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Arrêt
publié le 05 avril 2022

Extrait de l'arrêt n° 146/2021 du 21 octobre 2021 Numéro du rôle : 7297 En cause : le recours en annulation des articles 21, alinéa 1 er , 22 et 24 de la loi du 22 avril 2019 « relative à la qualité de la pratique des soins de santé La Cour constitutionnelle, composée des présidents P. Nihoul et L. Lavrysen, des juges J.-P. Moe(...)

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COUR CONSTITUTIONNELLE


Extrait de l'arrêt n° 146/2021 du 21 octobre 2021 Numéro du rôle : 7297 En cause : le recours en annulation des articles 21, alinéa 1er, 22 et 24 de la loi du 22 avril 2019Documents pertinents retrouvés type loi prom. 22/04/2019 pub. 14/05/2019 numac 2019041141 source service public federal sante publique, securite de la chaine alimentaire et environnement Loi relative à la qualité de la pratique des soins de santé type loi prom. 22/04/2019 pub. 14/05/2019 numac 2019012159 source service public federal sante publique, securite de la chaine alimentaire et environnement Loi portant modification de la loi coordonnée du 10 mai 2015 relative à l'exercice de professions des soins de santé fermer « relative à la qualité de la pratique des soins de santé », introduit par Cristina Manuela Hubert et la SPRL « Hubert-Vision ».

La Cour constitutionnelle, composée des présidents P. Nihoul et L. Lavrysen, des juges J.-P. Moerman, T. Giet, J. Moerman et D. Pieters, et, conformément à l'article 60bis de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, du président émérite F. Daoût, assistée du greffier F. Meersschaut, présidée par le président émérite F. Daoût, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet du recours et procédure Par requête adressée à la Cour par lettre recommandée à la poste le 14 novembre 2019 et parvenue au greffe le 18 novembre 2019, un recours en annulation des articles 21, alinéa 1er, 22 et 24 de la loi du 22 avril 2019Documents pertinents retrouvés type loi prom. 22/04/2019 pub. 14/05/2019 numac 2019041141 source service public federal sante publique, securite de la chaine alimentaire et environnement Loi relative à la qualité de la pratique des soins de santé type loi prom. 22/04/2019 pub. 14/05/2019 numac 2019012159 source service public federal sante publique, securite de la chaine alimentaire et environnement Loi portant modification de la loi coordonnée du 10 mai 2015 relative à l'exercice de professions des soins de santé fermer « relative à la qualité de la pratique des soins de santé » (publiée au Moniteur belge du 14 mai 2019) a été introduit par Cristina Manuela Hubert et la SPRL « Hubert-Vision », assistées et représentées par Me P. Malherbe, avocat au barreau de Bruxelles, et Me W. Derijcke, avocat à la Cour de cassation. (...) II. En droit (...) Quant aux dispositions attaquées B.1.1. L'article 21 de la loi du 22 avril 2019Documents pertinents retrouvés type loi prom. 22/04/2019 pub. 14/05/2019 numac 2019041141 source service public federal sante publique, securite de la chaine alimentaire et environnement Loi relative à la qualité de la pratique des soins de santé type loi prom. 22/04/2019 pub. 14/05/2019 numac 2019012159 source service public federal sante publique, securite de la chaine alimentaire et environnement Loi portant modification de la loi coordonnée du 10 mai 2015 relative à l'exercice de professions des soins de santé fermer « relative à la qualité de la pratique des soins de santé » (ci-après : la loi du 22 avril 2019) dispose : « Le médecin, l'infirmier, le dentiste, la sage-femme, le pharmacien, le kinésithérapeute, le psychologue clinique et l'orthopédagogue clinique doivent, lorsqu'une permanence est organisée pour leur profession, y participer et le mentionner dans leur portfolio. Tout médecin généraliste a l'obligation de participer à la permanence médicale dans la zone où il exerce sa profession. Pour répondre à cette obligation, le médecin généraliste participe à la permanence médicale organisée par une coopération fonctionnelle de médecins généralistes agréée qui fixe des modalités en matière de permanence médicale dans la zone concernée ».

Le recours en annulation vise uniquement le premier alinéa de cette disposition.

B.1.2. L'article 22, § 1er, de la même loi dispose : « Le Roi fixe les conditions minimales auxquelles doit satisfaire la permanence visée à l'article 21. Ces conditions peuvent porter sur la permanence organisée par profession des soins de santé ou sur la permanence organisée de manière interdisciplinaire.

Dans ce cadre, Il peut entre autres définir les modalités relatives : 1° au nombre de professionnels des soins de santé qui doivent être disponibles dans le cadre de la permanence;2° aux périodes au cours desquelles la permanence doit être garantie;3° au nombre minimal d'habitants pour lequel la permanence doit être organisée;4° au mode de publication de la permanence;5° à l'enregistrement des appels pendant la période de permanence médicale ». B.1.3. L'article 24 de la même loi dispose : « Aucun professionnel des soins de santé répondant aux conditions requises ne peut être exclu de la permanence visée à l'article 21 ».

B.2. Les parties requérantes sont un médecin spécialiste en ophtalmologie et une société active dans le domaine de l'ophtalmologie. Elles ne justifient dès lors d'un intérêt à attaquer les dispositions précitées que dans la mesure où ces dernières concernent les médecins spécialistes. En conséquence, la Cour n'examine pas ces dispositions en tant qu'elles s'appliquent aux médecins généralistes ou aux autres professionnels qu'elles visent.

B.3.1. En adoptant la loi attaquée, le législateur entendait créer « un cadre légal global pour assurer la qualité et la sécurité des prestations des professionnels des soins de santé », compte tenu de ce que « des prestations de qualité sont des prestations dictées par le patient, efficaces et efficientes, fournies en temps utile, justifiées et sûres » (Doc. parl., Chambre, 2018-2019, DOC 54-3441/001, p. 6).

B.3.2. Parmi les exigences de qualité définies par la loi attaquée figurent la continuité et la permanence des soins. La continuité des soins se définit comme « le suivi de soins déjà entamés » (ibid., p. 30). Jusqu'à l'entrée en vigueur de la loi attaquée, l'obligation d'assurer la continuité des soins est prévue par la loi relative à l'exercice des professions des soins de santé, coordonnée le 10 mai 2015, dont les dispositions relatives à cet objet ont été reprises, sous une forme simplifiée, aux articles 17 à 20, non attaqués, de la loi du 22 avril 2019Documents pertinents retrouvés type loi prom. 22/04/2019 pub. 14/05/2019 numac 2019041141 source service public federal sante publique, securite de la chaine alimentaire et environnement Loi relative à la qualité de la pratique des soins de santé type loi prom. 22/04/2019 pub. 14/05/2019 numac 2019012159 source service public federal sante publique, securite de la chaine alimentaire et environnement Loi portant modification de la loi coordonnée du 10 mai 2015 relative à l'exercice de professions des soins de santé fermer.

La permanence des soins s'en distingue « en ce qu'elle n'est pas liée à une prestation en cours » (ibid., p. 32). Les dispositions attaquées instaurent, pour les médecins spécialistes, une nouvelle obligation de participer à des permanences, lorsqu'un système de permanence est organisé pour leur profession. Elles interdisent par ailleurs l'exclusion de la permanence d'un professionnel de la santé répondant aux conditions pour y participer. La participation des professionnels des soins de santé visés aux permanences organisées peut être requise (article 25, non attaqué, de la loi du 22 avril 2019Documents pertinents retrouvés type loi prom. 22/04/2019 pub. 14/05/2019 numac 2019041141 source service public federal sante publique, securite de la chaine alimentaire et environnement Loi relative à la qualité de la pratique des soins de santé type loi prom. 22/04/2019 pub. 14/05/2019 numac 2019012159 source service public federal sante publique, securite de la chaine alimentaire et environnement Loi portant modification de la loi coordonnée du 10 mai 2015 relative à l'exercice de professions des soins de santé fermer). Enfin, l'article 26, non attaqué, de la loi du 22 avril 2019Documents pertinents retrouvés type loi prom. 22/04/2019 pub. 14/05/2019 numac 2019041141 source service public federal sante publique, securite de la chaine alimentaire et environnement Loi relative à la qualité de la pratique des soins de santé type loi prom. 22/04/2019 pub. 14/05/2019 numac 2019012159 source service public federal sante publique, securite de la chaine alimentaire et environnement Loi portant modification de la loi coordonnée du 10 mai 2015 relative à l'exercice de professions des soins de santé fermer prévoit la possibilité pour le professionnel des soins de santé d'être dispensé de l'obligation de participer à la permanence, pour des motifs de santé, d'âge, de situation familiale ou d'exercice effectif de la profession.

B.3.3. Lors de la discussion en Commission de la Santé publique, de l'Environnement et du Renouveau de la société, la ministre de la Santé publique a précisé que « l'obligation de participer à une permanence ne vaut que pour les professions visées à [l'article 21], lorsqu'une permanence est organisée pour ces dernières » et qu'il « s'agit principalement de médecins généralistes » (Doc. parl., Chambre, 2018-2019, DOC 54-3441/005, p. 49).

Quant au premier moyen B.4.1. Les parties requérantes prennent un premier moyen de la violation, par les articles 21, alinéa 1er, 22 et 24 de la loi du 22 avril 2019Documents pertinents retrouvés type loi prom. 22/04/2019 pub. 14/05/2019 numac 2019041141 source service public federal sante publique, securite de la chaine alimentaire et environnement Loi relative à la qualité de la pratique des soins de santé type loi prom. 22/04/2019 pub. 14/05/2019 numac 2019012159 source service public federal sante publique, securite de la chaine alimentaire et environnement Loi portant modification de la loi coordonnée du 10 mai 2015 relative à l'exercice de professions des soins de santé fermer, de l'article 27 de la Constitution, lu en combinaison avec l'article 11 de la Convention européenne des droits de l'homme et avec l'article 22 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.

B.4.2. Elles font grief aux dispositions attaquées de violer la liberté d'association garantie par les dispositions constitutionnelle et conventionnelles précitées en ce qu'elles contraindraient les médecins spécialistes visés à s'associer avec d'autres médecins spécialistes qu'elles n'ont pas choisis librement pour assurer la permanence qui leur est imposée.

B.5.1. L'article 27 de la Constitution dispose : « Les Belges ont le droit de s'associer; ce droit ne peut être soumis à aucune mesure préventive ».

L'article 11 de la Convention européenne des droits de l'homme dispose : « 1. Toute personne a droit à la liberté de réunion pacifique et à la liberté d'association, y compris le droit de fonder avec d'autres des syndicats et de s'affilier à des syndicats pour la défense de ses intérêts. 2. L'exercice de ces droits ne peut faire l'objet d'autres restrictions que celles qui, prévues par la loi, constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la sécurité nationale, à la sûreté publique, à la défense de l'ordre et à la prévention du crime, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui.Le présent article n'interdit pas que des restrictions légitimes soient imposées à l'exercice de ces droits par les membres des forces armées, de la police ou de l'administration de l'Etat ».

L'article 22 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques dispose : « 1. Toute personne a le droit de s'associer librement avec d'autres, y compris le droit de constituer des syndicats et d'y adhérer pour la protection de ses intérêts. 2. L'exercice de ce droit ne peut faire l'objet que des seules restrictions prévues par la loi et qui sont nécessaires dans une société démocratique, dans l'intérêt de la sécurité nationale, de la sûreté publique, de l'ordre public, ou pour protéger la santé ou la moralité publiques ou les droits et les libertés d'autrui.Le présent article n'empêche pas de soumettre à des restrictions légales l'exercice de ce droit par les membres des forces armées et de la police. 3. Aucune disposition du présent article ne permet aux Etats parties à la Convention de 1948 de l'Organisation internationale du Travail concernant la liberté syndicale et la protection du droit syndical de prendre des mesures législatives portant atteinte - ou d'appliquer la loi de façon à porter atteinte - aux garanties prévues dans ladite convention ». B.5.2. Dès lors que l'article 11 de la Convention européenne des droits de l'homme et l'article 22 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques ont une portée analogue à celle de l'article 27 de la Constitution, les garanties qu'ils contiennent forment un ensemble indissociable avec celles qui sont inscrites dans cette disposition constitutionnelle, de sorte que la Cour tient compte de ces dispositions conventionnelles lors de son contrôle des dispositions attaquées.

B.6. La liberté d'association prévue par les dispositions précitées a pour objet de garantir la création d'associations privées et la participation à leurs activités. Elle implique le droit de s'associer et celui de déterminer librement l'organisation interne de l'association, mais également le droit de ne pas s'associer.

B.7.1. Les dispositions attaquées prévoient que, lorsque le Roi juge nécessaire de créer une permanence qui doit être assurée par certains professionnels de la santé, parmi lesquels les médecins spécialistes, les professionnels visés ont l'obligation d'y participer. Ces dispositions chargent le Roi de fixer les conditions minimales auxquelles cette permanence doit satisfaire en ce qui concerne, notamment, le nombre de professionnels disponibles, les périodes au cours desquelles la permanence doit être assurée et le nombre d'habitants pour lequel elle est organisée.

B.7.2. Contrairement à ce que les parties requérantes soutiennent, les dispositions attaquées n'ont pas pour objet ou pour effet de contraindre les professionnels de la santé qu'elles visent à s'associer avec des confrères ou avec d'autres professionnels. La seule obligation qui pèse sur eux tient en ce qu'ils doivent se rendre disponibles durant les plages horaires qui leur sont attribuées dans le cadre de la permanence et recevoir les patients qui se présentent à eux dans ce cadre. Il leur incombe également d'informer leurs patients de l'existence de la permanence, via l'inscription dans leur portfolio. Leurs patients demeurent par ailleurs libres de faire appel ou non au médecin spécialiste de permanence, ou encore de s'adresser à un autre professionnel, soit au sein d'un service d'urgences, soit lors des horaires de consultation du médecin de leur choix. Enfin, les dispositions attaquées n'empêchent pas les médecins spécialistes de s'associer s'ils le souhaitent ni de planifier et d'organiser leurs consultations comme ils l'entendent, à condition qu'ils soient disponibles durant les plages horaires qui leur sont assignées, si une permanence est organisée par le Roi pour leur spécialité.

B.7.3. Les obligations, précitées, imposées aux médecins spécialistes ne sauraient être assimilées à une obligation de former une association avec des confrères ou d'adhérer à une association déjà constituée. Le simple fait que ces médecins spécialistes soient contraints de se rendre disponibles, pendant des plages horaires spécifiées, pour examiner et traiter les patients qui se présenteraient, ainsi que d'informer leurs propres patients de l'existence de la permanence, sans qu'il en résulte pour ces derniers une obligation de s'adresser au médecin spécialiste de permanence, ne suppose pas la création d'une association ou l'adhésion à une association existante.

B.8.1. Il résulte de ce qui précède que les dispositions attaquées ne limitent pas la liberté d'association telle qu'elle est garantie par les dispositions invoquées par les parties requérantes.

Par voie de conséquence, l'article 22 de la loi attaquée, en ce qu'il charge le Roi de fixer les conditions minimales auxquelles la permanence doit satisfaire, ne saurait violer le principe de légalité en matière de liberté d'association.

B.8.2. Le premier moyen n'est pas fondé.

Quant au second moyen B.9.1. Les parties requérantes prennent un second moyen de la violation, par les articles 21, alinéa 1er, 22 et 24 de la loi du 22 avril 2019Documents pertinents retrouvés type loi prom. 22/04/2019 pub. 14/05/2019 numac 2019041141 source service public federal sante publique, securite de la chaine alimentaire et environnement Loi relative à la qualité de la pratique des soins de santé type loi prom. 22/04/2019 pub. 14/05/2019 numac 2019012159 source service public federal sante publique, securite de la chaine alimentaire et environnement Loi portant modification de la loi coordonnée du 10 mai 2015 relative à l'exercice de professions des soins de santé fermer, des articles 10, 11 et 23, alinéa 3, 1°, de la Constitution, lus en combinaison avec l'article 16 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, avec l'article 6, § 1er, VI, alinéa 3, de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles et avec le principe général de la liberté de commerce et d'industrie, tel qu'il est garanti par l'article II.3 du Code de droit économique.

B.9.2. Elles font grief aux dispositions attaquées d'entraver, sans nécessité ou de façon disproportionnée, la liberté d'entreprendre et la liberté professionnelle qui se déduisent des dispositions précitées, dès lors qu'elles les contraignent à coopérer avec des confrères qu'elles n'ont pas choisis et vers lesquels elles doivent envoyer leurs patients.

B.10.1. La Cour n'est pas compétente pour contrôler des dispositions législatives au regard de dispositions législatives, tel l'article II.3 du Code de droit économique, qui ne sont pas des règles répartitrices de compétences entre l'autorité fédérale, les communautés et les régions.

B.10.2. La loi du 28 février 2013Documents pertinents retrouvés type loi prom. 28/02/2013 pub. 29/03/2013 numac 2013011134 source service public federal economie, p.m.e., classes moyennes et energie Loi introduisant le Code de droit économique fermer, qui a introduit l'article II.3 du Code de droit économique, a abrogé le décret dit d'Allarde des 2-17 mars 1791. Ce décret garantissait la liberté de commerce et d'industrie. La Cour a régulièrement pris ce décret comme norme de référence dans son contrôle du respect des articles 10 et 11 de la Constitution.

B.10.3. La liberté d'entreprendre, visée par l'article II.3 du Code de droit économique, doit s'exercer « dans le respect des traités internationaux en vigueur en Belgique, du cadre normatif général de l'union économique et de l'unité monétaire tel qu'établi par ou en vertu des traités internationaux et de la loi » (article II.4 du même Code). La liberté d'entreprendre doit par conséquent être lue en combinaison avec les dispositions du droit de l'Union européenne applicables, ainsi qu'avec l'article 6, § 1er, VI, alinéa 3, de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles, au regard duquel la Cour peut effectuer directement un contrôle, s'agissant d'une règle répartitrice de compétences. Enfin, la liberté d'entreprendre est également garantie par l'article 16 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne.

B.10.4. Par conséquent, la Cour est compétente pour contrôler les dispositions attaquées au regard des articles 10 et 11 de la Constitution, lus en combinaison avec la liberté d'entreprendre.

B.11.1. La liberté d'entreprendre ne peut être conçue comme une liberté absolue. Elle ne fait pas obstacle à ce que le législateur compétent règle l'activité économique des personnes et des entreprises. Celui-ci n'interviendrait de manière déraisonnable que s'il limitait la liberté d'entreprendre sans aucune nécessité ou si cette limitation était disproportionnée au but poursuivi.

B.11.2. Les dispositions attaquées obligent les professionnels de la santé à participer à une permanence, si celle-ci est organisée pour leur spécialité. Elles les contraignent donc à exercer leur profession à certains moments fixés par un tiers et à recevoir les patients qui s'adressent à eux dans ce cadre. Dans cette mesure, les dispositions attaquées peuvent être considérées comme limitant la liberté d'entreprendre des médecins spécialistes concernés. En revanche, elles ne contraignent pas ces derniers à envoyer leurs patients vers d'autres praticiens, puisque, d'une part, rien ne les empêche de s'organiser pour recevoir leurs patients quand ils le souhaitent et, d'autre part, ces patients demeurent libres de faire appel ou non au médecin qui assure la permanence.

B.12.1. La participation des médecins spécialistes à une permanence n'est obligatoire que si cette permanence est organisée. Il appartient au Roi, s'Il décide d'organiser une permanence pour une spécialité particulière, de ne le faire que s'il est constaté que celle-ci est nécessaire pour garantir la « permanence des soins », cette notion étant, comme il est précisé en B.3.2, distincte de la notion de « continuité des soins ». Il ne saurait être déduit des dispositions attaquées que le législateur aurait autorisé le Roi à imposer à des médecins pratiquant une spécialité donnée de participer à une permanence alors que la nécessité de celle-ci ne pourrait être démontrée.

B.12.2. Par ailleurs, les dispositions attaquées ne limitent pas de façon disproportionnée la liberté d'entreprendre des médecins spécialistes. Contrairement à ce que les parties requérantes soutiennent, ces dispositions ne les obligent pas à coopérer avec des confrères, chacun demeurant libre d'exercer sa pratique comme il le souhaite. Elles ne les contraignent pas non plus à envoyer leurs patients vers ces confrères, mais uniquement à informer leurs patients de l'existence de la permanence lorsque celle-ci est organisée et lorsqu'il ne leur est pas possible d'accueillir un patient au moment souhaité par ce dernier ou au moment nécessité par son état.

B.13. Le second moyen n'est pas fondé.

Par ces motifs, la Cour rejette le recours.

Ainsi rendu en langue française, en langue néerlandaise et en langue allemande, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, le 21 octobre 2021.

Le greffier, F. Meersschaut Le président, F. Daoût

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