par les articles 201/4, alinéa 6, et 202 du Code des droits et taxes divers, insérés par la loi attaquée, des articles 10, 11 et 172 de la Constitution.

B.27.2. Le deuxième moyen dans l'affaire n° 7625 et le sixième moyen dans l'affaire n° 7630 sont notamment pris de la violation des articles 16 et 17 de la Constitution, de l'article 1er du Premier Protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme, de l'article 17 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et des articles 10 et 11 de la Constitution, lus en combinaison avec le principe de la sécurité juridique, par l'article 201/4, alinéa 6, du Code des droits et taxes divers, inséré par la loi attaquée.

B.27.3. Il n'y a pas lieu d'examiner les moyens précités, dès lors qu'ils ne peuvent conduire à une annulation plus étendue.

B.28.1. Le sixième moyen dans l'affaire n° 7630 est pris de la violation, par l'article 4 de la loi attaquée, des articles 10, 11 et 172 de la Constitution, lus en combinaison avec l'article 63, paragraphe 1, du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (ci-après : le TFUE).

B.28.2. Comme il est dit en B.2.2, pour satisfaire aux exigences de l'article 6 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, les moyens de la requête doivent faire connaître, parmi les règles dont la Cour garantit le respect, celles qui seraient violées ainsi que les dispositions qui violeraient ces règles et exposer en quoi ces règles auraient été transgressées par ces dispositions.

B.28.3. En ce qu'il est pris de la violation de l'article 63, paragraphe 1, du TFUE, lu en combinaison avec les articles 10, 11 et 172 de la Constitution, le sixième moyen dans l'affaire n° 7630 ne répond pas à ces exigences.

Bien qu'elle fasse valoir que les dispositions anti-abus contenues dans les articles 201/4, alinéa 6, et 202 du Code des droits et taxes divers, insérés par la loi attaquée, constituent une ingérence dans la libre circulation des capitaux entre les Etats membres et entre les Etats membres et les pays tiers, consacrée par l'article 63, paragraphe 1, du TFUE, lu en combinaison avec les articles 10, 11 et 172 de la Constitution, la partie requérante n'expose cependant pas de manière suffisamment précise et univoque en quoi les normes de référence précitées seraient violées.

B.28.4. Le sixième moyen dans l'affaire n° 7630 n'est pas recevable, en ce qu'il est pris de la violation de l'article 63, paragraphe 1, du TFUE, lu en combinaison avec les articles 10, 11 et 172 de la Constitution.

L'effet rétroactif des dispositions anti-abus à partir du 30 octobre 2020 B.29.1. Le deuxième moyen dans l'affaire n° 7627 est pris notamment de la violation des articles 10 et 11 de la Constitution par les articles 201/4, alinéa 6, et 202 du Code des droits et taxes divers, insérés par la loi attaquée, en ce que ces dispositions sont applicables à des opérations effectuées à partir du 30 octobre 2020. Selon la partie requérante dans cette affaire, l'effet rétroactif des dispositions anti-abus n'est pas justifié par des circonstances particulières.

B.29.2. Compte tenu de l'annulation de l'article 201/4, alinéa 6, du Code des droits et taxes divers, le grief relatif à cette disposition est sans objet. Le moyen doit donc uniquement être examiné en ce qui concerne l'article 202 du Code des droits et taxes divers.

B.30.1. Une règle de droit fiscal n'est rétroactive que si elle s'applique à des faits, actes et situations qui étaient définitivement accomplis au moment où elle est entrée en vigueur.

B.30.2. La taxe est due le premier jour qui suit la fin de la période de référence (article 201/8 du Code des droits et taxes divers, inséré par l'article 8 de la loi attaquée). L'article 20 de la loi attaquée dispose que la première période de référence commence le jour de l'entrée en vigueur de cette loi et se termine le 30 septembre 2021.

L'article 21 de la loi attaquée règle l'entrée en vigueur : « Cette loi entre en vigueur le jour qui suit celui de sa publication au Moniteur belge, à l'exception des articles 15 et 16 qui produisent leurs effets, exclusivement quant à la taxe annuelle sur les comptes-titres, le 30 octobre 2020 » .

La loi attaquée a été publiée au Moniteur belge le 25 février 2021.

L'article 202 du Code des droits et taxes divers, inséré par l'article 16 de la loi attaquée, produit ses effets à partir du 30 octobre 2020.

Ainsi, cette disposition est applicable à des faits, actes et situations qui étaient définitivement accomplis, à savoir aux opérations qui avaient déjà été effectuées au moment où elle est entrée en vigueur.

B.31.1. La rétroactivité de dispositions législatives, qui est de nature à créer une insécurité juridique, ne peut se justifier que par des circonstances particulières, notamment lorsqu'elle est nécessaire pour réaliser un objectif d'intérêt général, tel que le bon fonctionnement ou la continuité du service public.

B.31.2. L'intérêt général peut exiger qu'une mesure fiscale que le législateur considère comme indispensable ait effet immédiat et que la possibilité des contribuables de réduire par anticipation les effets poursuivis par la mesure soit limitée.

Il ressort des travaux préparatoires des dispositions attaquées ainsi que de l'avis paru au Moniteur belge, cité ci-après, que le législateur était soucieux de prévenir les effets d'anticipation susceptibles d'influencer les recettes fiscales et d'éviter que l'objectif d'intérêt général relatif au financement des dépenses d'intérêt général soit menacé (Doc. parl., Chambre, 2020-2021, DOC 55-1708/001, p. 26).

B.31.3. Le souci d'éviter que des redevables potentiels procèdent à grande échelle à des opérations pour échapper à une nouvelle imposition ne suffit certes pas en soi pour justifier la rétroactivité de la loi.

L'argument du Conseil des ministres selon lequel les opérations en question peuvent être effectuées très simplement est la conséquence du choix du législateur de prendre pour matière imposable la détention d'un compte-titres. Par ailleurs, ce raisonnement est contraire au raisonnement suivi pour motiver la tranche d'exonération de 1 000 000 euros, pour lequel il a été souligné que, pour une partie considérable des comptes-titres, à savoir ceux dont la valeur moyenne des instruments financiers imposables dépasse le seuil de 1 000 000 euros, il ne serait pas simple de trouver d'autres options de placement réalistes (Doc. parl., Chambre, 2020-2021, DOC 55-1708/001, p. 51).

B.31.4. Le 4 novembre 2020, l'avis suivant est paru au Moniteur belge : « Le 2 novembre 2020, le Conseil des ministres a approuvé un avant-projet de loi qui introduit une taxe annuelle sur les comptes-titres dans le Code des droits et taxes divers (ci-après C.D.T.D.).

Cet avant-projet sera transmis aussi rapidement que possible pour avis au Conseil d'Etat à 30 jours, en vue d'être déposé dans les meilleurs délais au Parlement.

La taxe annuelle vise les comptes-titres comme tels et concerne par conséquent en principe tous les comptes-titres détenus par des personnes physiques, y compris celles soumises à l'impôt des non-résidents, ainsi que tous les comptes-titres détenus par des personnes morales soumises à l'impôt des sociétés, à l'impôt des personnes morales ou à l'impôt des non-résidents. Par conséquent, les comptes-titres qui sont détenus dans le cadre des constructions juridiques mentionnées à l'article 2, § 1er, 13° du CIR 1992 sont également soumises à la taxe.

La nouvelle taxe est un impôt annuel sur la détention d'un compte-titres, ayant comme base imposable la valeur moyenne des instruments financiers imposables détenus sur ce compte-titres.

La taxe annuelle sur les comptes-titres est due seulement si cette valeur moyenne est supérieure à 1 000 000 euros.

Le taux de la taxe est fixé à 0,15 p.c.

Le cas échéant, le montant de la taxe est limité à 10 p.c. de la différence entre la base imposable et le seuil de 1 000 000 euros.

L'avant-projet contient aussi une disposition anti-abus qui vaut pour tout le C.D.T.D. Cette disposition vise entre autres les situations suivantes relatives à la taxe annuelle sur les comptes-titres : 1° la scission d'un comptes-titres par laquelle des titres sont déplacés sur un ou plusieurs autres comptes auprès du même intermédiaire financier ou vers des comptes-titres auprès d'un autre intermédiaire financier en vue d'éviter que la valeur totale des titres sur un compte soit de plus d'1 million d'euros;2° l'ouverture de comptes-titres par laquelle des titres sont répartis entre des comptes auprès du même intermédiaire financier ou auprès d'un autre intermédiaire financier en vue d'éviter que la valeur totale des titres sur un compte soit de plus d'1 million d'euros;3° la conversion d'actions, obligations ou d'autres instruments financiers imposables en titres nominatifs de sorte qu'ils ne soient plus détenus sur un compte-titres, en vue d'échapper à la taxe;4° le placement d'un compte-titres soumis à la taxe dans une personne morale étrangère qui transfère les titres sur un compte-titres étranger, en vue d'éviter la taxe;5° le placement d'un compte-titres soumis à la taxe dans un fonds dont les parts sont nominatives, en vue d'éviter la taxe. Dans les situations mentionnées ci-dessus, il existe une présomption réfutable d'évasion fiscale par laquelle le redevable peut apporter la preuve du contraire.

Afin d'éviter les effets d'anticipation qui pourraient influencer les recettes fiscales et pour éviter que l'objectif d'intérêt général de financement des dépenses générales soit menacé, le Gouvernement a décidé de faire rétroagir la disposition anti-abus, exclusivement quant à la taxe sur les comptes-titres, au 30 octobre 2020, date à laquelle cette taxe a été largement couverte par les médias. A partir de cette date, l'on peut raisonnablement admettre que le public a pu prendre connaissance de l'intention d'imposer les comptes-titres ».

B.31.5. S'il est vrai qu'un avis publié au Moniteur belge annonçant une modification de la loi fiscale corrige, dans une certaine mesure, l'imprévisibilité d'une disposition rétroactive, un tel avis ne peut, de par sa nature, étant donné notamment son caractère purement informatif et l'absence de toute force obligatoire, remédier à l'insécurité juridique créée par l'effet rétroactif. Un avis publié au Moniteur belge ne peut dès lors en soi suffire à justifier l'effet rétroactif d'une disposition législative. Tel est d'autant plus le cas lorsque l'effet rétroactif est applicable à partir d'une date qui précède la publication de l'avis.

B.32. Il résulte de ce qui précède qu'aucun élément ne justifie la rétroactivité attaquée. Le deuxième moyen dans l'affaire n° 7627 est fondé dans cette mesure. Dans l'article 21 de la loi attaquée, il y a lieu d'annuler les mots « , à l'exception des articles 15 et 16 qui produisent leurs effets, exclusivement quant à la taxe annuelle sur les comptes-titres, le 30 octobre 2020 ».

VI. En ce qui concerne le principe non bis in idem en matière fiscale B.33.1. Les parties requérantes dans l'affaire n° 7628 invoquent, dans leur quatrième moyen, la violation du principe non bis in idem, lu en combinaison avec les articles 10, 11 et 172 de la Constitution. Elles font valoir en substance qu'il y a un cumul de la taxe attaquée avec la taxe annuelle compensatoire des droits de succession, contenue dans les articles 147 à 160bis du Code des droits de succession, et que le fait de clôturer un compte-titre et d'en ouvrir un autre, contenant les mêmes instruments financiers, au cours d'une même période de référence aboutit à la perception d'une double taxe sur les comptes-titres.

B.33.2.1. La partie requérante dans l'affaire n° 7630 prend un troisième moyen de la violation, par les articles 3 et 11 de la loi attaquée, des articles 10, 11 et 172 de la Constitution, de l'article 16 de la Constitution et de l'article 1er du Premier Protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme, de l'article 63 du TFUE et du principe de proportionnalité. Elle évoque également le fait que la clôture et la réouverture d'un compte-titres, avec les mêmes instruments financiers, au cours d'une même période de référence aboutissent à la perception d'une double taxe sur les comptes-titres.

B.33.2.2. Comme il est dit en B.2.2, pour satisfaire aux exigences de l'article 6 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, les moyens de la requête doivent faire connaître, parmi les règles dont la Cour garantit le respect, celles qui seraient violées ainsi que les dispositions qui violeraient ces règles et exposer en quoi ces règles auraient été transgressées par ces dispositions.

Le troisième moyen dans l'affaire n° 7630 ne répond en l'espèce à aucune de ces exigences. La partie requérante n'expose pas de façon suffisamment claire en quoi les dispositions attaquées ne seraient pas compatibles avec les normes de référence qu'elle invoque. Bien qu'elle fasse valoir que les dispositions attaquées peuvent, dans certains cas, aboutir à la perception d'une double taxe lorsqu'un redevable de la taxe titulaire d'un compte-titres clôture celui-ci et ouvre un autre auprès d'un autre organisme financier au cours d'une même période de référence avec les mêmes instruments financiers, elle n'expose pas en quoi cette pratique serait incompatible avec les articles 10, 11 et 172 de la Constitution, avec l'article 16 de la Constitution et avec l'article 1er du Premier Protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme, avec l'article 63 du TFUE et avec le principe de proportionnalité.

B.33.2.3. En vertu de l'article 142, alinéa 2, de la Constitution et de l'article 1er de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, la Cour est en outre uniquement compétente pour statuer sur les recours en annulation d'une loi, d'un décret ou d'une règle visée à l'article 134 de la Constitution pour cause de violation des règles qui sont établies par la Constitution ou en vertu de celle-ci pour déterminer les compétences respectives de l'autorité fédérale, des communautés et des régions et pour cause de violation des articles du titre II (« Des Belges et de leurs droits ») et des articles 143, § 1er, 170, 172 et 191 de la Constitution.

En ce que la Cour est invitée, dans le troisième moyen dans l'affaire n° 7630, à contrôler directement les dispositions attaquées au regard de l'article 63 du TFUE et du principe de proportionnalité, le moyen est irrecevable. B.33.2.4. Le troisième moyen dans l'affaire n° 7630 est irrecevable.

B.34.1. Les articles 147 à 160bis du Code des droits de succession prévoient une taxe annuelle compensatoire des droits de succession, qui s'élève à 0,17 % et qui est due annuellement sur la totalité des avoirs des associations sans but lucratif, des fondations privées et des associations internationales sans but lucratif, en principe sans déduction de charges. Tout comme la taxe attaquée, cette imposition est applicable aux comptes-titres des personnes morales précitées.

B.34.2. Interrogés par le Conseil d'Etat sur l'éventuelle violation du principe non bis in idem en raison du cumul de la taxe attaquée avec la taxe compensatoire des droits de succession, les délégués du Gouvernement ont déclaré ce qui suit (en néerlandais) : « Er is geen sprake van juridische dubbele belasting. De belastbare materie is immers fundamenteel verschillend. Bij de jaarlijkse taks tot vergoeding der successierechten staat het geheel van de bezittingen/het totale bruto vermogen centraal, met een aantal specifieke uitzonderingen (cf. art. 150 W.Succ.), terwijl bij JTER enkel effectenrekeningen centraal staan (cf. art. 201/4 WDRT). Zo betalen de betrokken entiteiten ook onroerende voorheffing op hun huizen, verkeersbelasting op hun auto's, heffingen op hun ongeschikte en onbewoonbare woningen, heffingen op hun leegstaande bedrijfsruimten, etc., terwijl die goederen ook deel uitmaken van de berekeningsbasis voor de jaarlijkse taks tot vergoeding der successierechten. Er kan dus enkel worden vastgesteld dat voormelde vermogensbestanddelen die reeds worden onderworpen aan een andere belasting, vandaag ook al in aanmerking komen voor de jaarlijkse taks tot vergoeding der successierechten.

Verder viseert de jaarlijkse taks tot vergoeding der successierechten bepaalde privaatrechtelijke verenigingen die een specifieke rechtsvorm hebben aangenomen. Bijgevolg kunnen ze ook geen aandelen of deelbewijzen vererven en zal het vermogen van een vzw ook niet zijn onderworpen aan de successierechten, die bij iedere generatie de overdrachten van goederen bij particulieren treft. Vandaar dat de wet een compensatie heeft ingevoerd door de goederen van de vzw te onderwerpen aan een speciale belasting, ' taks tot vergoeding der successierechten ' genoemd, die in principe geldt op het gehele vermogen. Deze compensatiedoelstelling is dus geheel verschillend van de doelstelling van JTER. In het verleden heeft het Grondwettelijk Hof reeds rekening gehouden met de verschillende doelstelling van wetgeving om te besluiten dat er geen schending was van het beginsel ne bis in idem (Arbitragehof, 15 september 1999, nr. 97/99, overw.

B.55-B.62).

De jaarlijkse taks tot vergoeding der successierechten heeft ook tot doel het oppotten van vermogen in de rechtspersoon dat niet nodig is voor de dagelijkse werking van de vereniging te ontraden. Artikel 150 W. Succ. stelt dan ook de liquiditeiten en het bedrijfskapitaal bestemd om gedurende het jaar te worden verbruikt voor de activiteit van de vereniging of stichting vrij van de taks. De inkomsten die worden belegd in aandelen, obligaties of soortgelijke waarden worden beschouwd als gekapitaliseerde inkomsten en komen bijgevolg niet in aanmerking voor de vrijstelling. Voor termijnrekeningen van korte duur (vb. minder dan drie maand) wordt aangenomen dat ze onder bepaalde voorwaarden niet te beschouwen zijn als belastbaar kapitaalsbestanddeel (RJ nr. S 150/08-01). Ook deze ontradingsdoelstelling is dus geheel verschillend van de doelstelling van JTER. JTER viseert dus geen specifieke rechtspersonen in functie van een compenserend of ontradend doel. Enkel een specifiek aangeduid vermogensbestanddeel, namelijk effectenrekeningen, is onderworpen aan de taks. Alle rechtspersonen zijn in principe onderworpen aan de taks.

Het vrijstellen van de vzw's of het eventueel toelaten van het verrekenen van de betaalde taks met de vzw-taks, zou evenzeer leiden tot een gespannen verhouding met het gelijkheidsbeginsel, vanuit de optiek van de onderworpenheid aan JTER » (Doc. parl., Chambre, 2020-2021, DOC 55-1708/001, pp. 59-60).

B.34.3. A la lumière de cette réponse, la section de législation du Conseil d'Etat a conclu : « La notion de ' double imposition ' implique qu'il doit s'agir de taxes parfaitement ou essentiellement identiques, à tout le moins en ce qui concerne la matière imposable, le contribuable et la contribution fiscale. Non seulement la base d'imposition des deux taxes est quelque peu différente, mais en outre l'objectif et le contexte des deux taxes présentent également des différences importantes. En effet, le but de la taxe annuelle compensatoire des droits de succession est de prévoir une compensation pour le fait que les personnes morales concernées ne ' décèdent ' pas et que, partant, leur patrimoine ne peut jamais faire l'objet de droits de succession, alors que l'objectif de la taxe annuelle sur les comptes-titres est de nature purement budgétaire et ne compense pas une taxe ' manquée'.

Il semble dès lors qu'il n'y a aucune contradiction avec le principe ne bis in idem, ni avec le principe d'égalité » (ibid., p. 60).

B.34.4. Il découle de ce qui précède que la taxe attaquée et la taxe annuelle compensatoire des droits de succession, bien qu'elles soient toutes deux applicables aux comptes-titres, diffèrent fondamentalement l'une de l'autre. En outre, ni les articles 10 et 11, ni l'article 172, alinéa 1er, de la Constitution ne contiennent une interdiction générale de la double imposition. Le cumul de la taxe attaquée avec la taxe annuelle compensatoire des droits de succession est compatible avec ces dispositions constitutionnelles.

B.35. Lorsqu'au cours d'une période de référence, une personne ouvre un compte-titres auprès d'un intermédiaire et ouvre ensuite un compte-titres auprès d'un autre intermédiaire, les intermédiaires concernés sont tenus d'appliquer distinctement la loi attaquée. Ainsi, les deux intermédiaires sont tenus de déterminer la valeur moyenne des instruments financiers détenus sur le compte-titres sur la base de la valeur de ceux-ci aux points de référence auxquels le compte était ouvert chez eux.

Bien que, sur les deux comptes, les mêmes instruments financiers puissent être détenus et que la valeur de ces instruments puisse donc, le cas échéant, donner deux fois lieu à l'application de la taxe attaquée, la double application de la taxe vise, non pas les instruments financiers, mais bien la détention de deux comptes-titres différents. La circonstance qu'une personne qui clôture au cours d'une période de référence un compte-titres d'une valeur moyenne dépassant 1 000 000 euros et ouvre ensuite un autre compte d'une valeur moyenne dépassant 1 000 000 euros doit payer deux fois la taxe attaquée découle logiquement du choix du législateur d'instaurer une taxe annuelle d'abonnement sur la simple détention d'un compte-titres dont la valeur moyenne dépasse 1 000 000 euros.

B.36. Le quatrième moyen dans l'affaire n° 7628 n'est pas fondé.

VII. En ce qui concerne l'obligation d'information des intermédiaires belges et les obligations des titulaires de comptes-titres B.37. La partie requérante dans l'affaire n° 7629 prend un deuxième moyen de la violation, par les articles 7 et 9 de la loi attaquée, des articles 10, 11, 22 et 172 de la Constitution. Elle fait valoir que, lorsqu'un compte-titres a plusieurs titulaires, ceux-ci sont, en vertu de l'article 201/9, alinéa 3, du Code des droits et taxes divers, inséré par la loi attaquée, solidairement tenus au paiement de la taxe attaquée et éventuellement aux amendes, alors qu'en vertu de l'article 201/9, alinéa 1er, l'intermédiaire est responsable du paiement et des éventuelles amendes lorsqu'il y a un seul titulaire. Elle fait valoir qu'il existe également des différences de traitement selon que les co-titulaires de comptes-titres sont résidents ou non-résidents.

Enfin, elle fait valoir que les intermédiaires doivent, selon les travaux préparatoires, informer les titulaires de l'identité de leurs co-titulaires.

B.38.1. Contrairement à ce que soutient la partie requérante dans l'affaire n° 7629, il ne peut être déduit de l'article 9 de la loi attaquée qu'il impose différentes obligations au titulaire d'un compte-titres, selon qu'il est l'unique titulaire ou co-titulaire d'un compte-titres détenu auprès d'un intermédiaire belge.

B.38.2. En ce qu'il est pris de la violation, par l'article 9 de la loi attaquée, des articles 10, 11 et 172 de la Constitution, le deuxième moyen dans l'affaire n° 7629 n'est pas fondé, étant donné qu'il repose sur une prémisse erronée.

B.39.1. Comme il est dit en B.2.2, pour satisfaire aux exigences de l'article 6 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, les moyens de la requête doivent faire connaître, parmi les règles dont la Cour garantit le respect, celles qui seraient violées ainsi que les dispositions qui violeraient ces règles et exposer en quoi ces règles auraient été transgressées par ces dispositions.

B.39.2. Bien que la partie requérante dans l'affaire n° 7629 fasse valoir que l'article 7 de la loi attaquée viole l'article 22 de la Constitution, en ce qu'il oblige les intermédiaires belges à communiquer aux titulaires des comptes-titres que ces derniers détiennent auprès d'eux une série de données - dont l'identité de tous les titulaires du compte concerné -, elle n'expose cependant pas de manière suffisamment précise et univoque en quoi cette dernière disposition serait violée. Il n'est de ce fait pas satisfait à l'exigence précitée.

B.39.3. En ce qu'il est pris de la violation de l'article 22 de la Constitution par l'article 7 de la loi attaquée, le deuxième moyen dans l'affaire n° 7629 est irrecevable.

B.40.1. La partie requérante fait ensuite valoir que les articles 7 et 9 de la loi attaquée violent les articles 10, 11 et 172 de la Constitution, en ce que seuls les intermédiaires belges, et donc pas les intermédiaires qui ne sont pas établis en Belgique, seraient tenus de communiquer les données mentionnées en B.37 à l'unique titulaire ou aux co-titulaires des comptes-titres détenus auprès d'eux.

B.40.2. L'article 201/3, 7°, du Code des droits et taxes divers, inséré par l'article 3 de la loi attaquée, contient une définition du terme « intermédiaire belge » : « Intermédiaire belge : un intermédiaire constitué conformément au droit belge ainsi qu'un intermédiaire établi en Belgique. Les intermédiaires qui ne sont pas établis en Belgique et qui ont désigné un représentant visé à l'article 201/9/1, sont assimilés à un intermédiaire belge pour l'application du présent titre ».

L'exposé des motifs du projet de loi mentionne au sujet de cette définition : « 7° une définition de la notion d'' intermédiaire belge ' est donnée.

C'est nécessaire parce qu'une distinction est faite par la suite entre les obligations imposées aux intermédiaires belges comme redevables de la taxe et celles imposées aux intermédiaires étrangers, pour lesquels la Belgique n'a pas de compétence territoriale.

Les intermédiaires étrangers pourront désigner un représentant agréé afin de payer la taxe, mais ce n'est pas une obligation » (Doc. parl., Chambre, 2020-2021, DOC 55-1708/001, p. 8).

L'exposé des motifs mentionne ensuite : « Comme pour chaque taxe indirecte, la perception se fait en principe via un intermédiaire. L'intermédiaire belge sera en tout cas responsable de la retenue, de la déclaration et du paiement de la taxe.

Le paiement libératoire par un intermédiaire belge est donc le point de départ. Dans tous les autres cas, le titulaire effectue lui-même la déclaration et le paiement de la taxe. Si un compte-titres est détenu par plusieurs titulaires, chaque titulaire peut déposer la déclaration pour tous les titulaires. Chaque titulaire est tenu solidairement au paiement de la taxe, des amendes et des intérêts. Pour cette raison, il est donc également important de toujours mentionner qui est titulaire du compte lors de la délivrance des relevés si plusieurs titulaires sont enregistrés.

Toutefois, les titulaires n'ont pas d'obligation s'ils peuvent prouver que la taxe a déjà été déclarée et payée par un intermédiaire. Il est important de noter qu'il ne s'agit pas ici d'un intermédiaire ' belge '. Il est, en effet, possible que l'intermédiaire étranger retienne la taxe comme prestation de service au client. Dans ce dernier cas, le titulaire sera libéré de la dette fiscale solidaire, bien que l'intermédiaire étranger ne puisse pas être légalement tenu de retenir, déclarer et payer la taxe.

L'intermédiaire étranger reçoit également la possibilité de faire appel à un représentant responsable agréé et d'être ainsi assimilé à un intermédiaire belge. Dans ce cas, l'intermédiaire est tenu à toutes les obligations auxquelles un intermédiaire belge est tenu. On souligne donc ici que l'intermédiaire étranger n'est en aucun cas obligé de retenir la taxe, mais qu'il peut le faire volontairement.

Dans ce dernier cas, cela a pour conséquence que le titulaire est exempté de ces obligations » (Doc. parl., Chambre, 2020-2021, DOC 55-1708/001, p. 18).

B.40.3. A la lumière de ce qui précède, le fait que l'obligation d'information précitée est limitée aux intermédiaires belges est raisonnablement justifié. Non seulement le législateur belge n'est nullement compétent en ce qui concerne les intermédiaires qui ne sont pas établis en Belgique, mais la loi attaquée prévoit également que cette dernière catégorie d'intermédiaires est assimilée aux intermédiaires belges lorsque ceux-ci, en application de l'article 201/9/1 du Code des droits et taxes divers, inséré par l'article 10 de la loi attaquée, ont désigné un représentant responsable.

B.41. En ce qu'il est pris de la violation, par les articles 7 et 9 de la loi attaquée, des articles 10, 11 et 172 de la Constitution, le deuxième moyen dans l'affaire n° 7629 n'est pas fondé.

VIII. En ce qui concerne le délai prévu pour la déclaration et le paiement de la taxe attaquée B.42. La partie requérante dans l'affaire n° 7629 prend un cinquième moyen de la violation des articles 10, 11 et 172 de la Constitution par l'article 12 de la loi attaquée. Elle fait valoir en substance que lorsque le titulaire d'un compte-titres doit lui-même procéder à la déclaration et au paiement de la taxe attaquée, le même délai s'applique, qu'il s'agisse d'une personne physique habitante du Royaume, d'une personne physique qui n'est pas habitante du Royaume ou une personne morale. L'article 201/9/3, § 1er, alinéa 2, du Code des droits et taxes divers, inséré par l'article 12 de la loi attaquée, prévoit que, le cas échéant, le délai est le même que celui qui s'applique à l'introduction de la déclaration à l'impôt des personnes physiques via MyMinfin.

B.43.1. Bien que les personnes physiques qui sont habitantes du Royaume, les personnes physiques qui ne sont pas habitantes du Royaume et les personnes morales soient soumises à des délais différents pour la déclaration, respectivement, à l'impôt des personnes physiques, à l'impôt des non-résidents, à l'impôt des sociétés et à l'impôt des personnes morales, elles se trouvent, en ce qui concerne la déclaration et le paiement de la taxe attaquée, dans une situation comparable.

B.43.2. Le principe d'égalité et de non-discrimination ne s'oppose pas à un traitement égal de situations comparables. L'application d'un même délai pour la déclaration et le paiement de la taxe attaquée, lorsque le titulaire du compte-titres concerné doit lui-même le faire, par rapport à toutes les catégories de titulaires est, par conséquent, compatible avec les articles 10, 11 et 172 de la Constitution.

A la lumière de son pouvoir d'appréciation étendu en matière fiscale, le choix du législateur de fonder le délai d'introduction de la déclaration de la taxe attaquée sur le délai qui s'applique à la déclaration et au paiement à l'impôt des personnes physiques n'est du reste pas manifestement déraisonnable.

B.44. Le cinquième moyen dans l'affaire n° 7629 n'est pas fondé.

IX. En ce qui concerne l'application potentielle de conventions internationales préventives de la double imposition B.45.1. La première branche du huitième moyen dans l'affaire n° 7630 est prise de la violation, par la loi attaquée, des articles 10, 11, 16, 170 et 172 de la Constitution, de l'article 1er du Premier Protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme et de l'article 63 du TFUE. La partie requérante fait valoir en substance que, lorsqu'un compte-titres est détenu par un résident belge et un co-titulaire étranger résident d'un pays avec lequel la Belgique a conclu une convention internationale préventive de la double imposition, lors du calcul du seuil de 1 000 000 euros et de la base d'imposition, il convient également de prendre en compte les montants qui appartiennent au patrimoine du co-titulaire étranger, patrimoine qui ne peut être soumis à la taxe attaquée en vertu de cette convention. Elle fait valoir que, le cas échéant, le patrimoine du co-titulaire étranger est ainsi malgré tout soumis à une imposition en Belgique et que seul le résident belge doit déclarer et payer la taxe attaquée.

B.45.2. Comme il est dit en B.1, la taxe attaquée est applicable aux comptes-titres détenus par les habitants du Royaume auprès d'un intermédiaire établi en Belgique et d'un intermédiaire étranger. La taxe est également applicable aux comptes-titres détenus par des non-résidents auprès d'un intermédiaire établi en Belgique. Lorsque le compte-titres est détenu par plusieurs titulaires, chaque titulaire est solidairement tenu au paiement de la taxe, des amendes et des intérêts. La taxe est uniquement perçue si la valeur moyenne des instruments financiers imposables détenus sur le compte-titres dépasse 1 000 000 euros.

B.45.3. En ce qui concerne les redevables de la taxe attaquée, et la situation des non-résidents en particulier, l'exposé des motifs du projet de loi qui a abouti à la loi attaquée précise : « Quant aux résidents, l'Etat belge est compétent en matière d'imposition sur l'ensemble de leur situation financière, revenu mondial/patrimoine mondial. La Belgique est donc compétente en matière d'imposition tant pour les comptes-titres belges qu'étrangers. La taxe s'applique donc également aux instruments financiers imposables détenus sur des comptes-titres étrangers. Le passé a montré que les intermédiaires étrangers prélèvent parfois eux-mêmes la taxe en tant que prestation de service pour les titulaires de comptes-titres. Si ce n'est pas le cas, il revient aux titulaires de veiller à la déclaration et au paiement corrects de la taxe.

Quant aux non-résidents, les comptes-titres belges peuvent être visés, compte tenu du principe de territorialité, sauf si des limites sont fixées par des conventions préventives de double imposition. Ainsi, bien qu'aucune distinction ne soit faite entre les comptes-titres belges et étrangers, le principe de territorialité impose de tenir compte de la résidence » (Doc. parl., Chambre, 2020-2021, DOC 55-1708/001, pp. 6-7).

Au cours du débat mené au sein de la commission compétente, le vice-premier ministre et ministre des Finances a précisé l'éventuelle application de conventions internationales préventives de la double imposition conclues par la Belgique en ce qui concerne la taxe attaquée : « Par rapport à la question relative aux citoyens néerlandais, norvégiens et suisses, qui connaissent une forme de taxation du capital, le vice-premier ministre explique qu'une convention préventive de double imposition peut donner lieu à une non-application de la taxe seulement si un compte-titres est exclusivement détenu et revient à un non-résident d'un Etat avec lequel la Belgique a conclu une convention préventive de double imposition et que cette convention a pour effet que le pouvoir d'imposition du patrimoine sur le compte-titres revient à l'autre Etat. La convention conclue entre la Belgique et les Pays-Bas est un exemple d'une telle convention.

Dès que ce compte-titres est également détenu ou revient à un résident, ou à un non-résident qui n'est pas résident d'un Etat avec lequel la Belgique a conclu une telle convention préventive de double imposition, la taxe reste due.

En effet, la nouvelle taxe sera perçue sur les comptes-titres dont la valeur moyenne est supérieure à 1 million d'euros.

Le nombre de titulaires d'un compte-titres et leurs rapports de propriété sous-jacents ne sont pas relevants pour l'application de la taxe.

Chaque compte-titres est considéré comme un objet imposable distinct et donne lieu à la perception de la taxe séparément.

Chaque titulaire est solidairement tenu au paiement de la taxe qui est calculée sur base de la valeur moyenne des instruments financiers imposables détenus sur le compte-titres, ainsi que des amendes et intérêts, et ce indépendamment de la qualité ou de la résidence du ou des titulaire(s).

Le règlement mutuel de la taxe entre les titulaires ou en fonction des rapports de propriété sous-jacents est une affaire privée entre les concernés et n'est pas relevant pour l'application de la taxe. Pour cette raison, cette question n'est pas réglée dans le présent projet » (Doc. parl., Chambre, 2020-2021, DOC 55-1708/003, p. 71).

B.45.4. Dans les limites de la juridiction territoriale de l'Etat belge, la loi attaquée prévoit un traitement égal des co-titulaires belges et étrangers d'un compte-titres soumis à la taxe attaquée. La taxe attaquée étant qualifiée de taxe d'abonnement, chaque co-titulaire est solidairement tenu au paiement de la taxe qui est calculée sur la valeur moyenne des instruments financiers imposables qui sont détenus sur le compte-titres concerné, dans la mesure où elle dépasse le seuil de 1 000 000 euros.

Lorsque, à l'égard d'un non-résident qui est co-titulaire, avec un résident belge, d'un compte-titres soumis à la taxe attaquée, cette taxe ne peut, dans la pratique, être perçue du fait de l'application d'une convention internationale préventive de la double imposition qui lie la Belgique, la différence de traitement entre le co-titulaire étranger et le co-titulaire belge ne découle dès lors, le cas échéant, pas de la loi attaquée, mais de la convention concernée. De telles conventions préventives de la double imposition et leurs lois d'assentiment ne font toutefois pas l'objet du recours présentement examiné. Dans cette mesure, le huitième moyen dans l'affaire n° 7630, en sa première branche, est irrecevable.

Contrairement à ce que fait valoir la partie requérante dans l'affaire n° 7630, le non-résident ne sera, le cas échéant, pas soumis à la taxe attaquée, en application de la convention internationale préventive de la double imposition, même s'il est tenu compte de la valeur totale du compte-titres dont il est co-titulaire pour la perception de cette taxe.La Cour n'aperçoit dès lors pas en quoi le droit de propriété du non-résident ou la libre circulation des capitaux seraient violés.

Pour le surplus, la Cour est uniquement compétente pour contrôler des normes législatives au regard des normes mentionnées en B.33.2.3. Par conséquent, le contrôle de l'application correcte d'une convention internationale préventive de la double imposition qui lie la Belgique ne relève pas de sa compétence.

B.45.5. Le huitième moyen dans l'affaire n° 7630, en sa première branche, n'est pas fondé.

B.46.1. La deuxième branche du huitième moyen dans l'affaire n° 7630 est prise de la violation, par l'article 3 de la loi attaquée, des conventions internationales préventives de la double imposition qui lient la Belgique et de l'article 63 du TFUE, lus en combinaison avec les articles 10, 11 et 172 de la Constitution.

La partie requérante dénonce en substance le fait que, lorsque le fondateur d'une construction juridique étrangère qui détient un compte-titres belge, conformément à l'article 201/3, 8° à 10°, du Code des droits et taxes divers, inséré par la loi attaquée, et aux articles du CIR 1992 contenus dans cet article, sera considéré comme « le(s) fondateur(s) de constructions juridiques, constructions filiales, constructions mères et constructions en chaîne dans le cadre desquelles le compte[-titres] est détenu », il sera de ce fait soumis à la taxe attaquée, alors que, selon le droit étranger, la construction est considérée comme étant titulaire du compte-titres. Il s'ensuivrait, le cas échéant, qu'une convention internationale préventive de la double imposition excluant l'application de la taxe belge ne serait pas appliquée. Le fondateur d'une construction étrangère qui détient un compte-titres belge et qui n'est pas considéré comme fondateur d'une construction juridique au sens de la loi attaquée ne sera en revanche pas considéré comme titulaire du compte-titres et ne sera dès lors pas soumis, en tant que tel, à la taxe attaquée.

B.46.2. L'article 201/3 du Code des droits et taxes divers, inséré par l'article 3 de la loi attaquée, dispose : « [...] 8° titulaire : le(s) détenteur(s) du compte-titres y compris le(s) fondateur(s) de constructions juridiques, constructions filiales, constructions mères et constructions en chaîne dans le cadre desquelles le compte est détenu;9° fondateur : la personne considérée comme fondateur d'une construction juridique en application de l'article 2, § 1er, 14°, du Code des impôts sur les revenus 1992;10° construction juridique, construction filiale construction mère et construction en chaîne : les constructions, où qu'elles soient établies, considérées comme construction juridique, construction filiale, construction mère et construction en chaîne, en application respectivement de l'article 2, § 1er, 13°, 13°/2, 13°/3 et 13°/4, du Code des impôts sur les revenus 1992; [...] ».

L'exposé des motifs du projet de loi ayant abouti à la loi attaquée mentionne à cet égard ce qui suit : « 8° la notion de titulaire concerne le(s) détenteur(s) du compte-titres y compris le(s) fondateur(s) de constructions juridiques, constructions filiales constructions mères et constructions en chaîne dans le cadre desquelles le compte est détenu.

Dans certains cas, des entités sans personnalité juridique, telles des sociétés simples ou des associations de fait, détiennent des comptes-titres.

Le cas échéant, le compte est au nom de certains responsables (personnes physiques ou morales). Ceux-ci détiennent et gèrent le compte comme un patrimoine d'affectations indivis. Dans ce cas, les obligations des titulaires leur incombent, comme c'est le cas aussi dans le cadre des revenus mobiliers obtenus par des associations sans personnalité juridique, visés à l'article 5/2 du Code des impôts sur les revenus 1992 (ci-après CIR 1992). 9° la notion de fondateur concerne la personne que l'on entend comme fondateur d'une construction juridique en application de l'article 2, § 1er, 14°, du CIR 1992.10° les notions de construction juridique, construction filiale, construction mère et construction en chaîne concernent les constructions, où qu'elles soient établies, considérées comme construction juridique, construction filiale, construction mère ou construction en chaîne, en application respectivement de l'article 2, § 1er, 13°, 13°/2, 13°/3 et 13°/4, du CIR 1992.Tant les constructions établies dans un Etat ou territoire qui appartient à l'Espace économique européen qu'en dehors sont visées. Leur mention ou pas dans un arrêté royal relatif à l'application de l'impôt sur les revenus est irrelevant » (Doc. parl., Chambre, 2020-2021, DOC 55-1708/001, pp. 8-9).

B.46.3. Comme l'observe le Conseil des ministres, la différence de traitement invoquée dans le moyen ne peut être imputée à la loi attaquée. Elle est plutôt la conséquence du fait que les conventions internationales préventives de la double imposition qui lient la Belgique ne sont pas identiques et que leur application peut, dans la pratique, donner lieu à des contestations. Ces conventions internationales et leurs lois d'assentiment ne font cependant, comme il est dit en B.45.4, pas l'objet du recours présentement examiné.

Etant donné qu'il est en réalité dirigé, non pas contre la loi attaquée, mais contre ces conventions internationales, le huitième moyen dans l'affaire n° 7630, en sa deuxième branche, est irrecevable.

B.46.4.1. Comme il est dit en B.2.2, pour satisfaire aux exigences de l'article 6 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, les moyens de la requête doivent faire connaître, parmi les règles dont la Cour garantit le respect, celles qui seraient violées ainsi que les dispositions qui violeraient ces règles et exposer en quoi ces règles auraient été transgressées par ces dispositions.

En ce que la deuxième branche du huitième moyen dans l'affaire n° 7630 est prise de la violation de l'article 63 du TFUE et des articles 10, 11 et 172 de la Constitution, il n'est pas satisfait à ces exigences.

La partie requérante n'expose pas de manière claire et univoque en quoi la disposition attaquée serait incompatible avec les normes de référence précitées.

B.46.4.2. En ce qu'il est pris de la violation de l'article 63 du TFUE et des articles 10, 11 et 172 de la Constitution, le huitième moyen dans l'affaire n° 7630, en sa deuxième branche, n'est pas recevable.

X. En ce qui concerne la libre prestation des services et la libre circulation des capitaux B.47. Les parties requérantes dans l'affaire n° 7628 prennent un cinquième moyen de la violation des articles 10, 11 et 172 de la Constitution, lus en combinaison avec l'article 56 du TFUE et l'article 36 de l'Accord du 2 mai 1992 sur l'Espace économique européen (violation de la libre prestation des services) et avec l'article 63 du TFUE et l'article 40 de l'Accord du 2 mai 1992 sur l'Espace économique européen (violation de la libre circulation des capitaux), par les articles 3 à 21 de la loi attaquée.

Selon les parties requérantes, la loi attaquée dissuaderait les résidents belges de détenir un compte-titres auprès d'un intermédiaire qui n'est pas établi en Belgique, alors que les articles 56 et 63 du TFUE interdiraient toutes les restrictions à la libre circulation entre les Etats membres et entre les Etats membres et les pays tiers.

Elles font valoir que la loi attaquée impose uniquement aux intermédiaires belges l'obligation de se charger de la déclaration et du paiement de la taxe attaquée pour le titulaire redevable. Lorsque des intermédiaires qui ne sont pas établis en Belgique souhaitent offrir le même service, à savoir les déclaration et paiement libératoires de la taxe attaquée, elles doivent désigner un représentant responsable en Belgique (article 201/9/1 du Code des droits et taxes divers, inséré par l'article 10 de la loi attaquée).

Cette obligation administrative supplémentaire peut dès lors inciter un résident belge à ne pas ou ne plus faire usage des services d'une institution financière qui n'est pas établie en Belgique.

A cet égard, les parties requérantes souhaitent que deux questions préjudicielles soient posées à la Cour de justice de l'Union européenne.

B.48.1. L'article 56, premier alinéa, du TFUE dispose : « Dans le cadre des dispositions ci-après, les restrictions à la libre prestation des services à l'intérieur de l'Union sont interdites à l'égard des ressortissants des Etats membres établis dans un Etat membre autre que celui du destinataire de la prestation ».

L'article 36, paragraphe 1, de l'Accord du 2 mai 1992 sur l'Espace économique européen dispose : « Dans le cadre du présent accord, toute restriction à la libre prestation des services à l'intérieur du territoire des parties contractantes à l'égard des ressortissants des Etats membres de la CE et des Etats de l'AELE établis dans un Etat membre de la CE ou dans un Etat de l'AELE, autre que celui du destinataire de la prestation, est interdite ».

B.48.2. L'article 63 du TFUE dispose : « 1. Dans le cadre des dispositions du présent chapitre, toutes les restrictions aux mouvements de capitaux entre les Etats membres et entre les Etats membres et les pays tiers sont interdites. 2. Dans le cadre des dispositions du présent chapitre, toutes les restrictions aux paiements entre les Etats membres et entre les Etats membres et les pays tiers sont interdites ». L'article 40 de l'Accord du 2 mai 1992 sur l'Espace économique européen dispose : « Dans le cadre du présent accord, les restrictions entre les parties contractantes aux mouvements des capitaux appartenant à des personnes résidant dans les Etats membres de la CE ou dans les Etats de l'AELE, ainsi que les discriminations de traitement fondées sur la nationalité ou la résidence des parties ou sur la localisation du placement, sont interdites. Les dispositions nécessaires à l'application du présent article figurent à l'annexe XII ».

B.49.1. Il résulte des articles précités du TFUE et de l'Accord du 2 mai 1992 sur l'Espace économique européen que les restrictions à la libre prestation des services au sein de l'Union européenne et les restrictions à la libre circulation des capitaux et des paiements entre les Etats membres et entre les Etats membres et les pays tiers sont en principe interdites.

B.49.2. Un Etat membre peut toutefois apporter des restrictions à la libre prestation des services en vertu des articles 51 (autorité publique) et 52 (ordre public, sécurité publique et santé publique) du TFUE ou pour des raisons impérieuses d'intérêt général. Par ailleurs, des restrictions à la libre circulation des capitaux peuvent être justifiées par des motifs d'intérêt général (article 65 du TFUE) et, sous certaines conditions, des restrictions peuvent être imposées à la libre circulation des capitaux (articles 64 et 66 du TFUE) ou à la libre circulation des capitaux et des paiements (article 75 du TFUE) vers des pays tiers ou à partir de ceux-ci.

Les restrictions visées par les articles 56 et 63 du TFUE et par les articles 36 et 40 de l'Accord du 2 mai 1992 sur l'Espace économique européen sont des mesures adoptées par un Etat membre de l'Union européenne qui interdisent, gênent ou rendent moins attrayant l'exercice de la libre prestation des services ou de la libre circulation des capitaux et des paiements (CJCE, grande chambre, 28 avril 2009, C-518/06, Commission des Communautés européennes c.

République italienne, point 62; CJUE, grande chambre, 1er juin 2010, C-570/07 et C-571/07, Blanco Pérez et Chao Gómez, point 53; 7 octobre 2010, C-515/08, dos Santos Palhota e.a., point 29; 4 mai 2017, C-339/15, Vanderborght, point 61). La notion de « restriction » couvre en particulier les mesures prises par un Etat membre qui, quoiqu'indistinctement applicables, peuvent affecter la libre circulation de services dans les autres Etats membres (CJUE, 4 mai 2017, C-339/15, Vanderborght, point 62).

B.49.3. Une restriction à la libre prestation des services ou à la libre circulation des capitaux et des paiements n'est autorisée que si elle poursuit un objectif d'intérêt général, est propre à garantir la réalisation de celui-ci et ne va pas au-delà de ce qui est nécessaire pour l'atteindre (CJCE, 1er juin 1999, C-302/97, Konle, points 36-49; 6 juin 2000, C-35/98, Verkooijen, point 43; 25 janvier 2007, C-370/05, Festersen, point 28; 17 janvier 2008, C-256/06, Jäger, point 50; CJUE, 4 mai 2017, C-339/15, Vanderborght, point 65; 31 mai 2018, C-190/17, Lu Zheng c. Ministerio de Economia y Competitividad, point 37).

Une restriction à la libre prestation des services ou à celle des capitaux et des paiements n'est toutefois pas proportionnée si le but poursuivi peut être atteint par une mesure moins radicale (CJCE, 5 mars 2002, C-515/99, Reisch e.a., points 35-39).

B.50.1. Le titulaire redevable de la taxe qui détient un compte-titres auprès d'un intermédiaire qui n'est pas établi en Belgique est tenu de déclarer et payer lui-même la taxe attaquée et de satisfaire aux obligations qui en sont le corollaire, sauf s'il peut établir que la taxe a été déclarée et acquittée par un intermédiaire constitué ou établi en Belgique ou non. Le législateur a tenté de faciliter l'administration de la preuve du paiement de la taxe attaquée en permettant aux intermédiaires étrangers de faire agréer un représentant responsable par le ministre des Finances ou par son délégué. Ce représentant s'engage solidairement envers l'Etat belge à déclarer et payer la taxe et à respecter toutes obligations de l'intermédiaire. Ni le titulaire redevable belge, ni l'Etat belge ne peuvent, eu égard au principe de territorialité, obliger un intermédiaire étranger à désigner un représentant responsable. En l'absence d'un représentant responsable, le résident belge reste redevable de la taxe attaquée.

En outre, le titulaire redevable a la possibilité de désigner un mandataire pour satisfaire à ses obligations relatives à la taxe attaquée. Il demeure responsable à l'égard de l'Etat belge de l'exécution du mandat qu'il a donné à l'intermédiaire étranger.

B.50.2. La circonstance que l'intermédiaire qui n'est pas établi en Belgique ne peut être tenu de désigner un représentant responsable et le constat que le résident belge doit en principe procéder lui-même à la déclaration et au paiement de la taxe attaquée lorsqu'il fait appel à un intermédiaire étranger ont pour conséquence que le résident belge qui détient un compte-titres auprès d'un intermédiaire étranger, eu égard notamment à la responsabilité qui en découle pour le titulaire redevable en cas d'absence de déclaration et de paiement de la taxe ou en cas de déclaration ou de paiement tardifs de celle-ci, pourrait être limité dans son choix d'un intermédiaire.

B.51. Par conséquent, la question se pose de savoir si la libre prestation des services ou la libre circulation des capitaux s'opposent à une réglementation nationale par laquelle le titulaire belge d'un compte-titres devient redevable de la taxe attaquée sur les compte-titres lorsque l'intermédiaire est établi à l'étranger.

L'article 267 du TFUE habilite la Cour de justice à statuer, à titre préjudiciel, aussi bien sur l'interprétation des traités et des actes des institutions de l'Union européenne que sur la validité de ces actes. En vertu du troisième alinéa de cette disposition, une juridiction nationale est tenue de saisir la Cour de justice lorsque ses décisions - comme celles de la Cour constitutionnelle - ne sont pas susceptibles d'un recours juridictionnel de droit interne. En cas de doute sur l'interprétation ou sur la validité d'une disposition du droit de l'Union européenne importante pour la solution d'un litige pendant devant une telle juridiction nationale, celle-ci doit, même d'office, poser une question préjudicielle à la Cour de justice.

B.52.1.1. Par son arrêt n° 149/2018 du 8 novembre 2018, la Cour s'est prononcée sur le recours en annulation des articles 122 et 123 de la loi-programme du 25 décembre 2016Documents pertinents retrouvés type loi-programme prom. 25/12/2016 pub. 29/12/2016 numac 2016021100 source service public federal chancellerie du premier ministre Loi-programme fermer.

B.52.1.2. Le recours portait sur l'extension, par les dispositions attaquées, du champ d'application de la taxe sur les opérations de Bourse (ci-après : TOB), prévues par le Code des droits et taxes divers.

Sont soumises à la TOB les opérations qui sont conclues ou exécutées en Belgique et qui portent sur des fonds publics belges ou étrangers, dans la mesure où l'opération est effectuée grâce à un intermédiaire professionnel (article 1261 du Code des droits et taxes divers).

Il s'agit en particulier de toute vente, de tout achat et de toute cession ainsi que de toute acquisition à titre onéreux et de tout rachat de ses actions par une société d'investissement, lorsque l'opération porte sur des actions de capitalisation (article 120, alinéa 1er, du Code des droits et taxes divers).

A la suite des articles 122 et 123 de la loi-programme du 25 décembre 2016Documents pertinents retrouvés type loi-programme prom. 25/12/2016 pub. 29/12/2016 numac 2016021100 source service public federal chancellerie du premier ministre Loi-programme fermer, les opérations conclues ou exécutées en Belgique ne sont plus les seules à être soumises à la TOB. La TOB est désormais aussi due lorsque l'ordre d'achat ou de vente est donné à un intermédiaire professionnel établi à l'étranger et que l'ordre émane d'une « personne physique ayant sa résidence habituelle en Belgique » ou d'une « personne morale pour le compte d'un siège ou d'un établissement de celle-ci en Belgique ». Il faut entendre par « résidence habituelle » le domicile fiscal pour les impôts sur les revenus, ce qui signifie que, lorsqu'un investisseur est soumis à l'impôt belge des personnes physiques, il est supposé avoir sa résidence habituelle en Belgique.

Lorsque l'ordre est conclu ou exécuté via un intermédiaire professionnel étranger, l'assujettissement à la taxe est déplacé vers la personne qui donne l'ordre, au lieu de l'intermédiaire professionnel. L'acheteur ou le vendeur doit déclarer la taxe et la payer dans les deux mois qui suivent le mois de l'opération (article 125, § 1er, du Code des droits et taxes divers). Ce n'est que si le donneur d'ordre peut établir que la taxe boursière a déjà été acquittée, par l'intermédiaire professionnel ou par son représentant responsable, qu'il est libéré de son obligation de déclaration et de paiement (article 1262 du Code des droits et taxes divers).

B.52.1.3. Par son arrêt n° 149/2018, la Cour constitutionnelle a posé à la Cour de justice les questions préjudicielles suivantes : « 1. L'article 56 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne et l'article 36 de l'Accord du 2 mai 1992 sur l'Espace économique européen doivent-ils être interprétés en ce sens qu'ils s'opposent à une réglementation nationale qui instaure une taxe sur les opérations de bourse, comme celle visée aux articles 120 et 1262 du Code belge des droits et taxes divers, et qui a pour conséquence que le donneur d'ordre belge est redevable de cette taxe lorsque l'intermédiaire professionnel est établi à l'étranger ? 2. L'article 63 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne et l'article 40 de l'Accord du 2 mai 1992 sur l'Espace économique européen doivent-ils être interprétés en ce sens qu'ils s'opposent à une réglementation nationale qui instaure une taxe sur les opérations de bourse, comme celle visée aux articles 120 et 1262 du Code belge des droits et taxes divers, et qui a pour conséquence que le donneur d'ordre belge est redevable de cette taxe lorsque l'intermédiaire professionnel est établi à l'étranger ? [...] ».

B.52.2. Par son arrêt du 30 janvier 2020, en cause de Anton van Zantbeek VOF (C-725/18), la Cour de justice a répondu aux questions préjudicielles précitées : « 18. Il en résulte que, par ses première et deuxième questions, qu'il convient d'examiner ensemble, la juridiction de renvoi demande, en substance, si les articles 56 et 63 TFUE ainsi que les articles 36 et 40 de l'accord EEE doivent être interprétés en ce sens qu'ils s'opposent à une réglementation d'un Etat membre qui instaure une taxe sur les opérations de bourse conclues ou exécutées sur ordre d'un résident de cet Etat membre par un intermédiaire professionnel non-résident, ayant pour conséquence qu'un tel donneur d'ordre est redevable de cette taxe et des obligations déclaratives qui sont liées à ladite taxe. 19. Afin de répondre à ces questions, il convient, en premier lieu, de constater qu'une telle réglementation nationale est susceptible d'affecter tant la libre prestation des services que la libre circulation des capitaux.20. A cet égard, selon une jurisprudence constante de la Cour, lorsqu'une mesure nationale se rapporte à la fois à la libre prestation des services et à la libre circulation des capitaux, la Cour examine la mesure en cause, en principe, au regard de l'une seulement de ces deux libertés s'il s'avère que, dans les circonstances de l'affaire au principal, l'une d'elles est tout à fait secondaire par rapport à l'autre et peut lui être rattachée [voir, en ce sens, arrêts du 3 octobre 2006, Fidium Finanz, C-452/04, EU: C: 2006: 631, point 34;du 26 mai 2016, NN (L) International, C-48/15, EU: C: 2016: 356, point 39, ainsi que du 8 juin 2017, Van der Weegen e.a., C-580/15, EU: C: 2017: 429, point 25]. 21. Dans l'affaire au principal, il apparaît que l'aspect de la libre prestation des services prévaut sur celui de la libre circulation des capitaux.En effet, si une imposition telle que la TOB est susceptible d'affecter la libre circulation des capitaux en ce qu'elle porte sur des opérations boursières, il ressort des indications fournies par la juridiction de renvoi que cette taxe ne s'applique que si un intermédiaire professionnel intervient dans l'opération. En outre, cette juridiction s'interroge sur la restriction qui pourrait résulter du fait que le donneur d'ordre, lorsqu'il fait appel à un prestataire de services d'intermédiation financière non-résident, devient redevable de ladite taxe alors que tel n'est pas le cas lorsqu'il s'adresse à un prestataire de services résident. Or, une telle conséquence concerne de manière prépondérante la libre prestation des services, alors que les effets sur la libre circulation des capitaux ne sont qu'une conséquence inéluctable de l'éventuelle restriction imposée aux prestations des services. 22. Il s'ensuit que la réglementation en cause au principal doit être examinée uniquement au regard de l'article 56 TFUE et de l'article 36 de l'accord EEE.23. En deuxième lieu, conformément à la jurisprudence de la Cour, l'article 56 TFUE exige la suppression de toute restriction à la libre prestation des services imposée au motif que le prestataire est établi dans un Etat membre différent de celui dans lequel la prestation est fournie (arrêts du 19 juin 2014, Strojirny Prostejov et ACO Industries Tàbor, C-53/13 et C-80/13, EU: C: 2014: 2011, point 34, ainsi que du 22 novembre 2018, Vorarlberger Landes- und Hypothekenbank, C-625/17, EU: C: 2018: 939, point 28).Constituent des restrictions à la libre prestation des services les mesures nationales qui interdisent, gênent ou rendent moins attrayant l'exercice de cette liberté (voir, en ce sens, arrêts du 19 juin 2014, Strojirny Prostejov et ACO Industries Tàbor, C-53/13 et C-80/13, EU: C: 2014: 2011, point 35, ainsi que du 25 juillet 2018, TTL, C-553/16, EU: C: 2018: 604, point 46 et jurisprudence citée). 24. En outre, selon une jurisprudence constante de la Cour, l'article 56 TFUE confère des droits non seulement au prestataire de services lui-même, mais également au destinataire desdits services (arrêts du 31 janvier 1984, Luisi et Carbone, 286/82 et 26/83, EU: C: 1984: 35, point 10;du 18 octobre 2012, X, C-498/10, EU: C: 2012: 635, point 23, ainsi que du 19 juin 2014, Strojirny Prostejov et ACO Industries Tàbor, C-53/13 et C-80/13, EU: C: 2014: 2011, point 26). [...] 26. A cet égard, il convient d'observer que les donneurs d'ordre résidents qui, en tant que destinataires de services d'intermédiation financière, décident de recourir aux services d'un intermédiaire résident pour effectuer leurs opérations de bourse se trouvent dans une situation comparable à ceux qui préfèrent recourir aux services d'un intermédiaire non-résident.27. Si, certes, la réglementation nationale en cause au principal a pour effet de soumettre à une imposition identique les donneurs d'ordre résidents indépendamment du lieu de l'établissement de ces intermédiaires, elle a également pour conséquence d'imposer une responsabilité et des obligations supplémentaires à de tels donneurs d'ordre qui décideraient de faire appel à un intermédiaire non-résident.28. En effet, il ressort de la demande de décision préjudicielle que les donneurs d'ordre résidents deviennent, dans ce dernier cas, redevables de la TOB et des obligations déclaratives qui sont liées à cette taxe en vertu de l'article 126/2 du CDTD, alors que s'ils avaient fait appel à un intermédiaire résident, c'est ce dernier qui aurait été tenu de ces obligations et de prélever ladite taxe à la source.Ainsi, les donneurs d'ordre résidents recourant aux services d'un intermédiaire non-résident sont tenus, en particulier, de déclarer eux-mêmes la même taxe au moyen d'un bordereau comportant les mentions visées à l'article 127 du CDTD et de la payer dans un délai de deux mois, sous peine d'amendes, sauf s'ils apportent la preuve qu'elle a déjà été payée, par cet intermédiaire ou par le représentant responsable de celui-ci en Belgique. 29. Une telle réglementation nationale établit, partant, une différence de traitement entre destinataires de services d'intermédiation financière résidant en Belgique de nature à les dissuader de recourir aux services de prestataires non-résidents, tout en rendant plus difficile, pour ces derniers, de proposer leurs services dans cet Etat membre.Dès lors, une telle réglementation nationale est constitutive d'une restriction à la libre prestation des services. 30. En troisième lieu, il convient de rappeler que, selon la jurisprudence de la Cour, une telle restriction peut être justifiée par des raisons impérieuses d'intérêt général.Encore faut-il que l'application de cette restriction soit propre à garantir la réalisation de l'objectif poursuivi et qu'elle n'aille pas au-delà de ce qui est nécessaire pour l'atteindre (voir, en ce sens, arrêts du 7 septembre 2006, N, C-470/04, EU: C: 2006: 525, point 40; du 13 juillet 2016, Brisal et KBC Finance Ireland, C-18/15, EU: C: 2016: 549, point 29, ainsi que du 25 juillet 2018, TTL, C-553/16, EU: C: 2018: 604, point 52 et jurisprudence citée). 31. Il convient d'examiner, tout d'abord, si la restriction à la libre prestation des services qu'entraîne la réglementation nationale en cause au principal répond à des raisons impérieuses d'intérêt général.32. En l'occurrence, le gouvernement belge indique que cette réglementation nationale vise à garantir l'efficacité du recouvrement de l'impôt ainsi que des contrôles fiscaux et à lutter contre l'évasion fiscale.33. Ainsi que la Cour l'a déjà jugé, constituent des raisons impérieuses d'intérêt général susceptibles de justifier une restriction à l'exercice de la libre prestation des services tant la nécessité de garantir l'efficacité du recouvrement de l'impôt et des contrôles fiscaux (voir en ce sens, notamment, arrêt du 25 juillet 2018, TTL, C-553/16, EU: C: 2018: 604, points 53 et 57 ainsi que jurisprudence citée), ces derniers visant à lutter contre la fraude et l'évasion fiscales [voir, en ce sens, arrêts du 5 juillet 2012, SIAT, C-318/10, EU: C: 2012: 415, point 44, et du 26 février 2019, X (Sociétés intermédiaires établies dans des pays tiers), C-135/17, EU: C: 2019: 136, point 74], que la lutte contre l'évasion fiscale (voir, notamment, arrêt du 19 juin 2014, Strojirny Prostejov et ACO Industries Tàbor, C-53/13 et C-80/13, EU: C: 2014: 2011, point 55 ainsi que jurisprudence citée).34. Selon les indications figurant dans la demande de décision préjudicielle et confirmées par le gouvernement belge, il ressort des travaux préparatoires relatifs aux articles 122 et 123 de la loi-programme que ces dispositions visent, notamment, à éviter toute concurrence déloyale entre les intermédiaires professionnels résidents et non-résidents, dans la mesure où les premiers sont obligés de procéder à la retenue à la source de la TOB pour le compte de leur client lors de l'exécution des opérations de bourse, conformément au CDTD, tandis que les seconds ne sont pas obligés de le faire sur les transactions effectuées pour des clients belges, et permettent d'assurer l'efficacité du recouvrement de l'impôt ainsi que des contrôles fiscaux.35. De tels motifs, qui, en l'occurrence, sont étroitement liés, répondent à la notion de ' raisons impérieuses d'intérêt général ', au sens de la jurisprudence de la Cour rappelée au point 33 du présent arrêt, de telle sorte qu'ils sont susceptibles de justifier une restriction à la libre prestation des services.36. Ensuite, s'agissant de l'aptitude de cette réglementation à atteindre les objectifs poursuivis, il convient de relever que l'assujettissement à la TOB du donneur d'ordre recourant aux services d'un intermédiaire non-résident est de nature à assurer que les opérations de bourse concernées n'échapperont pas à l'impôt (voir, par analogie, arrêt du 18 octobre 2012, X, C-498/10, EU: C: 2012: 635, point 39 et jurisprudence citée), en rendant plus efficaces les contrôles fiscaux et plus difficile le contournement de cette taxe, dont la charge est supportée par le donneur d'ordre.37. Il s'ensuit qu'une telle réglementation nationale est propre à atteindre les objectifs qu'elle poursuit.38. Quant à la question de savoir si la réglementation nationale en cause au principal ne va pas au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre ces objectifs, il y a lieu de constater d'emblée, ainsi que l'a noté la Commission européenne, que les informations nécessaires à l'établissement et au contrôle d'une taxe telle que la TOB, visant chaque opération de bourse, ne peuvent pas être obtenues par la seule coopération administrative ainsi que par l'échange automatique et obligatoire d'informations dans le domaine fiscal, prévus, en particulier, par la directive 2011/16/UE du Conseil, du 15 février 2011, relative à la coopération administrative dans le domaine fiscal et abrogeant la directive 77/799/CEE (JO 2011, L 64, p.1), telle que modifiée par la directive 2014/107/UE du Conseil, du 9 décembre 2014 (JO 2014, L 359, p. 1). 39. En outre, il ressort de la demande de décision préjudicielle que la réglementation nationale en cause au principal, bien qu'ayant pour effet de rendre le donneur d'ordre belge redevable de la TOB lorsque l'intermédiaire professionnel est établi à l'étranger, limite toutefois la charge résultant de cet assujettissement à ce qui est nécessaire pour atteindre les objectifs recherchés.40. Notamment, en application de l'article 126/2 du CDTD, le donneur d'ordre est exonéré du paiement de cette taxe et des obligations déclaratives qui sont liées à ladite taxe s'il établit que celle-ci a déjà été acquittée.A cet effet, il ressort de la demande de décision préjudicielle qu'il suffit à ce donneur d'ordre de produire le bordereau visé à l'article 127 du CDTD, indiquant le nom de l'intermédiaire professionnel non-résident, le type et la valeur de l'opération ainsi que la valeur de la même taxe, accompagné, par exemple, d'un extrait de compte prouvant le paiement de celle-ci. 41. Il apparaît, par ailleurs, que le donneur d'ordre résident peut convenir avec l'intermédiaire professionnel non-résident auquel il fait appel que ce dernier se chargera de lui fournir un relevé de compte des opérations faisant apparaître le paiement de la TOB, comme les intermédiaires établis en Belgique en ont l'obligation.La juridiction de renvoi relève également que l'intermédiaire professionnel non-résident a la possibilité de désigner un mandataire aux fins d'effectuer ces formalités. 42. Il ressort également de la demande de décision préjudicielle que, par l'introduction de l'article 126/3 du CDTD, le législateur belge a également cherché à simplifier l'administration de la preuve en matière de paiement de la TOB.Cet article permet, sans les y obliger, aux intermédiaires non-résidents de faire agréer un représentant établi en Belgique aux fins d'accomplir, pour leur compte, les obligations déclaratives liées au paiement de cette taxe et qui en sera responsable. Cette faculté est notamment de nature à pallier la difficulté liée à la nécessité de remplir le bordereau visé à l'article 127 du CDTD dans une langue qui n'est pas celle de l'intermédiaire professionnel non-résident. 43. Dans ces circonstances, un tel choix d'options, au profit tant des donneurs d'ordre résidents que des intermédiaires professionnels non-résidents, qui leur permet d'adopter, parmi ces options, la solution qui leur apparaît la moins contraignante, limite la restriction à la libre prestation des services résultant de la réglementation nationale en cause au principal à ce qui est nécessaire pour atteindre les objectifs qu'elle poursuit, de sorte que ladite réglementation, qui offre ainsi à ces donneurs d'ordre et auxdits intermédiaires professionnels des facilités, tant en ce qui concerne les obligations déclaratives liées à la TOB que son paiement, ne paraît pas aller au-delà de ce qui est nécessaire pour réaliser ces objectifs.44. Enfin, s'agissant de l'article 36 de l'accord EEE, il y a lieu de relever que cette disposition est analogue à celle établie à l'article 56 TFUE, de sorte que les considérations relatives à ce dernier article, énoncées aux points 23 à 43 du présent arrêt, valent également en ce qui concerne ledit article 36.45. Par conséquent, il convient de répondre aux première et deuxième questions que l'article 56 TFUE et l'article 36 de l'accord EEE doivent être interprétés en ce sens qu'ils ne s'opposent pas à une réglementation d'un Etat membre qui instaure une taxe sur les opérations de bourse conclues ou exécutées sur ordre d'un résident de cet Etat membre par un intermédiaire professionnel non-résident, ayant pour conséquence une restriction à la libre prestation des services fournis par de tels intermédiaires professionnels, pour autant que cette réglementation offre à un tel donneur d'ordre et auxdits intermédiaires professionnels des facilités, tant en ce qui concerne les obligations déclaratives liées à cette taxe que son paiement, qui limitent cette restriction à ce qui est nécessaire pour atteindre les objectifs légitimes poursuivis par ladite réglementation ». B.52.3. Faisant suite à la réponse de la Cour de justice, la Cour constitutionnelle a, par son arrêt n° 79/2020 du 4 juin 2020, jugé que les articles 122 et 123 de la loi-programme du 25 décembre 2016Documents pertinents retrouvés type loi-programme prom. 25/12/2016 pub. 29/12/2016 numac 2016021100 source service public federal chancellerie du premier ministre Loi-programme fermer ne sont pas contraires aux articles 10, 11 et 172 de la Constitution, lus en combinaison avec les articles 56 et 63 du TFUE et avec les articles 36 et 40 de l'Accord du 2 mai 1992 sur l'Espace Economique Européen.

B.53. Il ressort de l'exposé des motifs du projet qui a abouti à la loi attaquée que le législateur s'est inspiré, pour donner corps à la taxe attaquée, de la réglementation relative à la TOB - en particulier pour le cas où un résident belge détient un compte-titres auprès d'un intermédiaire qui n'est pas établi en Belgique - et a en outre tenu compte de la jurisprudence précitée de la Cour de justice et de la Cour constitutionnelle : « La taxe est perçue de manière indirecte, c'est-à-dire par un intermédiaire. Un exemple comparable est la taxe sur les opérations de bourse qui est aussi perçue par les intermédiaires sur les opérations qu'ils exécutent (art. 1262 CDTD). C'est seulement si l'intermédiaire n'est pas à même de percevoir la taxe que cette obligation retombe sur le donneur d'ordre » (Doc. parl., Chambre, 2020-2021, DOC 55-1708/001, p. 9). « Toutefois, les titulaires n'ont pas d'obligation s'ils peuvent prouver que la taxe a déjà été déclarée et payée par un intermédiaire.

Il est important de noter qu'il ne s'agit pas ici d'un intermédiaire ' belge '. Il est, en effet, possible que l'intermédiaire étranger retienne la taxe comme prestation de service au client. Dans ce dernier cas, le titulaire sera libéré de la dette fiscale solidaire, bien que l'intermédiaire étranger ne puisse pas être légalement tenu de retenir, déclarer et payer la taxe.

L'intermédiaire étranger reçoit également la possibilité de faire appel à un représentant responsable agréé et d'être ainsi assimilé à un intermédiaire belge. Dans ce cas, l'intermédiaire est tenu à toutes les obligations auxquelles un intermédiaire belge est tenu. On souligne donc ici que l'intermédiaire étranger n'est en aucun cas obligé de retenir la taxe, mais qu'il peut le faire volontairement.

Dans ce dernier cas, cela a pour conséquence que le titulaire est exempté de ces obligations.

Cet effet pratique de la taxe n'est en aucun cas incompatible avec l'article 56 du TFUE (libre circulation des services). Par exemple, on pourrait argumenter que le fait que seuls les intermédiaires belges soient obligés d'effectuer une retenue libératoire, signifie qu'il est moins avantageux de faire appel à un intermédiaire étranger. En ce sens, il est possible qu'il y ait une différence de traitement pouvant décourager le titulaire à faire appel à un intermédiaire étranger (CJUE, 30 janvier 2020, C-725/18, n° 29). Toutefois, cette différence peut être justifiée par des raisons impérieuses d'intérêt général.

Ainsi, il est admis depuis longtemps que la nécessité d'assurer l'efficacité de la perception et des contrôles fiscaux ainsi que la lutte contre l'évasion fiscale constituent des raisons impérieuses d'intérêt général (CJUE, 19 juin 2014, c-53/13 et C-80/13, n° 55). Le fait que les titulaires soient solidairement responsables a pour seul but d'assurer que la taxe soit déclarée et payée et donc de lutter contre l'évasion fiscale. On peut donc conclure que ce système est également adapté pour atteindre les objectifs qu'il poursuit (paiement effectif et lutte contre l'évasion fiscale). En outre, ce système de retenue est très similaire à celui de la taxe sur les opérations de bourse, pour lequel la Cour de Justice a déjà jugé que l'article 56 du TFUE ne s'oppose pas à un tel système (CJUE, 30 janvier 2020, C-725/18). Entre-temps, la Cour constitutionnelle a également jugé que ce système quasi identique n'est pas contraire aux principes constitutionnels d'égalité et de non-discrimination (C. const. n° 79/2020 du 4 juin 2020) » (ibid., pp. 18-19).

B.54. Comme il est dit en B.47, les parties requérantes dans l'affaire n° 7628 demandent à la Cour de poser deux questions préjudicielles à la Cour de justice. Lorsqu'une question d'interprétation du droit de l'Union européenne est soulevée dans une affaire pendante devant une juridiction nationale dont les décisions ne sont pas susceptibles de recours en vertu du droit national, cette juridiction est tenue de poser la question à la Cour de justice, conformément à l'article 267, troisième alinéa, du TFUE. Ce renvoi n'est toutefois pas nécessaire lorsque cette juridiction a constaté que la question soulevée n'est pas pertinente, que la disposition du droit de l'Union en cause a déjà fait l'objet d'une interprétation de la part de la Cour ou que l'interprétation correcte du droit de l'Union s'impose avec une telle évidence qu'elle ne laisse place à aucun doute raisonnable (CJCE, 6 octobre 1982, C-283/81, CILFIT, point 21; CJUE, grande chambre, 6 octobre 2021, C-561/19, Consorzio Italian Management e Catania Multiservizi et Catania Multiservizi, point 33). A la lumière de l'article 47 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, ces motifs doivent ressortir à suffisance de la motivation de l'arrêt par lequel la juridiction refuse de poser la question préjudicielle (CJUE, grande chambre, 6 octobre 2021, C-561/19, Consorzio Italian Management e Catania Multiservizi et Catania Multiservizi, point 51).

L'exception du défaut de pertinence a pour effet que la juridiction nationale n'est pas tenue de poser une question lorsque « la question n'est pas pertinente, c'est-à-dire dans les cas où la réponse à cette question, quelle qu'elle soit, ne pourrait avoir aucune influence sur la solution du litige » (CJUE, 15 mars 2017, Aquino, C-3/16, point 43; grande chambre, 6 octobre 2021, C-561/19, Consorzio Italian Management e Catania Multiservizi et Catania Multiservizi, point 34).

L'exception selon laquelle l'interprétation correcte du droit de l'Union s'impose avec évidence implique que la juridiction nationale doit être convaincue que la même évidence s'imposerait également aux autres juridictions de dernier ressort des autres Etats membres et à la Cour de justice. Elle doit à cet égard tenir compte des caractéristiques propres au droit de l'Union, des difficultés particulières que présente l'interprétation de ce dernier et du risque de divergences de jurisprudence au sein de l'Union. Elle doit également tenir compte des différences entre les versions linguistiques de la disposition concernée dont elle a connaissance, notamment lorsque ces divergences sont exposées par les parties et sont avérées. Enfin, elle doit également avoir égard à la terminologie propre à l'Union et aux notions autonomes dans le droit de l'Union, ainsi qu'au contexte de la disposition applicable à la lumière de l'ensemble des dispositions du droit de l'Union, de ses finalités et de l'état de son évolution à la date à laquelle l'application de la disposition en cause doit être faite (CJUE, grande chambre, 6 octobre 2021, C-561/19, Consorzio Italian Management e Catania Multiservizi et Catania Multiservizi, points 40-46).

Pour le surplus, une juridiction nationale statuant en dernier ressort peut s'abstenir de soumettre une question préjudicielle à la Cour « pour des motifs d'irrecevabilité propres à la procédure devant cette juridiction, sous réserve du respect des principes d'équivalence et d'effectivité » (CJCE, 14 décembre 1995, Van Schijndel et Van Veen, C-430/93 et C-431/93, point 17; CJUE, 15 mars 2017, Aquino, C-3/16, point 56; grande chambre, 6 octobre 2021, C-561/19, Consorzio Italian Management e Catania Multiservizi et Catania Multiservizi, point 61).

Eu égard à la jurisprudence précitée de la Cour de justice et à la forte similitude entre ce qui s'applique à l'égard de la taxe attaquée et à l'égard de la TOB lorsqu'un résident belge fait usage des services financiers proposés par un intermédiaire qui n'est pas établi en Belgique, ce qui répond par ailleurs à l'objectif explicite du législateur, les dispositions attaquées ne sont pas contraires aux articles 10, 11 et 172 de la Constitution, lus en combinaison avec les articles 56 et 63 du TFUE et avec les articles 36 et 40 de l'Accord du 2 mai 1992 sur l'Espace Economique Européen.

Il n'y a pas lieu de poser à la Cour de justice les questions préjudicielles suggérées par la partie requérante.

B.55. Le cinquième moyen dans l'affaire n° 7628 n'est pas fondé.

XI. En ce qui concerne l'interdiction de percevoir des impôts indirects sur l'apport de capital dans une société B.56. Les parties requérantes dans l'affaire n° 7628 prennent un sixième moyen de la violation des articles 10, 11 et 172 de la Constitution, lus en combinaison avec la directive 2008/7/CE du Conseil du 12 février 2008 « concernant les impôts indirects frappant les rassemblements de capitaux » (ci-après : la directive 2008/7/CE), par les articles 3 à 21 de la loi attaquée. Par référence à la jurisprudence de la Cour de justice, elles font valoir en substance que la taxe attaquée constitue un impôt indirect interdit sur l'apport de capital dans une société. Elles demandent à la Cour de poser à cet égard une question préjudicielle à la Cour de justice.

La partie requérante dans l'affaire n° 7631 prend un troisième moyen de la violation par la loi attaquée des articles 10, 11 et 172 de la Constitution, lus en combinaison avec l'article 5, paragraphe 2, point a), de la directive 2008/7/CE, dans la mesure où la taxe attaquée est perçue sur des instruments financiers neufs qui sont émis soit lors de la constitution d'une société, soit lors d'une augmentation ultérieure de capital.

B.57.1. L'article 5, paragraphe 2, de la directive 2008/7/CE dispose : « Les Etats membres ne soumettent à aucune imposition indirecte, sous quelque forme que ce soit : a) la création, l'émission, l'admission en Bourse, la mise en circulation ou la négociation d'actions, de parts ou autres titres de même nature, ainsi que de certificats représentatifs de ces titres, quel qu'en soit l'émetteur;b) les emprunts, y compris les rentes, contractés sous forme d'émission d'obligations ou autres titres négociables, quel qu'en soit l'émetteur, et toutes les formalités y afférentes, ainsi que la création, l'émission, l'admission en Bourse, la mise en circulation ou la négociation de ces obligations ou autres titres négociables ». B.57.2. L'interdiction mentionnée à l'article 5, paragraphe 2, de la directive 2008/7/CE doit être quelque peu nuancée, étant donné que l'article 6 de la même directive dispose : « 1. Nonobstant l'article 5, les Etats membres peuvent percevoir les droits et taxes suivants : a) taxes sur la transmission des valeurs mobilières, perçues forfaitairement ou non;b) droits de mutation, y compris taxes de publicité foncière, sur l'apport à une société de capitaux, de biens immeubles ou de fonds de commerce situés sur son territoire;c) droits de mutation sur les actifs de toute nature qui font l'objet d'un apport à une société de capitaux, dans la mesure où le transfert de ces biens est rémunéré autrement que par des parts sociales;d) droits frappant la constitution, l'inscription ou la mainlevée des privilèges et des hypothèques;e) droits ayant un caractère rémunératoire;f) taxe sur la valeur ajoutée.2. Le montant des droits et des taxes énumérés au paragraphe 1, points b) à e), reste inchangé, que le siège de direction effective ou le siège statutaire de la société de capitaux se trouve ou non sur le territoire de l'Etat membre percevant l'imposition.Ce montant ne peut dépasser celui des droits et des taxes qui sont applicables aux opérations similaires dans l'Etat membre percevant l'imposition ».

B.58.1. Les articles 5, paragraphe 2, et 6, précités, de la directive 2008/7/CE sont analogues aux articles 11 et 12 de la directive 69/335/CEE du 17 juillet 1969 « concernant les impôts indirects frappant les rassemblements de capitaux », abrogée dans l'intervalle.

B.58.2. Concernant ces dernières dispositions, la Cour de justice de l'Union européenne a jugé ce qui suit, par son arrêt du 27 octobre 1998 qui concernait un impôt espagnol sur les actes notariés attestant le remboursement d'un emprunt obligataire : « 15. Par sa question, la juridiction de renvoi demande en substance si l'article 11, sous b), de la directive doit être interprété en ce sens que l'interdiction de soumettre les emprunts obligataires à l'imposition s'applique à l'impôt sur les actes notariés attestant le remboursement d'un emprunt et, dans l'affirmative, si un tel impôt peut bénéficier de la dérogation prévue notamment à l'article 12, paragraphe 1, sous d, de la directive. 16. Le royaume d'Espagne et l'administration fiscale soutiennent, tout d'abord, que l'article 11, sous b), de la directive ne mentionne pas le remboursement des emprunts parmi les opérations qui ne peuvent pas être soumises à l'imposition.17. A cet égard, il convient de rappeler que l'article 11, sous b), de la directive interdit l'imposition, sous quelque forme que ce soit, des emprunts contractés sous forme d'émission d'obligations ou autres titres négociables, quel qu'en soit l'émetteur, et toutes les formalités y afférentes, ainsi que la création, l'émission, l'admission en bourse, la mise en circulation ou la négociation de ces obligations ou autres titres négociables.18. S'il est donc vrai que l'article 11, sous b), de la directive ne mentionne pas expressément le remboursement d'un emprunt obligataire, il n'en reste pas moins qu'interdire la perception d'un impôt lors de l'émission d'un emprunt obligataire mais l'autoriser lors du remboursement d'un tel emprunt auraient pour conséquence, contrairement à l'objectif poursuivi par la directive, d'imposer l'emprunt en tant qu'opération globale pour le rassemblement de capitaux.19. Il s'ensuit que l'article 11, sous b), de la directive doit être interprété en ce sens que l'interdiction de soumettre un emprunt obligataire à l'impôt s'étend à l'imposition du remboursement d'un tel emprunt.20. L'administration fiscale fait, ensuite, valoir que la directive ne se réfère en rien aux documents notariés dressés pour le remboursement des emprunts, lorsque de tels actes sont une condition de forme essentielle pour d'autres opérations juridiques, différentes de l'émission de l'emprunt ou de son remboursement, comme l'inscription au registre de la propriété ou du commerce des amortissements des emprunts inscrits auxdits registres.21. A cet égard, il convient de rappeler que l'article 11, sous b), de la directive interdit non seulement l'imposition des emprunts obligataires, mais également toutes les formalités y afférentes.22. Il suffit donc de constater que, même si l'imposition en cause au principal ne frappe pas le remboursement d'emprunt en tant que tel, elle est néanmoins perçue sur l'acte notarié obligatoire pour le faire enregistrer, c'est-à-dire en raison d'une formalité y afférente.23. L'administration fiscale soutient, enfin, que l'impôt en cause au principal peut être perçu, au moins pour autant qu'il s'agisse d'un emprunt garanti par une hypothèque.24. Sur ce point, il convient de reconnaître que les Etats membres restent libres, conformément à l'article 12, paragraphe 1, sous d), de la directive, de soumettre à un droit la mainlevée des privilèges ou autres hypothèques.Cependant, le remboursement d'un emprunt obligataire constitue une opération financière propre, distincte de la mainlevée d'une inscription hypothécaire faite en vue de garantir les obligations résultant de l'emprunt. 25. Il en résulte que, même si un emprunt obligataire est garanti par une hypothèque, le remboursement de celui-ci ne peut pas être soumis à l'imposition.26. Au vu de ce qui précède, il convient de répondre à la question posée que l'article 11, sous b), de la directive doit être interprété en ce sens que l'interdiction de soumettre les emprunts obligataires à l'imposition s'applique à l'impôt sur les actes notariés attestant le remboursement d'un emprunt.Un tel impôt ne peut pas bénéficier de la dérogation prévue à l'article 12, paragraphe 1, sous d), de ladite directive » (CJUE, 27 octobre 1998, affaires jointes C-31/97 et C-32/97, Fuerzas Eléctricas de Catalunya SA e.a., points 15-26).

B.58.3. Par son arrêt du 15 juillet 2004, qui concernait une taxe belge sur les opérations boursières et sur la livraison de titres au porteur, la Cour de justice de l'Union européenne a jugé ce qui suit : « Sur le grief relatif à la taxe sur les opérations de Bourse [...] 31. En vue de statuer sur ce premier grief de la Commission, il convient de rappeler que l'article 11, sous a), de la directive 69/335 interdit de soumettre à une imposition, sous quelque forme que ce soit, la création, l'émission, l'admission en Bourse, la mise en circulation ou la négociation d'actions, de parts ou d'autres titres de même nature, ainsi que de certificats représentatifs de ces titres, quel qu'en soit l'émetteur.32. S'il est vrai, ainsi que le soutient le gouvernement belge, que ladite disposition ne mentionne pas expressément la première acquisition d'actions, de parts ou de titres de même nature, il n'en demeure pas moins, ainsi que M.l'avocat général l'a relevé au point 14 de ses conclusions, qu'autoriser la perception d'un impôt ou d'une taxe sur la première acquisition d'un titre nouvellement émis reviendrait en réalité à imposer l'émission elle-même de ce titre en tant qu'elle fait partie intégrante d'une opération globale au regard du rassemblement de capitaux. En effet, une émission de titres ne se suffit pas à elle-même, mais n'a de sens qu'à partir du moment où ces titres trouvent des acquéreurs. 33. L'effet utile de l'article 11, sous a), de la directive 69/335 implique dès lors que l'' émission ', au sens de cette disposition, doit inclure la première acquisition de titres s'effectuant dans le cadre de l'émission de ceux-ci.34. Cette constatation n'est pas remise en cause par les arguments invoqués par le royaume de Belgique.35. S'agissant, en premier lieu, de l'argument selon lequel, dès lors que l'article 11, sous a), de la directive 69/335 n'a pas expressément visé la première acquisition de titres consécutive à l'émission de ceux-ci, cette opération ne relève pas de l'interdiction prévue par cette disposition, il convient de relever que, d'une part, en visant la première acquisition de titres ' dans le cadre de l'émission ', l'article 4, paragraphe 1, sous a), de la proposition de directive de 1976 indique que la première acquisition de titres fait partie intégrante et est indissociable de l'opération plus générale que constitue l'émission de titres.D'autre part, la circonstance que la Commission a, compte tenu le cas échéant de l'existence de divergences dans l'interprétation ou l'application dudit article 11, sous a), voulu assurer une application uniforme des directives se rapportant aux mêmes opérations, en donnant une définition plus précise de l'' émission de titres ', n'est pas de nature à influer sur la constatation selon laquelle, d'un point de vue économique, la première acquisition de titres dans le cadre de l'émission de ceux-ci doit être considérée comme faisant partie de cette émission. 36. En ce qui concerne, en deuxième lieu, l'argument selon lequel la taxe sur les opérations de Bourse ne relève pas du champ d'application de la directive 69/335, au motif que les redevables de ladite taxe ne sont pas les sociétés de capitaux visées par cette directive mais les investisseurs, il suffit de constater que l'interdiction de percevoir une imposition autre que le droit d'apport ainsi que les droits et taxes mentionnés à l'article 12 de ladite directive ne se réfère qu'à des opérations de capitaux explicitement énumérées, sans qu'il soit besoin, pour les caractériser, de préciser l'identité du débiteur de l'imposition.37. S'agissant, en troisième lieu, de l'argument selon lequel la taxe sur les opérations de Bourse constitue une taxe sur la transmission de valeurs mobilières, au sens de l'article 12, paragraphe 1, sous a), de la directive 69/335, qui doit dès lors bénéficier de la dérogation prévue à cette disposition, il convient de relever que, comme toute exception, ladite dérogation est d'interprétation stricte et ne saurait avoir pour conséquence que le principe auquel elle déroge soit dépourvu de tout effet utile.38. Or, interpréter le terme ' transmission ', figurant à l'article 12, paragraphe 1, sous a), de la directive 69/335, en un sens tel que celui préconisé par le gouvernement belge reviendrait à priver l'article 11, sous a), de cette directive de son effet utile, en sorte que l'opération d'émission qui ne doit, conformément à cette disposition, être soumise à aucune imposition ou taxe autre que le droit d'apport pourrait néanmoins être frappée d'un impôt ou d'une taxe en raison du fait que les titres nouvellement émis sont nécessairement, dans le cadre de leur émission, ' transmis ' à des acquéreurs.39. Dès lors, la première acquisition de titres dans le cadre de leur émission ne saurait être considérée comme constituant une ' transmission ', au sens de l'article 12, paragraphe 1, sous a), de la directive 69/335, et, partant, une taxe frappant cette première acquisition ne saurait relever de la dérogation figurant à cette disposition.40. Eu égard à ces considérations, il y a lieu de constater que, dans la mesure où elle est prélevée sur des titres nouveaux, créés soit lors de la constitution d'une société ou d'un fonds de placement, soit consécutivement à la réalisation d'une augmentation de capital, soit encore lors d'une émission d'emprunt, la taxe sur les opérations de Bourse constitue une imposition au sens de l'article 11, sous a), de la directive 69/335 dont l'institution est prohibée par cette disposition.41. Il s'ensuit que le premier grief de la Commission est fondé. Sur le grief relatif à la taxe sur les livraisons de titres au porteur [...] 46. Il convient de relever que le grief de la Commission est circonscrit au prélèvement de la taxe sur les livraisons de titres au porteur frappant la remise matérielle de tels titres qui a lieu dans le cadre de l'émission de ceux-ci.47. Or, s'il est vrai, ainsi que le gouvernement belge le soutient, que l'émission en tant que telle de titres au porteur ne donne pas lieu au prélèvement de ladite taxe, il n'en demeure pas moins que la remise matérielle de ce type de titres aux premiers acquéreurs de ceux-ci doit, pour les mêmes raisons que celles énoncées au point 35 du présent arrêt, être considérée comme faisant partie intégrante de l'émission, au sens de l'article 11, sous a), de la directive 69/335.48. Il importe d'ajouter que la remise matérielle de titres au porteur aux premiers acquéreurs ne relève pas non plus de la dérogation prévue à l'article 12, paragraphe 1, sous a), de la directive 69/335, dès lors que, ainsi qu'il ressort du point 37 du présent arrêt, le terme ' transmission ' est d'interprétation stricte et ne peut, pour les mêmes raisons que celles énoncées au point 38 de cet arrêt, couvrir la première remise matérielle de titres nouvellement émis.49. Contrairement à ce que soutient le gouvernement belge, cette constatation ne se heurte pas à l'interprétation de l'article 12, paragraphe 1, sous a), de la directive 69/335 donnée par la Cour dans son arrêt Codan, précité.50. En effet, ainsi que M.l'avocat général l'a relevé au point 38 de ses conclusions, dans ledit arrêt, la Cour n'a pas retenu une interprétation large de la notion de ' transmission de valeurs mobilières ', mais s'est bornée à donner une interprétation uniforme des différentes versions linguistiques de la directive 69/335, en cas de divergence entre elles, en jugeant que l'article 12, paragraphe 1, sous a), de celle-ci ne peut pas être interprété en ce sens qu'il limite la possibilité des Etats membres de percevoir des taxes aux seules opérations boursières ainsi que le prévoient les versions allemande et danoise de ladite directive. 51. Eu égard à ces considérations, il y a lieu de constater que, dans la mesure où elle frappe la première remise matérielle de titres au porteur nouvellement émis, la taxe sur les livraisons de titres au porteur constitue une imposition prohibée en vertu de l'article 11, sous a), de la directive 69/335.52. Il s'ensuit que le second grief de la Commission est également fondé » (CJUE, 15 juillet 2004, C-415/02, Commission c.Belgique, points 31-52).

B.58.4. Par son arrêt du 9 octobre 2014, en cause de Isabelle Gielen c. Ministerraad (C-299/13), concernant une taxe belge sur la conversion de titres au porteur en titres dématérialisés ou en titres nominatifs, la Cour de justice, répondant à une question préjudicielle posée par la Cour constitutionnelle par son arrêt n° 68/2013 du 16 mai 2013, a jugé ce qui suit : « 20.Il convient de rappeler, à titre liminaire, ainsi que cela ressort du préambule de la directive 69/335, que la directive 2008/7 a remplacée à compter du 1er janvier 2009, que celle-ci tend à promouvoir la liberté de circulation des capitaux, considérée comme essentielle à la création d'une union économique ayant des caractéristiques analogues à celles d'un marché intérieur. La poursuite d'une telle finalité suppose, en ce qui concerne la taxation frappant les rassemblements de capitaux, la suppression des impôts indirects jusqu'alors en vigueur dans les Etats membres, et l'application, à leur place, d'un impôt perçu une seule fois dans le marché intérieur et d'un niveau égal dans tous les Etats membres (voir arrêt HSBC Holdings et Vidacos Nominees, C-569/07, EU: C: 2009: 594, point 28). 21. A cet égard, l'article 5, paragraphe 1, de la directive 2008/7 interdit toute forme d'imposition indirecte, notamment, sur les apports de capital.En outre, l'article 5, paragraphe 2, sous a) et b), de ladite directive interdit aux Etats membres de soumettre à une imposition indirecte, sous quelque forme que ce soit, d'une part, la création, l'émission, l'admission en Bourse, la mise en circulation ou la négociation d'actions, de parts ou autres titres de même nature, ainsi que de certificats représentatifs de ces titres, quel qu'en soit l'émetteur, et, d'autre part, notamment les emprunts, y compris les rentes, contractés sous forme d'émission d'obligations ou autres titres négociables, quel qu'en soit l'émetteur, et toutes les formalités y afférentes. 22. S'agissant de l'article 11, sous b), de la directive 69/335, dont les termes sont repris à l'article 5, paragraphe 2, sous b), de la directive 2008/7, la Cour a précisé, dans son arrêt FECSA et ACESA (EU: C: 1998: 508, point 18), que si cette disposition ne mentionne pas expressément le remboursement d'un emprunt obligataire, il n'en reste pas moins qu'interdire la perception d'un impôt lors de l'émission d'un emprunt obligataire mais l'autoriser lors du remboursement d'un tel emprunt auraient pour conséquence, contrairement à l'objectif poursuivi par la directive, d'imposer l'emprunt en tant qu'opération globale pour le rassemblement de capitaux.23. De même, dans l'arrêt Commission/Belgique (EU: C: 2004: 450, point 32), la Cour a jugé que, si l'article 11, sous a), de la directive 69/335, formulé en des termes identiques à l'article 5, paragraphe 2, sous a), de la directive 2008/7, ne mentionne pas expressément la première acquisition d'actions ou la livraison de titres au porteur, il n'en demeure pas moins qu'autoriser la perception d'une taxe sur la première acquisition d'un titre nouvellement émis ou d'une taxe sur les livraisons de titres au porteur frappant la remise matérielle de tels titres qui a lieu dans le cadre de l'émission de ceux-ci reviendrait en réalité à imposer l'émission elle-même de ce titre en tant qu'elle fait partie intégrante d'une opération globale au regard du rassemblement de capitaux.24. Il ressort ainsi de la jurisprudence de la Cour relative aux dispositions de l'article 11 de la directive 69/335, et notamment des arrêts FECSA et ACESA (EU: C: 1998: 508) ainsi que Commission/Belgique (EU: C: 2004: 450), que, conformément aux objectifs de ladite directive, l'interdiction d'imposition des opérations de rassemblement de capitaux s'applique également aux opérations non expressément visées par cette interdiction, dès lors qu'une telle imposition revient à taxer une opération faisant partie intégrante d'une opération globale au regard du rassemblement de capitaux.Cette interprétation est transposable à l'article 5, paragraphe 2, de la directive 2008/7 qui reprend, en des termes identiques, l'article 11 de la directive 69/335. 25. En l'occurrence, s'il est vrai, ainsi que le soutient le gouvernement belge, que l'article 5, paragraphe 2, sous a), de la directive 2008/7 ne mentionne pas expressément la conversion d'actions, il n'en demeure pas moins que la conversion des actions au porteur en titres dématérialisés ou en titres nominatifs, rendue obligatoire par la loi du 14 décembre 2005Documents pertinents retrouvés type loi prom. 14/12/2005 pub. 23/12/2005 numac 2005009962 source service public federal justice Loi portant suppression des titres au porteur fermer portant suppression des titres au porteur, relève de l'émission des actions au sens de l'article 5, paragraphe 2, sous a), de la directive 2008/7.26. Dès lors, en établissant une taxe sur ladite conversion, l'article 167 du code revient, en réalité, à imposer l'émission elle-même de ce titre en tant qu'elle fait partie intégrante d'une opération globale au regard du rassemblement de capitaux, portant atteinte de ce fait à l'effet utile de l'article 5, paragraphe 2, sous a), de la directive (voir, en ce sens, arrêts FECSA et ACESA, EU: C: 1998: 508, points 18 et 19, ainsi que Commission/Belgique, EU: C: 2004: 450, points 32 et 33).27. Il s'ensuit que l'article 5, paragraphe 2, sous a), de la directive 2008/7 doit être interprété en ce sens que l'interdiction de soumettre l'émission d'actions à une imposition indirecte, sous quelque forme que ce soit, s'oppose à une taxe sur la conversion d'actions au porteur déjà émises en titres dématérialisés ou en titres nominatifs, telle que celle en cause au principal.28. S'agissant de la question de savoir si une telle taxe peut être justifiée par l'article 6, paragraphe 1, de la directive 2008/7 qui permet aux Etats membres de percevoir une taxe sur la transmission des valeurs mobilières, la Cour a déjà eu l'occasion de préciser que l'article 12 de la directive 69/335, dont le libellé était en substance identique à celui de l'article 6 de la directive 2008/7, constitue une dérogation à l'interdiction de principe des impositions présentant les mêmes caractéristiques que le droit d'apport (arrêt Grillo Star Fallimento, C-443/09, EU: C: 2012: 213, point 28).29. Cette disposition, qui en tant qu'exception à la règle de non-imposition, est d'interprétation stricte, ne saurait s'appliquer dans le cas d'une taxe sur la conversion d'actions au porteur telle que celle en cause au principal.30. En effet, dans le cadre de cette conversion des actions au porteur sont converties en des titres dématérialisés ou en des titres nominatifs, sans qu'il y ait de transfert d'un droit d'un premier titulaire à un second titulaire.31. Au vu des considérations qui précèdent, il y a lieu de répondre à la question posée que l'article 5, paragraphe 2, de la directive 2008/7 s'oppose à la perception d'une taxe sur la conversion de titres au porteur en titres nominatifs ou en titres dématérialisés, telle que celle en cause au principal.Une telle taxe ne saurait être justifiée au titre de l'article 6 de ladite directive ».

B.59.1. Comme il est dit en B.56, les parties requérantes dans l'affaire n° 7628 demandent à la Cour de poser une question préjudicielle à la Cour de justice. A la lumière de la jurisprudence précitée de la Cour de justice de l'Union européenne, la question pourrait en effet se poser de savoir si la taxe attaquée doit ou non être qualifiée d'« imposition indirecte » frappant « la création, l'émission, l'admission en Bourse, la mise en circulation ou la négociation d'actions, de parts ou autres titres de même nature, ainsi que de certificats représentatifs de ces titres, quel qu'en soit l'émetteur », au sens de l'article 5, paragraphe 2, de la directive 2008/7/CE. B.59.2.1. Comme il est dit en B.1, la taxe attaquée est perçue annuellement sur la détention d'un compte-titres. Elle n'est dès lors pas due sur la simple émission ou commercialisation des titres détenus sur ce compte, ni sur la seule inscription de ceux-ci sur ce compte.

La taxe sera uniquement perçue lorsque la valeur moyenne de l'ensemble des instruments financiers imposables qui sont détenus sur un compte-titres, peu importe la date à laquelle ils ont été émis ou inscrits sur ce compte et qu'ils aient été acquis ou négociés ou non au cours de la période de référence, dépasse le seuil de 1 000 000 euros durant la période de référence.

B.59.2.2. En ce qui concerne la possibilité de qualifier la taxe attaquée d'imposition indirecte au sens de la directive 2008/7/CE, l'exposé des motifs du projet ayant abouti à la loi attaquée mentionne ce qui suit : « En outre, la qualification de taxe indirecte est sans conséquence sur l'application de la directive 2008/7/CE du 12 février 2008 concernant les impôts indirects frappant les rassemblements de capitaux. Cette taxe ne relève en aucune façon du champ d'application de l'article 5 de la directive précitée. Ici, aucune taxe n'est prélevée sur les apports de capitaux ou autres faits liés à un apport ou à une émission de titres de sociétés de capitaux. Il s'agit en fait seulement d'une taxe sur la détention d'un compte-titres, et non d'une taxe sur l'émission d'actions ou la mise sur le marché de titres. Même si le considérant 2 de la directive précise que l'interdiction s'applique également aux ' autres impôts indirects présentant les mêmes caractéristiques que le droit d'apport ou le droit de timbre sur les titres ', on peut faire valoir que cela reste sans conséquence pour cette taxe étant donné qu'elle ne présente pas les mêmes caractéristiques qu'un droit d'apport ou un droit de timbre. Un droit d'apport, à savoir le droit sur l'apport de capitaux dans des sociétés, ou le droit de timbre, un droit sur l'émission dématérialisée d'actions, ne peut en aucun cas être comparé à la présente taxe sur un compte-titres. Cette taxe ne nécessite aucunement une opération telle que l'apport de capitaux dans une société ou l'émission de titres, mais est perçue par le simple fait de détenir un compte-titres. On peut donc en conclure que cette taxe ne présente pas les mêmes caractéristiques qu'un droit d'apport ou un droit de timbre » (Doc. parl., Chambre, 2020-2021, DOC 55-1708/001, pp. 9-10).

B.59.2.3. Bien que, comme l'affirment les parties requérantes, la question se pose de savoir si l'inscription de titres sur un compte-titres peut être considérée comme faisant « partie intégrante d'une opération globale au regard du rassemblement de capitaux » (CJUE, 9 octobre 2014, C-299/13, Isabelle Gielen c. Ministerraad, point 23), il existe en tout état de cause, en l'espèce, un lien insuffisant entre pareille opération et la perception de la taxe attaquée.

B.60. Comme il est dit en B.54, la Cour constitutionnelle n'est pas tenue de poser une question préjudicielle à la Cour de justice lorsqu'elle a constaté que la question soulevée n'est pas pertinente ou que la disposition du droit de l'Union en cause a déjà fait l'objet d'une interprétation de la part de la Cour de justice ou que l'application correcte du droit de l'Union s'impose avec une telle évidence qu'elle ne laisse place à aucun doute raisonnable (CJCE, 6 octobre 1982, C-283/81, CILFIT, point 21; CJUE, grande chambre, 6 octobre 2021, C-561/19, Consorzio Italian Management e Catania Multiservizi et Catania Multiservizi, point 51).

Eu égard à la jurisprudence précitée de la Cour de justice et à ce qui a été dit en B.59.2, il n'y a pas lieu de poser la question préjudicielle suggérée par la partie requérante. Les dispositions attaquées ne sont pas contraires aux articles 10, 11 et 172 de la Constitution, lus en combinaison avec la directive 2008/7/CE. B.61. Le sixième moyen dans l'affaire n° 7628 et le troisième moyen dans l'affaire n° 7631 ne sont pas fondés.

XII. En ce qui concerne les règles en matière d'aides d'Etat B.62. La partie requérante dans l'affaire n° 7631 prend un deuxième moyen de la violation, par la loi attaquée, de l'article 107, paragraphe 1, du TFUE. Elle fait valoir en substance que la taxe attaquée viole les règles de l'Union concernant les aides d'Etat, en ce qu'elle est uniquement applicable aux instruments financiers qui peuvent être détenus sur un compte-titres. De ce fait, un avantage sélectif serait accordé à certaines entreprises dont les actions ou parts ne peuvent être détenues sur un compte-titres.

B.63. En vertu de l'article 142, alinéa 2, de la Constitution et de l'article 1er de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, la Cour est compétente pour statuer sur les recours en annulation d'une loi, d'un décret ou d'une règle visée à l'article 134 de la Constitution pour cause de violation des règles qui sont établies par la Constitution ou en vertu de celle-ci pour déterminer les compétences respectives de l'autorité fédérale, des communautés et des régions et pour cause de violation des articles du titre II (« Des Belges et de leurs droits ») et des articles 143, § 1er, 170, 172 et 191 de la Constitution.

La Cour n'est dès lors pas compétente pour contrôler directement une norme législative au regard de dispositions conventionnelles qui lient la Belgique, dont l'article 107, paragraphe 1, du TFUE. B.64. Le deuxième moyen dans l'affaire n° 7631 n'est pas recevable.

Par ces motifs, la Cour - annule : 1. l'article 201/4, alinéa 6, du Code des droits et taxes divers, inséré par l'article 4 de la loi du 17 février 2021Documents pertinents retrouvés type loi prom. 17/02/2021 pub. 25/02/2021 numac 2021040569 source service public federal finances Loi portant introduction d'une taxe annuelle sur les comptes-titres fermer « portant introduction d'une taxe annuelle sur les comptes-titres »;2. à l'article 21 de la loi précitée les mots « , à l'exception des articles 15 et 16 qui produisent leurs effets, exclusivement quant à la taxe annuelle sur les comptes-titres, le 30 octobre 2020 »; - rejette les recours pour le surplus.

Ainsi rendu en langue néerlandaise, en langue française et en langue allemande, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, le 27 octobre 2022.

Le greffier, Le président, F. Meersschaut L. Lavrysen

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