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Arrêt
publié le 11 octobre 2004

Extrait de l'arrêt n° 149/2004 du 15 septembre 2004 Numéros du rôle : 2812, 2814, 2815, 2816, 2817, 2818, 2819, 2820, 2823, 2824, 2827, 2828, 2829, 2831, 2833, 2834, 2837 et 2840 En cause : les recours en annulation des articles 15 à 22 de La Cour d'arbitrage, composée des présidents A. Arts et M. Melchior, et des juges P. Martens, M.(...)

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2004202873
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11/10/2004
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Extrait de l'arrêt n° 149/2004 du 15 septembre 2004 Numéros du rôle : 2812, 2814, 2815, 2816, 2817, 2818, 2819, 2820, 2823, 2824, 2827, 2828, 2829, 2831, 2833, 2834, 2837 et 2840 En cause : les recours en annulation des articles 15 à 22 de la loi du 11 avril 2003Documents pertinents retrouvés type loi prom. 11/04/2003 pub. 22/05/2003 numac 2003007143 source ministere de la defense Loi prévoyant de nouvelles mesures en faveur des victimes de la guerre fermer prévoyant de nouvelles mesures en faveur des victimes de la guerre, introduits par S. De Billoëz et autres.

La Cour d'arbitrage, composée des présidents A. Arts et M. Melchior, et des juges P. Martens, M. Bossuyt, A. Alen, J.-P. Moerman et J. Spreutels, assistée du greffier L. Potoms, présidée par le président A. Arts, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet des recours et procédure a. Par requêtes adressées à la Cour par lettres recommandées à la poste les 30 et 31 octobre, 3, 4, 5, 7, 8, 12 et 13 novembre 2003 et parvenues au greffe les 31 octobre, 3, 4, 5, 6, 10, 13 et 14 novembre 2003, des recours en annulation des articles 15 à 22 de la loi du 11 avril 2003Documents pertinents retrouvés type loi prom. 11/04/2003 pub. 22/05/2003 numac 2003007143 source ministere de la defense Loi prévoyant de nouvelles mesures en faveur des victimes de la guerre fermer prévoyant de nouvelles mesures en faveur des victimes de la guerre (publiée au Moniteur belge du 22 mai 2003, deuxième édition), ont été introduits par S.De Billoëz, demeurant à 9120 Beveren-Waas, Cretenborchlaan 17, A. Vandewalle, demeurant à 7890 Ellezelles, rue de Lessines 92, R. Delange, demeurant à 7890 Ellezelles, Rigaudrye 45, E. Labrune, demeurant à 7540 Kain, rue Montgomery 68, P. Goudalier, demeurant à 7911 Frasnes-lez-Buissenal, rue Cornet 6, G. Hendrick, demeurant à 9600 Renaix, rue de Grammont 78, M. Dusausoit, demeurant à 7890 Ellezelles, Crimont 63, S. Labrune, demeurant à 7500 Tournai, rue des Sports 24, L. Masure, demeurant à 7890 Ellezelles, Beaufaux 1, R. Vankeleffe, demeurant à 7100 La Louvière, rue Ed. Anseele 105/25, A. Vandereecken, demeurant à 7890 Ellezelles, rue Delattre 10, P. Goudalier, demeurant à 7880 Flobecq, rue Docteur Degavre 47, G. Spileers, demeurant à 9600 Renaix, Kammeland 2, l'a.s.b.l.

Confédération nationale des prisonniers politiques et ayants droit de Belgique, dont le siège social est établi à 1000 Bruxelles, rue du Commerce 21, et M.-C. du Bois de Vroylande, demeurant à 1320 Beauvechain, rue de Mollendael 2. b. Par requête adressée à la Cour par lettre recommandée à la poste le 15 novembre 2003 et parvenue au greffe le 17 novembre 2003, H.Debey, demeurant à 4800 Verviers, rue de Francorchamps 19, a introduit un recours en annulation de la même loi. c. Par requête adressée à la Cour par lettre recommandée à la poste le 21 novembre 2003 et parvenue au greffe le 24 novembre 2003, un recours en annulation partielle des articles 12, § 1er, 15, § 1er, et 19, § 1er, de la même loi a été introduit par H.Epstein, I. Godny, J. Voorzanger-Bentley, H. Bjelinki, I. Lajbman, S. Kerner, E. Goldman, S. Mel, T. Kahan, J. Rafalowicz, H. Paciarski et J. Funkleder, faisant élection de domicile à 1050 Bruxelles, rue Capitaine Crespel 2-4.

Ces affaires, inscrites sous les numéros 2812, 2814, 2815, 2816, 2817, 2818, 2819, 2820, 2823, 2824, 2827, 2828, 2829, 2831, 2833, 2834, 2837 et 2840 du rôle de la Cour, ont été jointes. (...) II. En droit (...) Quant à la recevabilité des recours introduits B.1.1. Le Conseil des ministres conteste l'intérêt des requérants dans les affaires nos 2812, 2814, 2815, 2816, 2817, 2818, 2819, 2820, 2823, 2824, 2827, 2828, 2829, 2833 et 2834.

Les requérants sont tous des orphelins de prisonniers politiques de la seconde guerre mondiale. Ils justifient d'un intérêt à l'annulation de dispositions qui instaurent une nouvelle réglementation d'indemnisation pour une autre catégorie de victimes de guerre, ce qui a pour effet qu'ils s'estiment préjudiciés.

B.1.2. Le Conseil des ministres conteste également l'intérêt de l'a.s.b.l. Confédération nationale des prisonniers politiques et ayants droit de Belgique, en ce que son intérêt se confondrait avec l'intérêt individuel de ses membres.

Lorsqu'une association sans but lucratif se prévaut d'un intérêt collectif, il est requis que son objet social soit d'une nature particulière et, dès lors, distinct de l'intérêt général; que l'intérêt collectif ne soit pas limité aux intérêts individuels des membres; que la norme entreprise soit susceptible d'affecter l'objet social; enfin, qu'il n'apparaisse pas que l'objet social ne soit pas ou plus réellement poursuivi.

L'objet social de l'association requérante consiste, entre autres, à défendre les intérêts moraux et matériels des prisonniers politiques et de leurs ayants droit, à leur venir en aide par tous les moyens et à leur prêter assistance. Elle justifie d'un intérêt à l'annulation de dispositions à l'encontre desquelles elle fait valoir qu'elles préjudicient les orphelins des prisonniers politiques.

B.1.3. Enfin, le Conseil des Ministres conteste également la recevabilité ratione temporis du recours en annulation dans l'affaire n° 2837, en ce que ce recours ne serait pas dirigé contre la loi du 11 avril 2003Documents pertinents retrouvés type loi prom. 11/04/2003 pub. 22/05/2003 numac 2003007143 source ministere de la defense Loi prévoyant de nouvelles mesures en faveur des victimes de la guerre fermer mais contre la loi du 7 juin 1989 instaurant de nouvelles mesures en faveur des victimes de la guerre. Le requérant est reconnu comme réfractaire de la guerre 1940-1945. Il justifie d'un intérêt à introduire un recours en annulation des dispositions de la loi du 11 avril 2003Documents pertinents retrouvés type loi prom. 11/04/2003 pub. 22/05/2003 numac 2003007143 source ministere de la defense Loi prévoyant de nouvelles mesures en faveur des victimes de la guerre fermer qui règlent la rente liée à ce statut et par lesquelles il prétend être préjudicié.

Quant au fond B.2.1. Le moyen unique dans les affaires nos 2812, 2814, 2815, 2816, 2817, 2818, 2819, 2820, 2823, 2824, 2827, 2828, 2829, 2831, 2833 et 2934 poursuit l'annulation des articles 15 à 22 de la loi attaquée.

Ces dispositions accordent, à certaines conditions, une rente personnelle, d'une part, aux personnes dont le père et la mère, déportés de Belgique pendant la seconde guerre mondiale à la suite des persécutions raciales des autorités occupantes, sont décédés en déportation et, d'autre part, aux personnes qui, soumises aux mesures de persécutions raciales des autorités occupantes, ont été forcées de vivre dans la clandestinité.

B.2.2. Il appert de l'exposé du moyen que les griefs des requérants sont uniquement dirigés contre l'article 15, § 1er, a), et l'article 16 de la loi du 11 avril 2003Documents pertinents retrouvés type loi prom. 11/04/2003 pub. 22/05/2003 numac 2003007143 source ministere de la defense Loi prévoyant de nouvelles mesures en faveur des victimes de la guerre fermer. Les articles 15 et 16 disposent : «

Art. 15.§ 1er. Il est institué une rente viagère personnelle égale à une rente de réfractaire de 4 semestres en ce compris la majoration prévue à l'article 2 de la présente loi, en faveur de toute personne : a) dont le père et la mère, déportés de Belgique suite aux mesures de persécutions raciales des autorités occupantes, sont décédés en déportation, pour autant qu'elle réalise les conditions suivantes : 1° être âgée de moins de 21 ans au 10 mai 1940;2° être belge au 1er janvier 2003;3° résider en Belgique au 10 mai 1940, à l'exception des personnes nées après le 10 mai 1940 de parents résidant en Belgique à cette date et ce jusqu'à leur déportation;4° ne pas bénéficier ou n'avoir pas bénéficié de pensions d'orphelins en vertu des lois sur les pensions de réparation, coordonnées par l'arrêté du Régent du 5 octobre 1948, ou de pensions d'orphelins ou d'allocations allouées sur base de l'article 6, § 4, de la loi du 15 mars 1954 relative aux pensions de dédommagement des victimes civiles de la guerre 1940-1945 tel qu'il était libellé avant sa modification par la loi du 18 mai 1998 ou de l'indemnité ou de la rente prévue par le décret français du 13 juillet 2000 instituant une mesure de réparation pour les orphelins dont les parents ont été victimes de persécutions antisémites.b) ou qui, soumise aux mesures de persécutions raciales des autorités occupantes, a été forcée de vivre dans la clandestinité, pour autant qu'elle réalise les conditions suivantes : 1° résider en Belgique au 10 mai 1940, à l'exception des personnes nées après le 10 mai 1940 de parents résidant en Belgique à cette date et ce jusqu'à leur déportation;2° être Belge au 1er janvier 2003;3° ne pas bénéficier d'une pension d'invalidité sur la base de la loi du 15 mars 1954 relative aux pensions de dédommagement des victimes civiles de la guerre 1940-1945 ou ne pas s'être vu reconnaître le droit à en bénéficier en cas d'application de l'article 5 de la loi précitée. § 2. Le § 1er n'est pas applicable aux personnes qui peuvent prétendre au bénéfice de l'article 12. § 3. II ne pourra être alloué qu'une seule rente par personne au titre du présent article.

Art. 16.La rente visée à l'article 15 est fixée annuellement à : - 241,07 EUR du 1er janvier 2003 au 31 décembre 2003; - 319,91 EUR du 1er janvier 2004 au 31 décembre 2004; - 398,75 EUR du 1er janvier 2005 au 31 décembre 2005; - 477,59 EUR à partir du 1er janvier 2006. » B.2.3. Les requérants reprochent à ces dispositions d'instaurer une différence de traitement non justifiée en accordant une rente personnelle aux orphelins dont les parents ont été déportés pendant la seconde guerre mondiale à la suite de mesures de persécutions raciales et non aux orphelins des victimes de guerre déportées pour d'autres raisons.

B.2.4. Les personnes qui ont été déportées pendant la seconde guerre mondiale à la suite des mesures des autorités occupantes ont pu obtenir, sur la base de la loi du 5 février 1947 organisant le statut des étrangers prisonniers politiques ou sur celle de la loi du 26 février 1947 organisant le statut des prisonniers politiques et de leurs ayants droit, le statut de prisonnier politique en même temps que les avantages matériels et moraux qui y sont liés pour elles-mêmes et leurs ayants droit.

Le statut de prisonnier politique n'ayant été accordé qu'aux personnes qui possédaient la nationalité belge à l'époque ou, lorsqu'il s'agissait d'étrangers, aux personnes qui avaient posé des actes patriotiques et désintéressés pendant la guerre, les victimes juives et tziganes qui ont été déportées de Belgique pendant la seconde guerre mondiale mais qui ne remplissaient pas la condition de nationalité n'ont généralement pas obtenu d'indemnité dans le passé, ni davantage leurs ayants droit.

B.2.5. La loi du 20 décembre 1996Documents pertinents retrouvés type loi prom. 20/12/1996 pub. 06/06/1997 numac 1997015014 source ministere des affaires etrangeres, du commerce exterieur et de la cooperation au developpement Loi portant assentiment à la Convention sur l'interdiction de la mise au point, de la fabrication, du stockage et de l'emploi des armes chimiques et sur leur destruction, et des trois Annexes, faites à Paris le 13 janvier 1993 fermer a créé une commission spéciale aux fins d'examiner la concrétisation des revendications non satisfaites des victimes de la seconde guerre mondiale, en fonction des possibilités budgétaires. Dans son prolongement, la loi du 26 janvier 1999Documents pertinents retrouvés type loi prom. 26/01/1999 pub. 26/02/1999 numac 1999002017 source ministere de la defense nationale et ministere des affaires sociales, de la sante publique et de l'environnement Loi instaurant de nouvelles mesures en faveur des victimes de la guerre fermer avait déjà accueilli les revendications de la communauté juive sur le plan moral. La loi entreprise complète ces mesures en prévoyant également, à certaines conditions, une réparation matérielle.

B.2.6. Contrairement à ce que soutiennent les requérants, les dispositions critiquées n'ont pas pour but d'établir une distinction entre les orphelins de personnes qui ont été déportées pour des raisons raciales et ceux de personnes qui ont été déportées pour d'autres raisons. Elles se fondent par contre sur la distinction entre ceux qui avaient déjà pu obtenir précédemment une indemnité en leur qualité de victime de guerre et ceux qui ne pouvaient y prétendre.

Les personnes qui ont été déportées pour des raisons de persécutions raciales ont pu obtenir à l'issue de la guerre, comme les autres victimes de la déportation, le statut de prisonnier politique si elles avaient à l'époque la nationalité belge. La loi attaquée entend supprimer l'inégalité à l'égard des victimes juives et tziganes qui ne possédaient pas la nationalité belge à l'époque et qui n'ont donc pu obtenir le statut de prisonnier politique. Le législateur a ainsi voulu prouver sa reconnaissance à l'égard des personnes qui, pendant la seconde guerre mondiale, avaient été victimes d'épreuves particulièrement rudes mais qui ne relevaient jusqu'à présent d'aucune réglementation d'indemnisation.

B.2.7. Eu égard à l'objectif qu'elles poursuivent, les mesures entreprises ne s'appliquent ni aux personnes qui ont obtenu le statut de prisonnier politique ou qui remplissaient les conditions requises pour l'obtenir ni à leurs ayants droit. La distinction se fonde sur des motifs objectifs et pertinents, dès lors que ces personnes ont déjà pu être indemnisées sur la base d'une autre réglementation légale.

B.2.8. Le fait que l'indemnité accordée par les dispositions entreprises soit d'une autre nature que celle accordée aux ayants droit des prisonniers politiques est lié à l'important laps de temps séparant l'élaboration des deux réglementations, qui a pour effet que la situation personnelle des intéressés et les besoins qui y sont liés sont différents, et ne peut pas être considéré comme disproportionné par rapport aux objectifs poursuivis par le législateur.

B.2.9. Le moyen unique ne peut être accueilli.

B.3.1. Le requérant dans l'affaire n° 2837 invoque une violation des articles 10 et 11 de la Constitution en ce que la loi du 11 avril 2003Documents pertinents retrouvés type loi prom. 11/04/2003 pub. 22/05/2003 numac 2003007143 source ministere de la defense Loi prévoyant de nouvelles mesures en faveur des victimes de la guerre fermer accorde une même augmentation de la rente aux réfractaires et aux déportés pour le travail obligatoire de la guerre 1940-1945, alors que leur situation serait différente, étant donné que la première catégorie de personnes aurait, selon le requérant, beaucoup plus souffert de la guerre que la deuxième catégorie.

B.3.2. La loi du 12 décembre 1969 créant une rente viagère en faveur des déportés de la guerre 1914-1918 et des réfractaires et des déportés pour le travail obligatoire de la guerre 1940-1945 a prévu une rente viagère, payable à l'âge de 55 ans, une réglementation différente étant instaurée pour les réfractaires et pour les déportés pour le travail obligatoire. Ce n'est que par la loi du 7 juin 1989 instaurant de nouvelles mesures en faveur des victimes de la guerre que la rente a été accordée par assimilation aux deux catégories de personnes, mais sans effet rétroactif, et la loi du 11 avril 2003Documents pertinents retrouvés type loi prom. 11/04/2003 pub. 22/05/2003 numac 2003007143 source ministere de la defense Loi prévoyant de nouvelles mesures en faveur des victimes de la guerre fermer majore cette indemnité de manière égale.

B.3.3. En raison de l'important laps de temps écoulé avant qu'il fut procédé à l'assimilation des rentes accordées à ces deux catégories de victimes de la guerre, il ne saurait être soutenu qu'elles ont été traitées de manière égale dès lors qu'est pris en compte l'ensemble de la réglementation ayant régi leur situation dans le passé.

B.3.4. Le moyen part donc d'une prémisse erronée et ne peut être accueilli.

B.4.1. Les requérants dans l'affaire n° 2840 prennent un premier moyen de la violation des articles 10, 11 et 191 de la Constitution en ce que l'article 12, § 1er, 2°, et l'article 15, § 1er, a), 2°, et b), 2°, de la loi attaquée exigent la qualité de Belge au 1er janvier 2003 pour pouvoir prétendre à l'indemnité prévue par ces dispositions.

B.4.2. Les dispositions attaquées prévoient une indemnité matérielle en faveur des personnes qui ont été arrêtées en Belgique et déportées en Allemagne ou dans des territoires occupés par l'Allemagne au cours de la seconde guerre mondiale à la suite des mesures anti-juives décidées par les autorités occupantes du pays ou à la suite de mesures prises par ces mêmes autorités à l'encontre des tziganes (article 12, § 1er), en faveur des personnes dont le père et la mère, déportés de Belgique à la suite des mesures de persécutions raciales des autorités occupantes, sont décédés en déportation (article 15, § 1er, a)) et en faveur des personnes qui, soumises aux mesures de persécutions raciales des autorités occupantes, ont été forcées de vivre dans la clandestinité (article 15, § 1er, b)).

B.4.3. Pour pouvoir bénéficier de l'indemnité, les intéressés doivent avoir résidé en Belgique à la date du 10 mai 1940 et être belges au 1er janvier 2003. Il appert de l'élaboration des dispositions attaquées que lorsqu'il a délimité leur champ d'application, le législateur, d'une part, a recherché une cohérence avec les réglementations déjà existantes en faveur des victimes de guerre, dans lesquelles il existe une exigence de nationalité et, d'autre part, a dû tenir compte de restrictions budgétaires et a, pour cette raison, imposé des limites (Doc. parl., Chambre, 2002-2003, DOC 50-2273/005, pp. 6 et 10, et DOC 50-2273/008, p. 3; Doc. parl., Sénat, 2002-2003, n° 2-1534/3, p 6;

Ann., Chambre, CRIV Plen 335, 12 mars 2003, pp. 5, 6 et 11).

B.4.4. Les mesures attaquées sont l'expression de la reconnaissance nationale à l'égard des victimes de guerre et de leurs ayants droit et elles sont fondées sur la solidarité nationale. Eu égard au fait que les indemnités sont financées à l'aide de moyens publics, le législateur a pu exiger un lien suffisant avec la Belgique et limiter l'indemnité à ceux qui non seulement séjournaient en Belgique durant la deuxième guerre mondiale mais qui ont acquis entre-temps la nationalité belge.

B.4.5. Le premier moyen ne peut être accueilli.

B.5.1. Le deuxième moyen dans l'affaire n° 2840 est dirigé contre l'article 15, § 1er, a), de la loi du 11 avril 2003Documents pertinents retrouvés type loi prom. 11/04/2003 pub. 22/05/2003 numac 2003007143 source ministere de la defense Loi prévoyant de nouvelles mesures en faveur des victimes de la guerre fermer et est pris de la violation des articles 10 et 11 de la Constitution. Les requérants reprochent à la disposition attaquée d'exiger, pour l'octroi d'une rente viagère personnelle aux orphelins des victimes de guerre, que leurs père et mère aient été déportés de Belgique à la suite des persécutions raciales des autorités occupantes et soient décédés en déportation. A leur estime, cette disposition entraîne donc une discrimination à l'égard des personnes qui ont perdu ou leur père ou leur mère dans les mêmes conditions.

B.5.2. Par la loi du 11 avril 2003Documents pertinents retrouvés type loi prom. 11/04/2003 pub. 22/05/2003 numac 2003007143 source ministere de la defense Loi prévoyant de nouvelles mesures en faveur des victimes de la guerre fermer, le législateur a voulu adopter une réglementation en faveur des victimes juives et tziganes de la seconde guerre mondiale. Il appert de l'élaboration des dispositions entreprises qu'elles constituent un compromis sur la base de négociations délicates (Doc. parl., Chambre, 2002-2003, DOC 50-2273/005, p. 6; Doc. parl., Sénat, 2002-2003, n° 2-1534/3, p. 4) et que, dans cette matière particulièrement sensible, le législateur a voulu éviter de nouveaux déséquilibres envers les catégories de victimes de guerre déjà reconnues précédemment (Ann., Chambre, CRIV Plen, 335, 12 mars 2003, p. 12). En accordant une indemnité aux orphelins dont les deux parents sont décédés en déportation, le législateur a voulu être cohérent par rapport à la réglementation applicable aux ayants droit de prisonniers politiques (Doc. parl., Sénat, 2002-2003, n° 2-1534/3, p. 5).

B.5.3. Les personnes qui ont perdu un de leurs deux parents par suite de la déportation ne sont pas exclues du champ d'application de la loi, étant donné que sur la base de l'article 15, § 1er, b), toutes les personnes qui résidaient en Belgique au 1er mai 1940 et qui ont été forcées de vivre dans la clandestinité à la suite des mesures de persécutions raciales prises par les autorités occupantes peuvent prétendre à une indemnité aux mêmes conditions que les personnes dont les deux parents sont décédés en déportation.

B.5.4. Il est vrai que les requérants demandent également, dans le troisième moyen, l'annulation de l'article 15, § 1er, b), en tant que cette disposition exigerait que les intéressés démontrent la clandestinité de leur séjour, ce qui serait impossible pour certains.

B.5.5. Il a été affirmé à plusieurs reprises de manière particulièrement explicite dans les travaux préparatoires de la disposition attaquée que les dossiers des demandeurs doivent être examinés par l'administration avec beaucoup de bienveillance, en tenant compte des difficultés de preuve qui peuvent exister en ce domaine (Doc. parl., Chambre, 2002-2003, DOC 50-2273/001, pp. 7 et 9;

Doc. parl., Sénat, 2002-2003, n° 2-1534/3, p. 4). Eu égard à la manière systématique dont les membres de la communauté juive ont été persécutés pendant la seconde guerre mondiale, il faut admettre, à la lumière des travaux préparatoires, que tous les Juifs visés à l'article 15, § 1er, b), 1°, c'est-à-dire ceux qui résidaient en Belgique au 10 mai 1940 et ceux qui sont nés après 1940 de parents qui résidaient en Belgique à cette date et jusqu'à leur déportation, ont été forcés de vivre dans la clandestinité s'ils ont vécu pendant la guerre dans un territoire occupé par l'ennemi (Doc. parl., Chambre, 2002-2003, DOC 50-2273/005, p. 11). Interprétées de cette manière, les dispositions attaquées ne violent pas les articles 10 et 11 de la Constitution.

B.5.6. Les deuxième et troisième moyens ne sont pas fondés.

B.6.1. Le quatrième moyen dans l'affaire n° 2840 est dirigé contre les articles 12, § 1er, et 19, § 1er, de la loi attaquée et allègue une violation des articles 10 et 11 de la Constitution en ce que les dispositions entreprises ne font courir les pensions et rentes qu'à partir du 1er janvier 2003 et qu'elles ne leur confèrent pas d'effet rétroactif.

B.6.2. Eu égard au concept de solidarité nationale qui se trouve à la base des indemnités accordées aux victimes de guerre et à leurs ayants droit, le législateur, lorsqu'il a pris des mesures en leur faveur immédiatement après la seconde guerre mondiale, a pu en principe réserver ces indemnités aux personnes de nationalité belge.

B.6.3. Par les dispositions entreprises, le législateur a voulu montrer, soixante ans après la fin de la seconde guerre mondiale, sa reconnaissance envers les victimes de guerre qui n'avaient pas la nationalité belge à l'époque mais qui l'ont acquise depuis lors. Eu égard à l'important laps de temps qui s'est écoulé et compte tenu des restrictions budgétaires, il n'a pas été jugé réaliste d'instaurer cette réglementation avec effet rétroactif (Ann., Chambre, CRIV 50 Plen, 335, p. 6). En outre, de nouvelles inégalités risqueraient de ce fait d'apparaître à l'égard d'autres catégories de victimes de guerre, dès lors que certaines des indemnités qui leur sont accordées étaient limitées dans le temps et qu'elles ont donc cessé d'exister depuis longtemps.

Dans ces conditions, en faisant courir la nouvelle réglementation à partir du 1er janvier 2003, sans limitation dans le temps, le législateur a adopté une mesure qui n'est pas sans justification raisonnable.

B.6.4. Le moyen n'est pas fondé.

Par ces motifs, la Cour rejette les recours.

Ainsi prononcé en langue néerlandaise, en langue française et en langue allemande, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage, à l'audience publique du 15 septembre 2004.

Le greffier, L. Potoms.

Le président, A. Arts.

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