publié le 18 janvier 2001
Arrêt n° 139/2000 du 21 décembre 2000 Numéro du rôle : 1797 En cause : le recours en annulation totale ou partielle des articles 4 et 6 de la loi du 11 avril 1999 modifiant la loi du 19 décembre 1974 organisant les relations entre les autorit La Cour d'arbitrage, composée des présidents M. Melchior et G. De Baets, et des juges H. Boel, P(...)
COUR D'ARBITRAGE
Arrêt n° 139/2000 du 21 décembre 2000 Numéro du rôle : 1797 En cause : le recours en annulation totale ou partielle des articles 4 et 6 de la
loi du 11 avril 1999Documents pertinents retrouvés
type
loi
prom.
11/04/1999
pub.
12/05/1999
numac
1999002052
source
ministere de la fonction publique
Loi modifiant la loi du 19 décembre 1974 organisant les relations entre les autorités publiques et les syndicats des agents relevant de ces autorités
fermer modifiant la
loi du 19 décembre 1974Documents pertinents retrouvés
type
loi
prom.
19/12/1974
pub.
05/10/2012
numac
2012000586
source
service public federal interieur
Loi organisant les relations entre les autorités publiques et les syndicats des agents relevant de ces autorités. - Coordination officieuse en langue allemande
fermer organisant les relations entre les autorités publiques et les syndicats des agents relevant de ces autorités, introduit par l'a.s.b.l. GERFA. La Cour d'arbitrage, composée des présidents M. Melchior et G. De Baets, et des juges H. Boel, P. Martens, J. Delruelle, R. Henneuse et M. Bossuyt, assistée du greffier L. Potoms, présidée par le président M. Melchior, après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant : I. Objet du recours Par requête adressée à la Cour par lettre recommandée à la poste le 8 novembre 1999 et parvenue au greffe le 9 novembre 1999, un recours en annulation totale ou partielle des articles 4 et 6 de la
loi du 11 avril 1999Documents pertinents retrouvés
type
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11/04/1999
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fermer modifiant la
loi du 19 décembre 1974Documents pertinents retrouvés
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fermer organisant les relations entre les autorités publiques et les syndicats des agents relevant de ces autorités (publiée au Moniteur belge du 12 mai 1999) a été introduit par l'a.s.b.l. Groupe d'étude et de réforme de la fonction administrative (GERFA), dont les bureaux sont établis à 1190 Bruxelles, avenue du Pont de Luttre 137.
II. La procédure Par ordonnance du 9 novembre 1999, le président en exercice a désigné les juges du siège conformément aux articles 58 et 59 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage.
Les juges-rapporteurs ont estimé n'y avoir lieu de faire application des articles 71 ou 72 de la loi organique.
Le recours a été notifié conformément à l'article 76 de la loi organique, par lettres recommandées à la poste le 17 décembre 1999.
L'avis prescrit par l'article 74 de la loi organique a été publié au Moniteur belge du 21 décembre 1999.
Le Conseil des ministres, rue de la Loi 16, 1000 Bruxelles, a introduit un mémoire, par lettre recommandée à la poste le 28 janvier 2000.
Ce mémoire a été notifié conformément à l'article 89 de la loi organique, par lettre recommandée à la poste le 29 février 2000.
La partie requérante a introduit un mémoire en réponse, par lettre recommandée à la poste le 31 mars 2000.
Par ordonnances du 27 avril 2000 et du 26 octobre 2000, la Cour a prorogé respectivement jusqu'aux 8 novembre 2000 et 8 mai 2001 le délai dans lequel l'arrêt doit être rendu.
Par ordonnance du 13 juillet 2000, la Cour a déclaré l'affaire en état et fixé l'audience au 11 octobre 2000, après avoir constaté que le juge H. Coremans, légitimement empêché de siéger, était remplacé par le juge M. Bossuyt comme membre du siège.
Cette ordonnance a été notifiée aux parties ainsi qu'à leurs avocats, par lettres recommandées à la poste le 14 juillet 2000.
Par ordonnance du 5 octobre 2000, la Cour a remis l'affaire au 6 décembre 2000.
Cette ordonnance a été notifiée aux parties ainsi qu'à leurs avocats, par lettres recommandées à la poste le 6 octobre 2000.
A l'audience publique du 6 décembre 2000 : - ont comparu : . l'a.s.b.l. GERFA, représentée par son président, M. Legrand; . Me M. Detry, avocat au barreau de Bruxelles, pour le Conseil des ministres; - les juges-rapporteurs P. Martens et H. Boel ont fait rapport; - les parties précitées ont été entendues; - l'affaire a été mise en délibéré.
La procédure s'est déroulée conformément aux articles 62 et suivants de la loi organique, relatifs à l'emploi des langues devant la Cour.
III. En droit - A - Position de la requérante A.1. L'a.s.b.l. Groupe d'étude et de réforme de la fonction administrative, en abrégé GERFA, est une organisation syndicale agréée. Elle estime avoir un intérêt direct à contester la disposition attaquée qui octroie, avec effet rétroactif, un avantage financier important aux seules organisations syndicales représentatives.
A.2. Dans un moyen unique, pris de la violation des articles 10 et 11 de la Constitution, elle fait valoir qu'elle dispose, conformément à la loi, de délégués syndicaux et doit rembourser le traitement brut de son délégué permanent.
A.3. L'article 18, alinéa 3, de la loi du 19 décembre 1974Documents pertinents retrouvés type loi prom. 19/12/1974 pub. 05/10/2012 numac 2012000586 source service public federal interieur Loi organisant les relations entre les autorités publiques et les syndicats des agents relevant de ces autorités. - Coordination officieuse en langue allemande fermer organisant les relations entre les autorités publiques et les syndicats des agents relevant de ces autorités, ajouté par l'article 4 de la loi attaquée du 11 avril 1999, dispense de ce remboursement les organisations syndicales représentatives, afin, selon la requérante, d'éviter à la Centrale générale des services publics (C.G.S.P.) des remboursements qu'elle n'avait plus effectués depuis 1997, ce qui expliquerait la rétroactivité donnée à la disposition attaquée.
A.4. La requérante estime injustifiée cette différence de traitement entre deux catégories d'organisations syndicales alors que les délégués permanents des uns et des autres sont des fonctionnaires détachés dans ces organisations et qui assument les mêmes fonctions dans la défense de leurs membres et dans l'exécution des projets de l'organisation.
Position du Conseil des ministres A.5. Le Conseil des ministres conteste l'intérêt de la requérante à l'annulation d'une disposition qui ne lui procurerait aucun avantage puisqu'elle resterait, comme c'est le cas actuellement, privée du bénéfice de cette disposition.
A.6. Sur le fond, le Conseil des ministres répond que la distinction entre organisations syndicales représentatives et agréées participe de la philosophie de la loi du 19 décembre 1974Documents pertinents retrouvés type loi prom. 19/12/1974 pub. 05/10/2012 numac 2012000586 source service public federal interieur Loi organisant les relations entre les autorités publiques et les syndicats des agents relevant de ces autorités. - Coordination officieuse en langue allemande fermer et de son arrêté d'exécution du 28 septembre 1994. Les secondes ne doivent, pour être agréées, remplir que des conditions minimes et de pure forme, à savoir l'envoi d'un pli recommandé d'une copie des statuts et de la liste des dirigeants responsables. Les premières doivent démontrer qu'elles représentent une partie importante du personnel dont elles défendent les intérêts, selon les critères fixés par la loi. Leurs prérogatives sont également plus importantes puisqu'elles seules participent aux comités de négociation et de concertation. Ce critère objectif de distinction, reconnu et appliqué depuis deux décennies, est mentionné dans les travaux préparatoires de la loi du 19 décembre 1974Documents pertinents retrouvés type loi prom. 19/12/1974 pub. 05/10/2012 numac 2012000586 source service public federal interieur Loi organisant les relations entre les autorités publiques et les syndicats des agents relevant de ces autorités. - Coordination officieuse en langue allemande fermer. Il a été admis par la Cour dans son arrêt n° 71/92. Il s'agit donc, selon le Conseil des ministres, d'un choix politique qui appartient au législateur et qui ne peut être tenu pour déraisonnable.
A.7. Enfin, le Conseil des ministres ajoute que, dès lors que la distinction litigieuse est admise, la requérante perd tout intérêt à critiquer la rétroactivité prévue par l'article 6 de la loi.
Mémoire en réponse de la requérante A.8. En ce qui concerne l'intérêt, la requérante répond que les dispositions attaquées lui causent un dommage direct et rompent fondamentalement et définitivement les règles d'égalité entre organisations syndicales, qu'elles soient représentatives ou agréées.
A.9. Sur le fond, la requérante répète que les dispositions attaquées ont essentiellement pour effet de répondre à une demande de la C.G.S.P., qui souhaitait échapper aux remboursements qu'elle devait depuis 1997, la mesure étant étendue à toutes les organisations représentatives, ce qui démontre qu'elle ne repose pas sur un critère objectif mais vise à avantager une organisation déterminée. La requérante demande à la Cour, en application de la loi spéciale du 6 janvier 1989, de procéder à une mesure d'instruction auprès du ministère des Finances et du Service de la trésorerie pour vérifier si la C.G.S.P. était en défaut de paiement pour ses délégués permanents, depuis 1997.
A.10. La requérante admet que seules les organisations représentatives sont associées aux travaux effectués dans les comités de négociation syndicale A, B et C, mais elle ajoute qu'il s'agit là d'une chasse gardée, verrouillée par les critères de représentativité établis par la loi. Parmi ces critères figure l'affiliation à une organisation syndicale représentée au Conseil national du travail. Or, c'est la partie adverse elle-même qui désigne ces organisations syndicales. La requérante ajoute que cette condition est étrangère au but poursuivi puisque le système de relations sociales du secteur public n'est en rien lié aux prérogatives du Conseil national du travail.
A.11. La requérante ajoute que la composition des comités de négociation échappe à tout contrôle démocratique puisque la partie adverse a renoncé à organiser des élections sociales. Elle conteste que ce contrôle démocratique puisse être remplacé par des opérations de comptage qui ne respectent pas la vie privée et la liberté d'association.
A.12. La requérante estime que les dispositions qu'elle attaque sont, en outre, en contradiction avec l'article 5 de la Convention concernant la protection du droit d'organisation et les procédures de détermination des conditions d'emploi dans la fonction publique, ratifiée par la loi du 4 avril 1991, qui insiste sur la nécessité de garantir l'indépendance des organisations d'agents publics et d'éviter toute ingérence des autorités publiques dans leur formation, leur fonctionnement et leur administration. La requérante souligne l'importance des avantages octroyés, qui avoisinent, pour les 19 délégués, un montant brut de plusieurs dizaines de millions, ces délégués pouvant en outre faire une carrière intéressante par des promotions successives en surnombre. - B - B.1. L'article 4 de la loi du 11 avril 1999Documents pertinents retrouvés type loi prom. 11/04/1999 pub. 12/05/1999 numac 1999002052 source ministere de la fonction publique Loi modifiant la loi du 19 décembre 1974 organisant les relations entre les autorités publiques et les syndicats des agents relevant de ces autorités fermer modifiant la loi du 19 décembre 1974Documents pertinents retrouvés type loi prom. 19/12/1974 pub. 05/10/2012 numac 2012000586 source service public federal interieur Loi organisant les relations entre les autorités publiques et les syndicats des agents relevant de ces autorités. - Coordination officieuse en langue allemande fermer organisant les relations entre les autorités publiques et les syndicats des agents relevant de ces autorités a ajouté à l'article 18 de cette loi un deuxième et un troisième alinéas. Cet article 18 se lit désormais comme suit : « Le Roi établit les règles qui sont applicables aux délégués des organisations syndicales en raison de leur activité au sein des services publics. Il fixe la position administrative des agents ayant ladite qualité, en déterminant notamment les cas dans lesquels les périodes de mission syndicale sont assimilées à des périodes de service.
Le Roi fixe les règles concernant le remboursement à l'autorité par les organisations syndicales des sommes payées à certains délégués de celles-ci en leur qualité de membres du personnel.
Toutefois, le Roi peut, selon les conditions et critères qu'Il fixe, dispenser les organisations syndicales représentatives en tout ou en partie du remboursement. » L'article 6 de la loi attaquée dispose qu'elle entre en vigueur le jour de sa publication au Moniteur belge, « à l'exception de l'article 4, qui produit ses effets le 1er juillet 1997 ».
La requérante attaque l'alinéa 3 de l'article 18 précité, ainsi que, à l'article 4 de la loi attaquée, les mots cités ci-avant entre guillemets.
B.2. La requérante justifie d'un intérêt à l'annulation de dispositions qui accordent à certaines organisations syndicales un avantage qui lui est refusé. En cas d'annulation, elle aurait une chance de voir le législateur adopter une nouvelle disposition qui pourrait lui reconnaître cet avantage. Une telle possibilité suffit à justifier l'intérêt de la requérante.
B.3. La première disposition attaquée établit une différence de traitement entre deux catégories d'organisations syndicales du secteur public : les organisations agréées, qui doivent rembourser à l'autorité publique le traitement de leurs délégués permanents; les organisations représentatives, qui peuvent être dispensées de ce remboursement par le Roi.
B.4. La différence de traitement entre les deux catégories d'organisations syndicales a été voulue par le législateur dès l'adoption de la loi du 19 décembre 1974Documents pertinents retrouvés type loi prom. 19/12/1974 pub. 05/10/2012 numac 2012000586 source service public federal interieur Loi organisant les relations entre les autorités publiques et les syndicats des agents relevant de ces autorités. - Coordination officieuse en langue allemande fermer, dont l'article 7 réserve aux organisations représentatives le droit de siéger « dans le comité commun à l'ensemble des services publics, dans le comité des services publics fédéraux, communautaires et régionaux, ainsi que dans le comité des services publics provinciaux et locaux ». Selon le même article, est considérée comme représentative l'organisation qui : « 1° exerce son activité sur le plan national; 2° défend les intérêts de toutes les catégories du personnel des services publics;3° est affiliée à une organisation syndicale représentée au Conseil national du travail ». B.5. Il ressort des travaux préparatoires de la loi du 19 décembre 1974Documents pertinents retrouvés type loi prom. 19/12/1974 pub. 05/10/2012 numac 2012000586 source service public federal interieur Loi organisant les relations entre les autorités publiques et les syndicats des agents relevant de ces autorités. - Coordination officieuse en langue allemande fermer que ce choix correspond à la volonté du Gouvernement « d'avoir devant lui des interlocuteurs valables et responsables avec lesquels il puisse négocier efficacement » et, pour atteindre ce but, de ne « négocier qu'avec des syndicats capables de porter des responsabilités effectives sur le plan national » et d'éviter l'émiettement syndical qui « signifierait la mort de ces négociations ».(Doc. parl., Sénat, S.E. 1974, n° 367-2, p. 10).
B.6. Un tel choix repose sur un critère objectif, il est en rapport avec le but poursuivi et il n'est pas manifestement disproportionné à celui-ci. Il n'est pas déraisonnable de n'admettre dans les structures de concertation et de négociation permanentes que les organisations qui justifient d'un certain nombre d'affiliés cotisants, qui sont actives au niveau national ou qui font partie d'une organisation constituée à ce niveau et qui défendent les intérêts de toutes les catégories de personnel. Une telle exigence est de nature à garantir que les revendications relatives à une catégorie du personnel soient formulées en tenant compte de la situation des autres.
B.7. Il reste cependant à examiner si ce traitement différencié est pertinent en ce qui concerne la mesure critiquée qui accorde aux organisations représentatives un avantage pécuniaire qu'elle refuse aux organisations agréées, d'autant qu'il est affirmé par la requérante que la mesure est inspirée par la volonté de privilégier une organisation déterminée.
B.8. En ce qu'elles sont associées aux procédures de concertation et de négociation permanentes, les organisations représentatives sont nécessairement amenées à exiger de leurs délégués permanents des prestations plus lourdes que les organisations agréées. Dans un protocole 264 du 4 juillet 1997, versé aux débats par le Conseil des ministres, et qui contient les conclusions de négociations menées au sein des comités des services publics fédéraux, communautaires et régionaux, il est dit : « Compte tenu de la fréquence et de la complexité des dossiers soumis dans les instances de concertation ou de négociation, le gouvernement fédéral libérera des délégués de leurs activités professionnelles en vue de permettre aux organisations syndicales représentatives de remplir au mieux les missions prévues sur le terrain par le statut syndical. » B.9. En décidant, en outre, de permettre au Roi de dispenser les organisations représentatives du remboursement des traitements versés aux délégués qui siègent dans les comités de négociation, le législateur a pris une mesure qui est en rapport avec le but poursuivi. Il ne peut être considéré comme discriminatoire de refuser le même avantage aux organisations dont les délégués ne sont pas astreints aux mêmes prestations.
B.10. La partie requérante invoque encore la violation de l'article 5 de la Convention n° 151 concernant la protection du droit d'organisation et les procédures de détermination des conditions d'emploi dans la fonction publique, adoptée à Genève le 27 juin 1978, et approuvée par une loi du 4 avril 1991. Sans qu'il soit nécessaire de vérifier si ledit article 5 contient un droit dont la requérante pourrait être titulaire, la Cour constate que celle-ci n'en tire aucun argument distinct de ceux qu'elle a invoqués sur la base des articles 10 et 11 de la Constitution.
B.11. Dès lors que la mesure critiquée traite également toutes les organisations représentatives et qu'elle n'est pas discriminatoire, il n'y a pas lieu de procéder à la mesure d'instruction suggérée par la requérante quant aux circonstances qui ont précédé son adoption.
B.12. L'article 18, alinéa 3, ne créant pas une différence de traitement injustifiée au détriment de la catégorie d'organisations syndicales à laquelle appartient la requérante, celle-ci est sans intérêt à critiquer la portée rétroactive que donne l'article 4 de la loi attaquée à cette disposition.
Par ces motifs, la Cour rejette le recours.
Ainsi prononcé en langue française, en langue néerlandaise et en langue allemande, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage, à l'audience publique du 21 décembre 2000.
Le greffier, L. Potoms Le président, M. Melchior